Chapitre 84

Chapitre 84

Dans une des ailes réservées aux familles bourgeoises du Walhalla, à l’intérieur de ses appartements, Bedra de Edel, émerge doucement de cette nuit agréable, qu’elle a passé emmitouflée dans ses draps.
Malgré le réveil, elle paraît toujours aussi séduisante. Ses longs cheveux blonds soyeux et à peine dépeignés, ne gâchent en rien cette beauté que chaque homme rêve d’avoir à ses côtés au matin.

Ses yeux améthyste se tournent instinctivement de l’autre côté du lit, celui-ci est hélas déjà vide en ce matin du 23 mars 1987.
Très vite, son futur époux la rassure. Couvert de sa God Rob, casque sous le bras, Syd de Mizar admire le paysage depuis la grande fenêtre où il s’est posté : « Bientôt tu continueras à passer d’aussi agréables nuits que celle qui vient de s’écouler. »
Sa promise se penche légèrement et admire un temps moins capricieux que d’ordinaire. Hormis quelques flocons qui voltigent dans un vent relativement calme, le ciel paraît clément en ce jour à Asgard.
_ « Odin bénit déjà sa Majesté Hilda d’entreprendre notre conquête du Sanctuaire.
_ Alors c’est toi que la Princesse de Polaris a choisi ?
_ Oui. Je dois me rendre au Sanctuaire jauger la puissance des Saints qui protègent Athéna et, accessoirement, ramener sa tête si la tâche n’est pas trop ardue. »
L’engouement du Guerrier Divin n’est pas partagé par la belle des neiges : « Je suis surprise que tu prennes plaisir à ôter la vie d’une déesse qui nous a toujours été présentée comme alliée à Odin. »
Bien plus impulsif avec elle depuis qu’il a découvert sa liaison avec Bud, le God Warrior de Zeta s’emporte : « Parce qu’une divinité qui nous condamne à vivre ici dans ces conditions, est une alliée pour toi ?! Bien sûr, en restant au chaud à profiter des trophées de chasse de nos serviteurs, tu ne dois pas te rendre compte de la rudesse d’une vie ordinaire dans ces contrées ! Demande à Thor ce qu’il en pense. Interroge-le sur le nombre d’enfants morts le mois dernier à cause des conditions de vie déplorables ici ! »
Discrète, effrayée, Bedra se contente de murmurer : « Je suis simplement surprise qu’Hilda accepte soudainement de faire appel à la violence. Elle et sa s½ur abhorrent toute forme de haine. D’ailleurs, en parlant d’elle, où est Freya ? Que pense-t-elle de tout ceci ? Et le Seigneur Sigmund ? On dit que son frère fut nommé à sa place God Warrior ! »
Préférant s’épargner de longues explications, le second de Siegfried choisit de taire la mise au cachot de la cadette de Polaris. Il fixe son casque sur son crâne et déclare : « Qu’importe les moyens. Les Asgardiens souffrent depuis trop longtemps. Hilda me fait l’honneur d’être son messager. Il est convenu que je parte dès le lever du soleil. Je reviendrai victorieux au nom de notre futur mariage. Sous peu, tu épouseras un prestigieux Guerrier Divin sous le soleil grec. »
Il emprunte la sortie sans plus poser un regard sur la jeune femme qui cajole son corps nu dans ses draps. (Reste 62324 caractères)
 

Chapitre 83

Chapitre 83

Ce 22 mars 1987, parait semblable à n’importe quel autre jour au royaume d’Asgard.
Le vent glacial propage la neige. Elle tombe depuis des heures tout autour du Walhalla.
Chacun vaque à ses occupations, à l’exception près que celui qui accompagne la Princesse de Polaris ce jour n’est pas Siegfried mais Alberich.
Et c’est bien pour cela que Sigmund rejoint l’Autel du Destin où prie chaque jour Hilda.

Confuse après le trouble semé entre eux par Thétis, Hilda préfère s’éloigner ponctuellement de son bienfaiteur, pour permettre à de Megrez de redorer cette image qu’il a tant de mal à faire valoir.
Par précaution, conscient que son aîné, chef des armées d’Asgard, est appelé à devenir God Warrior un jour, Siegfried s’en est trouvé rassuré de pouvoir compter sur son frère pour garder un ½il sur eux.

Pourtant, en ce jour d’apparence ordinaire, une vaste secousse vient avertir les guerriers les plus alertes.
L’ensemble du domaine tremble l’espace d’une dizaine de seconde.
Renversant l’argenterie que Lyfia nettoie dans le grand salon.
Menaçant de plusieurs avalanches les promeneurs, comme par exemple Freya qui peut compter sur Hagen pour la secourir. Ou mettant en exergue les combattants les plus vaillants comme Balder le vagabond, ou Fenrir et sa meute.
Faisant s’écrouler les logis les moins bien lotis, que Thor maintient afin d’éviter à une famille toute entière d’être prise sous les décombres. Assisté de Syd il donne l’alerte aux plus démunis et évacue Helena et ses jeunes frères et s½urs.
Faisant choir sur son postérieur la cohorte qu’entraîne Héraclès, son supérieur, dans l’enceinte d’une caserne.
Inquiétant le malhonnête Fafner, encore impliqué dans une bagarre de taverne.
Brisant quelques vitres du palais dont les éclats auraient défiguré ses habitants, si Frodi n’avait pas été présent…

Tout proche de l’Autel du Destin, alors qu’il voit la garde personnelle d’Alberich attendre à proximité, Sigmund est ébranlé par le tremblement.
Comptant sur des réflexes capables de lui assurer le statut de God Warrior le jour de la résurgence de ce corps d’armée, Sigmund réussit à se maintenir sur pieds en bondissant de bloc de glace en bloc de glace, avant que chacun d’eux ne se brise suite au mouvement des plaques terrestres.
Dans sa course, il devance la garde d’Alberich. Ce dernier n’apparaît plus à la vue de ses hommes.
_ « Que s’est-il passé, leur emboîte le pas Sigmund ?
_ On ne sait pas, répond le premier.
_ Il y a eu un grand choc et la mer s’est soudain agitée, complète mieux le second.
_ Il faut secourir Hilda, s’enquiert Sigmund ! »
L’Asgardien presse davantage le pas lorsqu’il découvre la Princesse de Polaris étendue inconsciente au pied de l’autel, sans même remarquer le fourbe Alberich dissimulé en retrait dans une enclave de la falaise.
_ « Hilda, s’époumone le frère de Siegfried ! »
Alors qu’il peut se sentir rassuré en voyant Hilda se remettre de ses émotions, il n’en a guère le temps qu’il ressent un cosmos d’une étrange noirceur émaner d’elle.
_ « D’où vient ce cosmos maléfique ? »
Pour seule réponse, l’anneau des Nibelungen balaie l’aspirant God Warrior et les hommes d’Alberich.
Ils sont encastrés contre la falaise qui s’écroule ensuite sur eux.

D’abord impuissant face au raz-de-marée, puis ambitieux lorsqu’il comprend que la mer lui a rendu Hilda porteuse de l’anneau des Nibelungen, Alberich se montre enfin.
Croisant le regard malsain de la Prêtresse d’Odin, il se dirige alors vers les trois intervenants.
Sigmund reprend difficilement conscience comme l’un des deux soldats. L’autre est mort sur le coup.
Alberich n’hésite alors pas à fracasser le crâne de son sujet rescapé en abattant avec rage son talon dessus.
Sentant Hilda s’approcher dans son dos, il n’a pas le temps d’achever Sigmund et s’incline stratégiquement.
_ « J’ai vu comme leur réaction a provoqué votre courroux.
_ N’est-ce pas ton cas Alberich ?
_ Je ne suis là que pour vous satisfaire Princesse Hilda, ricane-t-il avec perfidie.
_ Très bien, dit-elle en faisant scintiller l’anneau et tout en levant les yeux vers la Grande Ourse… »


En Grèce, au Sanctuaire, le printemps offre au domaine sacré un temps doux et clément.
Bien que cela fait deux mois et demi qu’Athéna ne soit pas revenue, les oiseaux chantent avec entrain et égaillent même les visages sceptiques de deux camarades.

Assis tous les deux à examiner pièce par pièce les morceaux éparpillés des cinq armures de bronze des héros de la traversée des douze maisons, Aldebaran est confronté au constat que lui confirme Mû : « Il semble que comme leurs corps, leurs armures n’ont pas survécu à la bataille. »
De nature optimiste, le Brésilien assure : « Il existe pourtant un espoir de ramener leur armure à la vie, tout comme la Source d’Athéna a pu soigner leurs plaies. »
Circonspect, Mû se redresse en balançant désabusé le bouclier fendu en deux du Dragon : « Malheureusement, bien qu’ayant reçus tous les soins possibles, Seiya et ses compagnons ne se sont toujours pas réveillés. »
Le Saint d’or du Taureau marche les bras croisés.
_ « Je ne m’inquiète pas pour eux. Ils ont surmonté de lourdes épreuves. Ils reviendront à eux en temps voulu. Ce qui m’étonne surtout, c’est que tu n’abordes pas le sujet toi-même. Il existe une solution pour ces armures.
_ En effet. Mais tu sais aussi bien que moi, que notre sang n’est pas suffisant pour réparer ces cinq armures. Même l’armure du Phénix, capable de renaître de ses cendres, est inutilisable. Il faudra beaucoup, beaucoup de sang.
_ Nous ne sommes pas non plus les seuls Saints d’or survivants. Nous ne sommes pas non plus les seuls à avoir reconnus Seiya et ses amis à leur juste valeur.
_ Tu suggères qu’il faut réunir Aiolia et les autres ? »
Un simple sourire permet au Saint du Taureau de répondre par l’affirmative.


Plus loin, à la Source d’Athéna, devant le temple, là où les feuillages dissimulent le grand jardin fleuri qui encercle ce dispensaire miraculeux, une jeune femme rousse aux collants rouge et aux guêtres blanche observe un bijou.
Sous son masque de femme chevalier, Marin détaille les symboles de Pégase et de la Chouette qui s’entremêlent : « Seiya… Je viens de réajuster ton Jonc à ton poignet. Je garde celui de ta s½ur précieusement. Peut-être m’aidera-t-il à retrouver la Chouette. »

Elle sert fort dans son poignet couvert de sa Cloth l’artefact lorsque, inopinément, une image holographique apparaît devant elle.
L’apparence d’un homme jeune, robuste, brun, torse nu, aux pieds chaussés de ballerines, ne la laisse pas coi : « Pourquoi vous présenter à moi dans votre véritable apparence, Saint d’or de la Balance ? »
Affûté, le Chinois projette depuis les Cinq Pics l’image de sa réelle apparence.
_ « Simplement parce qu’après que tu te sois réellement présentée auprès d’Athéna, j’ai compris que mon subterfuge n’était pas nécessaire auprès de toi.
_ En effet, j’ai toujours pu voir que votre apparence était volontairement vieillie. Le don que vous a fait Athéna est incroyablement puissant.
_ Bien sûr. Néanmoins, je doute qu’il soit suffisant pour accompagner Seiya, Shiryu et les autres dans cette Guerre Sainte que tu prédis contre l’Olympe. Je mourrai sûrement avant. »
L’Aigle tend le Jonc de la Chouette en direction de l’hologramme.
_ « J’imagine donc que vous venez pour ça ?
_ Bien sûr. Il est difficile de pouvoir te parler seul à seul alors que tu passes ton temps à parfaire l’entraînement des aspirantes Saintias. Je pense savoir qui est la Chouette d’Athéna. Depuis la nuit des temps, elle est liée à Pégase. Lors de la précédente réincarnation d’Athéna, elle s’était réincarnée en la mère du chevalier Pégase.
_ Seiya et sa s½ur sont orphelins. Je peine à croire que sa mère soit… A moins que vous ne pensiez à…
_ Sa s½ur ! Ça peut être une piste.
_ Si c’est bien le cas, vous ne me facilitez pas la tâche, Seika a disparu lorsque Seiya est parti en Grèce il y a plus de six ans maintenant.
_ J’ai beaucoup réfléchi à ta discussion avec Athéna et Mû. Et j’ai également suivi ton affrontement contre Hestia. Quelque chose m’est alors venu à l’esprit. Ce cosmos olympien dégagé par l’Ange. Je l’ai ressenti à plusieurs reprises. Y compris il y a six ans. Ce n’était pas le même, mais il était relativement proche.
_ Si la Chouette est bien Seika, un Ange l’aurait abattu c’est bien ça ?
_ Pas forcément. Mais j’ai souvenir d’avoir ressenti cette cosmo énergie semblable à celle de l’Ange que vous avez affronté avec Apodis, dépassant celle des Saints d’or, à proximité du Sanctuaire. Sur les frontières Sud. Qu’elle soit vivante ou morte, peut-être retrouveras-tu des traces de la Chouette, ou de Seika, ou conjointement des deux, là-bas ?
_ Même si c’est très maigre, ça reste une piste. Il est vrai que Seika a quitté le Japon pour partir à la recherche de son frère. A force de détermination, elle a très bien pu arriver jusqu’aux portes du domaine sacré. J’essaierai de poursuivre mes recherches tout en veillant sur Seiya. Cependant, Athéna m’a confié la formation des Saintias et j’aimerai vraiment me rendre auprès de Nicol et Mei également pour les aider dans leur quête.
_ Je suis à distance l’avancée de leurs recherches. Hélas, je piétine autant qu’eux. Athéna t’a demandé de substituer le rôle de la Chouette en veillant sur Seiya jusqu’à nouvel ordre tout en formant les Saintias. Je m’occupe de te faire dispenser l’apprentissage des Saintias. En deux mois et demi de temps, avec les bases qu’elles avaient, je pense qu’elles en ont assez pour prendre leur envol. Tu peux te focaliser sur Seiya et sa s½ur. Et pour ton Pendentif de Zeus, tu auras le temps de le chercher une fois de nouveaux indices recueillis. »


A Asgard, au temple Walhalla, après que l’immense vague de Poséidon a emporté Hilda pour l’ensorceler à l’aide de l’anneau des Nibelungen sous le regard d’Alberich, la Prêtresse d’Odin a réuni ses hommes sur la terrasse de son palais.
Tous les nouveaux Guerriers Divins sont agenouillés et en tenue de guerre. Ils apprennent la prétendue volonté d’Odin, dictée par une Hilda sous l’emprise de Poséidon.

Esseulé depuis des mois, Bud a vu l’espace d’un instant l’espoir d’une vie meilleure lorsque l’armure double de Zeta se présenta à lui.
Hélas, une fois arrivé auprès d’Hilda, ses rêves de retrouver légitimement Bedra de Edel et de faire valoir son rang de God Warrior, furent anéantis en réalisant qu’une fois de plus il n’était que l’ombre de ce frère qu’il hait.
Face à la statue d’Odin, dissimulé derrière une colonne de marbres, Bud d’Alcor découvre le projet de conquête du Sanctuaire.
Alors, lorsque la Princesse de Polaris achève son discours et demande à ses Guerriers Divins de rassembler les soldats du domaine, il profite de la savoir seule pour la rejoindre à ses appartements.

La suivant furtivement dans ses jardins privés, il ne prend pas la peine d’admirer les sculptures recouvertes de givres et de stalagmites lorsqu’elle lui confirme son rôle.
_ « Moi ? L’ombre de Syd ? Je ne suis donc pas un Guerrier Divin ? »
Elle le lui certifie en renvoyant dans le ciel un oiseau venu chercher l’accueil de ses mains.
_ « Le Guerrier Divin de l’étoile de Zeta est et restera Syd de Mizar. Tu es son ombre, personne ne doit te voir.
_ Majesté Hilda, je ne pense pas être inférieur à Syd en puissance. Je le surpasse même ! Alors pourquoi ? »
En se retournant pour exposer un sourire sadique que personne ne lui connaissait avant aujourd’hui, elle conclut : « Odin, notre dieu, en a décidé ainsi. Veux-tu désobéir à Odin ? Si tu n’es pas satisfait de ton sort, tu peux partir. Cependant, si Syd devait faillir un jour, toi seul pourrais lui succéder en tant que Guerrier Divin de l’étoile de Zeta. »
Résigné, Bud prend congés en s’assurant de n’être vu par personne.
Avant qu’il ne soit parti trop loin, Hilda lui prouve une fois de plus son tempérament implacable : « En étant l’ombre de ton frère, tu constateras que je ne tolère pas la trahison à Odin. J’ai fait emprisonner Sigmund de Grani pour diffamation. Syd le conduit à l’heure qu’il est en cellule en compagnie de Thor. »
Bud ravale sa morgue et fait profil bas.

Pourtant, Hilda ne parvient pas à aspirer au plaisir de la solitude qu’elle s’est découverte depuis la possession de l’anneau.
Elle devine au pas pressé d’un des fidèles guerriers d’Asgard qu’il s’agit d’un noble qu’elle connaît bien : « Surt ! Ne devrais-tu pas être avec ceux rassemblés en bas, sous les ordres des God Warriors ? »
Le jeune homme aux cheveux couleur feu ne tient pas en place.
Malgré qu’il se soit incliné, il trépigne d’impatience : « Princesse Hilda ! Cette Guerre Sainte que vous déclarez au Sanctuaire me parait la plus légitime au monde ! Vous connaissez mon dévouement envers le Royaume d’Asgard et la rage qui m’anime envers les Saints d’Athéna ! Seulement, je me permets de vous poser la question, pourquoi n’avoir réveillé que les God Warriors de la Grande Ours ? »
L’ami d’enfance de Camus, animé par sa soif de vengeance après que le Français a tué sa s½ur par accident, soulève un point qu’Hilda s’empresse de préciser.
_ « Ton dévouement te rend perspicace mon cher Surt. Odin dispose de deux corps de God Warriors. Celui rassemblé sous l’égide des étoiles la Grande Ours. Et celui sous l’égide des créatures de la mythologie nordique. En bon stratège, il serait imprudent de dévoiler à l’ennemi l’ensemble de mon jeu. La Guerre Sainte sera déclarée par les représentants de la Grande Ours. Ceux-ci défendront le Walhalla, quand Athéna voudra que je lui rende des comptes. Et s’ils ne suffisent pas à assurer ensuite ma conquête, alors je marcherai sur le Sanctuaire avec les représentants de notre mythologie nordique. »
Elle glisse sa main sur la tresse que porte Surt en hommage à sa s½ur et le rassure : « Surt d'Eikthyrnir, tel le cerf se tenant sur le Walhalla, tu marcheras avec moi sur le monde lorsque l’heure sera venue et que Odin fasse appel à toi. A présent descends avec les tiens. Et rassure ceux qui aspiraient à devenir comme toi les semblables de Siegfried et des autres. »

Dehors, camouflé dans des dunes de neige à l’intérieur de sa Robe blanche, Bud se tourmente : « Désobéir à Odin ?! Jamais de la vie. Au contraire, je compte bien lui prouver mon dévouement. »
Comme si son dieu l’entend, il surprend une troupe de cinq soldats vêtus de fourrures sous leurs armures et portants l’emblème d’Asgard.
_ « Que faites-vous ici à traîner, les agresse-t-il ? »
Le meneur de l’escouade déclare : « Nous répondons à l’ordre de rassemblement des Guerriers Divins. Nous regagnons le Walhalla. Et toi ? Qui es-tu ? Ta God Rob ressemble étrangement à celle du Guerrier Divin de Zeta ! »
Usant d’ingéniosité mais aussi de caractère, Bud ordonne : « C’est parce que je suis… Le second du God Warrior de Zeta, Syd de Mizar. Il m’a ordonné d’aller transmettre un message au Sanctuaire et m’a confié une équipe. Sachez que notre mission sera reconnue par Hilda en personne. Alors ?! »
Sans même demander aux siens, le leader confirme pour eux : « Bien sûr que nous en sommes ! »
Immédiatement, l’unité suit du mieux qu’elle peut le combattant des glaces qui s’assure déjà du succès de son opération : « D’après ce que j’ai pu comprendre du messager du Sanctuaire envoyé il y a quelques mois par Athéna quand j’épiais Hilda, ceux qui l’ont protégé des Saints d’or sont dans un état critique. Si je débarrasse déjà Hilda de ces gêneurs, je ne pourrai qu’être reconnu par Odin. C’est certain… »


En Grèce, au Sanctuaire, à la Source d’Athéna, la nuit est tombée.
Un étrange vent glacial s’est levé.
L’occasion pour les deux soldats de garde devant le temple où reposent Seiya et ses amis de discuter de cet étonnant froid.
Baillant à l’unisson, ils sont troublés par un inattendu bruissement.
Sans même avoir le temps de s’interroger, ils tombent sans vie.
Leurs yeux, d’abord embués par le sommeil, perdent tout éclat pendant que leurs corps meurtris et couverts de givre, s’écrasent dans l’herbe devenue aussi fragile que du verre en raison d’une chute brutale de température.

Furtives, cinq ombres surgissent devant les cadavres.
En contrôlant sa respiration, l’une d’elles murmure : « Une chance que les effectifs de l’armée d’Athéna se sont amoindris au fil des derniers mois. Sans quoi, nous n’aurions pas réussi à venir ici sans encombre. »
Les quatre autres, retenant leur cosmo énergie pour mieux localiser leurs proies, s’introduisent dans le palais.
A pas de loup, ils avancent sur le sol marbré dont le reflet glaçant dessine la forme d’hommes aux bottines en fourrure, couverts de plastrons métalliques par-dessus leurs laines épaisses, protégés au bras gauche par un bouclier pointu et ornés d’un casque à cornes.
Le blizzard qui les accompagne, gèle en un instant l’eau de l’immense fontaine sculptée dans le même marbre blanc que les colonnes qui tiennent la voûte peinte en marine. Les statues gravées dans la pierre se brisent d’elles-mêmes sous l’effet du froid.
Comme s’ils chassaient sur leur terre natale, éternellement couverte de neige, les assassins se positionnent à chaque coin de la pièce comme pour mieux cerner les lits de pierre drapés de linges blancs où sont étendus les Saints de bronze.
Néanmoins, le visage d’un des étrangers se fige : « Quoi ?! Comment ?! Un des cinq lits est vide ! »
Un rire moqueur réplique à cette surprise.
Très vite, sortant de l’obscurité imposée par une statue, la figure spectrale d’un homme accompagne le sarcasme.
Malgré son visage creusé, les cheveux bleus d’Ikki permettent à quiconque ayant déjà croisé le chevalier dans sa vie de le reconnaître.
Uniquement en sous-vêtements, il expose ses muscles saillants bien qu’encore endoloris.
Pour éloigner le danger, le Phénix leur tourne le dos et s’engage vers la sortie en traînant difficilement la jambe.
_ « En temps normal, je les aurai éliminé avec précision d’un seul coup. Cependant, c’est un miracle si j’ai déjà pu me lever de ma couche. L’instinct certainement, réfléchit Ikki pendant sa retraite… »

A peine sorti, ses sens sont mis en alerte puisque, sans se retourner, il pressent qu’un des hommes est entrain de dégainer une hache.
Il esquive le misérable sans tenir compte de son corps à peine rétabli.
Avec une agilité qui le surprend presque, il ramasse au passage le bras de son assaillant et le renvoie auprès des quatre autres tout juste arrivés.
Sans plus tarder, peu rassuré, Ikki concentre légèrement son cosmos pour libérer, d’une voix diminuée, un faible, mais suffisant, arcane : « Ho Yoku Tensho. »
L’incandescence des Ailes du Phénix, offre une chaleur inédite à ces guerriers du froid.
Leurs yeux terrifiés témoignent de la douleur éprouvée par cette attaque qui leur ôte immédiatement la vie.
Toutefois, Ikki n’exprime aucune satisfaction.
Au contraire, son corps se pétrifie pour une raison étrangère aux stigmates laissés par la bataille remportée trois mois plus tôt.
Un cosmos glacé, puissant et dégageant un immense instinct meurtrier, surpassant les faibles assassins tout juste abattus, l’oppresse.
Son porteur, une ombre blanche sortie de derrière un arbre, lance un coup à une vitesse à peine perceptible pour un Phénix convalescent.
_ « Il se déplace à la vitesse de la lumière comme seul un Saint d’or sait le faire, songe-t-il ! »
L’attaque d’une lumière aveuglante fonce sur lui en déchirant la nuit.
Dans un tel état et sans armure, Ikki ne peut l’éviter.
Résigné, il ferme les yeux et se contente d’envoyer une dernière penser à son petit frère : « Shun… »
Lorsque le moment d’être fouetter par le froid meurtrier vient, une étrange enveloppe d’une énergie intense anéantie le choc.
Une voix familière au Saint de bronze brise le suspens : « Kan ! »
_ « Shaka, reconnaît Ikki ! »
A peine le Japonais trouve le temps de se retourner pour reconnaître son sauveur, que l’ombre blanche de Bud d’Alcor disparaît dans la nuit…


Pendant ce temps, à Asgard, dans les couloirs du palais, Freya observe impuissante chaque God Warrior se réunir dans la salle du trône.
Fermés, concentrés, tous sont déjà rivés d’un air solennel vers leur mission.

Tourmentée par le comportement de sa s½ur depuis ce matin, elle ne résiste pas au besoin de se précipiter auprès de Siegfried.
Ne sachant par où commencer, elle souhaite sensibiliser le plus puissant des Asgardiens en allant droit au but.
_ « Siegfried ! Ma s½ur a changé du tout au tout, elle est comme possédée par le démon. Tu t’en es sûrement rendu comptes ? Si on ne fait rien, elle subira le châtiment céleste ! Use de ta puissance pour libérer ma s½ur ! »
Tout juste nommé général de l’armée de sa bien-aimée à la place son frère jugé pour haute trahison, encore peiné par cette nuit d’amour chacun passé dans les bras de Thétis, Siegfried refuse de nuire aux projets d’Hilda, ni même de croire que sa volonté d’agir dans l’intérêt de son peuple soit dictée par le diable.
Sigmund a profité que son frère baisse sa garde un instant pour tenter un coup d’état que Freya semble suivre.
Hors de question pour lui de ne pas saisir l’occasion de revenir dans les bonnes grâces d’Hilda.
_ « Dame Freya, je ne peux que protéger Dame Hilda en toutes circonstances. Si Sa Majesté Hilda doit recevoir un châtiment céleste, moi, Siegfried, resterait à ses côtés jusqu’en enfer.
_ Siegfried…
_ Pourquoi ces doutes maintenant ? Je ne peux plus reculer, j’ai prêté serment. J’ai juré de protéger sa Majesté Hilda, quoi qu’il arrive. »
Sans en dire davantage, il prend congés et rejoint ses six frères d’armes déjà positionnés entre le trône de la Prêtresse d’Odin et le grand foyer aux flammes bleutés qui donnent à la pièce aux teintes déjà froides davantage de cynisme.

A la suite du Guerrier Divin d’Alpha, Freya s’immisce dans la pièce, sans que cela ne dérange la Princesse de Polaris, impériale dans son fauteuil entouré de deux griffons en pierre.
_ « Je vous ai tous réunis ici pour mener à bien une mission. Notre mission. Celle d’offrir au peuple d’Asgard une vie plus clémente. Là où le soleil brille sans cesse et où la faim ne nous tue pas. Des générations d’Asgardiens ont été suffisamment nombreuses à être sacrifiées. Au nom d’Odin, je demande réparation. Athéna a repris son Sanctuaire. Pourtant, que la Terre soit gouvernée par la Déesse de la Sagesse ou par un imposteur, rien ne change pour nos âmes meurtries. Il n’est que justice qu’Asgard confie cette lourde tâche qui nous a toujours incombés à d’autres. Pour cette raison, je choisis Syd de Mizar Guerrier Divin de Zeta pour se rendre au Sanctuaire et délivrer un message… »
Couvert de sa noble God Rob, le tigre viking avance d’un pas pour acquiescer, lorsque la cadette d’Hilda intervient de sa frêle voix : « Attends grande s½ur ! Veux-tu vraiment qu’Asgard conquière le Sanctuaire afin de dominer la planète ? »
Sereine, Hilda répond sans sourciller : « Les Guerriers Divins sont de mon côté. Je ne peux pas perdre contre Athéna. »
Le regard de son aînée, d’ordinaire si tendre, est chargé d’une noirceur troublante. Si les Guerriers Divins et le peuple, à l’égard de leurs vies pénibles ici, peuvent juger légitime la décision d’Hilda, Freya n’en oublie pas moins les sages paroles d’antan de sa s½ur.
Celle-ci l’a toujours destiné à la remplacer si jamais il venait à lui arriver malheur. Pour cette raison, elle connaît toute l’importance de leur rôle ici : « Qu’est-il arrivé ? Qu’est-ce qui t’a changé ainsi ? Réveille-toi, grande s½ur ! »
Ne tolérant plus aucune insubordination, Hilda se lève : « Tais-toi ! Thor, emmène Freya. Mets-là donc au cachot ! »
Stupéfait, le géant ne sait comment réagir.
_ « Mais…
_ Obéis-moi immédiatement, Thor ! »
Alors que l’immense silhouette du God Warrior de Gamma lui fait de l’ombre, les yeux teintés de tristesse, Freya tente une dernière fois d’interpeller son aînée : « Grande s½ur… »
Toutefois, la mine embarrassée, Thor passe devant elle pour l’inviter à quitter la pièce.
 

En Grèce, au Sanctuaire, à la Source d’Athéna, Ikki regarde Shaka examiner les cadavres des cinq guerriers des glaces devant le temple où il a sommeillé pendant trois mois.
Les doigts du Saint d’or caressent les gravures faîtes sur leurs boucliers : « Deux corbeaux autour d’un écu frappé par les sept étoiles polaires… L’emblème d’Odin et du royaume d’Asgard. Mais pourquoi Asgard alors que la Prêtresse de Polaris a assuré allégeance à Athéna lors de son retour au pouvoir ? »
Le Saint du Phénix, lui, fixe froidement ses adversaires : « Peu importe. S’il y a bien un moment où le Sanctuaire est fragile, c’est maintenant. Nous nous remettons à peine de la discorde causée par Saga. La réorganisation du domaine est donc friable et surtout, je le perçois, Athéna est loin d’ici. »

Un ton chevaleresque, bien qu’emprunté, répond à Ikki.
Réveillé, soutenu par ses trois autres camarades qui ont émergés grâce aux vibrations du récent affrontement, Seiya sort du temple dans la même tenue que les autres souffrants : « Et nous ne pouvons pas laisser Saori seule… Alors qu’un nouveau danger la menace ! »
Immédiatement, Shun court jusqu’à son frère pour l’aider à tenir debout.
Enfin sur pieds, réunis, les chevaliers de bronze s’échangent fièrement un sourire rempli de conviction.
Essayant de nuire le moins possible à ses solennelles retrouvailles, Shaka déclare : « Puisqu’il en est ainsi, allez donc revêtir vos tenues qui vous attendent à vos chevets et rejoignez-nous donc au lever du soleil, nous autres Saints d’or, chez Mû. »

Alors que Shaka les devance, Ikki remarque sur l’armure d’or de la Vierge quelques marques de givre, que l’adepte de Bouddha espérait jusqu’ici dissimuler.
Serrant les poings, Ikki grimace : « Cette ombre blanche… Ça devait certainement être un de ces légendaires Guerrier Divin d’Asgard. Alors que même mes attaques les plus puissantes n’avaient pas été capables d’affliger à une armure d’or une simple éraflure, ce défenseur d’Odin y est parvenu. Même si on dit de la Prêtresse de Polaris qu’elle est une femme bienveillante, aimée et respectée de tous, il paraît inévitable que je retrouverai ce Guerrier Divin dans peu de temps… »
Ikki devine déjà son prochain affrontement avec Bud d’Alcor…


Dans une dimension qui surplombe la Terre, l’Olympe, à l’extérieur du temple du soleil, dans les jardins du dieu Apollon, l’imposant maître des lieux laisse l’eau d’une fontaine tenter d’approcher sa main.
Devant le monument sculpté à son effigie, le frère d’Artémis s’amuse à faire évaporer l’eau grâce à l’insoutenable incandescence de son divin cosmos.
Derrière lui, dans leurs Glories, ses fidèles Anges, Helénê et Kassandra observent agenouillées les gesticulations du pitoyable Roloi qui mime à son maître la prise de possession d’Hilda par Poséidon.
Ses pitreries amusent les quelques servantes du fils de Zeus, étendues dans le muguet qui couvre tout le parc du palais solaire.
Plus loin, reculés, sous l’ombre d’immenses lauriers majestueux, Héra, Hestia et Héphaïstos, les trois autres comploteurs, attendent la fin du récit de Roloi, pour qu’Apollon leur adresse enfin la parole.

Hautain, Apollon susurre ces phrases courtes qui caractérisent son allocution condescendante : « Ainsi tout se déroule selon notre plan. »
Le pas saccadé, boiteux, le torse nu, le Dieu du Feu, des Forges et des Volcans s’expose à la vue de tous. Sa voix grondante retentit à travers sa barbe broussailleuse : « Rien n’est encore fait. Il y a beaucoup d’acteurs sur Terre. Qui te dit que personne ne viendra chambouler l’ordre des évènements que nous avons fixé. »
Apollon dédramatise : « Poséidon va affaiblir Athéna en utilisant Asgard. Si Asgard ne suffit pas, si Poséidon ne suffit pas, Tezcatlipoca, Loki, Hadès, Eris et Arès feront l’affaire. Athéna mourra ou sera poussée à la faute. »
Toute couverte de sa toge immaculée, la Déesse du Feu Sacré et du Foyer, Hestia, s’en extasie : « Dans les deux cas, Zeus ne pourra rester insensible au sort de l’humanité. »
Immédiatement, les yeux plissés, impériale dans sa robe pourpre, la Déesse du Mariage, Héra, ramène sa semblable à la réalité : « Si Arès nous fait faux bond ? Si les Alcides de cette garce d’Hébé, ou encore Alexer de Blue Graad, se joignaient à Athéna pour combattre Poséidon et Hadès, ses ennemis légendaires, nos plans pourraient tomber à l’eau ! »

Tournant le dos à ses pairs, chassant d’un simple regard ses domestiques, le Dieu du Soleil attend d’être en toute intimité pour réagir de son ton sournois : « C’est pour cela que je vous ai conviés aujourd’hui. Helénê, la plus puissante de tous les Anges de l’Olympe, a été éloignée de moi trop longtemps. Réincarnée sur Terre sous le nom de Ksénia, elle a mené d’une main de maître notre conspiration. Ensuite, j’ai également mandaté Kassandra pour la lier à Arès. Elle pourra veiller à la bonne exécution des engagements de ce ridicule personnage. Roloi, lui, bien que n’étant un simple Olympien, se charge d’innover sans cesse dans le but que nous dupions du mieux possible Zeus. A votre tour, j’aimerai que vous engagiez enfin quelques forces dans la bataille. »
Le menton carré et la large carrure d’Héphaïstos aurait de quoi effrayer quiconque en Olympe, surtout lorsqu’il s’insurge comme il le fait présentement : « Comment ?! Après notre confiance, tu oses nous demander un tribut encore plus lourd ! »
Sans même écarquiller les yeux, Apollon ne laisse s’approcher davantage son acolyte.
D’une simple émanation de cosmo énergie, il tétanise l’un des plus puissants gardiens du monde céleste.
Immobilisé, contraint à courber l’échine, Héphaïstos abandonne très vite toute hostilité dans son regard, forcé de constater la toute-puissance de celui qui a, depuis la fondation de cet univers, toujours été envisagé à la succession de Zeus si d’aventure celui-ci venait à disparaître.
Le célèbre adage du calme olympien n’étant jamais mieux justifié qu’ici, le dieu du Soleil suggère : « Est-ce donc une tenue à avoir auprès de moi Héphaïstos ? Je vais répondre logiquement à cette question. Non. Ce n’est pas ainsi que tu dois te tenir. Ce ne sera plus jamais ainsi. N’est-ce pas ? »
D’un battement de cils, la titanesque entité valide la supériorité d’Apollon. Ce dernier l’invite : « Tes propos étaient d’autant plus déplacés, sachant qu’Héra est déjà intervenue par le passé pour contrer la Chouette. Et qu’Hestia a éliminé en personne Hébé. »
Reprenant son souffle, essuyant du revers de la main la première goutte de sueur froide de son existence qui lui parcoure le front, Héphaïstos demande : « Qu’attends-tu de m… Que puis-je faire ? »
Apollon reconnaît : « Héra a été clairvoyante. Il faut se méfier de l’apport des Alcides et des Blue Warriors. Nous ne devons laisser aucun allié à Athéna pouvant nuire à nos plans. »


En Grèce, au Sanctuaire, à l’Ouest du domaine, zone autrefois témoin d’une très grande bataille contre Arès, le village de Paesco reste le seul endroit du Sanctuaire où le chevalier de Pégase se sente réellement chez lui.
Autrefois locataire de ce lieu, comme Orphée et Apodis, Seiya y titube.
Tout juste remis, accompagné de Shiryu, Hyoga et Shun, il s’installe dans le misérable logis qu’il partageait avec Marin.
_ « C’est bien peu, mais je ne me voyais pas passer une nuit de plus dans ce temple où nous sommes restés trois mois, s’installe Seiya sur son ancien lit de pierre.
_ Dommage que mon frère ne nous a pas suivi, déplore Shun.
_ Tu le connais Shun. Pour rien au monde Ikki ne se mêlerait à un groupe, dit Hyoga en posant affectueusement sa main sur son épaule.
_ Il a préféré attendre que d’autres gardes viennent chercher les corps de nos assaillants, ainsi que ceux de nos deux soldats morts, avant de monter la garde en cas d’un éventuel retour, complète Shiryu. »
Seiya s’allonge, les bras derrières la tête : « Il ne changera donc jamais ! Mais au moins, toi, Shun, tu as de la chance. Tu as un frère que tu vois toujours et qui ne t’ignore pas. »
Ses trois amis comprennent vite où Seiya veut en venir.
_ « Tu attends toujours des nouvelles de Marin, demande Hyoga ?
_ Tu espérais peut-être la retrouver chez vous. Voilà pourquoi tu nous as menés ici, déduit Shiryu.
_ C’est vrai. Depuis qu’Astérion a dit qu’elle est ma s½ur, le doute m’habite. Je ne sais plus quoi penser. Et si elle m’est venue à l’aide durant la traversée des douze maisons, j’aurai au moins voulu lui dire merci et lui demander… »
Tout à coup, on frappe à la porte.
Manquant de chuter, Seiya se précipite pour l’ouvrir en grand, mais montre involontairement une profonde déception, en voyant que le masque de femme chevalier auquel il fait face n’est pas celui du Saint de l’Aigle : « Ah… June… »
C’est Shun qui prend la suite.
D’un pas moins pressé que Seiya, il demande de sa douce voix : « June ! Tu es rétablie ! Quand es-tu arrivée en Grèce ? »

Préférant ne pas déranger Seiya plus longtemps, Andromède s’éloigne en compagnie de l’Ethiopienne aux cheveux couleur blé…

Dans la demeure, Seiya, aidé de Shiryu et Hyoga, repart s’effondrer sur sa couche.
En se prenant la tête entre les mains, il remarque seulement le Jonc d’Athéna qu’il croyait perdu alors qu’il n’était encore que l’élève de Marin.
_ « M… Mais… C’est mon bracelet ! Je ne l’ai même pas remarqué tout à l’heure lorsque je me suis rhabillé. J’ai fixé mes brassards machinalement sans faire attention.
_ Cet objet à l’air très important pour toi, un peu comme la croix que Hyoga a reçu de sa mère.
_ Oui. C’est un bijou qui me vient de mes parents. Enfin je crois. D’aussi loin que peuvent remonter mes souvenirs, je l’ai toujours eu. Et ma s½ur Seika avait le même. J’ai cru l’avoir perdu lorsque je faisais mon apprentissage de Saint. C’est étrange… »
Préférant se ressourcer un peu, Hyoga botte en touche en rigolant : « Encore un bien étrange mystère que le cosmos devra résoudre ! »
Les trois compagnons rient aux éclats comme pour libérer leur joie d’être sains, saufs et réunis.


Sur l’île d’Yíaros, dans le Parthénos, Juventas Alcide des Juments de Diomède reste dans la salle du trône.
A l’intérieur du temple d’Hébé, vide et terriblement silencieux, la régente de l’île, grande, mince, porte sa Cloth blanche et crème par-dessus sa tunique grenat.
Elle fixe à travers son masque de femme chevalier le fauteuil qu’occupait il y a encore quelques mois la Déesse de la Jeunesse.
Propre, rénovée après la tentative de coup d’état des hommes de Gigas, la pièce dégage encore l’odeur du ciment et du plâtre frais.
Un parfum que le disgracieux ¼dipe ne pourra jamais ressentir.
En traînant les jambes, l’hideux Alcide des Oiseaux du Lac Stymphale s’invite par télépathie dans l’esprit de sa camarade.
_ « Cela fera bientôt cinq mois qu’Hébé nous a quittés.
_ Et mon c½ur saigne depuis.
_ Il est évident que nous n’aurons jamais assez de temps pour faire le deuil de notre Grande Hébé. Mais peut-être devrions nous nous rapprocher d’Athéna, pour poursuivre la volonté de notre Majesté ?
_ J’ai perdu les deux hommes qui auraient pu rendre ma fille heureuse. Je n’envisage pas de partir à la guerre et d’en faire une orpheline.
_ Tôt ou tard hélas il nous faudra agir. Tu as dû ressentir comme moi une étrange cosmo énergie malfaisante planer autour de l’île depuis la mer.
_ Crois-tu toi aussi qu’il puisse s’agir de Poséidon ?
_ C’est envisageable. En plus du complot de l’Olympe, d’autres dieux ne se priveront pas d’attaquer la Terre. En plus des Olympiens, Athéna devra faire face à ses ennemis historiques. _ Oui… J’en ai conscience… »
La guerrière au cheveux couleur taupe traverse la pièce pour prendre la direction des couloirs depuis laquelle elle scrute, grâce aux lucarnes, sa cité originelle : « … Seulement, notre armée se reconstitue à peine. Et pour tous ces jeunes gens, porter la dague hébéïenne sera une première. »
¼dipe la suit péniblement : « Je réalise que l’ultime bataille les conduira à la mort. Tout comme nous. Néanmoins, il en va de la survie du monde. Un monde auquel ta fille appartient. »
La veuve d’Iphiclès cesse sa progression et abandonne ses pensées dans l’horizon.
Les images bienfaitrices de son époux Iphiclès et de son amant Apodis se bousculent dans sa tête.
Pourtant, elle réussit enfin à n’en tirer aucune nostalgie.
Au contraire, le Lion de Némée et l’Oiseau de Paradis éveillent enfin en elle un désir de revanche : « Laissons à Athéna le soin de combattre ses ennemis historiques. Nous viendrons à son secours lorsqu’il conviendra de défaire les ennemis de tous les hommes et de tous les dieux qui veulent gouverner la Terre, l’Olympe. »


En Grèce, au Sanctuaire, la tête dans les étoiles, Shun progresse d’un pas lent et ordonné en compagnie de June bien silencieuse.
En prenant la direction du Nord du domaine, le Japonais est stupéfait.
_ « Je n’aurai jamais cru le Sanctuaire aussi grand.
_ Lorsque je suis arrivée hier, j’ai eu du mal à me repérer aussi. Heureusement, Shaina m’a affecté à la surveillance d’une zone bien connue des gardes que j’ai sous mes ordres.
_ Je suis content de te savoir heureuse ici. Te connaissant, je savais que la vie au Japon t’aurait semblé monotone. Comment vont Sho, Ushio et Daichi ?
_ Très bien. Ils se sont parfaitement occupés de moi. »
Instinctivement, s’étonnant après coup d’avoir fait une telle remarque, Shun demande d’un air inquisiteur : « Jusqu’à quel point ? »
Confus, dérouté, l’élégant chevalier aux cheveux vert pomme a les joues qui s’empourprent.
Seulement, c’est suffisant pour que June ôte son masque.
_ « C’est tellement mieux ainsi. L’air est agréable pour cette première pleine lune du printemps tu ne trouves pas.
_ June… Ton masque… Tu…
_ Tu me l’as ôté Shun lors de notre combat au Japon. Tu sais ce que cela signifie n’est-ce pas ? »
Shun peut lire dans les grands et beaux yeux bleus de son amie toute l’émotion qu’elle éprouve en restant rivée vers la lune.
Il se contente d’un timide : « Oui. »
Heureusement, bien vite, voulant stopper ce silence gênant, June s’exclame : « C’est ici ! »
A visage découvert, elle se précipite dans un village où seules quelques ambiances musicales s’échappent des différentes tavernes.
Les allées sont libres, quelques chandelles forment les ombres des habitants des petits logis que Shun et June s’amusent à observer en traversant la place : « Voici le village où je réside désormais ! »

Elle s’engouffre dans une modeste mais propre demeure.
Au risque de le faire chuter alors qu’il est encore faible, elle tire Shun par le bras pour l’obliger à occuper l’espace.
Une pièce principale où domine une grande table en bois sur laquelle l’urne de sa Cloth est posée. Une chambrette à droite, dont l’encadrement de porte est fermé par un rideau. Des peintures colorées et chaudes qui rappellent l’île d’Andromède…
Shun se sent aussitôt comme chez lui.
_ « Lorsque j’ai perçu ma première bourse de sacres pour m’installer après que je sois promue sergent, j’ai visité plusieurs demeures mais j’ai craqué aussitôt sur celle-ci. »
Shun écarte le rideau de la chambrée pour finir son inspection.
Il découvre un grand lit déjà couvert d’étoffes par June et un bassin d’un mètre vingt sur deux mètres carrelé avec de magnifiques mosaïques : « Je comprends, en effet, c’est sublime. »
Accompagnée par la lumière intense de sa Cloth qui reprend sa forme en totem pour rentrer dans sa Pandora Box, June assure : « Nous serons heureux, ici, tous les deux. »
Laissant Shun sans voix, elle défait ses vêtements en exposant sa totale nudité sans la moindre gêne.
Elle déverse l’eau qui chauffe depuis plusieurs heures dans une marmite suspendue au-dessus du feu de la cheminée.
Intimidé, Shun détourne ses yeux d’elle en se contentant de lui dire : « Tu es magnifique. »
D’un ton volontairement hasardeux, alors qu’elle se glisse dans l’onde, elle lance : « Tu ne me rejoins pas ? »
Fébrile, Shun se positionne sur une chaise et préfère décliner l’invitation : « Vois-tu, June, j’ai… Je suis… »
Le regard perdu d’Andromède s’abandonne sur le sol de la maisonnette.
Ne sachant comment s’y prendre, il ne remarque même pas le corps trempé de June venir le chercher : « Tu te souviens de ta promesse avant l’épreuve du sacrifice sur l’île d’Andromède ? »
Confus, le chevalier regarde la jeune femme le dominer en se tenant droite devant lui, alors qu’il est complètement affaissé sur son siège.
Instinctivement, il contemple le détail de ses courbes sur lesquelles glissent les gouttes d’eau chaude.
Par phénomène de condensation, le corps tout entier de June dégage une vapeur qui crée une atmosphère licencieuse.
Elle s’accroupit délicatement sur les genoux du Saint convalescent en prenant soin de rapprocher le plus possible son buste du sien, lui offrant au passage le frôlement de son affriolante poitrine contre son visage : « Tu m’as promis que lorsque tu retrouverais ton frère, tu reviendrais auprès de moi. Que crois-tu que j’attende à présent ? »
Contraint de faire front à l’attitude avenante de son amie, Shun cesse son regard abandonné et la fixe avec émotion.
_ « Je sais très bien ce que tu souhaites, mais d’autres batailles nous attendent encore. Je ne peux t’assurer une vie harmonieuse, tant que je n’aurai pas assuré la paix en ce monde.
_ Cette nuit… Juste celle-ci, la paix, elle règne. Pourquoi en vouloir plus lorsque nous pouvons profiter des instants présents ?
_ C’est juste que je ne veux pas te promettre des choses que je ne pourrai t’offrir. »
Elle lui agrippe fermement les mains pour les lui poser sur ses seins.
Ses yeux pétillent d’impatience tandis que machinalement, Shun se laisse guider par les mouvements circulaires que June l’incite à réaliser pour lui faire plaisir.
Lorsque les gestes de Shun deviennent autonomes, voire initiateurs, June se penche jusqu’à son visage pour lui baiser le cou.
A mesure que Shun poursuit ses cajoleries de plus en plus passionnées, il peut entendre entre chaque claquement de lèvres les petites poussées aigues de la voix satisfaite de June.
Très vite leur étreinte devient plus fougueuse et le corps suintant du Caméléon trempe le maillot de Shun qui lui colle à la peau et épouse à merveille son athlétique torse.
La vue de ce corps si parfait conjuguée aux mains de Shun qui parcourent dorénavant le reste de sa peau propulse June dans un état de grâce…


Dans une dimension qui surplombe la Terre, l’Olympe, à l’intérieur d’un des onze temples qui protège l’accès au Mont Olympe, son propriétaire entre dans une rage folle.
A l’intérieur de la demeure aux pierres ternes et à l’atmosphère suffocante, le Dieu du Feu des Forges et du Volcan boitille en pestant : « Apollon prétend que je ne fais que profiter des risques qu’il prend ! Et que contrairement à Héra et Hestia j’attends que notre courroux contre les hommes se réalise en gagnant les faveurs de Zeus ! Mais c’est faux ! Je vais le lui prouver ! »

Traversant un pont de pierre à l’intérieur même de sa propriété, le maître des lieux passe au-dessus un torrent de lave.
Tout autour, sur les plateformes en roches taillés dans un style dorique, les serviteurs du dieu, uniquement des hommes à peine vêtus en raison de la température ambiante, s’activent à présenter le nectar et l’ambroisie partout où leur souverain pourrait être amené à passer.

Lorsqu’il s’arrête en plein milieu du pont, ses yeux, larges et plissés, regardent au loin un atelier, depuis lequel on peut entendre s’entrechoquer quelques morceaux de métaux.
Il observe la silhouette frapper devant un fourneau quelques pièces de métal et l’appelle : « Phygée ! »
Le susnommé déploie immédiatement ce qui s’apparente à des ailes. Elles apparaissent par l’effluve de la cosmo énergie qu’il dégage.

En quelques secondes, il débarque devant son maître et s’agenouille de façon très solennelle.
Couvert d’une Glory, il n’ose même pas regarder son souverain dans les yeux : « Maître, la réfection du char d’Apollon progresse à… »
Héphaïstos ne laisse même pas l’Olympien aux longs cheveux azurs coupés en carré plongeant finir sa phrase : « Le char d’Apollon attendra. Fais venir Idaios. J’ai une mission bien plus grande à vous confier. »


Au Sanctuaire, à l’intérieur de la chaumière de June, la buée de son bassin condense sur les blocs de pierre qui forment ses murs.
Eclairée par quelques chandelles, celles-ci dessinent les corps entremêlés de Shun et June, désormais étendus, nus, ne faisant plus qu’un, sur la couche aux draps soyeux.
La propriétaire de la maison, couchée sur le côté, une jambe enlaçant fermement les cuisses de son amant, entrouvre légèrement les yeux à chaque soupir d’extase, afin de ne rien perdre de la vue alléchante du visage de Shun en plein effort.
Appliqué, concentré, doux dans ses premiers gestes et fougueux lorsque la passion l’exige, le Saint d’Andromède accélère le mouvement de ses hanches à mesure que sa mâchoire se crispe.
Venant en même temps qu’elle au point culminant du plaisir, ils libèrent tous les deux un râle sauvage mêlant bonheur et délivrance.

Cependant, ce soulagement prend des allures d’émancipation pour Shun.
Etrangement, si attentionné jusqu’ici, Shun serre plus fort encore contre lui June, au point que la marque de ses bras qui l’encerclent stigmate son corps.
En appui, lourde et rugueuse, la main droite de Shun remonte le long de sa poitrine, jusqu’à sa frêle gorge qu’il saisit sans ménagement. Ses mouvements de reins deviennent plus secs, plus violents.
Stupéfaite, June écarquille grands les yeux et remarque que les cheveux pomme de Shun oscillent vers le prune. Ses yeux s’embrument et, avec son autre main, il serre fort son collier en forme d’étoile avec l’inscription « Your’s Ever » gravée dessus.
Ne voyant pas d’autre solution, elle le gifle violemment pour le ramener à lui.
Le choc est si violent que le Japonais en tombe à la renverse et recouvre ses esprits et son physique originel.
_ « June ?!
_ Shun… Mais… Enfin… Qu’as-tu ? Qu’est-ce qu’il te prend ? »
Devinant sa mauvaise conduite, influencée par ce cauchemar qui le poursuit sans cesse, Shun baisse les yeux : « Je… Je ne sais pas. Je ne comprends pas… »
S’entourant des étoffes pour couvrir son corps qui se refroidit après avoir intensément brûlé jusqu’ici, June s’inquiète.
_ « La dernière fois que je t’ai vu ainsi, c’était avant que tu choisisses l’épreuve du sacrifice. Tu étais devenu fou de rage contre Reda et Spica. Ta colère te consumait à tel point que tu aurais pu détruire l’île entière.
_ Je… Je suis désolé. Je ne sais pas pourquoi je deviens ainsi. Plus le temps passe et plus je me sens comme changeant. Je hais la violence. Pourtant ce cauchemar permanent d’une petite fille me portant, moi bébé, dans ses bras, chaque nuit, renforce en moi ce sentiment de colère. Il ne m’est pourtant pas apparu durant la bataille des douze maisons. Mais il faut croire que d’être resté trois mois dans le coma a eu un effet néfaste. Cette vision a décuplé en moi cette peur et cette haine que j’abhorre plus que tout.
_ Tu devrais en parler à Athéna.
_ Non. Ni à Athéna, ni à mon frère. Je ne veux pas les perturber avec ça. Des choses plus importantes les concernent. »
June vient alors se coller contre lui et l’enlace amoureusement.
_ « Dans ce cas, nous combattrons ensemble ce mal qui te ronge.
_ Si seulement c’était si simple, sourit-il gentiment.
_ Oui, bientôt tu retourneras auprès d’Athéna et tu seras à nouveau loin de moi. »
 

Chapitre 82

Chapitre 82
 
Sur la plus septentrionale des quatre îles principales de l'archipel du Japon, Hokkaido, se matérialise la silhouette de Kyoko.
Légèrement vêtue de sa jupe et de son chemisier, la jeune femme progresse dans le plus haut relief montagneux de l’île.
Alors que quiconque ne tiendrait pas une minute dans ce climat, elle prend le temps de progresser dans la tenue scolaire qu’elle a choisi pour rendre visite à Mars en Grèce.
D’apparence chétive, elle avance sans difficulté, caressée qu’elle est par les bourrasques de vent gelé, sur les sentiers sinueux.
Tout à coup, au-dessus de sa tête, le bruit de raie d’hélices perturbe son allégresse.
Un drone s’infiltre dans cette zone inhabitée et inexplorée depuis trois ans maintenant que le Jardin d’Eden a rejailli des entrailles terrestres.
En débouchant en sortie de forêt sur le flanc de la montagne, elle s’en amuse : « Ils ne comprendront donc jamais. »
A cet instant, morceau par morceau, l’appareil se disloque puis explose pièce après pièce.
Elle observe alors devant elle des vestiges de la Grèce Antique taillés à même la roche.
_ « Ils ne parviennent plus à accéder à ce lieu. Les barrières naturelles sont insurmontables. Alors ils tentent par leur technologie, sans jamais accepter qu’ils ne peuvent pas tout s’approprier sur cette Terre, d’atteindre ce lieu qui les rejette. La limite des hommes est atteinte là où le choisissent les dieux. »

Revenue de son escapade en Grèce avec Arès, Eris profite du soleil levé de ce 22 mars 1987 pour admirer en plein Japon de hautes colonnes de la Grèce antique. Elles érigent divers prieurés avec en sommet de flanc de montagne un temple plus imposant.
Son ascension commence en slalomant les monceaux de roches retournés par la résurgence du Jardin d’Eden où se mêlent piliers effondrés et pierres brisées.
Aussitôt, quelques Dryades aux Leaf noires et amarantes sortent des décombres pour prendre en étau la jeune femme jusqu’à ce que celles-ci reconnaissent leur déesse.
Toutes s’agenouillent instantanément tandis qu’un Ghost Saint apparaît.
D’un claquement de doigt il chasse les Dryades.
_ « Rigel, quel plaisir que tu viennes m’accueillir. »
Le Fantôme pose genou à Terre. Un voile flou couvrant ses yeux, Rigel, imposant dans sa Leaf d’Orion, démontre toute sa dévotion : « Quoi de plus normal Kyoko. »
En passant à côté de lui, elle lui caresse affectueusement le visage en forçant à hauteur du menton pour le forcer à se relever : « Rigel… Je t’ai déjà demandé de ne plus me nommer ainsi en ce lieu… »
Il la laisse passer devant et la fixe reprendre la route.
Son regard s’éclaircit alors, reprenant la vigueur qui était la sienne avant qu’Eris ne lui ôte la vie sur l’Utérus. A cet instant, lui reviennent les souvenir du meurtre de Mayura et du baiser mortel qui le firent rentrer dans le camp de la Déesse de la Discorde…
Il devina aisément l’affliction de ses anciens camarades il y a trois ans après la bataille sur l’Utérus…

Flashback
Au Sanctuaire, les prêtresses, des aspirantes Saintia, allaient et venaient entre leur temple au sommet des douze maisons et le camp des femmes chevalier au Sud Est du domaine.
Seules autorisées à pénétrer le camp, elles apportaient à Shaina, Marin et Geist l’aide nécessaire pour nettoyer les corps et les charrier dans les cimetières des villages alentours à l’aide de quelques b½ufs.

Là-bas, Erda, choquée de sa rencontre avec Deathmask qu’elle gardait pour elle, participait à l’effort malgré ses nombreuses blessures. Elle refusait de se faire soigner malgré les remontrances de ses aînées.
Préoccupée à rendre à ce camp sa pureté d’antan, Erda repoussait chaque prêtresse alors que Shaina en renvoyait chaque fois une nouvelle à son chevet.
Xiao Ling, elle, en retrait, recevait les soins sans perdre des yeux Erda. Traumatisée par cette journée sanglante, elle restait admirative du caractère bien trempé de sa camarade. Si bien qu’elle voyait à travers elle la défunte Saint de Cassiopée, Rebecca.
D’ailleurs, Geist referma dans sa Pandora Box la Cloth de Cassiopée.
_ « J’étais de passage au Sanctuaire pour rendre compte d’une mission au Pope, enfila-t-elle l’urne par-dessus son épaule. Il ne reste plus grand-chose à faire ici. La terre finira par absorber le sang qui jonche le sol. Les nouvelles recrues hisseront de nouveaux abris avec les débris de temple qui se trouvent ici, comme nous autrefois, s’adressa-t-elle à Shaina et Marin. Je m’en retourne accomplir mon devoir auprès du Pope. J’en profiterai pour lui restituer cette Cloth. »
Comme pour refuser de dire adieu à sa maîtresse, Erda préféra ne pas poser ses yeux sur l’armure de Cassiopée et s’attela davantage à la tâche. Tandis qu’au contraire Xiao Ling s’embua les yeux en voyant le souvenir de Rebecca les quitter.
Alors qu’elle claquait le cul d’un b½uf pour faire partir le char de celui-ci avec une prêtresse, Erda resta bloquée un instant sur la pile de cadavre. Le rire sarcastique de Deathmask retentit alors dans son crâne. Depuis sa rencontre avec lui, l’image de l’odieux Saint d’or restait gravée dans son esprit : « Pourquoi… Pourquoi Athéna a-t-elle fait de lui un de ses Saints ?! Je dois savoir pourquoi, ressassait-elle. »
A cet instant, restée accrochée sur la feuille d’un arbre, une Evil Seed de l’Utérus tomba sur elle. Une graine maléfique se planta aussitôt en elle sans qu’elle puisse s’en rendre compte.
Subjuguée par sa camarade, Xiao Ling admirait chacun de ses mouvements.
Si bien qu’il fallut l’insistance d’une prêtresse qui répéta pour la seconde fois sa question pour qu’elle revienne à elle : « Vous allez donc faire partie de la nouvelle génération d’apprentie Saint ? »
La vestale avait de grands yeux verts, de grands cheveux mauves coiffés d’une longue tresse et agrémentés d’une pince en or. Celle qui deviendra plus tard Lilith, la captive de Deathmask, faisait preuve d’intérêt pour son prochain et d’entrain à l’idée de parler à une rescapée qu’elle considérait comme héroïque.
_ « Nous, prêtresses, et aspirantes Saintias, nous devons comme vous faire preuve de maîtrise martiale et de courage pour être dignes d’approcher Athéna. Malheureusement, je suis plus douée en tâches ménagères qu’en manipulation du cosmos, poursuivit-elle en souriant gênée. »
Traumatisée et pleurnicharde, Xiao Ling craqua à l’idée qu’on puisse la voir comme courageuse.
A l’inverse, les mots de la future Lilith parvinrent à Erda comme une évidence. Les Saintias peuvent approcher Athéna. Elle a les connaissances de guerrière. Ne reste que les bonnes grâces d’une gouvernante à savoir dispenser à sa déesse.
Marin vint sortir Erda de ses songes en posant sa main sur son épaule.
_ « Tu étais une des favorites de Rebecca. Tu as fait preuve de beaucoup de force aujourd’hui. Tant durant la bataille, qu’après. Par respect envers Rebecca, je peux achever ton instruction. J’ai ressenti ton cosmos lors des combats. La Cloth de Cassiopée irradiait et veillait sur toi quand nous vous avons rejointes ici. Il s’agit de ta constellation. Si tu le désires, cette Cloth t’es toutes destinée.
_ Je n’ai plus de maître. Je refuse de suivre l’enseignement d’un autre professeur, répondit sèchement Erda. »
Sa réaction ne passa pas inaperçue.
Marin resta droite devant elle. Sans insister.
Xiao Ling était pendue aux lèvres d’Erda qui poursuivit : « Je suivrai ma propre voie. Après aujourd’hui, beaucoup de questions me viennent. Seule la prière m’aidera à trouver les réponses. A compter de maintenant, je consacrerai ma vie aux prières afin qu’Athéna me guide. Je décide de devenir Saintia. »
Après un long temps de pause, Marin comprit que des doutes profonds habitaient la jeune femme. Elle conclut : « Si tel est ton destin… Après tout, si la Cloth de ton maître t’est réellement destinée, alors elle te reviendra lorsque tu seras sacrée Saintia. »
En entendant cela, Xiao Ling tourna la tête en direction de sa soignante : « Puis-je moi aussi devenir Saintia ? »
La future esclave de Deathmask sourit : « Katya, notre Saintia en chef, et Mii, son assistante, sont très exigeantes lors du recrutement d’une aspirante. Il faut être serviable et prédestinée à un fort potentiel martial. Si je crains hélas de devoir un jour être renvoyée puisque je ne progresse pas, je pense que pour ton amie et toi, après vos exploits de ce jour, aurez droit à une dérogation du Grand Pope en personne. »
Choquée par la bataille, la Chinoise voit l’opportunité de profiter de ses prédispositions au combat pour se cacher dans ce Sanctuaire en se rangeant au service de la déesse que chérissait Rébecca. L’occasion aussi pour elle de rester auprès d’Erda.
Cette nouvelle rassura Xiao Ling qui inconsciemment vint toucher du bout des doigts ses lèvres en se souvenant du baiser malencontreux échangé plus tôt avec Erda. Elle comprit enfin que cela a déclenché quelque chose en elle. Que cette attirance soudaine qu’elle éprouve envers Erda est aussi forte que l’amitié qu’elle éprouvait pour Yufa.
C’est alors, qu’une autre Evil Seed restée cachée de l’éradication faite plus tôt par Deathmask vint s’insinuer dans son c½ur.
Ignorant l’affection soudaine de Xiao Ling à son endroit, Erda garda un instant de dignité lorsqu’elle chargea le dernier corps resté dans le camp, celui de Mito.
Elle ferma les paupières solennellement.
Ses adieux à sa camarade signifiaient pour elle ses adieux à ce camp où elle passa tant d’années…

Plus loin, à Honkios, avant la montée des marches des douze maisons, sur le flanc Ouest, Mirai pleurait devant la stèle de Mayura.
Alerte, l’apprenti du Saint d’argent sentit un noble cosmos approcher dans son dos.
Il lui dit sans même se retourner : « Le cimetière est à peine remis de l’éboulement provoqué par l’éruption de l’Utérus qu’il accueille déjà de nouvelles tombes. »
Derrière lui, Shaka, Pandora Box du Paon sur le dos, présenta ses condoléances : « J’ai appris que ta condisciple, Shinato, avait héroïquement donné sa vie elle aussi. Tu peux être fier d’avoir été entouré de deux femmes d’une telle abnégation. »
D’un revers de la main, Mirai essuya ses yeux afin de présenter une mine fière au Saint de la Vierge.
_ « Shinato… Elle était apprentie… Sa place ne sera pas dans ce cimetière aux côtés des Saints et de notre maître… Sa place ne sera d’ailleurs nulle part… Tout au mieux, une pierre à son nom dans un cimetière isolé dans le Sanctuaire… Nous n’avons même pas retrouvé son corps… »
Shaka pouvait deviner le tourment de l’élève à propos de Shinato. Il ressentait le même à l’endroit de Mayura.
Malgré la distinction de celui-ci, impérial dans son armure d’or, Mirai pouvait lire sur le visage de Shaka une profonde affliction à l’endroit de son professeur.
_ « Par respect envers mon amie, j’ai obtenu du Grand Pope le droit de conduire sa Cloth à Jamir afin qu’elle y soit réparée. J’aimerai que tu m’y accompagnes ?
_ Pardon ?!
_ Mayura me parlait souvent de Shinato et toi. Tu concoures à la Cloth de bronze du Petit Chien. Et Mayura ne tarissait pas d’éloges à ton endroit. Pour sa mémoire, le Grand Pope m’a autorisé à achever ton enseignement. A notre retour de Jamir, si tu es parvenu à surmonter les épreuves que je te ferai surmonter, tu seras promu Saint de bronze du Petit Chien. Qu’en penses-tu ? »
Mirai, à la fois peiné de poursuivre sans Mayura et Shinato et conscient de l’opportunité de parfaire son apprentissage auprès d’un des plus réputés Saint d’or, hésita l’espace d’un instant.
Shaka lut en lui comme dans un livre ouvert : « Le chemin pour devenir Saint est semé d’embûches. On supporte toutes sortes d’épreuves physiques et mentales. Les plus émérites les surmontent. Mais c’est seulement la vérité du champ de bataille, la mort, l’adrénaline qui en découle lorsqu’on la donne, mais également le chagrin qu’on éprouve lors de la perte de camarades, qui permet de déterminer vraiment si on est capable de devenir un chevalier. Aujourd’hui tu es face à ce dilemme. Et tu n’auras pas d’autres chances qu’à cet instant. As-tu traversé toutes ces épreuves pour arrêter maintenant ? Te crois-tu capable de surmonter la perte d’êtres aimés ? Sauras-tu supporter de perdre à l’avenir à nouveau des camarades ? Seras-tu prêt à mettre à chaque combat ta vie en péril maintenant que tu connais l’issue d’une Guerre Sainte ? »
Mirai tourna les talons une dernière fois en direction de la tombe de Mayura.
Il prit une profonde aspiration et dressa son poing : « Je souffre. Je souffre terriblement. Les stigmates sur mon corps ne sont rien par rapport à la déchirure de mon âme en cet instant. Durant toute notre formation, on l’entend, et on se croit prêt à vivre de tels désastres. Mais il n’en est rien. Pourtant, Shinato n’a pas tremblé au moment de partir secourir les femmes du camp. Elle n’a jamais baissé les bras même lorsqu’elle a découvert que la Cloth à laquelle elle aspirait, l’Oiseau de Paradis, était déjà portée par un Saint émérite. Elle était prête à tout pour servir le Sanctuaire et s’imaginait mercenaire s’il le fallait. Elle a même été jusqu’à dissimuler sa féminité pour être considéré comme l’égal de n’importe quel autre apprenti, sans traitements de faveur d’un côté ou brimades de l’autre. Et tout ça, c’est à Maître Mayura qu’elle le devait. Moi j’étais là, à les admirer toutes les deux, sans prendre au sérieux l’opportunité qui était mienne. Car c’est bien de ça qu’il en retourne aujourd’hui. Je suis en vie, moi. Et j’ai l’opportunité de pouvoir devenir Saint, moi. Je ne peux plus tricher, me cacher. La vérité m’a sauté aux yeux et le destin me fait face. Devant la tombe de Maître Mayura, en mémoire de Shinato, je ne peux me dérober… »
Il se retourna vers Shaka, déterminé comme jamais et scanda : « Je deviendrai Saint sous votre enseignement ! Partons pour Jamir Seigneur Shaka ! »

Plus haut, sur le flanc droit entre le palais papal et la maison des Poissons, Katya veillait au chevet de Shoko dans le temple des prêtresses.
Alors qu’elle ruminait encore l’accession de Shoko au statut de prêtresse, Mii changeait malgré elle les bandages de la souffrante.
_ « Allons Alicia, l’appela Katya de son vrai nom, ne peux-tu pas ravaler quelques instants ta ranc½ur ? Cela transparaît sur ton visage !
_ Je suis désolée, serra-t-elle fermement les bandelettes de papier, mais profiter des circonstances pour faire de cette apprentie Saint une aspirante Saintia alors qu’elle a jusqu’ici toujours loupé les épreuves d’érudition nécessaires à être acceptée parmi nous ça me… »
Le bond de son lit de la souffrante interrompit la rustre prêtresse : « Aïe, s’exclama Shoko ! »
Katya se mit à rire : « Alicia… J’ai l’impression que tu es si douce que tu en as sorti notre invité de son coma ! »
Mii ronchonna en reculant pour laisser de l’air à une Shoko hagarde.
_ « Où… Où suis-je ?
_ Au temple des prêtresses d’Athéna, vint lui prendre la main Katya. Tu te souviens de ce qui s’est passé ? »
Elle profita de l’échange pour glisser dans la paume de Shoko le collier à l’effigie de Pégase que portait Kyoko. Elle le ramassa lorsque Kyoko le perdit quand Eris prit possession d’elle.
Sentant le bijou froid au contact de sa peau, Shoko se remémora aussitôt.
_ « Kyoko, sanglota-t-elle…
_ Tu es restée inconsciente trois jours depuis. »
Shoko gardait les yeux rivés sur l’objet. Les paroles troublantes de Kyoko sur son acception à être Eris et sur l’absence d’Athéna du Sanctuaire traversèrent son esprit.
_ « Et ma s½ur ? Et le Saint du Scorpion ? Il a sacrifié sa vie pour lutter contre la destruction d’une partie du Sanctuaire.
_ Le Seigneur Milo est en bonne santé. Il a participé à la mission destinée à l’éradication de l’Utérus, des Dryades et…
_ D’Eris ?
_ Oui.
_ Et alors ?
_ La mission est réussie. »
Shoko resserra ses poings et tira ses draps vers elle par le même geste : « Ma s½ur est donc… »
Katya se contenta d’hocher la tête d’un signe affirmatif en faisant la moue.
_ « La mission est donc un succès, tenta de dédramatiser malgré elle Shoko.
_ Si on peut appeler ça ainsi, rétorqua sèchement Mii. Le camp des femmes chevaliers a été dévasté. Seule Erda a survécu parmi les apprenties. Dame Rebecca a également succombé. Les Seigneurs Aeson et Rigel ont trahi le Sanctuaire au profit de ta s½ur ! Et Dame Mayura y a perdu la vie !
_ Dame Rebecca… Toutes les apprenties… Mais… Et… Rumi, mon amie ?! »
D’un air sévère, Mii fit un signe négatif de la tête. 
Shoko sentit son c½ur se fendre à nouveau en apprenant que sa s½ur était responsable d’un nouveau drame. Elle murmura d’une voix triste : « Rumi… »
Pourtant, elle refusa de se laisser abattre.
Elle desserra le poing qui contenait le pégase de sa s½ur et sortit le sien, le même, de sous son maillot.
Elle répondit alors aussi rudement à Mii que celle-ci s’était adressée plus tôt à elle : « Je comprends ce sentiment de trahison qui t’habite. Après tout, ici, Kyoko était ton aînée. Un modèle peut-être même. Toi qui attaches tant d’importance aux protocoles et à la fonction de Saintia, j’imagine à quel point tu dois être dévastée par les conséquences de sa trahison. Mais face à Kyoko… Non, face à Eris, je me suis faite une promesse. Et je vais te l’adresser comme un engagement solennel. Qu’importe que tu m’acceptes comme une semblable ou non. Qu’importe mes maladresses à appréhender mon futur rôle. Mon destin n’était pas d’être Eris. C’est Kyoko qui a choisi cette voie sans lutter. C’est son choix. Le mien est d’être au service d’Athéna. Je veux devenir une Saintia ! Et je deviendrai une Saintia ! Pour laver l’affront que ma s½ur vous a infligé. Pour vous. Pour moi. Pour Athéna ! »
Restée en retrait durant cet échange musclé, Katya en garda un sourire convaincu.
Mii, par un hochement de tête et un regard assuré, accepta de laisser sa chance à Shoko.

A quelques centaines de mètres de là, devant les grandes portes de la salle d’audience du Pope, Aiolia attendait de faire son rapport.
Après Shaka, ce fut à Milo de rendre des comptes sur les évènements de la veille.
Le Saint du Lion n’attendit pas longtemps.
L’entrée fut ouverte en grand depuis l’intérieur de la pièce par les gardes qui s’y étaient enfermés avec le souverain.
Aiolia ôta alors son diadème et attendit que Milo en sorte.
Le Scorpion recoiffa ses longs cheveux du sien une fois dehors.
Les deux Grecs s’échangèrent un rapide signe de tête au moment de se croiser.
_ « Tu repars en mission, questionna le Lion ?
_ Tu es perspicace, chambra le Scorpion.
_ Pas bien compliqué. Tu portes deux Pandora Box qui ne sont pas les tiennes sur le dos. »
En effet, en plus de celle de la Coupe, Milo avait récupéré la Cloth de Rebecca que Geist avait redéposé plus tôt.
_ « J’ai obtenu du Pope le droit de rapporter la Cloth d’Aeson auprès de son élève, Crateris. Cela faisait des années qu’Aeson en trouver digne son disciple. Si bien qu’Aeson la sortait de son urne afin que Crateris entre régulièrement en symbiose avec lors de ses séances de méditation. Une sorte de passage de témoin en quelque sorte.
_ Le Grand Pope a accepté qu’on respecte les dernières volontés de ce traître d’Aeson, grinça des dents Aiolia.
_ Allons, tu sais que notre Grand Pope peut se montrer clément et ne pas s’arrêter uniquement sur les circonstances flagrantes. Il accepte volontiers de voir au-delà des apparences. Tu en as fait toi-même l’expérience par le passé. Et plus d’une fois si je ne me trompe pas. La trahison d’Aiolos. Ton tempérament rebelle lors de la Guerre Sainte contre les Titans… »
Vexé par le souvenir de son frère, Aiolia ravala sa morgue.
Milo n’insista pas, il conclut en montrant du doigt la Pandora Box de bronze dont il portait les lanières  au-dessous de celle de la Coupe : « En échange de l’exécution de la volonté d’Aeson, le Grand Pope m’a demandé de conduire la Cloth de bronze de Cassiopée à Albior de Céphée sur l’île d’Andromède. Avant même le décès de Rebecca, Albior mentionnait dans ses messages à l’attention du Sanctuaire qu’un de ses élèves, Anikeï, était aspirant à cette Cloth. Le temps qu’il achève sa formation, la Cloth se sera régénérée dans son urne. »
Aiolia acquiesça. Il songea un instant : « Le nombre d’aspirants est en constante progression en cette ère. Cela annonce de nombreuses Guerres Saintes en notre époque. Le Pope ne perd pas de temps afin de garder une armée importante en nombre. »
Au regard inquiet de Milo, il comprit que son compatriote partageait la même pensée.
Chacun reprit son chemin et bientôt Aiolia posait genou à terre devant le Grand Pope fermement cramponné à son trône.
_ « Félicitations Aiolia. Tes frères d’armes ont tour à tour précisé que notre victoire d’hier n’a pu être possible que grâce à ton succès face à l’Utérus. »
Portant encore sur lui les écorchures d’Hysminai et les ecchymoses de Galan, Aiolia restait focalisé sur son avenir.
_ « Merci Majesté. Ce fut avec opiniâtreté que j’ai respecté votre plan d’assaut. Vous n’aviez plus fait appel à moi depuis la bataille contre Cronos. Il était important que je revienne dans les bénédictions d’Athéna.
_ Ton impétuosité à l’époque a fini par me lasser. Toutefois, ce jour, tu parais bien plus mûr. Bien que je discerne toujours chez toi un tempérament de feu, pouffa sympathiquement de rire Saga. »
Aiolia afficha une mine partagée entre flatterie et gêne. Il était rare que le Pope fasse preuve de sympathie.
Néanmoins, il se remémora une des circonstances qui l’a rendue plus mature.
_ « J’avoue que la révolte des soldats des Titans alors que j’avais obtenu auprès de vous leur grâce lors du climax de la Guerre Sainte contre Cronos m’a profondément atteint. L’enfant que j’étais s’était tant battu pour leur offrir une vie meilleure, comme moi qui me battais pour effacer l’image d’Aiolos qui me collait à la peau. »
Sous son masque et son casque en or, Saga sua l’espace d’un instant. Le complot hourdis autour de l’accueil des soldats Titans au Sanctuaire demeurait un succès. A l’entendre, Aiolia n’y avait vu que du feu.
_ « Lorsque je revins du Cronos Laburinthos et que je découvris leur tentative d’invasion, ma candeur a pris fin. Tout n’est pas blanc ou noir. L’être humain est complexe. Je compris qu’à mes yeux Aiolos était peut-être un grand guerrier. Il n’en demeurait pas moins un traître. La bataille me fit réaliser qu’ils avaient beau être les assassins de mon frère, les autres Saints n’en demeuraient pas moins mes frères d’armes de confiance. »
Saga ne put retenir une larme tant le poids de ses mensonges avaient fini par corrompre l’amour et la foi d’un cadet envers son frère aîné.
_ « Si bien que l’exil que vous leur offrîtes sur Death Queen Island était une bien douce punition, acheva Aiolia résigné. »
Saga se racla la gorge pour ne pas trahir son émotion : « Il s’agit de la décision d’Athéna. Elle demeurera toujours bonne envers son prochain. Fut-il un ennemi. Athéna t’adresse à travers moi ses remerciements et ses félicitations pour cette mission accomplie Aiolia. Tu peux disposer et bénéficie de trois jours de permission qui t’aideront à te remettre de tes blessures. »
Aiolia hocha la tête pour prendre acte et fit volte-face.
En se dirigeant vers la sortie, il serra les dents : « Les soldats Titans… Finalement, ils avaient en ce dieu malfaisant qu’était Cronos le dieu qu’ils méritaient… Mais au fond de moi, maintenant que j’ai découvert la vérité à propos de Galan, cette guerre n’est pas finie… Lithos m’a menti… »
Tandis qu’Aiolia quittait le palais, le Grand Pope indiqua d’un signe de la main aux deux soldats portiers d’en faire autant.
Seul, il ôta son heaume et son masque pour libérer ses longs cheveux bleus et essuyer ses larmes de culpabilité.
En se dirigeant vers le balcon qui domine l’horizon, il paraissait très affecté : « Aiolos… Mon ami… Comme je m’en veux de devoir infliger ces mensonges à ton frère… »
Seulement, quelques secondes suffirent à sa chevelure pour devenir grisâtre.
Les larmes ne coulèrent plus dans ses yeux rouge empreints de folie : « Cependant, cette Guerre Sainte contre les Titans m’aura permis d’achever la formation de nombreux Saints d’or et de découvrir que des entités bien supérieures à Hadès, Poséidon ou encore Zeus menaçaient mon plan de domination. Pontos… J’ai perdu contact avec lui qui fomentait également contre les Titans à l’issue de cette bataille. Il n’a pas pu disparaître ainsi. Sans que mes Saints ne s’en rendent compte, les différentes Guerres Saintes menées contre le panthéon égyptien m’a permis de récolter de nombreux indices. Pas encore assez, hélas. Mais je sais au moins que ce panthéon n’était qu’un leurre. Des marionnettes que l’Olympe a placées pour sceller des forces supérieures. Des ruines plus profondes. Où se terre certainement Pontos aujourd’hui. Le jeune Mirai ira compléter l’équipe de recherche de Retsu du Lynx une fois qu’il sera fait Saint. Dans l’attente, Juan et Georg iront renforcer les rangs également. La réquisition de gens de leur calibre ne devrait pas éveiller trop de soupçons sur mon obstination pour ces recherches… »

Au Sud Est du domaine, sortie du camp des femmes, Shaina se débarbouillait à l’abri des regards de son combat et des tâches harassantes qui s’en suivirent.
Son masque, posé sur ses vêtements au bord de l’eau, fut ombragé par l’arrivée d’une camarade dont le cosmos lui était familier.
_ « Ton rapport est terminé, demanda Shaina ? »
Faisant grossièrement tomber ici et là chaque morceau de son armure de mercenaire, Geist se dépêcha de se laisser tomber dans l’onde pour rejoindre son amie.
_ « Je n’eus pas besoin de m’étaler. Gigas m’attendait au coin d’une ruelle d’Honkios afin que je ne sois pas découverte à faire mon rapport au Grand Pope. »
La brune se laissa tomber en arrière pour noyer ses longs cheveux.
Passant de l’eau sur son visage, Shaina déplora : « Tout de même, quel fait d’arme te faudra-t-il pour avoir de nouveau droit aux faveurs d’Athéna ?! »
Geist releva les genoux pour exposer son corps nu tout entier à la vue de l’Italienne qui en connaissait déjà les moindres détails : « Disons que cela est un bon compromis. Mon apparent exil me permet de réaliser des missions que beaucoup refuserait de faire et que j’accomplis sans état d’âme. Ça me permet de défouler cette part d’ombre en moi tandis que je reste dans les petits papiers du Pope Arlès. »
Shaina l’imita pour venir la prendre par la taille : « Tout de même… Aujourd’hui c’est Misty le capitaine des armées. Mais si un jour je parviens à me hisser à ce rang, alors je demanderai au Général Gigas de te réhabiliter. »
Geist approcha ses lèvres des siennes : « Je te manque tant que ça ?! »
En aucun cas Shaina ne voulut se dérober à ce baiser. Elle en profita pour l’étreindre lascivement et sentir sa poitrine frictionner la sienne.
A l’issue de cet échange langoureux, Geist la taquina.
_ « Tu as pourtant Marin pour combler ta solitude.
_ Je la soupçonne d’être attirée par le pestiféré du Sanctuaire, Aiolia. Elle passe dorénavant énormément de temps avec son disciple et lui à ce qu’on dit.
_ De tous les hommes du Sanctuaire, il a fallu qu’elle choisisse le moins bon parti, ricana Geist. Néanmoins, je la comprends, elle qui a longtemps été brimée en raison de ses origines, elle doit comprendre mieux que quiconque la souffrance de cet homme, compatit-elle sans vouloir médire davantage. Cependant, ces années où elle s’est isolée après être faite Saint semble avoir été propice au développement d’aptitudes qu’on ne lui soupçonnerait pas.
_ Que veux-tu dire ?
_ Je ne sais pas… Durant notre combat contre Emony, j’ai senti comme un cosmos… Comment dire… Pas inhumain… Mais supérieur à nous autre en tout cas… Différent tout du moins !
_ Arrête. C’est impossible. Marin n’a jamais démontré un potentiel supérieur à la moyenne de notre caste de Saint d’argent. Et tu sembles oublier qu’après Mayura, j’étais la Saint la plus puissante du Sanctuaire.
 _ A ce propos, maintenant que Rebecca n’est plus, que Mayura ne pourra reprendre à sa place, j’imagine que le Pope va te confier la remise sur pied du camp, le recrutement et l’apprentissage des nouvelles femmes chevaliers.
_ Rendre à ce camp sa beauté d’antan, je l’accepte volontiers. Après tout, nous y avons vécu tant de belles années. Recruter de nouveaux éléments, en visitant régulièrement l’ensemble du domaine, ou en partant en mission dans le monde contemporain, ça doit être possible. Néanmoins, prendre la responsabilité de l’apprentissage, très peu pour moi. Il me reste encore la formation de Cassios à achever. »
Geist tourna le dos à son amie et reprit la direction de la berge.
_ « Tu m’épates. Malgré tes réactions belliqueuses et ton ambition, tu restes mesurée et raisonnée. J’aurai aimé te ressembler.
_ Où vas-tu ?
_ Rejoindre mes hommes avant qu’ils ne soient découverts. Nous avons ordre de quitter au plus vite le Sanctuaire. Une nouvelle mission nous attend.
_ Reviens-moi vite.
_ Promis. Et en attendant, garde un ½il sur Marin. Tu l’as ignoré depuis qu’elle a quitté le camp. Nous étions toutes les trois très proches. A présent elle semble être une parfaite inconnue pour toi. Qui est son disciple ? Mes soupçons à propos de son potentiel sont-ils fondés ? Souffre-t-elle de solitude ? Ou bien, sa relation supposée avec Aiolia ne la met-elle pas en danger ? Autant de mystères que tu ferais bien d’élucider.
_ J’ai toujours soupçonné que tu lui trouvais plus d’intérêt qu’à moi, minauda Shaina.
_ Tu vas le faire, insista Geist ?
_ J’ai peur que l’intérêt et le temps me manque, termina Shaina.
_ J’espère dans ce cas que tu ne le regretteras pas ma belle. »

Dans les villages du Nord, Milo traînait des pieds à l’approche du logis où Aeson vivait reclus avec son disciple depuis des années.
Il craignait de voir Crateris ouvrir la porte avec le regard rempli de doutes et de devoir lui briser ses derniers espoirs.
_ « De toute évidence, il n’est pas dupe, se reprit Milo, en tant que futur Saint d’argent, il a bien ressenti le cosmos de son maître nous quitter. »
Le Scorpion sortit de ses pensées lorsqu’il tomba nez à nez avec le prétendant de la Coupe déjà sur le perron.
_ « Crateris… Tu m’as senti approcher ?! »
Les yeux rougis par le chagrin, Crateris pointa du doigt la Pandora Box de la Coupe que Milo portait par-dessus celle de Cassiopée : « J’ai ressenti l’armure. Elle m’appelait à mesure que vous approchiez. »
L’expression de son visage était dure. Il parlait sèchement.
Depuis la veille où il était passé ici pour saluer Aeson, Milo avait constaté un profond changement chez Crateris.
Il demeurait vêtu d’une tunique grise, gardait les poignets entourés de bandelettes de papier. Ses longs cheveux violets tombaient toujours derrière ses épaules et quelques mèches passaient encore sur son front et devant ses yeux bleu marin.
Physiquement il était bien le même.
_ « C’est l’émanation qui vient de lui. Cette impression de puissance, de maturité, de détermination qu’on ne trouve qu’en nous autre Saints confirmés. L’armure ne l’a pas encore revêtu qu’il dégage déjà le charisme d’un chevalier. »
Crateris ramena Milo à la conversation.
_ « Il le sentait Seigneur Milo.
_ Pardon ?!
_ Aeson. Il avait senti que le moment de mon sacre était venu. On dit qu’on peut voir son avenir à court voire moyen terme en observant son reflet dans l’eau qu’on déverserait dans le totem de ma Cloth. Il savait que cette mission était sa dernière. Et moi aussi. Je me suis vu, juste après lui, porter cette armure. Et je n’ai rien fait pour l’en empêcher. Je l’ai laissé partir. »
Milo posa sa main sur l’épaule du jeune homme et déposa à côté de lui l’urne : « Tu n’as pas à t’en vouloir. Il avait reçu son ordre de mission. Il devait accomplir son devoir. Et l’armure avait déjà préparé sa succession. Comme elle la préparera un jour pour toi. »
Aeson se plia en avant pour saisir la hanse permettant d’ouvrir la Pandora Box : « Elle n’en aura pas le temps. Car j’ai vu ma promotion… Puis ma mort… »
Il tira dessus et libéra l’armure qui vint le couvrir : « Je mourrai des mains de l’ombre infini qui dévore la volonté des morts. Hadès en personne ! »
Milo baissa la tête, confus.
_ « Je n’en suis pas gêné, reprit Crateris. Après tout, c’est bien en notre époque qu’Hadès se réincarnera n’est-ce pas ?
_ En effet.
_ Alors, pour la mémoire de mon maître, j’espère faire en sorte que notre génération sera celle qui verra mettre un terme à la répétition de ces batailles. »
Aussitôt, dignement, Crateris pose un genou à terre pour effectuer une révérence vers son supérieur qui, en déposa sa main sur le sommet de son crâne, l’adouba : « Je le souhaite de tout mon c½ur. C’est à cela que je suis préparé depuis que je suis fait Saint. Et même si ton appartenance à la chevalerie sera éphémère Crateris Saint d’argent de la Coupe, je te souhaite qu’elle soit honorable. »

Au temple des prêtresses, Shoko ajustait sa toge immaculée à l’instar d’Erda et Xiao Ling, nouvelles venues.
Katya les présenta brièvement à leurs cons½urs. Chacune des trois ayant été acceptées pour leurs faits d’armes lors de la Guerre Sainte contre Eris, elles obtinrent toutes de sincères applaudissements chaleureusement menés par celle qui deviendra dans quelques mois la Lilith de Deathmask.
Néanmoins, ce succès n’était pas au goût de toutes. Une prêtresse, recluse derrière les autres, applaudissait avec moins de dévouement.
Dévisageant sa s½ur Katya qui souriait franchement aux trois recrues, Maria lisait à travers ce geste une reconnaissance qu’elle n’a jamais eue en retour. Elle maudit alors à nouveau sa faiblesse qui ne lui permit jamais d’obtenir un tel respect de son aînée contrairement à ces inconnues.
Aussitôt, comme tant d’autres avant elle, une Evil Seed qui virevoltait depuis la veille au gré du vent, infiltra son c½ur.
Devant, bien qu’élogieusement accueillie, Shoko n’en demeurait pas moins intérieurement bouleversée par les évènements récents.
Tandis que Mii avait pris le relais de Katya pour assurer la visite des locaux, Shoko ne l’écoutait que d’une oreille.
_ « … et ce sont les Saintias précisément qui sont les seules autorisées à s’occuper du corps humain de la déesse Athéna. Tâche si essentielle que seules Katya et Kyoko furent promises Saintias. Car elles ont su s’en montrer dignes... »
A l’évocation du nom de sa s½ur, Shoko ne put refreiner un souffle d’amertume.
Cela la sortit de sa léthargie et lui permit de remarquer qu’elle n’était pas la seule à rêvasser pendant les explications de Mii.
En effet, Xiao Ling qui suivait à la semelle Erda semblait plus intéressée par elle que par leur future mission.
Bien que cela amusa Shoko, Mii n’y gouttait guère : « … alors que nous autres, aspirantes, sommes uniquement des prêtresses pour l’heure. Et rares sont celles qui reviennent de leurs soins à Athéna ! Certainement bannies car jugées trop impures ou incompétentes pour cette tâche ! Après tout, il s’agit de satisfaire la volonté de la Déesse de la Sagesse ! N’est-ce pas Xiao Ling ?! »
La Chinoise sursauta aussitôt, ce qui fit pouffer de rire Shoko.
Mii, ignorant tous des m½urs de Saga qui provoquaient tant d’hécatombes dans leurs rangs, apparut bien sévère vis-à-vis de sa camarade asiatique qui s’effaça aussitôt.
S’en fut assez pour que Shoko objecte : « Si je comprends bien Mii, toi qui es si passionnée par ton rôle et y mets tant de c½ur à l’ouvrage, tu es du même rang que nous et n’a jamais eu l’honneur de rencontrer sa Majesté Athéna ?! »
Cette remarque acerbe ne manqua pas d’assurer un sourire en coin sur les lèvres de la discrète Erda, de soulager Xiao Ling et de renforcer la rivalité entre Shoko et Mii.
Tout cela, bien entendu, sous le regard bienveillant de Katya, soulagée de savoir ces nouveaux caractères bienvenus à l’abri pour le moment des mauvaises pulsions de l’homme qu’elle aimait…

Pendant ce temps, dans les villages du Sanctuaire, Aiolia restait à regarder la fenêtre grande ouverte de la demeure où il vivait avec son frère avant que celui-ci n’attente à la vie d’Athéna.
Désormais résidence de Lithos, il profitait qu’elle aéra cette maisonnette qu’elle a incroyablement fleurie pour la regarder s’agiter aux fourneaux.
Il resta de longues minutes, partagé entre nostalgie de leur amitié passée et colère de lui avoir caché la mort de Galan.
Compréhensif mais furieux, il revit l’espace d’un instant ses deux domestiques à ses côtés dans la maison du Lion. Ce tableau appartenant désormais au passé ne devait pas être brisé.
Il tourna alors les talons, abandonnant toute dispute éventuelle.
C’est alors qu’il se pensait assez loin, que la voix fluette de Lithos l’interpella : « Maître Aiolia ?! »
Elle était juste dans son dos. Elle l’avait rejoint.
_ « Je vous ai vu vous éloigner depuis ma fenêtre… Vous n’êtes pas venu me voir après votre mission…
_ J’ai… C’est... C’est trop difficile…
_ Ça ne l’a pourtant jamais été entre nous jusqu’à présent. »
Aiolia garda le silence.
La phrase de Lithos était volontairement pleine de sous-entendues.
Admirative pour son sauveur alors qu’elle n’était qu’une enfant, dévouée à son service en tant qu’adolescente, elle ne pouvait pas demeurer insensible à sa droiture maintenant qu’elle était une femme.
Pourtant, Aiolia ne l’entendit pas de cette oreille.
Toujours dos à elle, il serrait nerveusement les poings.
_ « Vous savez n’est-ce pas, s’hasarda-t-elle ? On dit qu’Eris a corrompu des êtres de bravoures du passé. Vous avez découvert la vérité c’est ça ? »
Rompant le silence d’Aiolia, une voix familière répondit à sa place : « Dans les pires circonstances qui puissent être en effet. »
Marin revenait alors du camp des femmes et croisa les deux amis.
Comprenant que Marin prendrait la défense d’Aiolia, Lithos tenta de s’en expliquer : « C’était… C’était la volonté de Galan… Il m’a fait promettre de ne jamais vous le dire… Il préférait que vous le croyiez heureux et libre… Et… »
Aiolia la coupa sans ménagement : « Au lieu de ça il a été mis en terre dans les bas-fonds du Sanctuaire. Torturé par Eris à qui il a refusé de prêter allégeance. Possédé, meurtri, anéanti corps et âme par l’Utérus. Alors que je l’ai toujours cru heureux et libre, oui. La vérité m’est venue de la bouche d’une Dryade. Pendant que j’étais en bonne santé et ignorant, mon ami, acteur de ma réussite, souffrait mille tourments de son vivant puis dans sa mort. »
Confuse Lithos lâcha de façon malheureuse : « Nous n’aurions rien pu faire ! »
Le visage défiguré par la colère, il se retourna en grondant vers elle : « Qu’en sais-tu ?! Qui es-tu donc pour pouvoir avoir de telles certitudes ?! »
Choquée, vexée, profondément blessée par ces paroles, elle recroquevilla ses deux mains devant sa poitrine pendant que ses deux grands yeux ronds se gondolèrent de larmes.
Tel un rugissement, la voix d’Aiolia avait attiré les passants. Quelques curieux commencèrent à tendre l’oreille.
Hélas tristement connu, Aiolia ne put poursuivre davantage aux yeux de tous, devinant que déjà certains allaient médire à son sujet.
D’un bond prodigieux, il disparut dans le ciel.
Seule avec elle, Marin enfonça le couteau dans la plaie : « Je t’avais dit que la découverte un jour d’un tel mensonge serait pire que de lui avouer la vérité. »
Meurtrie, Lithos dévisagea avec ranc½ur la Saint d’argent.
Dans sa poitrine qu’elle cramponnait, une Evil Seed germait en secret.
_ « Ne me dis pas que ça n’arrange pas tes affaires ?! »
Marin préféra ne pas chercher querelle et tourna les talons.
_ « C’est ça, continue à être Marin la juste, la bienveillante, toujours à tomber à pic pour remonter le moral d’Aiolia une fois que Galan et moi avions fini d’essuyer les pots cassés !
_ Alors c’est donc ça, cessa son départ Marin ?!
_ Tu nous as pris Aiolia ! C’est toi qui l’as éloigné de nous ! C’est pour ça qu’il nous a renvoyé de chez lui !
_ Tu n’y es pas du tout. Il voulait une meilleure vie pour vous qui aviez tant subi à ses côtés justement.
_ Mensonge ! Tu as toujours vu d’un mauvais ½il qu’une autre vive sous son toit ! »
Marin avait compris que les années aidant, il y avait bien plus qu’un amour fraternel de Lithos envers Aiolia.
Ignorant tout du fait que cet amour était exacerbé désormais par les graines de l’Utérus, Marin repartit comme elle arriva…
En chemin, bondissant de roche en roche, elle revit quelques images horrifiques du bain de sang du camp des femmes qu’elle découvrit après la bataille.
Animée par sa mission d’Aigle de Zeus, consciente des machinations qui entouraient les dernières Guerres Saintes, elle était davantage convaincue que l’entraînement qu’elle prodiguait à Seiya devait être le plus rigoureux possible. Car ce Pégase sera celui qui aura entre les mains l’avenir de l’humanité face aux dieux…

Dans la partie Ouest de l'Océan Indien, près de la Somalie, Milo n’arrivait pas à apprécier la brise.
L’air marin sur l’île d’Andromède demeurait brûlant sur cette terre où une chaleur infernale le jour, dépassant aisément les 50 degrés Celsius, harassait les élèves d’Albior.
Fixant la Pandora Box de Cassiopée qu’il a déposé au bord d’une falaise pour profiter par la même occasion de la vue, Milo souffla : « Je n’arriverai jamais à m’y faire à ce climat ! »
Son interlocuteur, un homme blond, à la carrure massive et au visage mûr, rajouta : « Et encore, lors de tes visites tu ne t’es jamais attardé la nuit. Tu ignores tout du froid glacial qui s'abat sur l'île une fois le soleil couché. »
Milo tourna la tête sur sa droite pour voir Albior le rejoindre.
_ « Très peu pour moi. Je ne pensais pas revenir te rendre visite de sitôt mon ami. »
Imposant dans sa Cloth d’argent, Albior inclina la tête en guise de respect et s’assit sur un rocher plus bas, juste aux pieds du Grec.
Milo l’imita alors.
_ « Ton courrier au Grand Pope a été apprécié. Il évoquait les difficultés qu’il avait à te rallier à lui depuis que nous sommes allés combattre en Egypte.
_ Si notre présence en Egypte a permis de libérer quelques partisans athéniens du dictat des représentants du panthéon égyptien, combien de morts innocentes cela a-t-il engendré ? Cela justifie-t-il que depuis, les uns après les autres, nous attaquions chaque sanctuaire égyptien pour imposer notre régime ?
_ Est-ce ce que tu inculques à tes élèves ?
_ Pas le moins du monde. J’ai beau trouver la politique d’expansion du Pope en Egypte anormale, je garde un devoir de neutralité. La preuve, il a su le reconnaître en relevant dans mon dernier courrier qu’un postulant à la Cloth de Cassiopée est bientôt prêt à se rendre au Sanctuaire pour lui prêter allégeance.
_ La perte de Rebecca a été l’opportunité pour le Grand Pope de te prouver la considération qu’il a pour toi. Il a immédiatement fait suivre cette Cloth.
_ Certainement pour renforcer son armée et mener de nouvelles batailles.
_ Si tel est le désir d’Athéna. »
Albior soupira et se releva : « Pff… Je t’ai connu plus opiniâtre par le passé. »
Milo le suivit vers le centre de l’île.
_ « Où veux-tu en venir ?
_ A l’époque, tu réfléchissais davantage aux causes et aux conséquences d’une Guerre Sainte. C’est cette sagesse, ton sens de la stratégie et ton acharnement sur le champ de bataille qui m’ont donné plaisir à lutter sous tes ordres, mon ami.
_ Nous avons traversé de grandes épreuves ensemble, il est vrai.
_ Toutefois, depuis, je te sais être parti de nombreuses fois au combat, exécuter diverses missions. Et à ton discours de l’instant, je ressens bien que tes agissements ne sont plus autant raisonnés qu’antan. »
Les deux alliés arrivèrent au bord d’un précipice en bas duquel les disciples d’Albior s’exerçaient.
Ceux-ci, tout en bas, furent interpellés par le reflet du soleil sur la Cloth de l’homme qui accompagnait leur professeur.
Parmi tous, curieux et aveuglé, Shun baissa sa garde un instant, ouvrant une brèche que Spica s’empressa d’exploiter pour le renvoyer visage contre terre.
June courut immédiatement le relever : « Shun ! Tu n’as rien de cassé ?! »
Anikeï le réprimanda aussitôt : « Combien de fois faudra-t-il te dire de ne pas baisser ta garde même lorsque tu combats un camarade ?! La confiance aveugle que tu portes à tes adversaires finira par te jouer des tours. »
Mais le futur Saint d’Andromède n’y entendait rien. Il restait fasciné par la vue de ce chevalier qui l’éblouissait et dont il n’arrivait pas à bien distinguer les traits.
Reda, venu féliciter Spica pour sa victoire, s’empressa d’être condescendant : « Notre maître reçoit régulièrement des visites de Saints de haut rang venus tout droit du Sanctuaire ! Il a mené de grandes batailles et est respecté de tous. Quel dommage que tu offres un tel spectacle Shun ! A part décrédibiliser le travail accompli par Maître Albior, tu ne sers vraiment pas à grand-chose ! »
Plus haut, loin de se soucier des querelles ou des piètres prestations de ses élèves, Milo demeurait vexé par les propos outranciers d’Albior.
_ « Tu finiras par empoisonner tes élèves à tenir de tels discours, que tu le veuilles ou non.
_ Je te rassure, j’ai choisi simplement d’inculquer mon art. Pour le reste, je fais preuve de neutralité.
_ Faire preuve de neutralité c’est ignorer les ordres du Sanctuaire. Le Grand Pope est tout autant magnanime qu’il peut être intransigeant. Au point de faire punir ceux qu’il considère comme des traîtres par leurs proches. Un châtiment traumatisant destiné à marquer les esprits d’éventuelles mauvaises résolutions d’autres sujets.
_ Gouverner par la terreur. Le Grand Pope Shion nous a habitué à mieux par le passé. Son frère Arlès n’aurait-il pas une mauvaise influence sur lui depuis ces dernières années ?
_ Je crains surtout qu’avec une telle attitude, je ne sois envoyé un jour ici pour te punir en personne. »
Albior le regarda alors fixement : « Si ce jour venait alors, par respect envers notre camaraderie, je te demande de me combattre de toutes tes forces. »
Bien que droit, Milo grimaça : « Tu sais très bien que j’en serai incapable. Car je sais qu’au fond, tu demeures un Saint digne d’Athéna. Faire l’étalage de toute ma puissance serait alors te condamner sans retour possible. »
Albior repartit récupérer la Cloth de Cassiopée en tempérant : « Prions Athéna alors pour que ce jour n’arrive jamais. »
Milo le laissa prendre ainsi congé. Avant de repartir d’un bond jusqu’au Sanctuaire, sa récente discussion avec Aiolia et les doutes évoqués par Albior le perturbèrent : « Pourrais-je vraiment condamner Albior ? Après tout, il est vrai que le Grand Pope est très changeant. Par exemple, il accède à la dernière volonté d’Aeson alors qu’il a trahi par deux fois le Sanctuaire. La première fois en enfantant par deux fois avec une Saintia, un parjure envers Athéna. Et pire que tout, la seconde en se rangeant du côté d’Eris. Tout comme il semble accorder ses faveurs à Aiolia qui, même s’il est un vaillant frère d’arme, n’en reste pas moins le frère du traître. Comment garder les idées claires après tout ça ? »
Flashback

Perdu dans ses pensées, Rigel demeure dans le sillage d’Eris.
Il ne prête guère plus attention aux temples desquels s’écoule sous forme de cascades l’eau des ruisseaux, ni aux pierres blanches qui dallent le sol.
Tout ceci, il l’arpente maintenant depuis trois ans au milieu des Dryades et de ses camarades Fantômes, Aeson et Olivia.
D’ailleurs, c’est lorsque Kyoko arrive devant un banc de pierre entouré d’anciennes statues d’athlètes et penseurs, qu’elle ramène à lui le Ghost Saint. D’un demi-tour gracieux, elle lui offre un sourire semblable à ceux d’autrefois alors qu’elle était une Saintia et lui un Saint.
_ « Cet endroit n’est-il pas magnifique ?! Je veux parler du Jardin d’Eden tout entier !
_ Si, bien sûr, incline-t-il la tête. »
Elle achève la traversée de son Jardin d’Eden au sommet d’un escalier de pierre fort marqué par le temps.
_ « Il me tarde de pouvoir entrer en scène ! Maintenant qu’Aeson, Olivia et toi êtes à mes côtés, j’ai hâte de retrouver le dernier membre de ma famille. La seule qui n’a pas voulu se joindre à moi. Shoko ! »
Cette déclaration pleine de motivation rappelle à Rigel que les trois années passées ici à s’entraîner sont bien destinées à une Guerre Sainte plus sanglante que celle que le Sanctuaire croit avoir remporté contre Eris.
Pour preuve, ils débouchent tous les deux sur l’esplanade principale au bout de laquelle autour du trône d’Eris, trois silhouettes l’attendent.
Rigel n’avance plus, observant une distance que le rang de ces trois entités inspire.
La première d’entre elle, un homme de grande stature, plus mature que les deux autres, s’impose.
Blond, l’½il gauche dissimulé par une mèche de cheveu, il a un ton sévère : « Notre père Arès est-il enfin au courant ? »
Kyoko fait apparaître entre ses mains sa lance à quatre branches.
L’apparition de celle-ci réduit en cendres sa tenue contemporaine d’écolière et la remplace par sa longue robe pourpre.
A cet instant, plus que jamais, elle est Eris : « Tout est prêt Deimos ! »
Immédiatement, derrière l’athlétique Deimos, Harmonie, rejoint ses deux mains devant elle en entrelaçant ses doigts : « Alors après ces millénaires enfermés dans la Pomme d’Or, nous allons enfin pouvoir assister notre père. »
Harmonie a de longs cheveux blonds et onduleux. Ses yeux sont bleus.
Contrairement à ses frères, bardés des pieds à la tête comme de sanguinaires soldats, Harmonie est vêtue d'une robe blanche et d'un châle blanc.
Enfin, d’apparence plus juvénile que Deimos et Harmonie, Phobos n’apparaît pas moins dangereux. Loin de là. Sa joue gauche balafré et la malice qui se dégage de son ½il gauche donnent au troisième membre de la garde rapprochée d’Arès une allure menaçante.
L’½il droit caché comme son frère sous son diadème et sa mèche de cheveux bruns, il se précipite au-devant d’Eris : « Nous, les Ombres, la garde rapprochée d’Arès, allons enfin pouvoir être à ses côtés. Finis ces Berserkers qui n’étaient pour nous que des premières lignes. Ils ont causé assez d’échecs comme ça au Dieu de la Guerre en notre absence ! »
Eris passe devant lui sans s’en soucier et s’installe lascivement dans son trône de pierre.
D’un mouvement de la main, elle invite Rigel à la rejoindre.
Le Saint déchu passe au milieu des trois dieux sans leur adresser un regard et s’agenouille aux côtés de sa bien-aimée.
Eris conclut : « L’heure approche. Un peu de patience. En attendant, ça bouge à Asgard. Je viens de sentir le cosmos de Poséidon y interférer… »
 

Chapitre 81

Chapitre 81

En Argentine, devant le Disfrute, les secours ont fini de prendre en charge les prisonniers de Segador et la clientèle qui a fui les balles.
Les forces de l’ordre sont maintenant regroupées autour du night-club, prêtes à l’intervention.

A l’intérieur de la chambre, Vasiliás l’a bien ressenti.
Bien que désormais ce soit Peligra qui semble plus envieuse que lui, il devine que son instant de plaisir dans le monde contemporain doit cesser.
Peligra, elle, s’est levée sur la chaise pour coller contre le visage mal rasé de l’Américain, le bas de ses hanches.
Son souffle devient si envieux, haletant, qu’il étouffe à certains moments la musique qui résonne dans la pièce.
Décidée à accentuer son plaisir, elle redescend peu à peu pour s’accroupir contre lui, bassin contre bassin, et mimer un coït en remuant de plus en plus vite.
Ne sachant plus résister, elle se lève pour enfin ôter cet ultime habit qui la protégeait du dernier acte.
C’est à cet instant précis que Vasiliás choisit de se lever pour ramasser ses vêtements dans l’étonnement le plus complet.
_ « Que fais-tu ?!
_ Je n’ai plus d’argent. Le spectacle s’arrête là.
_ Tu m’as donné plus d’argent qu’il n’en fallait, je t’offre la suite de la prestation. »
Malgré toute l’envie qu’il contient, Vasiliás réajuste grossièrement ses vêtements : « Si ce n’est pas déjà le cas, dans les secondes qui suivent tu n’auras plus de patron. Cet établissement ferme ses portes ce soir. Profite justement de l’argent que je t’ai donné, pour te trouver un meilleur job où plus personne n’exploitera tes charmes. »
Sans même la regarder, il quitte la pièce et la laisse penaude.

A la sortie de la chambre, il reconnaît les sept surveillants de Segador étendus dans le couloir.
La porte de la salle privée de l’établissement est entrouverte.
Le corps de l’unique gardien survivant, celui au bras brisé, essaie de s’extraire en rampant. Souffrant, misérable, le videur laisse derrière lui sa trace dans son sang.
Vasiliás le regarde avec dépit : « Tu m’as l’air condamné. T’achever serait te rendre service. Autant te laisser crever comme tu le mérites. »
Il s’enfonce dans l’appartement aux murs tapissés de sang. (Reste 48683 caractères)
 

Chapitre 80

Chapitre 80

En Argentine, le night-club appartenant au chef de la pègre est peu à peu encerclé par les secours et les forces de l’ordre.
A l’intérieur, il ne reste plus que d’un côté Vasiliás et Peligra, et de l’autre Tromos et Segador.

Dans l’alcôve, où ils se sont enfermés, Vasiliás et Peligra dégustent à tour de rôle sur leurs corps le champagne qu’ils font couler.
Ils sont loin de connaître les détails des retrouvailles entre Segador et Tromos.
Leurs vêtements jonchent le sol, disséminés aux quatre coins de la pièce. La montre-gousset de Vasiliás, d’ordinaire si chère à son c½ur, abandonnée dans la poche de son pantalon qui traine à ses pieds.
Ne gardant que leurs sous-vêtements pour barrière à la concrétisation des envies qu’ils suscitent l’un chez l’autre, ils poursuivent leur corps à corps endiablé.
A genoux contre le Berserker assis, Peligra ne cesse d’appuyer sa poitrine en allant et venant sans cesse contre sa taille. Ouvrant même parfois sa bouche comme pour accueillir à travers son boxer blanc l’intimité sacrément manifestée de Vasiliás…

A quelques mètres de là, au fond du couloir, les bras ballants, Segador abandonne sa mine enjouée.
Un à un, les os de ses doigts puis de ses poignets, avant ceux de ses épaules et de son coude, ont été brisés.
Ses yeux à l’agonie devinent à la fouille qu’opère Tromos dans son bureau, que sa torture ne fait que commencer.
Brandissant d’un tiroir une pince, le colossal Argentin se congratule déjà des futurs résultats de ses sévices : « Que penses-tu que je puisse t’arracher avec ça une fois que je t’aurai ôté chacune de tes dents ? »
Puis, en refermant le tiroir, il trouve une manivelle dans celui du dessous : « Oh ! J’ai comme l’impression qu’il sera plus amusant de percer lentement tes genoux avant, pour ne pas que tu craches trop de sang après t’être fait opérer le râtelier ! »
L’odieux personnage change très vite d’attitude.
Désormais anxieux, Segador est défiguré par la folie qui symbolise la souffrance qu’il n’arrive même plus à hurler tant il s’égosille…


En Grèce, au sommet d’une falaise qui surplombe Athènes, Kyoko grimace après sa dernière gorgée d’alcool.
_ « Le champagne a vite réchauffé !
_ Le temps passe très vite. D’ailleurs j’aimerai que tu reprennes le récit de tes exploits avant que Vasiliás et Tromos ne reviennent de leur escapade et suspectent quoi que ce soit te concernant.
_ Bien, bien… »

Flashback
Sur l’Utérus, la structure complète cédait peu à peu depuis qu’Aiolia avait brisé le c½ur de l’arbre nourricier.
Les catacombes avaient déjà cédé.
Les étages suivants se désagrégeaient tour à tour.
Dans l’un d’eux, alors que l’édifice s’écroulait tout autour, Rigel restait les bras ballants. Tremblant, partagé entre la cruelle vérité et son amour indéfectible pour Kyoko.
_ « … Voilà la vérité sur ma naissance, mon adoption et l’absence d’Athéna du Sanctuaire. »
Une fois qu’elle eut fini, Rigel préféra s’adresser à son maître Aeson devenu Ghost Saint.
_ « Et c’est ainsi que vous espérez vous faire pardonner Aeson ?! En vous joignant à Eris ?! »
Sagement appliqué à expier sa faute passée, Aeson demeurait silencieux. Kyoko poursuivit alors.
_ « Je comprends que cela soit difficile à accepter pour toi. Ton monde s’écroule.
_ Non ! Penses-tu ! Mon maître, celui à qui je dois tout, que j’ai toujours cru être un modèle de droiture, a d’abord exécuté sa femme, renoncé à ses enfants, puis aujourd’hui il trahit Athéna ! Athéna qui d’ailleurs a disparu depuis onze ans du Sanctuaire ! Un Sanctuaire qui m’envoie tuer la femme que j’aime qui n’est autre que la réincarnation d’Eris !
_ Mais tu en es incapable n’est-ce pas, s’approcha tout doucement Eris ?
_ Recule ! N’avance pas, dit-il en faisant marche arrière !
_ Pourtant je suis là, à ta merci, gorge déployée. Tu n’as qu’à prendre ma vie et rentrer dignement au Sanctuaire où tu seras un héros. Ne le veux-tu pas ?
_ Non ! Je me fiche d’être un héros au Sanctuaire ! Pas dans ce Sanctuaire là en tout cas ! Tout ce que je veux c’est que tu quittes le corps de Kyoko et qu’elle me revienne !
_ Mais je suis là, rigola-t-elle amoureusement. Kyoko. Eris. C’est la même chose. Nous ne sommes qu’une. Vivre dans le secret. Dans la menace d’être un jour découvert. Condamnés, par un camp rempli de menteurs. Pour une foi caduque envers une déesse pleutre, cachée et affaiblie. Tout ça peut disparaître en embrassant ma cause. En embrassant ces lèvres que tu connais tant… »
Arrivée à lui, Eris saisit dans ses mains le visage fuyant de Rigel, pour l’obliger à plonger ses yeux dans les siens.
Le regard de la jeune femme avait changé en effet. Il était plus sournois, ses traits étaient plus tirés. Mais dans le reflet de ses yeux, Rigel voyait encore Kyoko et leurs courses enfantines dans les prairies désertes du Sanctuaire, leurs baisers d’adolescents volés derrière un arbre, leurs étreintes lascives d’adultes au milieu des fleurs d’été.
Sa gorge était nouée, sa bouche sèche.
Dans le dos de sa bien-aimée, honteusement agenouillé, son maître ne bougeait pas d’un pouce et lui rappelait tout ce en quoi il a cru. Il constata alors combien il fût idiot d’être gêné du crime qu’il commettait en s’énamourant d’une Saintia qu’il avait détourné du droit chemin dans un Sanctuaire mensonger, dirigé par un imposteur.
Seulement, son combat contre Jaguar lui remémorait la lâcheté des Ghost Saints, mus d’intérêts personnels, renonçant à leur honneur.
Le goût du sang et du conflit d’Eris qu’on leur apprend dès l’enfance au Sanctuaire et la menace que ferait peser Kyoko sur le monde le hantèrent aussi.
Pourtant, à bien y réfléchir, les hommes de Gigas sur lesquels elle lui ouvrit les yeux quelques minutes plus tôt ne valaient guère mieux. La sentence subie par Olivia, la mère de son amante, ne pouvait faire croire que le Sanctuaire était un lieu idéal, destiné à protéger un monde de bonté. Enfin, toutes ces légendes horribles à propos d’Eris étaient contées par son maître Aeson. Un maître qui abandonna ignoblement sa famille.
Tous ces sentiments s’entremêlèrent une fraction de seconde, le temps qu’il prenne sa décision et qu’il remonte ses bras à son tour pour caresser le visage de sa bien-aimée.
En plein conflit avec ses tourments, il profita de son approche pour descendre ses mains du visage de Kyoko jusque dans son cou….
Il commença à serrer fort.
Aussitôt, Aeson se releva mais, alors qu’elle pliait en arrière sous le poids de l’étreinte de Rigel, Kyoko tendit le bras pour empêcher son père d’intervenir.
Pris de sanglots, Rigel murmurait à répétition : « Je suis désolé, je suis désolé, je suis… »
Bientôt Kyoko était couchée sur le dos, le visage bleui, la langue gonflante.
Sa vue gondolée par les larmes empêchait Rigel de parfaitement distinguer la mort venir à sa compagne.
Lui non plus ne respirait plus. Il y mettait tant de force, tant d’opiniâtreté, qu’il retenait son souffle.
C’est lorsqu’il distingua les yeux révulsés de Kyoko qu’il fut frappé de terreur.
D’une aspiration profonde, il relâcha sa prise et chuta sur son postérieur avant de reculer à terre de dégoût.
Ses yeux étaient grands écarquillés, son visage pris de spasmes. Il regardait ses mains meurtrières avec effroi, bien qu’il savait qu’il n’avait pas été capable d’aller au bout de son geste.
Le rire sarcastique de Kyoko le lui confirma.
Elle se redressa lascivement et rigola de plus en plus fort.
_ « Je savais que tu en étais incapable. Ta culpabilité et le sentiment d’avoir été trahi par tout ce en quoi tu as cru sont plus forts.
_ Tout ce en quoi j’ai cru, toi y compris, vociféra-t-il.
_ Tu te trompes. Je ne cherche pas à te duper. Ma proposition est intéressée mais sincère. Tuer le temps dans tes bras en attendant que tu combattes pour moi, qu’on le fasse chez Athéna ou ici, où est la différence ? Entre nous, rien ne changera. Pour le monde, rien ne changera. Eris ou le Sanctuaire, il est voué à la destruction. Sauf que tu as la possibilité de disparaître ici et maintenant, ou de le vivre à mes côtés. »
Indécis, Rigel n’osa pas la dévisager davantage. Jusqu’à ce qu’un heurt traversa la pièce et frappa Eris par surprise en plein abdomen, l’obligeant à s’écrouler. Faisant bondir Aeson jusqu’à elle.
Soudain, depuis l’angle de la pièce d’à-côté, Olivia apparut. Elle suivit la direction empruntée par le coup qui toucha Eris à l’instant.
_ « Olivia, grinça des dents Aeson qui se mit en garde ! »
Toutefois, Olivia titubait en se tenant sa poitrine, percée, et en agitant d’un signe négatif la tête afin de manifester son innocence avant de s’écrouler. Elle était incapable de parler en raison du flot d’hémoglobine coagulée qui fuyait sa bouche.
Derrière elle, la Cloth en miettes, le masque brisé sur la moitié inférieure du visage, Mayura traînait la jambe, déterminée.
Elle crachait du sang elle aussi lorsqu’elle conjura à Rigel de se ressaisir.
_ « Ne l’écoute pas Rigel ! Ses paroles sont empoisonnées ! »
Pensant Kyoko meurtrie par l’attaque surprise de Mayura, Rigel avançait à genoux en direction de son amante.
_ « Non, scanda-t-il ! Tu ne sais pas toute la vérité ! »
Passant devant Olivia, Mayura fut soudain retenue à la cheville par sa main.
_ « Sache que malgré ma liaison avec Aeson et la naissance de mes filles contre la voie chaste des Saintias que j’ai choisi trop jeune, mon amour et ma dévotion pour Athéna étaient sans faille, confessa Olivia. Lorsque je fus découverte, emprisonnée, torturée puis condamnée, je n’ai cessé de la prier jusqu’au dernier instant. Mais elle ne m’est jamais apparue. Même lorsque le Pope me fit arrêter. Lorsqu’il laissa Gigas et ses hommes de mains me passer un à un, plusieurs fois par jour, durant des semaines de détention, sur le corps. Même lorsqu’il délibéra sur mon sort, nommant le père de mes enfants comme bourreau. Elle ne m’est jamais apparue. Je ne priais pourtant pas pour moi. Je priais simplement pour le salut de mes filles. Je lui demandais juste de veiller sur elles. Mais rien. J’allais mourir avec une profonde désillusion. Et tu sais qui m’a répondu ? Eris. Seule Eris me vint. Dès lors que je sentis un coup sec derrière ma nuque puis le néant. Pendant que ma tête roulait au sol devant les pieds d’Aeson et sous ton regard Mayura, mon amertume fut saisie aux portes des Enfers par Eris en personne. Elle fut la seule à m’entendre. »
En écoutant cela, Rigel fut davantage décidé à prendre Kyoko dans ses bras pour inspecter sa blessure.
_ « Les lois du Sanctuaire sont strictes et cruelles, afin que ses représentants soient justes. Car d’eux dépendent justement la paix et les libertés dont nous nous privons au profit du reste du monde, protesta Mayura.
_ Je vais te dire un secret, poursuivit malgré tout Olivia. Ce Sanctuaire si rigide que tu défends. Ce Sanctuaire donneur de leçon, modèle de vertus. Par qui crois-tu qu’il soit tenu ? Allons, n’as-tu pas remarqué depuis ma mort ce symbole à tête de mort parcouru d’un reptile ailé tatoué sur plusieurs soldats athéniens. Cela a commencé à se répandre un an avant ma mort. Le Pope qui m’a condamné, qui a accepté ma torture, qui t’envoie en guerre contre des dieux mineurs pourtant peu menaçants. Il n’a rien du Grand Pope qui nous envoyait en missions de prévention dans les domaines annexés. Le Grand Pope Shion n’est plus. Pas plus que son frère Arlès. Le Pope depuis onze ans est un imposteur. Et cette Athéna pour qui tu es prête à tuer ma fille aujourd’hui n’est pas là-bas !
_ Tu mens, dit Mayura en se défaisant d’un mouvement de jambe de l’étreinte d’Olivia, et je vais te le prouver maintenant, s’élança-t-elle vers Kyoko ! »
Le choc qui s’en suivit fut si brutal que les murs du hall furent inondés de plasma.
Aeson, devancé, resta statufié, maquillé de sang.
Ce sang roulait sur le visage de Kyoko et était absorbé par sa robe écarlate.
Incapable de progresser davantage, désabusée par la couardise de son camarade, Mayura se laissa tomber à genoux, les bras le long du corps, ne pouvant retenir les gerbes d’hémoglobine qui jaillissaient de sa trachée.
Devant elle, bras encore rigide, main raide et doigts tendus au bout desquels des flammèches scintillaient, Rigel murmura : « Ignis Fatuus… Je suis désolé Mayura… Mais ton obstination même face à la vérité ne peut avoir raison de la femme que j’aime. »
Alors qu’il venait de lui trancher la gorge, Rigel tourna le dos à Mayura.
Il refusa de regarder sa bouche démasquée tenter de happer l’air, dans un ultime instinct de survie.
Agonisant d’asphyxie, le cosmos de Mayura parvint malgré tout à dessiner un Paon d’or par-dessus elle… 

Sur terre, dans la forêt qui délimite le camp des femmes Saints, les derniers éclairs du Thunder Claw de Geist cessaient de grésiller dans l’atmosphère.
Aveugle, calcinée, Emony s’écroula dans l’herbe avant de devenir une fleur.
Epuisée, Geist s’appuya contre la roche où Emony était prisonnière pour ne pas s’effondrer.
Une voix connue, étouffée sous un masque, la congratula.
_ « Félicitations ! Tu as vaincue une Dryade et pas des moindres. »
Geist observa venir depuis l’extérieur Marin dans sa Cloth d’argent.
Néanmoins, la mercenaire n’en était pas plus rassurée : « Marin ! Ton renfort ne sera pas de trop ! Une Dryade vaincue fane. Regarde donc celle-ci. »
Devant elles, Emony bourgeonnait, poussait, devenait de plus en plus colorée.
De fleur, elle devint une plante resplendissante.
Immédiatement, les femmes se mirent en garde.
Lorsqu’elle eut éclos dans sa Fane, Emony n’était plus une enfant.
Elle était devenue femme.
Ses yeux maquillés de contours rendaient son regard plus dangereux et s’accommodaient à merveille avec l’émanation provocante de son cosmos.
Désormais dépourvus d’épaulettes, ses longs bras nus présentaient un galbe envoûtant, rappelant le charme dont aimaient jouer ses aînées Dryades.
Néanmoins, Emony paraissait toujours aussi cruelle et déterminée à en juger le sourire et le regard psychotique qu’elle balançait tour à tour à Marin et Geist.
_ « Je vois que nous avons une invitée, s’adressa-t-elle à Marin sur qui elle fit tomber une pluie de lobélie. Tu espérais que cela m’empêcherait de me venger du mal que tu viens de me faire, asséna-t-elle dans une onde de choc envoyée sur Geist. »
Cette dernière fut repoussée contre la pierre, impuissante.
Marin voulut lui porter secours mais ce fut vint, ses jambes flageolaient déjà. Autour d’elle, virevoltaient des papillons, qu’elle n’avait pas remarqué jusqu’alors.
_ « Nightmare Scheme, prononça Emony. Mes lobélies, semblables à des papillons tombent sur toi puis te recouvrent. Ces fleurs vont se servir de ton corps comme de la semence pour pousser jusqu’à se repaître entièrement de tes forces. »
Ainsi, les papillons se posaient sur elle et de chaque papillon naissait une nouvelle pousse.
Emony abandonna donc Marin, condamnée, et partit rejoindre sa principale rivale.
D’un coup de pied retourné, elle plaqua son talon contre la gorge de Geist pour la tenir à sa merci contre la roche.
_ « Quand as-tu pu déployer sur Marin ta technique, sans que nous n’y voyons rien, demanda d’une voix étouffée Geist ?
_ Ah ! Je ne t’avais pas prévenu ?! Disons que les lieutenants de Mère ont tous le pouvoir de rivaliser avec au moins vos Saints d’argent. Pour ma part, j’ai toujours trouvé grossier de faire preuve d’une grande démonstration de force à moins d’y être obligée. Et tu m’y as obligé, écrasa-t-elle davantage la gorge de son adversaire. Maintenant, tu vas mourir lentement pour ça ! »
Dans le dos d’Emony, les lobélies continuaient d’éclore. La mousse au sol était maintenant recouverte et tout autour de Marin des fleurs gagnaient sans cesse du terrain. Si bien que le bleu de leurs pétales irradiait derrière la Dryade de la Méchanceté.
Il se reflétait dans le masque de Geist derrière lequel la mercenaire avait le blanc des yeux rempli de vaisseaux sanguins éclatés, mourant d’asphyxie.
_ « Comment est-ce possible que les lobélies poussent encore, cessa son étreinte Emony. Je n’ai jamais rencontré d’adversaire détenant une telle source de cosmos. Elle parait infinie ! »
Inconsciemment, Marin se releva malgré les racines épaisses gorgées d’énergie qui la clouaient à terre jusqu’alors.
Epuisée, Geist se laissa glisser contre le sol, ne soupçonnant pas non plus une telle réserve d’énergie chez sa camarade.
Sans même se défaire des sangsues végétales qui la consumaient, la Saint accrut volontairement son cosmos. Si fortement que les tiges grossirent à s’en faire dégorger de sève et que les pétales s’arrachèrent des bourgeons, incapables qu’ils étaient de contenir tant de puissance.
C’est là qu’elle recroquevilla son coude droit pour prendre plus d’élan, avant de tendre son poing à la vitesse de la lumière vers Emony : « Ryu Sei Ken ! »
Déclenchée plus rapidement que d’ordinaire, l’Attaque de Météores se changea en faisceaux lumineux qui s’entrecroisèrent et martelèrent Emony dont la Fane éclata par endroit.
La Dryade reçut ainsi près de cent millions de coups en une seconde sans avoir pu les anticiper.
Elle fut projetée contre la roche, par-dessus la tête de Geist, et retomba derrière elle avec la pierre changée en vulgaires cailloux.
Epuisée, vidée, Marin profita de son élan pour s’écrouler devant Geist.
_ « Marin… Marin, la secoua tant bien que mal la mercenaire…
_ Ca va Geist… Je n’ai simplement plus aucune force… Cette Dryade a vidé toutes mes ressources… C’est un miracle que j’ai pu les réorienter contre elle…
_ Quelle dommage pour vous, se releva derrière elles Emony furieuse ! »
Le visage menaçant, défigurée par la colère de l’échec, elle était maquillée du sang qui perlait de son cuir chevelu où son bandeau avait été arraché par l’impact.
Surplombant les deux alliées, elle élança son bras pour les achever lorsqu’elle fut contrée inopinément par la pointe du pied de Shaina.
D’un saut acrobatique, la Saint d’argent d’Ophiuchus arriva à leur secours.
_ « C’est mon tour de t’en faire voir de toutes les couleurs, décréta l’Italienne qui partit à l’assaut !
_ Encore une femme Saint qui fanfaronne ! Je vais te remettre à ta place ! » 
Shaina balança ses griffes de façon horizontale.
Emony esquiva grâce à une roue arrière pleine de grâce.
L’Ophiuchus anticipa son point de réception en arrivant depuis les airs talons en avant.
La Dryade para avec son avant-bras gauche mais sa Fane déjà entamée par Marin se fendit davantage sur le coup.
Perturbée, elle laissa Shaina poursuivre son acrobatie en tournant sur elle-même pour la cogner en pleine tempe d’un coup de pied retourné.
Emony évita de peu en s’abaissant. Elle prit même l’avantage en se redressant plus vite que Shaina ne retombait sur ses jambes pour la cogner du poing en pleine cuisse et ainsi lui contracter les muscles.
Ne tenant plus que sur une jambe, Shaina eut du mal à ne pas céder de terrain sur la série de coups de poings que poursuivit Emony.
Elle pivota légèrement au dernier instant pour la laisser être emportée par son élan et espéra contre-attaquer en se retournant à une des vitesses les plus rapides parmi les Saints d’argent du Sanctuaire : « Thunder Claw ! »
Tandis qu’elle laissa depuis les airs ses Griffes de Tonnerre retomber, Emony réussit à faire volte-face à temps et rasa le sol de son poing pour remonter en direction de Shaina, portant un coup dans le sens inverse de celle-ci : « Ton amie a déjà utilisé cette attaque contre moi, elle n’a plus de secret pour moi. Innocent Glumness ! »
Un violent coup de poing contre celui de Shaina, suivi d’une multitude de coups approchant la vitesse de la lumière, brisa la main de Shaina, annihila sa technique et la pilonna jusque haut dans les airs.
Tandis qu’elle retombait en direction du sol tête la première, Emony chargeait à nouveau de son autre poing : « Tu m’as l’air robuste toi ! Je vais m’assurer que tu ne te relèves jamais en te plongeant dans un éternel cauchemar ! Lunatic Bind ! »
Contre toute attente, ce fut Geist qui devança Emony en apparaissant devant elle : « Cette fois c’est moi qui connaît déjà cette technique ! Thunder Claw ! »
Geist la frappa à l’épaule avant même qu’elle n’ait eu l’occasion de déployer totalement son bras.
Le heurt à bout portant explosa la Fane à hauteur de la clavicule et arracha l’épiderme de tout son biceps à la Dryade.
Pendant ce temps, Marin réceptionna Shaina afin de lui éviter une chute fatale.
_ « On a eu chaud, confessa Marin.
_ Néanmoins, même si j’ai pu gagner son bras gauche, elle garde sur nous l’avantage de la vitesse, déplora Geist qui reculait jusqu’à elles.
_ Et elle semble connaître toutes nos techniques, ragea Shaina meurtrie.
_ Pas tout à fait, corrigea Marin. Il nous reste une chance. J’ai une idée. Ecoutez bien… »

Plus loin, à l’intérieur du camp, tandis qu’Erda extrayait Rebecca des branches qui leurs étaient tombées dessus, Mito tentait de voler au secours de chaque camarade.
Hélas, pour une élève rescapée, une autre tombait dans son dos par les griffes des Dryades ou la gueule du bunyip.
_ « Ca va aller, prononça-t-elle essoufflée à la dernière de ses amies qu’elle venait d’extirper d’un ennemi. »
Elle ne se rendit même pas compte que le temps qu’elle tourne la tête, cette camarade secourue fut aussitôt décapitée par l’adversaire suivant.
L’instant d’après, une Dryade frappa du plat du pied derrière le genou de Mito pour le lui faire mettre à terre.
Une seconde arriva alors pour la frapper de volée en plein visage et l’envoyer choir au milieu de quatre de ses alliés Dryades. 
Ce fut alors que les quatre guerriers d’Eris furent retenus dans leurs mouvements par une bourrasque qu’ils ne parvinrent pas à surmonter.
Bandeau violet, kimono pourpre, Shinato arriva à son tour en libérant tout son cosmos.
Juste après, Xiao Ling suivit l’élève de Mayura. Elle vint relever Mito afin qu’elles se regroupent toutes les trois auprès d’Erda et Rebecca.
Par petits groupes, disséminés dans le camp, il ne restait qu’une quinzaine d’élèves qui survivaient tant bien que mal.
Shinato et Mito se tenaient déjà en garde.
Xiao Ling tremblait en faisant le tour d’elle-même au milieu de ce charnier. Rebecca, qu’elle était venue retrouver, était plus morte que vive. Son héroïne du passé était impuissante dans ce présent apocalyptique.
Malgré la perte de son bras, Rebecca, avec l’aide d’Erda, devança les jeunes femmes.
_ « Toutes ces femmes… Ces filles… Ces enfants… Elles avaient foi en moi, déplora la Saint en voyant tomber sur les cadavres les graines scintillantes de l’Utérus… Je les ai trahis…
_ Ne dites pas de bêtises, l’implora Erda qui essaya de la tirer en arrière pour chercher la retraite ! Vous êtes notre guide ! Nous devons nous replier maintenant !
_ Erda a raison, renchérit Mito. Nos forces sont divisées, affaiblies et en minorités. »
Rebecca détacha de son omoplate son foulard imbibé de sang qui retenait à peine l’hémorragie de son bras amputé.
_ « Oui, je sais, Erda a raison, lui tendit Rebecca le tissu. Vous devez battre en retraite. Les Dryades seront à votre portée une fois le bunyip vaincu. »
Elle se jeta sans crier garde contre le monstre.
_ « Maître, hurla de désespoir Erda !
_ Nous devons l’aider, convainquit Shinato une Mito déjà prête à la suivre ! »
Erda se joignit à eux, laissant Xiao Ling incapable de la moindre réaction.
Alors qu’elle s’élançait pour frapper la première, Shinato s’interrompit d’elle-même, prise d’un profond malaise au moment où elle perçut depuis les cimes le cosmos de Mayura décliner. Elle devina le sort de son maître sur l’Utérus.
De son côté, après avoir surpris ses élèves, se présentant à l’arrière de Bunyip, Rebecca répéta son précédent arcane : « Burning Lava Rain ! »
Pris à revers, Bunyip sentit ses pattes arrière s’écrouler, martelées et brûlées qu’elles étaient par les météores de laves que Rebecca libérait de son bras droit.
Son cosmos aussi vert que sa Cloth brilla au firmament avant de chanceler.
_ « Rebecca donne tout ce qu’il lui reste, se reprit Shinato !
_ Nous devons à tout prix la sauver, s’obstina Erda ! »
Erda se jeta vers son maître avec inconscience. 
Mito, voyant un tentacule de Bunyip fondre sur sa bien-aimée, dévia la trajectoire d’Erda qui, l’espace d’une fraction de seconde, resta suspendue dans les airs.
Coupable d’avoir agi sans retenue, Erda se retrouva à observer son sauvetage par Mito en étant impuissante.
Obligée de fixer la sentence irrévocable qui se produisit sous ses yeux.
Comme si cela durait une éternité.
Si long que Xiao Ling eut le temps de passer ses mains devant ses yeux.
Et pourtant, si net et cinglant, qu’Erda n’entendit pas le son déployé de sa gorge en criant le nom de Mito lorsque le fouet de Bunyip trancha en deux, de l’épaule gauche à la hanche droite, celle qu’elle aime, dans un claquement vif et percutant.
Erda roula au sol en première, perdant son masque.
Le tronc de Mito en second.
Ses jambes ensuite.
Le bras tremblant, Rebecca succomba au désespoir en voyant une de ses meilleures élèves vaincue.
La croupe au sol, Bunyip abattit un tentacule sur la Saint de Cassiopée.
Un second tentacule voua le même sort à Xiao Ling.
Contre toute attente, alors que tout semblait perdu, Shinato les dévia en libérant sous la forme d’une bourrasque son cosmos.
Dans son dos, l’emblème de l’Oiseau de Paradis, sa constellation protectrice et dont l’armure était déjà promue à Apodis, irradié d’un cosmos orangé.
Les appendices de Bunyip fendirent le sol en deux à côté de Rebecca et Xiao Ling, épargnées grâce à Shinato.
Cependant, les bras écartés de parts et d’autres, Shinato ne perçut pas un troisième tentacule qui lui perfora l’abdomen depuis le dos, sectionnant en deux sa colonne vertébrale.
Le craquement de ses os fit frémir Xiao Ling qui, de panique, remplie d’adrénaline, se jeta finalement à corps perdu dans la bataille.
Esquivant le quatrième et le cinquième tentacule, elle vit sa route barrée par une douzaine de Dryades. N’écoutant que son courage soudain, elle repoussa la première d’un coup de pied retourné, écrasant du tranchant de la main le larynx du second, enfonça du plat de l’autre main la cage thoracique du troisième, avant d’être submergée par la dizaine restante…
Cet acte de courage, galvanisa les dernières apprenties qui la suivirent dans une ultime tentative de révolte contre les Dryades pour venger Shinato venue héroïquement sacrifier sa vie.
Mito était à peine consciente, incapable de happer l’oxygène, sentant ses intestins se déverser.
Traînant au sol jusqu’à elle, Erda serrait fort dans son poing le foulard de Rebecca.
Le tentacule tombé à côté du professeur reprit sa liberté de mouvement maintenant que Shinato était suspendue en l’air par un autre appendice. Il enroula Rebecca et la conduisit vers sa gueule.
L’animal désormais rampant, le train arrière démantibulé par l’arcane de Rebecca, se hissa sur ses pattes avant.
Bunyip laissa d’abord tomber Shinato, encore vivante, dans sa gueule.
A peine la chair de l’apprentie au contact de sa langue, il croisa sa dentition, broyant le corps, quitte à faire pendre de sa gueule un bras et une jambe de la malheureuse.
La gueule baveuse de chair et de sang, puante de cadavres en putréfaction, Bunyip répéta son geste à l’attention de Rebecca, résignée.
En levant les yeux vers elle, le visage bleui de larme, Erda vit la mine déconfite et blafarde de celle qu’elle a toujours admirée, du jour où elle l’a extirpée de sa condition misérable jusqu’à présent où elle l’a fait grandir et devenir une femme forte.
Tandis que Bunyip lâcha d’en haut sa proie pour l’engloutir toute entière, Erda refusa de s’avouer vaincue.
D’un bond rageur, les bras croisés devant elle, au milieu des cris et des pleurs de ses condisciples tombant tour à tour, elle réunit ce qu’il lui resta de force et imita la technique de Rebecca qu’elle admirait depuis tant des années : « Burning Lava Rain ! »
Frappé à l’arrière par la Pluie de Lave Brûlante, bien que moins impressionnante que celle de Rebecca, Bunyip garda la gueule grande ouverte pour libérer un cri de souffrance.
Condamnée à chuter au fond de cette gorge caverneuse et puante, Rebecca transmit alors son cosmos chaleureux et bienveillant à Erda : « Erda… Ma petite Erda… Comme tu as grandi… Comme tu es devenue forte… Guide tes camarades qui auront survécu… Deviens une Saint digne et respectée… Deviens-le grâce à cette dernière technique que je n’ai pas eu le temps de t’enseigner ! Greatest Eruption ! »
Sombrant tête la première, Rebecca devint alors une boule de lave qu’engloutit malgré lui l’animal.
Ardente à s’en consumer elle-même, elle phosphorait depuis l’intérieur de Bunyip au point d’en être visible depuis l’extérieur par les spectateurs de la scène.
Pris en étau, Bunyip écarquillait ses quatre yeux rouges en luttant contre l’avancée de Rebecca qui lui brûlait l’½sophage après lui avoir déchiré la glotte.
Donnant tout ce qu’il lui reste, Erda n’abdiqua pas. Elle frappait toujours l’arrière de l’animal pour l’empêcher de lutter en son for intérieur contre la progression de Rebecca.
Réalisant le sacrifice de Rebecca, elle accrut son cosmos à son paroxysme au point que celui-ci dessina derrière son dos Cassiopée, l’emblème de son professeur.
Au même instant, achevant son treizième adversaire, Xiao Ling arriva pied en avant contre le flanc de Bunyip, là où sa collerette ne couvre pas le reste de son corps.
Bunyip en eut alors le souffle coupé, incapable de contenir en son sein plus longtemps La Plus Grande Eruption, attaque ultime de Rebecca.
Bunyip recroquevilla sa tête entre ses épaules et replia ses pattes avant contre sa poitrine alors qu’il tombait sur le flanc.
A l’intérieur, la lumière de Rebecca était si flamboyante qu’on voyait les organes de Bunyip à travers lui.
En boule, martelé par Erda et rongé de l’intérieur par Rebecca qui n’était plus qu’un amas de chair en fusion, Bunyip implosa.
Balayant la surface de viscères au liquide gluant et verdâtre.
Soufflant plus loin Xiao Ling et Erda.
Couchant au sol les dernières apprenties et les Dryades.
Pliant en deux les arbres qui délimitaient le champ de bataille.
Faisant céder les derniers vestiges du camp qui tenaient encore debout.
Bunyip était vaincu.
Au prix de nombreux sacrifices.
 
De l’extérieur du camp, la détonation laissa pantois tous les supporters athéniens.
Mal à l’aise depuis qu’il avait senti une perturbation dans le cosmos de Mayura peu avant, Mirai se tenait la poitrine de douleur, bouleversé après la disparition soudaine du cosmos de Shinato.
Personne ne parlait.
Le silence de mort qui planait au milieu du camp après l’explosion, avait eu raison de ses alentours également.

A l’intérieur du camp justement, pendant que les survivants, femmes ou Dryades, reprenaient leurs esprits, une ligne dorée traversa l’horizon.
Le silence qui suivit l’implosion assourdissante de Bunyip permit d’entendre enfin retentir un claquement de doigts.
Aussitôt, le sol se déchira.
L’enfer s’en échappa.
Des feux follets jaillirent des entrailles du centre d’entrainement. Ils emportèrent, sans distinction de camps, les âmes des survivants, incapables du moindre réflexe … 

Plus haut, sur l’Utérus, Rigel redressait Eris étonnamment bien remise du coup porté par Mayura.
Au-dessus de leurs têtes, le plafond s’effritait. Le niveau du dessus les menaçait. Il commençait à s’écrouler.
Aeson, lui, portait assistance à Olivia.
Le Saint d’argent de la Coupe, désormais Ghost Saint, était dérangé par le Paon d’or que s’obstinait Mayura à faire briller dans ses derniers instants.
_ « Que… Que fais-tu, s’enquerra Aeson ? Serais-tu… Serais-tu entrain d’alerter les autres Saints !
_ Ce n’est rien, le rassura Eris, l’Utérus a été détruit de toute façon. Tout est voué à disparaître ici.
_ Dans ce cas, par respect envers la Saint qu’elle fut, je vais mettre un terme à sa douleur, conclut-il.
_ Non, lui interdit Olivia en lui retenant le bras. Je veux la voir agoniser dans d’horribles souffrances. »
Rigel demeurait au sol interdit. Coupable d’avoir trahi Mayura, il fixait avec maladresse Kyoko qui apparaissait sous son vrai jour.
_ « Tu n’étais pas blessée… Tu n’avais rien… Depuis le début… Depuis notre arrivée ici, tu n’as pas accru ton cosmos pour ne pas être repérée puisque tu te baladais dans l’Utérus tandis que les Saints te croyaient au sommet. La destruction de l’Utérus était convenue. Seule comptait ta vengeance.
_ En effet. Néanmoins, rien de tout ce que je t’ai dit n’était faux, lui cueillait-elle à nouveau le visage. Cette étape est un succès, le Sanctuaire brûle partiellement. Mes graines ont éclos et seront semées au gré du vent mauvais pendant des années. Ma famille est presque au complet. L’Utérus a récolté suffisamment d’énergie pour faire ressurgir mon vrai sanctuaire, le Jardin d’Eden. Et tandis que je vais m’y retirer pour enfin y recouvrer toutes mes forces, le Sanctuaire va se remettre en me pensant vaincue. Joins-toi à moi, s’accroupit-elle jusqu’à coller son front au sien. »
A cet instant, depuis l’étage du dessus qui s’effondrait, Shaka et Naïra arrivèrent.
_ « Mayura, s’épouvanta aussitôt la Vierge avant que le sol ne se déroba sous ses pieds. »
Depuis le flanc, Milo et Apodis les rejoignirent aussi.
_ « Aeson, s’indigna Milo !
_ Rigel, s’inquiéta immédiatement Apodis ! »
Sur le flanc opposé, Georg et Juan titubaient côte à côte en se protégeant des débris constants sous le bouclier de l’Ecu.
Enfin, depuis l’orifice par lequel l’arbre matriciel traversait tout le sanctuaire, Aiolia surgit.
Dans son dos, l’arbre tout entier alternait entre la brillance dorée du Photon Burst du Lion et la noirceur de son écorce de plus en plus calcinée. Il menaçait d’imploser, emportant avec lui le reste de la ziggourat dans un nuage de cendres.
Chaque Saint envisageait de venir porter assistance à Mayura agonisante.
Mais le sol se fissura devant chacun d’eux. Les séparant les uns des autres. Laissant la Saint d’argent du Paon au milieu d’Eris, Olivia, Aeson et Rigel.
Se sachant condamnée, Mayura pencha alors sa tête sur le côté afin de voir une dernière fois Shaka. Elle tendit sa main, impuissante, manquant d’air, vers lui.
Incapable d’intervenir, le Saint de la Vierge ressassa alors en une fraction de seconde les derniers mots durs qu’ils s’échangèrent avant la bataille.
Au milieu de tout ça, ignorant l’ennemi et le sol qui s’effritait sous eux, Eris n’avait pas perdu des yeux Rigel. Elle avait gardé son visage entre ses mains et attendait de lire dans ses yeux sa résignation.
Partagé entre la condamnation de Mayura et le danger qui guettait Rigel, qu’il espérait encore pouvoir sauver, Apodis s’époumonait à crier son nom pour le sortir de sa torpeur.
Des failles du sol, des murs et du plafond, commençaient en sortir le restant des Dryades qui n’avaient pas pris part aux combats.
Elles se réunissaient tout autour d’Eris faisant définitivement abandonner aux Saints l’idée de pouvoir intervenir auprès de Mayura ou de Rigel.
Soumis par l’amour qu’il lui portait et la démonstration de force dont elle fit preuve, Rigel se laissa conquérir par l’approche du visage de Kyoko contre le sien.
L’Utérus éclata de part en part.
Volant en éclat.
Morceau par morceau.
Rigel pleura de joie de pouvoir embrasser à nouveau celle qu’il aimait. Il passa sa main derrière sa tête pour appuyer son baiser passionné afin qu’il ne s’arrête jamais.
Ce geste en fit tomber le long de son corps ses bras à Apodis.
Ses camarades baissèrent tous la tête, abattus.
_ « Tant de souffrances endurées pour voir ça, pesta Aiolia. »
Seul Shaka resta figé vers Mayura. Il avait rouvert ses yeux désormais embués de larmes. Elle avait cessé d’essayer de respirer. Son cosmos ne brillait plus.
Autour d’elle, les Dryades espérant échapper à la mort étaient de plus en plus nombreuses. Elles pullulaient.
Entre elles, le sol s’ouvrit encore. Il laissa Mayura tomber dans le faisceau de lumière qui en sortit, faisant disparaître son cadavre dans le néant.
Eris se libéra enfin du baiser de Rigel et exposa à la vue de tous le filet de sang qui fuyait ses lèvres.
Tous découvrirent alors Rigel à genoux, la tête penchée en arrière, s’étouffant dans son propre sang qui jaillissait de ses entrailles.
Les Saints comprirent alors qu’il n’y aurait plus d’autre chance de mettre un terme à tout ceci.
Shaka, yeux toujours grands ouverts, les enjoignit tous. Il s’adressa à eux par télépathie : « C’est maintenant ou jamais ! Nous devons terrasser maintenant Eris afin d’être sûrs qu’elle meurt emportée dans l’explosion de l’Utérus en compagnie de ceux qui nous ont trahis ! »
Tandis que Rigel tombait à la renverse, mort d’un baiser empoisonné, tous les Saints puisaient dans le restant de leur cosmos.
Les effluves dorés des Saints d’or, argentés des Saints d’argent, blanches de Naïra et orangées d’Apodis, s’unirent toutes haut dans le ciel pour former un dôme dont la pointe de cosmos retomba au-dessus de la tête d’Eris et ses hommes.
La déesse dégaina son sceptre à quatre branches pour dresser un bouclier contre ces émanations.
_ « Maintenant, s’élança Milo, Scarlet Needle Antarès !
_ Wing Jikan No Yoyu, suivit Apodis !
_ Typhoon Bullet, invoqua Naïra !
_ Astral Gravitation, frappa Juan !
_ Geistig Blitz, déclencha Georg !
_ Lightning Bolt, libéra Aiolia !
_ Tenma Kofuku, conclut Shaka ! »
Encerclés par des déferlantes de cosmos, Eris n’angoissa guère.
Derrière elle, Aeson ramassait le corps de Rigel.
_ « N’ai crainte, le rassura sa déesse, il s’agissait du baiser de la renaissance. »
A cet instant, Rigel rouvrit les yeux.
Il eut dans le regard le même flou que celui qui habitait Aeson depuis sa résurrection.
L’Utérus implosa au moment de l’impact de tous les arcanes.
Le choc fut tel que le bouclier d’Eris se corroda de part en part.
Soufflés par les explosions successives, les Saints furent incapables de voir les Dryades être emportées par les salves lumineuses au milieu desquelles elles disparaissaient de leurs champs de vision.

Une onde de choc si puissante fit alors trembler le sol terrestre sur toute sa surface. Ebranlant ainsi le monde contemporain.
Un bruit sourd détonant assourdit la Grèce entière tandis qu’un éclat rougeoyant illumina une fraction de seconde le quotidien des Grecs avant qu’un large manteau nuageux, en réalité la poussière de l’Utérus et du temple, ne couvre le ciel européen tout entier.

Au Sanctuaire, la lumière puis la détonation de la destruction de l’Utérus parvinrent.
Les Athéniens sautèrent de joie dans tout le domaine.
Autour de la forêt, les spectateurs s’échangeaient quelques sourires rassurés. Hormis Mirai qui gardait un mauvais pressentiment.

Dans la forêt, Emony guettait le ciel.
Elle ne paraissait pas inquiète malgré la disparition du cosmos d’Eris.
Elle essayait de replier les doigts de son bras gauche mutilé, en vain.
Abandonnant l’idée d’y avoir recours, elle arracha un morceau de tissu noir qui habillait son abdomen pour bander son bras ballant contre son corps et laisser son nombril à l’air.
_ « Bien, mon seul bras droit devrait suffire à vous anéantir. Je vois que vous avez une idée derrière la tête, mais je demeure plus rapide et je connais toutes vos techniques. »
Devant elles, les femmes se tenaient déjà en position après avoir écouté le plan de Marin.
_ « Tu es bien présomptueuse alors qu’Eris vient d’être vaincue, ricana Geist.
_ Tu es seule désormais et une même attaque ne peut marcher deux fois contre un Saint, l’avertit Shaina.
_ Et tu as déjà utilisé toutes tes techniques contre nous, ajouta Geist.
_ Naïves, pouffa Emony… Mon Innocent Glumness invoqué au paroxysme de ma puissance sera si rapide et puissant qu’il vous sera bien égal de savoir en quoi consiste l’arcane. Un seul coup que vous ne parviendriez pas à esquiver vous sera fatal. »
Soudain, les trois femmes furent saisies en même temps d’un étrange pressentiment.
_ « Le camp, s’inquiéta Geist.
_ Tout à coup… Tous les cosmos ont disparu, confirma Shaina. »
Marin, au centre, restait silencieuse : « Maudites soient les Dryades. Malgré la destruction de l’Utérus, elles auraient réussi à nous porter un coup fatal ?! Le temps presse. Le Ku Ken. Avec cette technique je peux faire croire que je porte un coup. Si je le déclenche en premier, en simulant le Ryu Sei Ken, j’obligerai Emony à dégainer aussitôt pour contrer et nous avoir toutes dans le champ de tir. »
Elle pivota légèrement vers Geist tout en accroissant ce qu’il lui restait de cosmos : « Tu es prête Geist, il faut que nous soyons parfaitement synchrones. »
Geist hocha la tête d’un geste d’approbation.
C’est alors que Marin s’élança, poing détendu pour lâcher ses météores.
Emony cria déjà victoire : « C’est pitoyable ! Regroupées comme vous êtes, c’en est trop facile ! Innocent Glumness ! »
Frappe déployée à son tour, défigurée par la joie de la victoire, Emony relâcha tout son cosmos en ravageant le paysage.
Ses coups de poings balancés à une vitesse proche de celle de la lumière pilonnèrent l’horizon, arrachèrent la végétation et les vestiges de la Grèce Antique.
Le nuage de poussière levé l’empêchait de voir les corps démantibulés de ses victimes sans que cela ne l’incite à interrompre.
Toutefois, un violent pincement à la nuque lui fit perdre l’usage de ses jambes.
_ « Eagle Toe Flash, murmura Marin retombée en pic pied droit en avant depuis le ciel dans son cou.
_ Thunder Claw, prirent en étau et en ch½ur Geist et Shaina ! »
Tandis qu’Emony eut la colonne vertébrale brisée sur ce coup du lapin de Marin, Shaina lui planta de sa dernière main valide ses griffes en plein sommet du crâne, lui brisant ainsi son diadème, et Geist en plein pubis, transperçant la ceinture de sa Fane.
Chacune poursuivant son geste, Shaina de haut en bas, Geist de bas en haut, les Griffes de Tonnerre s’entrecroisèrent et déchirèrent verticalement et profondément Emony. Brisant sa Fane, s’insinuant dans sa chair, lacérant son visage. 
A genoux, entourée des trois femmes, sa gorge arrachée ne parvenant à remplir ses poumons d’air tandis que par gerbes régulières son sang fuyait ses plaies, Emony aspirait dans un douloureux râle. Ses paupières arrachées laissaient crédules ses yeux rougis par le sang.
Marin lui apporta alors la raison de sa défaite : « Tu étais persuadée de ta victoire et nous y avons contribué en te laissant admettre que tu étais plus rapide et que tu connaissais toutes nos techniques. Sur le premier point tu avais l’avantage en effet. Sur le second, tu m’as sous-estimé. Il me restait deux techniques non employées. Le Ku Ken est un coup illusoire. J’ai simulé le Ryu Sei Ken que tu connaissais déjà pour engager les hostilités et te faire dégainer. Sauf qu’au même moment, Geist utilisa le Phantom Genwaku Ken pour maintenir une image rémanente de nos positions. En réalité, nous avions déjà quitté nos places en poussant nos cosmos à leurs paroxysmes. Ton Innocent Glumness que tu as lancé avec suffisance n’a rien fait d’autre que de frapper le vide. J’étais au-dessus de toi, prête à retomber en piqué. Geist et Shaina sur chacun de tes flancs, à attendre que mon Eagle Toe Flash que tu ne connaissais pas et ne pouvais pas voir venir te désarçonne pour t’achever de leurs deux techniques, certes connues, mais mortelles et désormais imparables pour toi. »
Marin lui tourna le dos tandis qu’elle glapissait.
Succombant, sa peau flétrissait, elle commença à faner pour de bon.
Geist, cruelle, la coucha au sol d’un coup de pied en pleine poitrine pour qu’elle suffoque dans son sang.
Enfin, Shaina resta à la voir agoniser en la blessant psychologiquement davantage : « Certaines Dryades ont peut-être le niveau des Saints d’or. Mais toi tu n’en fais pas parti. »
Malgré la douleur et la vexation, Emony resta un sourire aux lèvres. Elle pensait : « Le Jardin d’Eden… Notre diversion a donc permis sa résurgence. Tu as réussi Mère… Ma mission fut un succès… »
Le vent balaya la fleur pourrie Emony, tandis que Shaina rejoignait tête baissée ses alliées qui ne pressaient pas le pas. Toutes les trois avaient senti qu’elles ne trouveraient que désolation dans ce qui restait du camp des femmes Saints…
Flashback

_ « Je suis désolé de t’interrompre Eris, la coupe Mars, mais il va nous falloir conclure ton récit sur le chemin du retour. Je sens que mes hommes en ont bientôt fini en Argentine.
_ Très bien. Une petite marche ne me fera pas de mal, répondit elle friponne. Tu ne seras pas déçu de découvrir ce qui se passa réellement au camp des femmes Saints… » 
 

Chapitre 79

Chapitre 79

En Argentine, dans le night-club, Tromos est aux portes de sa vengeance.
En poussant la porte gardée, il débouche enfin sur un grand bureau. Celui-ci dispose d’un mur fait de télévisions retransmettant la vidéosurveillance de l’établissement.
Affalé dans son siège en cuir, le propriétaire du Disfrute n’en revient pas : « Je ne pensais vraiment pas que tu arriverais jusqu’ici. C’est lorsque tu as vaincu facilement le monstre dans la cave que j’ai commencé à avoir des doutes… »
L’ignoble individu dévoile enfin son visage à Tromos instantanément saisi.
_ « … Tu as gagné, achève sa phrase le chef de gang. Je t’engage ! Je vais faire de toi un homme riche. Tu auras tout ce que tu veux.
_ Tu… Tu n’as pas changé, reste un instant bouche-bée Tromos devant lui. Hormis quelques rides, tu restes le même que dans mes pires cauchemars. Un visage crapuleux, chauve avec tout le crâne tatoué, un menton carré et des dents pointues.
_ On se connaît ?!
_ Il y a vingt-et-un ans. Je n’étais qu’un petit garçon, frêle et innocent comme tous les enfants de huit ans. Un petit village dans lequel tu instaurais déjà la terreur. Tu obligeais les gens, de courageux ouvriers travaillant pour nourrir leurs familles, à te verser presque l’intégralité de leurs revenus, sous prétexte qu’ils vivaient dans une citée dont tu te prétendais maître. Tu te servais de cette zone résidentielle pour commencer tes basses besognes. Prostitution, trafic de drogues… »
Toujours confortablement installé dans son siège, le malfaiteur s’allume une cigarette en se sentant glorifié par cette histoire.
_ « Oh tu sais, j’ai commencé jeune à monter mon empire. Je ne me souviens pas de toi.
_ Moi je me souviens de cette nuit où tu es venu en personne punir mon père, qui n’avait pas assez d’argent pour payer ta taxe clandestine. J’ai été le seul à avoir eu le temps de me cacher sous le lit de mes parents. Je me souviens de tout. De tes hommes battant mon père. Le laissant tout juste conscient, pour qu’il puisse te voir violer ma mère et déshonorer mon frère avant de les égorger. Je me remémore encore l’incapacité de ma petite s½ur à répondre, lorsque tu lui as demandé lequel des jumeaux d’un mois elle voulait sauver, alors que tu lui promettais qu’elle aussi s’en sortirait si elle choisissait. J’ai encore ses cris gravés dans ma mémoire lorsque tes hommes ont abusé d’elle, alors qu’elle n’était qu’une enfant pendant que tu m’étais le feu au berceau des deux bébés qui pleuraient car ils mourraient de faim. Et chaque jour, je me vois impuissant, à essayer de tirer mon père immobilisé pour le sauver du feu qui se propageait dans la maison. Il n’y a pas un instant, pas un soupir, durant lequel je ne me maudis pas d’avoir échoué et d’avoir laissé cette peur de petit garçon me forcer à prendre mes jambes à mon cou pour échapper au même sort que les miens.
_ Mouais, recrache insensible Segador sa fumée… Une de mes aventures parmi tant d’autres. Loin d’être la plus palpitante !
_ Comment, s’avance le poing serré Tromos ?! »
Contre toute attente, de chaque côté du large bureau, tapis dans l’ombre, sortent deux derniers hommes de main.
_ « Je te présente les plus habiles tueurs de mon gang. Ils manient aussi bien tous les types d’armes que les styles de combats à mains nues. Je sens que tu vas m’offrir un spectacle beaucoup plus digne que celui de ta mère et ta s½ur dont je ne me souviens pas. »
Ces mots suffisent à faire basculer définitivement Tromos dans cette soif de justice subjective que véhicule Vasiliás.
Sans même laisser le moindre agent réagir, il les terrasse en les tranchant tous les deux en deux à hauteur du buste.
_ « Le Berserker de la Royauté, notre Roi, a raison. Le mal doit être éradiqué à la source. Et je vais m’en charger avec toi. »
Malgré sa fin imminente et inévitable, Segador se permet de se moquer de ses anges gardiens qui gisent au sol : « Les pauvres. Ils devaient manquer d’entraînement ! »
Cette indifférence ne démotive pas l’Arèsien, au contraire.
Il bondit sur Segador et se retient du mieux qu’il peut pour ne pas le tuer d’un seul coup.
En le callant bien dans le creux de son siège, il lui assure : « Je vais te réserver les pires tourments que tu as commis. Et je te promets, moi, homme de parole, que tu perdras ton sourire narquois avant de rendre ton dernier souffle. »
La cigarette lâchée sous le choc, Segador continue d’afficher sa mine sournoise alors que le mégot lui brûle la cuisse, comme pour annoncer que la tâche sera ardue… (Reste 49148 caractères)
 

Chapitre 78

Chapitre 78

En Argentine, dans le night-club, en dehors de la chambre où Vasiliás se livre à un jeu salace, Tromos est arrivé d’un pas décidé à l’étage.
Les yeux fixes et froids, il toise les sept veilleurs de Segador qui gardent la porte au bout du couloir.
Un premier tend la main pour barrer le passage : « Qui t’es toi ? Pas un pas de plu… »
Il n’a même pas le temps de finir sa phrase que Tromos lui retourne le bras, lui brisant ainsi tous les os. Ses camarades ne sont pas assez rapides pour dégainer leurs armes que le colossal Berserker zigzague entre eux pour les tuer d’un seul coup en frappant uniquement un point vital différent pour chacun.
Avant de s’enfoncer dans la dernière pièce, il ramasse sur un des hommes de main une machette attachée à sa ceinture. Il s’en sert pour planter à hauteur de chaque rein le premier rempart au bras brisé : « Meurs en souffrance. C’est tout ce que tu mérites. »


En Grèce, Kyoko continue de raconter à Mars les détails du retour d’Eris sur Terre il y a trois ans.
Sur la terrasse du café où elle a fait germer chez un couple les graines de la discorde, elle narre ses exploits en ignorant la dispute qu’elle a initié chez ses voisins de table…

Flashback
Au Sanctuaire, à proximité du camp des femmes chevaliers, le mètre quatre-vingt-dix-sept de Voskos s’était recroquevillé pour concentrer son cosmos face aux Dryades qui venaient d’éclore.
Le Saint de bronze du Bouvier chargeait de ses cent quatre-vingt-trois kilos une Dryade masculine : « Katapatisi Agria ! »
L’adversaire subit le Piétinement Sauvage de plein fouet et retomba, les os rompus, à côté d’une autre Dryade déjà vaincue et qui fanait avant de finir en poussière.
_ « Et de deux, se glorifia le rustre ! »
Dans son dos, Xiao Ling reculait sous la pression de deux autres qui profitèrent que leurs deux alliées restantes barraient la route au rustre chevalier.
_ « Fraîche, se lécha les lèvres une Dryade…
_ Innocente, pressa le pas la seconde ! »
Xiao Ling était acculée contre un bosquet.
Lorsque la première se jeta sur elle, par réflexe, elle passa ses mains par-dessus sa tête pour saisir le tronc et, appuyant sur ses jambes, grimpa plus haut pour esquiver le coup.
Enchevêtrée dans l’arbre, la Dryade n’eut pas le temps de s’en dépêtrer que Xiao Ling retomba sur elle d’un salto, le talon droit lui fendant le haut du crâne.
Son premier assaillant vaincu, la Chinoise n’en demeurait pas plus rassurée malgré tout.
Le second faisait déjà face, plus incisif.
Avec quelques pirouettes et roulades, elle parvint à esquiver un moment, jusqu’à ce que l’ennemi finisse par planter ses griffes sur le bas de sa tunique, au niveau de l’entrejambe, la laissant à la merci de son autre main aux ongles acérés.
Démunie, elle ferma les yeux, attendant le verdict.
C’est alors que Voskos apparut dans le dos de la Dryade, lui attrapa l’arrière de la tête dans son immense pogne gauche et la lui éclata contre le sol, entre les jambes de la jeune femme fébrile.
Éclaboussée par un sang qui n’était pas le sien, Xiao Ling rouvrit les yeux pour faire face au regard inquisiteur de Voskos : « M… Merci… »
Sous leurs pieds, le sol tremblait des combats venant du camp des femmes chevaliers.
Derrière Voskos, les dernières Dryades fanaient. Le colosse n’en tira aucune gloire.
_ « Ne me remercie pas. Tu aurais dû parvenir à te défaire d’elle sans mon aide, demeura-t-il sévère. Surtout que tu es parvenue à en vaincre une.
_ C’était un coup de chance.
_ La chance… C’est comme le miracle dont parlait plus tôt le Seigneur Algol. C’est l’apanage des Saints. Nous créons notre chance. Nous accomplissons nos miracles. En surpassant nos limites. En brûlant notre cosmos. Tout à l’heure, tu es parvenu à défaire une Dryade. Tu as mêlé sang-froid, analyse tactique du terrain et technique de combat à laquelle tu as joins ton cosmos. Que tu l’ais brûlé inconsciemment ou non, il fallait au moins une once de cosmos pour parvenir à l’éliminer.
_ Peut-être, baissa-t-elle la tête penaude…
_ Je ne peux pas croire qu’une jolie jeune femme comme toi as traversé le monde pour venir jusqu’ici sans rencontrer d’embûches. Des gens malhonnêtes, mal intentionnés, tu as dû en rencontrer des dizaines. Pour t’en débarrasser, tu as dû surpasser ces gens, parfois équipés d’armes contemporaines. Certains chemins sont inhabités. Tu n’as pu voler pour te nourrir. Tu as compensé la faim en t’enveloppant de ton cosmos. Ou tu as chassé dans des lieux où seuls les grands prédateurs arrivent à se repaître. Ou peut-être les deux. Toujours est-il que c’est le cosmos qui t’a maintenu jusqu’ici.
_ Peut-être, balbutia-t-elle à nouveau. Mais pourquoi me dire tout ceci ?
_ Parce que nous sommes arrivés au camp, pointa-t-il du doigt le bosquet dont elle s’était servie plus tôt et qui marquait le début d’une dense forêt. Traverse la forêt et tu trouveras Rebecca. »
Dans son dos, des hurlements de souffrances et de terreurs accompagnaient les tremblements de terre et les secousses cosmiques.
_ « Mais… Mais… Je ne peux pas… C’est la guerre là-dedans…
_ Justement ! C’est pour ça que tu dois aller y porter ton aide ! Nous autres, hommes, ne pouvons fouler cette terre bénie par Athéna. La seule chose que je puisse faire c’est empêcher la retraite des Dryades que vous, femmes, allez vaincre à l’intérieur ! »
Xiao Ling aurait voulu se vautrer plus bas que terre.
_ « … Je… Je ne serai qu’un poids…
_ Un Saint n’est jamais un poids lorsqu’il risque sa vie pour défendre autrui !
_ Mais je ne sais même pas ce qui est en jeu dans cette guerre…
_ Rebecca, celle à qui tu dois la vie aujourd’hui, risque la sienne pour sauver des innocentes prises au piège à l’intérieur et vaincre une menace qui pèse sur le monde !
_ Je ne suis pas aussi forte que Rebecca…
_ Ton soutien lui donnera encore plus de forces !
_ J’en suis incapable… »  (Reste 50642 caractères)
 

Chapitre 77

Chapitre 77

En Argentine, le club où Tromos rendait sa justice s’est vidé.
Libéré du sous-sol miteux où ils étaient réduits à l’esclavage, enfants et opposants politiques sont déjà accueillis dehors par les secours. Ceux-ci, alertés par des voisins interpellés par les fusillades à l’intérieur de l’établissement, attendent les directives des autorités.

A l’intérieur, au rez-de-chaussée, Tromos slalome entre les cadavres des hommes de main de Segador et des victimes pris entre les feux nourris de leurs revolvers.
Le son des enceintes cogne encore dans la tête du seul rescapé au milieu de la piste de danse.
Il fait le tour de lui-même pour, d’une légère émanation de cosmos, détruire chaque caméra afin d’instaurer davantage de crainte aux mafieux qui attendent à l’étage.
Il est temps pour le Berserker de les rejoindre.

C’est justement en haut, au milieu du couloir surveillé au bout par sept gardes du corps, que Vasiliás a suivi Peligra.
Les immenses enceintes ajustées au mur leur ont épargné le moindre soupçon de ce qui a pu se tramer en bas.
Au moment de refermer la porte de la chambre vide où Peligra l’a conduit, l’Américain reconnaît l’apparence de Tromos, couvert du sang de ses victimes, arriver sur le palier pour aller à la rencontre de Segador.

Bien décidé à laisser son second agir seul, Vasiliás retrouve à l’intérieur de la pièce aux murs insonorisés la plantureuse danseuse qui l’assied sur une chaise.
Utilisant une télécommande, elle relance une musique plus engagée qu’en bas.
Perchée sur ses hauts talons, elle reprend là où elle s’est arrêtée.
Habillée de son unique boxer, elle se déhanche de nouveau. Cette fois-ci plus lentement, de manière féline.
Elle fait le tour de la chaise où est assis un Vasiliás subjugué, qui se contente de se laisser caresser par la peau chocolat, douce et parfumée de Peligra lorsqu’elle vient coller contre lui sa poitrine et ses fesses. Alors pour permettre à l’homme d’Arès d’apprécier davantage, elle glisse ses doigts entre sa peau et la lanière de son sous-vêtement, qu’elle laisse descendre très lentement en l’accompagnant jusqu’à ses pieds, offrant à son client la pleine vue sur son intimité dorénavant dissimulée sous une dernière ficelle de tissu avec laquelle elle joue encore.
Seulement, avant de l’abandonner, elle choisit de provoquer son riche client, à qui elle ôte la veste tout en remuant devant lui. Lorsqu’elle s’assoit sur ses genoux, elle tire sèchement sur sa cravate pour écarter en grand sa chemise haute couture, faisant voler tous les boutons.
Face à ce torse nu et athlétique, elle vient coller le sien. Puis, après avoir feint un baiser sur ses lèvres, elle se laisse descendre contre lui en se tortillant paresseusement.
Lorsque son visage arrive devant la fermeture de son pantalon, elle le lui desserre en tirant dessus pour le lui ôter en même temps que ses chaussures…


En Grèce, le serveur vient ramener un nouveau verre à Mars et en profite pour remplir la coupe de Kyoko.
Friponne, elle demande à la réincarnation de son frère : « Sais-tu pourquoi j’ai commencé à réveiller les Evil Seeds du couple voisin ? »
La moue qu’il fait, montre un certain désintérêt pour cette question, dû à l’empressement qui est le sien de connaître la suite des aventures qui ont eu lieu il y a presque trois ans.
_ « Notre serveur porte une Evil Seeds lui aussi. Et il s’avère que l’homme avec qui notre voisine a une liaison secrète est notre serveur. Que dis-tu si je fais éclore son Evil Seed a lui aussi ?
_ Seulement après que tu ais avancé dans ton histoire, lui dit-il en retenant son poignet…
_ D’accord, souffle-t-elle déçue… »  (Reste 60391 caractères)