Chapitre 30 - Un amour plus grand que l’amour

Sur la côte sud d’Yíaros, les travaux de réfections du port sous la chaleur étaient un calvaire si grand que la simple arrivée d’un vaisseau maritime, était une satisfaction bien grande. En effet, elle annonçait une coupure momentanée dans ces fours des enfers.
Il s’agissait d’un navire marchand, dont la cargaison allait d’avantage marquer la victoire athénienne chez Hébé mais aussi, et surtout, lier deux êtres que tout oppose dans ce conflit.

Et tandis qu’en Grèce deux êtres se rapprochaient, au Canada, les idéaux de chacun allaient en séparer deux autres.


Chapitre 30 - Un amour plus grand que l’amour


Sur Yíaros, au sud de l’île, sur le port :

22 juillet 1985.
Le vaisseau a déposé l’ancre sur le port et décharge sa cargaison sur un des premiers pontons enfin refait. Le drapeau du Sanctuaire s’agite au gré du vent depuis le mat du bateau.

Apodis a revêtu sa tenue et a fait appeler Anikeï et Carina à ses côtés pour accueillir les voyageurs.
Il s’agit là de marins venus du Port du Destin, en Crète, sur ordre du domaine sacré. Ils viennent livrer armes et tenues de gardes, semblables à celles que portent les soldats du Sanctuaire, afin d’enrôler les hébéïens dans la nouvelle milice de l’île.

Un messager achève la lecture du papyrus sur lequel sont notées les directives du Grand Pope :
Messager - " … et afin de poursuivre votre mission de rééducation de ce peuple insubordonné, j’exige que les hébéïens, formés par nos soins pour devenir les nouveaux gardiens de cette île, portent désormais la tenue officielle du Sanctuaire d’Athéna. Tout homme, portant encore, dès réception de ces biens, la tunique marine et les protections azures de la garde hébéïenne sera jugé pour trahison… "
Apodis est troublé par cette insistance du Pope, à vouloir à tout prix étendre sa domination sur le monde. Il se remémore leur première rencontre… (Reste 39136 caractères)
 

Chapitre 29

Chapitre 29

A l’extérieur de la petite bourgade d’Arviat, au Canada, dans la région de Nunavut, sur une route enneigée déserte, un homme atterrit depuis les airs jusqu’au parterre givré.
Il s’écrase la tête la première, le corps tuméfié et le visage ensanglanté.
Il rampe difficilement, en regardant derrière lui comme pour fuir l’animal féroce, responsable de son calvaire.
Celui-ci ne tarde pas à dévoiler son identité.
Un homme corpulent qui devance sept de ses semblables, aux cheveux longs et quasis étouffés par un casque noir, muni en son sommet d’une corne acérée, s’avance jusque sa victime.
Il est couvert d’une armure noire qui copie au détail l’armure de bronze de la Licorne et qui couvre ses vêtements sombres.
En se frottant sa grosse moustache il écrase du pied un contemporain vêtu d’un costume noir arraché.
_ « Est-ce bien ici que vit ton patron, lui réclame Ankoku Monoceros ?
_ Je vous l’ai déjà dit, notre directeur est très discret sur sa vie privée. La seule adresse que nous avons dans nos fichiers, est celle-ci, s’apitoie l’employé de bureau. »
Le chevalier noir de la Licorne lève les yeux en direction d’un homme recouvert d’une version ténébreuse de l’armure d’or des Gémeaux : « Ankoku Gemini, as-tu encore besoin de lui ? »
Le visage dissimulé sous son heaume, le Gémeaux maléfique répond d’une voix venue d’outre-tombe : « Non. N’oublions pas que nous devons rester discrets pour accomplir cette mission. Personne ne doit être capable d’identifier des chevaliers, qu’ils soient d’Athéna ou d’un autre dieu. Il en va de notre réhabilitation auprès du Sanctuaire. »
Comprenant très peu les propos de son chef, la Licorne Noire se gratte derrière la tête, secouant ainsi ses longues bouclettes qui tombent de son casque. Il regarde enfin sa victime et lui sourit bêtement : « Je n’ai pas tout compris à ce que raconte notre chef. J’ai seulement retenu qu’il fallait en finir avec toi. Alors… »
Sans même finir sa phrase, il soulève son énorme pied, qu’il abat sur le crâne du salarié de l’entreprise familiale de Vasiliás…
Observant cette scène macabre, les sept autres Ankoku Saints restent de marbre.
La Licorne, le Lynx, la Lyre, l’Aigle, l’Ophiuchus, le Sagittaire, le Scorpion et les Gémeaux… En un grondement de tonnerre, ils se dispersent aussitôt à l’orée de la ville… (Reste 44652 caractères)
 

Chapitre 28

Chapitre 28

Le soleil de plomb fait courber encore plus bas l’échine qu’à l’accoutumer à Gigas ce 22 juillet 1985.
Accompagné de Ptolémy Saint d’argent de la Flèche, il écoute le compte rendu des quatre mois écoulés depuis la victoire athénienne sur Yíaros.
Sévèrement dissimulé sous sa bure et son masque, Ptolémy parait moins souffrir de la chaleur que son supérieur.
Cachant ainsi à tous l’identité du fidèle messager du Pope, le Général et l’émissaire traversent le marché d’Honkios en échangeant d’un ton bas.

_ « … Et donc Shura et ses hommes prirent possession du Centre de la cité tandis qu’Apodis Saint de bronze de l’Oiseau de Paradis faisait diversion contre Baucis Alcide de la Biche de Cérynie à l’Est.
_ Brave Saint que cet Apodis. Le plan du Grand Pope lors de la fausse attaque de la Journée Sainte aura permis de le ramener dans le rang, se félicite Gigas.
_ En effet. Le lendemain matin, Aldebaran et le reste de nos cohortes assirent nos positions dans le Centre, obligeant Hébé et ses trois derniers Alcides à se retrancher dans son temple, le Parthénos. Des deux cents soldats athéniens conduits là-bas, la centaine ayant survécu s’installa partout dans les villages afin de remplacer la garde hébéïenne dont l’armée a été décimée. C’est là que vinrent prendre la relève quatre autres chevaliers de bronze.
_ Oui. La victoire acquise, le Grand Pope a préféré ramener auprès de lui ses forces. Shura, Aldebaran et Babel rentrèrent. Anikeï de Cassiopée, Carina de la Carène du Navire, Lena de la Boussole et, enfin, Taishi du Toucan vinrent compléter les équipes de Philémon du Lièvre et d’Apodis. Tout cela sous ton ½il avisé.
_ Absolument. Bien que lorsque l’heure de mon départ fut ensuite venue, Taishi n’était toujours pas parvenu à accomplir la mission pour laquelle le Pope l’a investi. Notre Grand Pope m’avait confié dans le courrier qui accompagnait l’arrivée de ces Saints de bronze que Taishi doit remettre à Hébé le bandeau prélevé sur le défunt Iphiclès Alcide du Lion de Némée et lui délivrer un message.
_ Atteindre Hébé n’est pas chose aisée. Ce que vous avez accompli sur l’île en si peu de temps est déjà miraculeux.
_ Pour cela nous avons pu compter sur la grande expérience de Lena et Apodis. Leur pratique des guerres passées en Egypte et en Inde et les leçons apprises auprès de Saints d’or lors de ces évènements ont facilité les négociations avec les Hébéïens.
_ La main mise athénienne plutôt tu veux dire, pouffe de rire Gigas ?!
_ La sagesse d’Hébé aura permis à Shura de vite obtenir sa réédition, tempère Ptolémy en souriant sous son masque. Elle a accepté la prise politique de l’île par Athéna en échange de la vie sauve du peuple hébéïen composé d’un millier d’habitants. Ainsi Shura n’eut pas de difficulté à déléguer à Apodis et Lena. Ils soumirent au peuple la reconstruction du port au Sud de l’île qui fut le théâtre des premiers affrontements sur Yíaros. Ainsi, en se montrant obéissant, les travailleurs reçurent des sacres afin de relancer le commerce sur l’île. Notre monnaie a instauré rapidement un climat de paix, en rétablissant un système de rémunération basé sur le mérite et surtout la possibilité pour le peuple affamé de vite pouvoir être à nouveau livré en vivres. Car en attendant, afin de soumettre par la faim le peuple, les rares récoltes étaient réquisitionnés par les athéniens. Nous les stockions dans le temple d’Héraclès où nos Saints ont établi leur quartier général après avoir chassé les représentants religieux.
_ Gouverner par la faim mais apporter rapidement la solution pour ne pas priver le peuple et éviter une insurrection désespérée fut bienvenue.
_ A raison de deux repas par jours, le peuple finit par trouver cela raisonnable. Il se déplaçait donc jusqu’à ce temple pour le rationnement. Et, nourri, contesta moins le couvre-feu qui interdit à quiconque de sortir de chez lui la nuit tombée, sous peine d’être immédiatement exécuté.
_ La raison d’un côté et la fermeté de l’autre, cette gouvernance mesurée a donc permis de vite se mettre le peuple dans la poche donc ?
_ Pas exactement non. Malgré l’investissement à la réfection du port, le civisme lors des rationnements et le respect apparent des règles de couvre-feu, de nombreux sabotages témoignant de la révolte du peuple hébéïen. Ces rébellions masquées continuent encore de mobiliser fortement l’armée athénienne en cette période d’occupation.
_ Ça n’est qu’une question de temps. L’éducation et l’instruction militaire sont désormais données en mixité dans l’ancien temple dédié aux femmes, le temple d’Héra, par des prêtres athéniens.
_ Oui, les responsables religieux hébéïens ont tous été remis à la vie civile et ont été ensuite mis à mort sur les places publiques après que nous ayons fabriqué de fausses tentatives de soulèvement afin qu’ils servent d’exemple pour les autres Hébéïens…
_ … et afin de faire disparaitre toute source d’une doctrine hébéïenne, précise Gigas. Sauf le Grand Cardinal Acis… » (Reste 59313 caractères)
 

Chapitre 27

Chapitre 27

Au Sud de l’île d’Yíaros, sur le port, le campement athénien est établi.
Sous la tente la plus imposante du camp, teintée de rouge et orné en son centre d’une statuette en or d’Athéna tenant Niké dans son bras, Aldebaran est attablé à un guéridon.
Un verre de vin dans la main droite, son casque aux cornes acérées maintenue dans la gauche, le Brésilien observe son homologue Shura.
Le Capricorne, un genou au sol, le casque sous le bras, termine de répéter les saintes paroles prononcées par un prêtre qui dirige ses mains au ciel en célébrant Athéna.
Après une demi-heure et trois verres, Aldebaran assiste enfin à la fin du rituel et se retrouve désormais seul à seul avec l’Espagnol.
_ « Je t’en sers un ?
_ Juste avant cette tentative ? Ça ne serait pas raisonnable.
_ Tu as raison Shura. Tu m’excuseras alors, mais j’avais besoin de ça pour tenir le coup avec la présence de ce prêtre, rit à pleins poumons Aldebaran !
_ Il est vrai que tu préfères prier seul et de façon plus succincte.
_ Athéna n’a pas besoin de grands discours, juste de fidélité. »
Devant leur tente, ils entendent les cliquetis d’autres armures qui se réunissent.
_ « Es-tu certain qu’attaquer si vite notre ennemi est une bonne idée, s’inquiète Aldebaran ?
_ J’aurai cru le comité d’accueil plus important sur le port. Cela signifie qu’ils n’ont plus d’hommes. Investir le Centre de l’île ne sera qu’une partie de plaisir, sachant qu’Apodis attirera l’attention sur lui en attaquant le Nord Est, tempère Shura.
_ Dans ce cas nous ferons comme prévu. A l’aube, je te rejoindrai au Centre de l’île avec nos hommes pour en prendre définitivement le contrôle. Seuls quelques soldats resteront sur le port pour veiller à ce qu’il n’y ait pas de tentatives de fuites des Hébéïens.
_ Il n’y a pas de raison qu’il y en ait. S’ils se montrent fidèles à Athéna alors ils vivront heureux sous notre occupation. »
Le drap de leur tente est ouvert par Babel qui ôte son casque et s’agenouille : « Seigneur Aldebaran ! Seigneur Shura ! Moi Babel Saint d’argent du Centaure vient vous informer que nos troupes sont prêtes. Philémon Saint de bronze du Lièvre a réuni quatre-vingt soldats près à suivre vos ordres Saint du Capricorne. Trente autres affûtent déjà leurs armes, pour vous suivre demain matin Saint d’or du Taureau. Les hommes restants sont déjà sous le commandement de Ptolémy Saint d’argent de la Flèche afin de veiller sur le port. »
Shura ajuste son casque et déclare : « Dans ce cas, ne les faisons pas attendre ! »
Il se retourne et serre fermement la main de son camarade Aldebaran qui lui sourit aimablement. (Reste 58304 caractères)
 

Chapitre 26

Chapitre 26

Au Sanctuaire, l’étroit passage secret qui joint les douze maisons du zodiaque est bien difficile à suivre en pleine nuit. Rien ne peut l’éclairer hormis la lueur de la lune.
C’est pourquoi, alors que le 7 mars 1985 s’achève, Gigas mène le pas depuis le palais du Grand Pope qu’il vient de quitter. Lui qui peut utiliser ce passage les yeux fermés, descend lentement les marches en compagnie d’une femme chevalier.
Cette femme, dont les longs cheveux noirs couvrent son masque à hauteur du front et tombent en fines mèches sur ses épaules, porte une Cloth qui couvre ses épaules et ses mains d’une protection violette, tandis que ses avant-bras, son buste et ses genoux sont d’un noir cristallin. Son bustier descend jusqu’à son nombril et libère sa jupe, couleur lilas. Dessous son court vêtement elle porte un cuissard et ses tibias sont protégés par des jambières violettes. Ses longues jambes sont agrémentées d’escarpins qui agrandissent encore son mètre soixante-dix-sept.
Gigas ne cesse de lui donner ses directives : « Votre bateau quitte Athènes demain matin pour la Crète. Vous voyagerez dans l’anonymat le plus complet. Vous vous rendrez ensuite au Port du Destin, où un navire de commerce du Sanctuaire vous conduira jusque Yíaros. Cette galère marchande a déjà été payée par le Domaine Sacré pour vous amener toi, ton élève Carina, Anikeï de Cassiopée, Taishi du Toucan ainsi que des vivres pour nos soldats… »
Les deux passent sur le flanc de la maison des Poissons où Aphrodite, tapis dans l’ombre veille au grain. Gigas s’agenouille tandis que la femme chevalier l’imite.
Aphrodite l’interroge néanmoins : « Dis-moi femme chevalier. Tu es déjà passé devant moi il y a une heure pour rencontrer le Pope et chaque fois j’ai ressenti un certain froid venant de toi… Serais-tu une de ces chevaliers des glaces ? Ou bien peut-être cherches-tu à me montrer une certaine hostilité ? »
Gigas se manifeste immédiatement confus : « Seigneur Aphrodite, en tant que Général en chef de notre armée le Grand Pope m’a demandé de conduire cette femme à… »
Aphrodite s’expose à l’astre lunaire afin d’arborer son armure d’or enserrée par sa cape ainsi que son magnifique visage. Il interrompt le vieil homme : « Merci Général Gigas mais je n’ai pas l’intention de laisser cette femme passer devant ma demeure sans qu’elle ne me présente plus de respect. S’agenouiller est une chose, ne pas répondre à ma question en est une autre. »
Immédiatement, un courant d’air glacial venu du bas des marches gèle les colonnes du temple des Poissons, ainsi que les cheveux grisonnants du général qui grelotte aussitôt.
Aphrodite riposte instantanément en dégainant une rose rouge qu’il projette en bas des escaliers.
La fleur fonce sur un mystérieux intrus qui a couvert les environs de givre. C’est seulement lorsqu’elle arrive contre son visage ombragé qu’elle se brise comme du verre après avoir été réfrigérée.
Aphrodite n’attend pas que son adversaire poursuive son ascension pour deviner de qui il s’agit : « Quelle charmante surprise. Je n’attendais plus que tu viennes me saluer depuis ton retour de Sibérie chevalier d’or ! Camus du Verseau ! »
Du bras, Camus écarte également sa cape pour présenter sa Cloth qui illumine les environs comme le fait celle d’Aphrodite.
Tenant son diadème dans la main gauche, le Français pointe son index droit vers la femme chevalier et déclare à voix haute : « Ça ira Général Gigas, je m’occupe de reconduire Lena, Saint de bronze de la Boussole à Honkios. Je vous remercie. »
Aphrodite ne dit rien, il laisse Camus descendre jusqu’à son palais tandis que Gigas reste pantois.

Aphrodite profite que Camus et Lena aient quitté les lieux pour déclarer futilement au sujet de Lena : « De toute manière je ne m’imaginais pas passer la nuit avec un glaçon. »
Cette boutade fait rire Gigas qui espère ainsi gagner la sympathie du Saint d’or. Aphrodite n’est pas dupe : « Allons vieillard ! Qu’attends-tu pour quitter ce lieu. Tu n’as plus rien à faire à l’approche de ma demeure. »
Apeuré, le général cesse de glousser et s’empresse de suivre la même direction que le Français et son amie Russe. (Reste 54230 caractères)
 

Chapitre 25

Chapitre 25

Au Canada, dans la région de Nunavut, contrastant avec le paysage reculé et glacial, un véhicule motorisé roule à toute vitesse sur les routes gelées de la ville d’Arviat.
La voiture rouge, modèle sport, quitte la petite communauté Inuit d’environ mille huit cent habitants qui représente quatre-vingt pour cent de la région de Nunavut.
Le bolide sort de la ville et fonce à toute vitesse à l’Est, en direction de la baie de Baffin.

Reliée à l’Océan Atlantique par le détroit de Davis, au Sud-Est, et à l’Océan Arctique par plusieurs passes, à l'Ouest et au Nord, la baie n’est navigable que trois mois dans l’année, car des masses de glaces flottantes et des icebergs dominent ce cadre magnifique.
 
En quelques minutes, le conducteur atteint une anse au milieu de laquelle il reconnaît un Canadien aux cheveux longs, épais et gris.
Loin des yeux innocents, l’autochtone croise ses bras et plie doucement ses genoux.
Derrière lui, les calottes glaciaires se brisent tandis qu’un effluve orangé émane de son corps.
 
Plus haut, sur la berge, une demoiselle aux longs cheveux blonds observe son petit ami s’exercer.
Malgré la température fort basse, ses jambes ne sont habillées que de ses longues bottes rouges qui remontent jusqu’au haut de ses cuisses, tandis que sa courte jupe en jean ne la réchauffe pas davantage. Son manteau de fourrure n’est même pas fermé et laisse sa forte poitrine être arborée dans ce maillot rouge décolleté qui ne descend pas plus bas que son nombril.
 
Le chauffeur sort enfin de son automobile, dont il ferme soigneusement la porte, pour ne pas ébranler la concentration du Canadien et ne pas attirer l’attention de la jeune femme.
Il porte un costume blanc avec de fines rayures argentées, des chaussures blanches et brillantes, une chemise gris métallisé et une cravate à peine serrée du même coloris que son uniforme. Ainsi, il est libéré de son col trop serré et laisse apparaître quelques griffes tatouées dans son cou. Son visage aux traits fins porte une barbe de deux jours aussi courte que ses cheveux qui couvrent d’à peine trois millimètres son crâne rasé.
Les quelques rayons du soleil qui se reflètent en ce 7 mars 1985 sur les glaces canadiennes font briller deux petits diamants que porte l’élégant observateur à chacune de ses oreilles ainsi que ses beaux yeux bleus qui scrutent les mouvements de l’inconnu.
Il sort de la poche de son pantalon une montre-gousset qu’il remonte par la même occasion.
Fixant les aiguilles de longues secondes comme pour constater que le temps s’est écoulé vite depuis son absence ici, il pense alors : « Il semble que Bian ait développé encore davantage son God Breath en mon absence. » (Reste 41960 caractères)
 

Chapitre 24

Chapitre 24

7 mars 1985.
Le premier acte s’achève sur Yíaros.
La victoire athénienne au Sud de l’île garde tout de même un goût amer. La disparition de Yakamoz ainsi que l’annonce du décès de Naïra qui a succombé aux blessures infligées par Baucis entachent cette première incursion.
L’atmosphère se rafraichit, le soleil tombe de plus en plus et la journée s’achève.

Au loin, proche du détroit, Shura somme à ses hommes de ne pas emprunter le chenal. Il a réajusté son casque sur sa tête après qu’avec du fil et une aiguille un soldat lui ait recousu le crâne.

Les Athéniens, après avoir positionné quelques sentinelles dans les montagnes, déblayent la côte.
Ils regroupent près de soixante cadavres hébéïens avec, dans le lot, l’Alcide Androgée.
Une bonne autre vingtaine de dépouilles n’a pas été retrouvée. Elles furent soit brûlées, soit ensevelies par les nombreuses avalanches.
Tandis que certains montent plusieurs tentes sur les flancs gauche et droit, d’autres creusent une fosse dans laquelle les morts sont lancés et brûlés.
La petite trentaine d’Athéniens décédés a droit aux honneurs du bûcher avec des sacres sur les yeux pour le passeur des enfers, alors que les religieux officient une cérémonie funèbre.
 
Aldebaran rejoint Shura en compagnie de Babel et Ptolémy qui sont désormais revenus à eux. Philémon a dans ses bras le corps de Naïra.
Shura comprend : « Voici donc notre première perte. Elle était chevalier. Avait-elle des camarades particuliers parmi les nôtres ? »
Ptolémy, pour une fois dépourvu de sa soutane et de son masque, restés sur le bateau, répond à son supérieur : « Seigneur Shura, elle était très appréciée de nos gardes au domaine sacré. Elle vivait dans la ville d’Honkios et participait à maintenir l’ordre à mes côtés dans la ville principale de notre cité. Le Seigneur Aiolia lui a sauvé la vie lors de l’invasion hébéïenne durant la Journée Sainte.
_ Dans ce cas Ptolémy, fidèle scribe de notre Grand Pope, tu rédigeras un billet à notre majesté pour l’informer de son décès et présenter nos condoléances au chevalier du Lion qui a été son sauveur. Dis-lui qu’elle s’est battue courageusement pour Athéna et qu’elle est décédée avec les honneurs. »
Ptolémy incline légèrement sa tête pour saluer la décision. Aldebaran annonce à Shura : « Ils ont enlevé Yakamoz. Ils souhaitent certainement faire des prisonniers pour les interroger ou les monnayer contre notre retrait de l’île. »
Shura sourit : « Enlever nos Saints n’est pas la meilleure façon d’obtenir des informations. Chacun sait que les chevaliers préfèrent mourir, plutôt que de trahir les leur. Nous, nous serons plus malins qu’eux, dans la mesure où nous ne perdrons pas de temps à interroger des captifs. Nos prêtres ont déjà effectué ici de nombreux pèlerinages et les lieux leur sont connus. »
Shura n’a pas l’air de se soucier du sort réservé à Yakamoz, celle avec qui il a passé d’agréables instants avant de débarquer sur l’île.
Aldebaran se retourne vers le Saint de bronze et les deux Saints d’argent : « Vous pouvez disposer maintenant chevaliers. Soignez-vos plaies, laissez vos armures reprendre des forces dans leurs Pandora Box et reposez-vous. Cette nuit, lorsqu’Apodis et ses hommes auront débarqué, nous commencerons à investir l’île. »
Les trois hommes quittent leurs deux supérieurs, Philémon rumine la disparition de Yakamoz pour laquelle il se sent responsable, Babel ne décolère pas de s’être fait avoir par Baucis pendant que Ptolémy, papyrus et plume en main, a déjà regagné le navire et a réendossé ses vêtements qui voilent son identité. (Reste 57039 caractères)
 

Chapitre 23

Chapitre 23

En mer, à l’approche de l’embranchement entre le Nord et l’Est de l’île d’Yíaros, le vent faiblit de plus en plus.
Les matelots rangent les voiles et les soldats rejoignent les marins pour pousser les longues rames, sous l’impulsion de Pullo qui hurle à la mort pour leur ordonner de se dépêcher.
Le soleil ne brille plus de la même intensité qu’au début de l’après-midi. Sa teinte est orangée et il est moins haut dans le ciel.
Apodis est perché sur le mat pour respirer l’air frais et se vider l’esprit.
Ainsi, il suit les combats qui se jouent dans le Sud d’Yíaros sous l’impulsion d’Aldebaran et Shura.
Cette Guerre Sainte lui rappelle celle qu’il vécut contre Arès, au moment de la bataille contre Cronos…
 
Flashback
Printemps 1979. Les premières lueurs du soleil furent aussi rouges que le sang qui avait coulé la nuit précédente des tentatives d’incursion d’Arès dans le Sanctuaire d’Athéna.
Les rayons matinaux traversaient les lucarnes faîtes dans les murs et vinrent chauffer le visage d’Apodis qui, en une semaine de formation expéditive, obtint le grade de soldat.
Lorsqu’Apodis entrouvrit les yeux, il reconnut Cliff se redresser sur la même couche que lui. En balançant son regard à droite puis à gauche, il distingua les deux femmes avec lesquelles ils passèrent la nuit.
A la veille d’une mort qu’il attendait avec impatience, Apodis s’était endormi avec les trois autres et recouvrait avec bien du mal ses forces, les muscles encore endoloris par les exercices de Pullo.
Afin de ne pas réveiller les deux femmes de petites vertus allongées sur le ventre, nues, les bras et les jambes écartées, Cliff chuchota à son camarade : « Allez Apodis, debout ! Il est l’heure. »
Le futur Saint de bronze enfilait ses vêtements grisâtres que portent tous les soldats et emboita le pas à Cliff qui souriait à l’idée de combattre pour le Sanctuaire. (Reste 47273 caractères)