Chapitre 84

Chapitre 84

Dans une des ailes réservées aux familles bourgeoises du Walhalla, à l’intérieur de ses appartements, Bedra de Edel, émerge doucement de cette nuit agréable, qu’elle a passé emmitouflée dans ses draps.
Malgré le réveil, elle paraît toujours aussi séduisante. Ses longs cheveux blonds soyeux et à peine dépeignés, ne gâchent en rien cette beauté que chaque homme rêve d’avoir à ses côtés au matin.

Ses yeux améthyste se tournent instinctivement de l’autre côté du lit, celui-ci est hélas déjà vide en ce matin du 23 mars 1987.
Très vite, son futur époux la rassure. Couvert de sa God Rob, casque sous le bras, Syd de Mizar admire le paysage depuis la grande fenêtre où il s’est posté : « Bientôt tu continueras à passer d’aussi agréables nuits que celle qui vient de s’écouler. »
Sa promise se penche légèrement et admire un temps moins capricieux que d’ordinaire. Hormis quelques flocons qui voltigent dans un vent relativement calme, le ciel paraît clément en ce jour à Asgard.
_ « Odin bénit déjà sa Majesté Hilda d’entreprendre notre conquête du Sanctuaire.
_ Alors c’est toi que la Princesse de Polaris a choisi ?
_ Oui. Je dois me rendre au Sanctuaire jauger la puissance des Saints qui protègent Athéna et, accessoirement, ramener sa tête si la tâche n’est pas trop ardue. »
L’engouement du Guerrier Divin n’est pas partagé par la belle des neiges : « Je suis surprise que tu prennes plaisir à ôter la vie d’une déesse qui nous a toujours été présentée comme alliée à Odin. »
Bien plus impulsif avec elle depuis qu’il a découvert sa liaison avec Bud, le God Warrior de Zeta s’emporte : « Parce qu’une divinité qui nous condamne à vivre ici dans ces conditions, est une alliée pour toi ?! Bien sûr, en restant au chaud à profiter des trophées de chasse de nos serviteurs, tu ne dois pas te rendre compte de la rudesse d’une vie ordinaire dans ces contrées ! Demande à Thor ce qu’il en pense. Interroge-le sur le nombre d’enfants morts le mois dernier à cause des conditions de vie déplorables ici ! »
Discrète, effrayée, Bedra se contente de murmurer : « Je suis simplement surprise qu’Hilda accepte soudainement de faire appel à la violence. Elle et sa s½ur abhorrent toute forme de haine. D’ailleurs, en parlant d’elle, où est Freya ? Que pense-t-elle de tout ceci ? Et le Seigneur Sigmund ? On dit que son frère fut nommé à sa place God Warrior ! »
Préférant s’épargner de longues explications, le second de Siegfried choisit de taire la mise au cachot de la cadette de Polaris. Il fixe son casque sur son crâne et déclare : « Qu’importe les moyens. Les Asgardiens souffrent depuis trop longtemps. Hilda me fait l’honneur d’être son messager. Il est convenu que je parte dès le lever du soleil. Je reviendrai victorieux au nom de notre futur mariage. Sous peu, tu épouseras un prestigieux Guerrier Divin sous le soleil grec. »
Il emprunte la sortie sans plus poser un regard sur la jeune femme qui cajole son corps nu dans ses draps. (Reste 62324 caractères)
 

Chapitre 83

Chapitre 83

Ce 22 mars 1987, parait semblable à n’importe quel autre jour au royaume d’Asgard.
Le vent glacial propage la neige. Elle tombe depuis des heures tout autour du Walhalla.
Chacun vaque à ses occupations, à l’exception près que celui qui accompagne la Princesse de Polaris ce jour n’est pas Siegfried mais Alberich.
Et c’est bien pour cela que Sigmund rejoint l’Autel du Destin où prie chaque jour Hilda.

Confuse après le trouble semé entre eux par Thétis, Hilda préfère s’éloigner ponctuellement de son bienfaiteur, pour permettre à de Megrez de redorer cette image qu’il a tant de mal à faire valoir.
Par précaution, conscient que son aîné, chef des armées d’Asgard, est appelé à devenir God Warrior un jour, Siegfried s’en est trouvé rassuré de pouvoir compter sur son frère pour garder un ½il sur eux.

Pourtant, en ce jour d’apparence ordinaire, une vaste secousse vient avertir les guerriers les plus alertes.
L’ensemble du domaine tremble l’espace d’une dizaine de seconde.
Renversant l’argenterie que Lyfia nettoie dans le grand salon.
Menaçant de plusieurs avalanches les promeneurs, comme par exemple Freya qui peut compter sur Hagen pour la secourir. Ou mettant en exergue les combattants les plus vaillants comme Balder le vagabond, ou Fenrir et sa meute.
Faisant s’écrouler les logis les moins bien lotis, que Thor maintient afin d’éviter à une famille toute entière d’être prise sous les décombres. Assisté de Syd il donne l’alerte aux plus démunis et évacue Helena et ses jeunes frères et s½urs.
Faisant choir sur son postérieur la cohorte qu’entraîne Héraclès, son supérieur, dans l’enceinte d’une caserne.
Inquiétant le malhonnête Fafner, encore impliqué dans une bagarre de taverne.
Brisant quelques vitres du palais dont les éclats auraient défiguré ses habitants, si Frodi n’avait pas été présent… (Reste 50551 caractères)
 

Chapitre 82

Chapitre 82
 
Sur la plus septentrionale des quatre îles principales de l'archipel du Japon, Hokkaido, se matérialise la silhouette de Kyoko.
Légèrement vêtue de sa jupe et de son chemisier, la jeune femme progresse dans le plus haut relief montagneux de l’île.
Alors que quiconque ne tiendrait pas une minute dans ce climat, elle prend le temps de progresser dans la tenue scolaire qu’elle a choisi pour rendre visite à Mars en Grèce.
D’apparence chétive, elle avance sans difficulté, caressée qu’elle est par les bourrasques de vent gelé, sur les sentiers sinueux.
Tout à coup, au-dessus de sa tête, le bruit de raie d’hélices perturbe son allégresse.
Un drone s’infiltre dans cette zone inhabitée et inexplorée depuis trois ans maintenant que le Jardin d’Eden a rejailli des entrailles terrestres.
En débouchant en sortie de forêt sur le flanc de la montagne, elle s’en amuse : « Ils ne comprendront donc jamais. »
A cet instant, morceau par morceau, l’appareil se disloque puis explose pièce après pièce.
Elle observe alors devant elle des vestiges de la Grèce Antique taillés à même la roche.
_ « Ils ne parviennent plus à accéder à ce lieu. Les barrières naturelles sont insurmontables. Alors ils tentent par leur technologie, sans jamais accepter qu’ils ne peuvent pas tout s’approprier sur cette Terre, d’atteindre ce lieu qui les rejette. La limite des hommes est atteinte là où le choisissent les dieux. »

Revenue de son escapade en Grèce avec Arès, Eris profite du soleil levé de ce 22 mars 1987 pour admirer en plein Japon de hautes colonnes de la Grèce antique. Elles érigent divers prieurés avec en sommet de flanc de montagne un temple plus imposant.
Son ascension commence en slalomant les monceaux de roches retournés par la résurgence du Jardin d’Eden où se mêlent piliers effondrés et pierres brisées.
Aussitôt, quelques Dryades aux Leaf noires et amarantes sortent des décombres pour prendre en étau la jeune femme jusqu’à ce que celles-ci reconnaissent leur déesse.
Toutes s’agenouillent instantanément tandis qu’un Ghost Saint apparaît.
D’un claquement de doigt il chasse les Dryades.
_ « Rigel, quel plaisir que tu viennes m’accueillir. »
Le Fantôme pose genou à Terre. Un voile flou couvrant ses yeux, Rigel, imposant dans sa Leaf d’Orion, démontre toute sa dévotion : « Quoi de plus normal Kyoko. »
En passant à côté de lui, elle lui caresse affectueusement le visage en forçant à hauteur du menton pour le forcer à se relever : « Rigel… Je t’ai déjà demandé de ne plus me nommer ainsi en ce lieu… »
Il la laisse passer devant et la fixe reprendre la route.
Son regard s’éclaircit alors, reprenant la vigueur qui était la sienne avant qu’Eris ne lui ôte la vie sur l’Utérus. A cet instant, lui reviennent les souvenir du meurtre de Mayura et du baiser mortel qui le firent rentrer dans le camp de la Déesse de la Discorde…
Il devina aisément l’affliction de ses anciens camarades il y a trois ans après la bataille sur l’Utérus… (Reste 52488 caractères)
 

Chapitre 81

Chapitre 81

En Argentine, devant le Disfrute, les secours ont fini de prendre en charge les prisonniers de Segador et la clientèle qui a fui les balles.
Les forces de l’ordre sont maintenant regroupées autour du night-club, prêtes à l’intervention.

A l’intérieur de la chambre, Vasiliás l’a bien ressenti.
Bien que désormais ce soit Peligra qui semble plus envieuse que lui, il devine que son instant de plaisir dans le monde contemporain doit cesser.
Peligra, elle, s’est levée sur la chaise pour coller contre le visage mal rasé de l’Américain, le bas de ses hanches.
Son souffle devient si envieux, haletant, qu’il étouffe à certains moments la musique qui résonne dans la pièce.
Décidée à accentuer son plaisir, elle redescend peu à peu pour s’accroupir contre lui, bassin contre bassin, et mimer un coït en remuant de plus en plus vite.
Ne sachant plus résister, elle se lève pour enfin ôter cet ultime habit qui la protégeait du dernier acte.
C’est à cet instant précis que Vasiliás choisit de se lever pour ramasser ses vêtements dans l’étonnement le plus complet.
_ « Que fais-tu ?!
_ Je n’ai plus d’argent. Le spectacle s’arrête là.
_ Tu m’as donné plus d’argent qu’il n’en fallait, je t’offre la suite de la prestation. »
Malgré toute l’envie qu’il contient, Vasiliás réajuste grossièrement ses vêtements : « Si ce n’est pas déjà le cas, dans les secondes qui suivent tu n’auras plus de patron. Cet établissement ferme ses portes ce soir. Profite justement de l’argent que je t’ai donné, pour te trouver un meilleur job où plus personne n’exploitera tes charmes. »
Sans même la regarder, il quitte la pièce et la laisse penaude.

A la sortie de la chambre, il reconnaît les sept surveillants de Segador étendus dans le couloir.
La porte de la salle privée de l’établissement est entrouverte.
Le corps de l’unique gardien survivant, celui au bras brisé, essaie de s’extraire en rampant. Souffrant, misérable, le videur laisse derrière lui sa trace dans son sang.
Vasiliás le regarde avec dépit : « Tu m’as l’air condamné. T’achever serait te rendre service. Autant te laisser crever comme tu le mérites. »
Il s’enfonce dans l’appartement aux murs tapissés de sang. (Reste 48683 caractères)
 

Chapitre 80

Chapitre 80

En Argentine, le night-club appartenant au chef de la pègre est peu à peu encerclé par les secours et les forces de l’ordre.
A l’intérieur, il ne reste plus que d’un côté Vasiliás et Peligra, et de l’autre Tromos et Segador.

Dans l’alcôve, où ils se sont enfermés, Vasiliás et Peligra dégustent à tour de rôle sur leurs corps le champagne qu’ils font couler.
Ils sont loin de connaître les détails des retrouvailles entre Segador et Tromos.
Leurs vêtements jonchent le sol, disséminés aux quatre coins de la pièce. La montre-gousset de Vasiliás, d’ordinaire si chère à son c½ur, abandonnée dans la poche de son pantalon qui traine à ses pieds.
Ne gardant que leurs sous-vêtements pour barrière à la concrétisation des envies qu’ils suscitent l’un chez l’autre, ils poursuivent leur corps à corps endiablé.
A genoux contre le Berserker assis, Peligra ne cesse d’appuyer sa poitrine en allant et venant sans cesse contre sa taille. Ouvrant même parfois sa bouche comme pour accueillir à travers son boxer blanc l’intimité sacrément manifestée de Vasiliás…

A quelques mètres de là, au fond du couloir, les bras ballants, Segador abandonne sa mine enjouée.
Un à un, les os de ses doigts puis de ses poignets, avant ceux de ses épaules et de son coude, ont été brisés.
Ses yeux à l’agonie devinent à la fouille qu’opère Tromos dans son bureau, que sa torture ne fait que commencer.
Brandissant d’un tiroir une pince, le colossal Argentin se congratule déjà des futurs résultats de ses sévices : « Que penses-tu que je puisse t’arracher avec ça une fois que je t’aurai ôté chacune de tes dents ? »
Puis, en refermant le tiroir, il trouve une manivelle dans celui du dessous : « Oh ! J’ai comme l’impression qu’il sera plus amusant de percer lentement tes genoux avant, pour ne pas que tu craches trop de sang après t’être fait opérer le râtelier ! »
L’odieux personnage change très vite d’attitude.
Désormais anxieux, Segador est défiguré par la folie qui symbolise la souffrance qu’il n’arrive même plus à hurler tant il s’égosille…


En Grèce, au sommet d’une falaise qui surplombe Athènes, Kyoko grimace après sa dernière gorgée d’alcool.
_ « Le champagne a vite réchauffé !
_ Le temps passe très vite. D’ailleurs j’aimerai que tu reprennes le récit de tes exploits avant que Vasiliás et Tromos ne reviennent de leur escapade et suspectent quoi que ce soit te concernant.
_ Bien, bien… »

Flashback
Sur l’Utérus, la structure complète cédait peu à peu depuis qu’Aiolia avait brisé le c½ur de l’arbre nourricier.
Les catacombes avaient déjà cédé.
Les étages suivants se désagrégeaient tour à tour.
Dans l’un d’eux, alors que l’édifice s’écroulait tout autour, Rigel restait les bras ballants. Tremblant, partagé entre la cruelle vérité et son amour indéfectible pour Kyoko.
_ « … Voilà la vérité sur ma naissance, mon adoption et l’absence d’Athéna du Sanctuaire. »
Une fois qu’elle eut fini, Rigel préféra s’adresser à son maître Aeson devenu Ghost Saint.
_ « Et c’est ainsi que vous espérez vous faire pardonner Aeson ?! En vous joignant à Eris ?! »
Sagement appliqué à expier sa faute passée, Aeson demeurait silencieux. Kyoko poursuivit alors.
_ « Je comprends que cela soit difficile à accepter pour toi. Ton monde s’écroule.
_ Non ! Penses-tu ! Mon maître, celui à qui je dois tout, que j’ai toujours cru être un modèle de droiture, a d’abord exécuté sa femme, renoncé à ses enfants, puis aujourd’hui il trahit Athéna ! Athéna qui d’ailleurs a disparu depuis onze ans du Sanctuaire ! Un Sanctuaire qui m’envoie tuer la femme que j’aime qui n’est autre que la réincarnation d’Eris !
_ Mais tu en es incapable n’est-ce pas, s’approcha tout doucement Eris ?
_ Recule ! N’avance pas, dit-il en faisant marche arrière !
_ Pourtant je suis là, à ta merci, gorge déployée. Tu n’as qu’à prendre ma vie et rentrer dignement au Sanctuaire où tu seras un héros. Ne le veux-tu pas ?
_ Non ! Je me fiche d’être un héros au Sanctuaire ! Pas dans ce Sanctuaire là en tout cas ! Tout ce que je veux c’est que tu quittes le corps de Kyoko et qu’elle me revienne !
_ Mais je suis là, rigola-t-elle amoureusement. Kyoko. Eris. C’est la même chose. Nous ne sommes qu’une. Vivre dans le secret. Dans la menace d’être un jour découvert. Condamnés, par un camp rempli de menteurs. Pour une foi caduque envers une déesse pleutre, cachée et affaiblie. Tout ça peut disparaître en embrassant ma cause. En embrassant ces lèvres que tu connais tant… »
Arrivée à lui, Eris saisit dans ses mains le visage fuyant de Rigel, pour l’obliger à plonger ses yeux dans les siens.
Le regard de la jeune femme avait changé en effet. Il était plus sournois, ses traits étaient plus tirés. Mais dans le reflet de ses yeux, Rigel voyait encore Kyoko et leurs courses enfantines dans les prairies désertes du Sanctuaire, leurs baisers d’adolescents volés derrière un arbre, leurs étreintes lascives d’adultes au milieu des fleurs d’été.
Sa gorge était nouée, sa bouche sèche.
Dans le dos de sa bien-aimée, honteusement agenouillé, son maître ne bougeait pas d’un pouce et lui rappelait tout ce en quoi il a cru. Il constata alors combien il fût idiot d’être gêné du crime qu’il commettait en s’énamourant d’une Saintia qu’il avait détourné du droit chemin dans un Sanctuaire mensonger, dirigé par un imposteur.
Seulement, son combat contre Jaguar lui remémorait la lâcheté des Ghost Saints, mus d’intérêts personnels, renonçant à leur honneur.
Le goût du sang et du conflit d’Eris qu’on leur apprend dès l’enfance au Sanctuaire et la menace que ferait peser Kyoko sur le monde le hantèrent aussi.
Pourtant, à bien y réfléchir, les hommes de Gigas sur lesquels elle lui ouvrit les yeux quelques minutes plus tôt ne valaient guère mieux. La sentence subie par Olivia, la mère de son amante, ne pouvait faire croire que le Sanctuaire était un lieu idéal, destiné à protéger un monde de bonté. Enfin, toutes ces légendes horribles à propos d’Eris étaient contées par son maître Aeson. Un maître qui abandonna ignoblement sa famille.
Tous ces sentiments s’entremêlèrent une fraction de seconde, le temps qu’il prenne sa décision et qu’il remonte ses bras à son tour pour caresser le visage de sa bien-aimée.
En plein conflit avec ses tourments, il profita de son approche pour descendre ses mains du visage de Kyoko jusque dans son cou….
Il commença à serrer fort.
Aussitôt, Aeson se releva mais, alors qu’elle pliait en arrière sous le poids de l’étreinte de Rigel, Kyoko tendit le bras pour empêcher son père d’intervenir.
Pris de sanglots, Rigel murmurait à répétition : « Je suis désolé, je suis désolé, je suis… »
Bientôt Kyoko était couchée sur le dos, le visage bleui, la langue gonflante.
Sa vue gondolée par les larmes empêchait Rigel de parfaitement distinguer la mort venir à sa compagne.
Lui non plus ne respirait plus. Il y mettait tant de force, tant d’opiniâtreté, qu’il retenait son souffle.
C’est lorsqu’il distingua les yeux révulsés de Kyoko qu’il fut frappé de terreur.
D’une aspiration profonde, il relâcha sa prise et chuta sur son postérieur avant de reculer à terre de dégoût.
Ses yeux étaient grands écarquillés, son visage pris de spasmes. Il regardait ses mains meurtrières avec effroi, bien qu’il savait qu’il n’avait pas été capable d’aller au bout de son geste.
Le rire sarcastique de Kyoko le lui confirma.
Elle se redressa lascivement et rigola de plus en plus fort.
_ « Je savais que tu en étais incapable. Ta culpabilité et le sentiment d’avoir été trahi par tout ce en quoi tu as cru sont plus forts.
_ Tout ce en quoi j’ai cru, toi y compris, vociféra-t-il.
_ Tu te trompes. Je ne cherche pas à te duper. Ma proposition est intéressée mais sincère. Tuer le temps dans tes bras en attendant que tu combattes pour moi, qu’on le fasse chez Athéna ou ici, où est la différence ? Entre nous, rien ne changera. Pour le monde, rien ne changera. Eris ou le Sanctuaire, il est voué à la destruction. Sauf que tu as la possibilité de disparaître ici et maintenant, ou de le vivre à mes côtés. »
Indécis, Rigel n’osa pas la dévisager davantage. Jusqu’à ce qu’un heurt traversa la pièce et frappa Eris par surprise en plein abdomen, l’obligeant à s’écrouler. Faisant bondir Aeson jusqu’à elle.
Soudain, depuis l’angle de la pièce d’à-côté, Olivia apparut. Elle suivit la direction empruntée par le coup qui toucha Eris à l’instant.
_ « Olivia, grinça des dents Aeson qui se mit en garde ! »
Toutefois, Olivia titubait en se tenant sa poitrine, percée, et en agitant d’un signe négatif la tête afin de manifester son innocence avant de s’écrouler. Elle était incapable de parler en raison du flot d’hémoglobine coagulée qui fuyait sa bouche.
Derrière elle, la Cloth en miettes, le masque brisé sur la moitié inférieure du visage, Mayura traînait la jambe, déterminée.
Elle crachait du sang elle aussi lorsqu’elle conjura à Rigel de se ressaisir.
_ « Ne l’écoute pas Rigel ! Ses paroles sont empoisonnées ! »
Pensant Kyoko meurtrie par l’attaque surprise de Mayura, Rigel avançait à genoux en direction de son amante.
_ « Non, scanda-t-il ! Tu ne sais pas toute la vérité ! »
Passant devant Olivia, Mayura fut soudain retenue à la cheville par sa main.
_ « Sache que malgré ma liaison avec Aeson et la naissance de mes filles contre la voie chaste des Saintias que j’ai choisi trop jeune, mon amour et ma dévotion pour Athéna étaient sans faille, confessa Olivia. Lorsque je fus découverte, emprisonnée, torturée puis condamnée, je n’ai cessé de la prier jusqu’au dernier instant. Mais elle ne m’est jamais apparue. Même lorsque le Pope me fit arrêter. Lorsqu’il laissa Gigas et ses hommes de mains me passer un à un, plusieurs fois par jour, durant des semaines de détention, sur le corps. Même lorsqu’il délibéra sur mon sort, nommant le père de mes enfants comme bourreau. Elle ne m’est jamais apparue. Je ne priais pourtant pas pour moi. Je priais simplement pour le salut de mes filles. Je lui demandais juste de veiller sur elles. Mais rien. J’allais mourir avec une profonde désillusion. Et tu sais qui m’a répondu ? Eris. Seule Eris me vint. Dès lors que je sentis un coup sec derrière ma nuque puis le néant. Pendant que ma tête roulait au sol devant les pieds d’Aeson et sous ton regard Mayura, mon amertume fut saisie aux portes des Enfers par Eris en personne. Elle fut la seule à m’entendre. »
En écoutant cela, Rigel fut davantage décidé à prendre Kyoko dans ses bras pour inspecter sa blessure.
_ « Les lois du Sanctuaire sont strictes et cruelles, afin que ses représentants soient justes. Car d’eux dépendent justement la paix et les libertés dont nous nous privons au profit du reste du monde, protesta Mayura.
_ Je vais te dire un secret, poursuivit malgré tout Olivia. Ce Sanctuaire si rigide que tu défends. Ce Sanctuaire donneur de leçon, modèle de vertus. Par qui crois-tu qu’il soit tenu ? Allons, n’as-tu pas remarqué depuis ma mort ce symbole à tête de mort parcouru d’un reptile ailé tatoué sur plusieurs soldats athéniens. Cela a commencé à se répandre un an avant ma mort. Le Pope qui m’a condamné, qui a accepté ma torture, qui t’envoie en guerre contre des dieux mineurs pourtant peu menaçants. Il n’a rien du Grand Pope qui nous envoyait en missions de prévention dans les domaines annexés. Le Grand Pope Shion n’est plus. Pas plus que son frère Arlès. Le Pope depuis onze ans est un imposteur. Et cette Athéna pour qui tu es prête à tuer ma fille aujourd’hui n’est pas là-bas !
_ Tu mens, dit Mayura en se défaisant d’un mouvement de jambe de l’étreinte d’Olivia, et je vais te le prouver maintenant, s’élança-t-elle vers Kyoko ! »
Le choc qui s’en suivit fut si brutal que les murs du hall furent inondés de plasma.
Aeson, devancé, resta statufié, maquillé de sang.
Ce sang roulait sur le visage de Kyoko et était absorbé par sa robe écarlate.
Incapable de progresser davantage, désabusée par la couardise de son camarade, Mayura se laissa tomber à genoux, les bras le long du corps, ne pouvant retenir les gerbes d’hémoglobine qui jaillissaient de sa trachée.
Devant elle, bras encore rigide, main raide et doigts tendus au bout desquels des flammèches scintillaient, Rigel murmura : « Ignis Fatuus… Je suis désolé Mayura… Mais ton obstination même face à la vérité ne peut avoir raison de la femme que j’aime. »
Alors qu’il venait de lui trancher la gorge, Rigel tourna le dos à Mayura.
Il refusa de regarder sa bouche démasquée tenter de happer l’air, dans un ultime instinct de survie.
Agonisant d’asphyxie, le cosmos de Mayura parvint malgré tout à dessiner un Paon d’or par-dessus elle… 

Sur terre, dans la forêt qui délimite le camp des femmes Saints, les derniers éclairs du Thunder Claw de Geist cessaient de grésiller dans l’atmosphère.
Aveugle, calcinée, Emony s’écroula dans l’herbe avant de devenir une fleur.
Epuisée, Geist s’appuya contre la roche où Emony était prisonnière pour ne pas s’effondrer.
Une voix connue, étouffée sous un masque, la congratula.
_ « Félicitations ! Tu as vaincue une Dryade et pas des moindres. »
Geist observa venir depuis l’extérieur Marin dans sa Cloth d’argent.
Néanmoins, la mercenaire n’en était pas plus rassurée : « Marin ! Ton renfort ne sera pas de trop ! Une Dryade vaincue fane. Regarde donc celle-ci. »
Devant elles, Emony bourgeonnait, poussait, devenait de plus en plus colorée.
De fleur, elle devint une plante resplendissante.
Immédiatement, les femmes se mirent en garde.
Lorsqu’elle eut éclos dans sa Fane, Emony n’était plus une enfant.
Elle était devenue femme.
Ses yeux maquillés de contours rendaient son regard plus dangereux et s’accommodaient à merveille avec l’émanation provocante de son cosmos.
Désormais dépourvus d’épaulettes, ses longs bras nus présentaient un galbe envoûtant, rappelant le charme dont aimaient jouer ses aînées Dryades.
Néanmoins, Emony paraissait toujours aussi cruelle et déterminée à en juger le sourire et le regard psychotique qu’elle balançait tour à tour à Marin et Geist.
_ « Je vois que nous avons une invitée, s’adressa-t-elle à Marin sur qui elle fit tomber une pluie de lobélie. Tu espérais que cela m’empêcherait de me venger du mal que tu viens de me faire, asséna-t-elle dans une onde de choc envoyée sur Geist. »
Cette dernière fut repoussée contre la pierre, impuissante.
Marin voulut lui porter secours mais ce fut vint, ses jambes flageolaient déjà. Autour d’elle, virevoltaient des papillons, qu’elle n’avait pas remarqué jusqu’alors.
_ « Nightmare Scheme, prononça Emony. Mes lobélies, semblables à des papillons tombent sur toi puis te recouvrent. Ces fleurs vont se servir de ton corps comme de la semence pour pousser jusqu’à se repaître entièrement de tes forces. »
Ainsi, les papillons se posaient sur elle et de chaque papillon naissait une nouvelle pousse.
Emony abandonna donc Marin, condamnée, et partit rejoindre sa principale rivale.
D’un coup de pied retourné, elle plaqua son talon contre la gorge de Geist pour la tenir à sa merci contre la roche.
_ « Quand as-tu pu déployer sur Marin ta technique, sans que nous n’y voyons rien, demanda d’une voix étouffée Geist ?
_ Ah ! Je ne t’avais pas prévenu ?! Disons que les lieutenants de Mère ont tous le pouvoir de rivaliser avec au moins vos Saints d’argent. Pour ma part, j’ai toujours trouvé grossier de faire preuve d’une grande démonstration de force à moins d’y être obligée. Et tu m’y as obligé, écrasa-t-elle davantage la gorge de son adversaire. Maintenant, tu vas mourir lentement pour ça ! »
Dans le dos d’Emony, les lobélies continuaient d’éclore. La mousse au sol était maintenant recouverte et tout autour de Marin des fleurs gagnaient sans cesse du terrain. Si bien que le bleu de leurs pétales irradiait derrière la Dryade de la Méchanceté.
Il se reflétait dans le masque de Geist derrière lequel la mercenaire avait le blanc des yeux rempli de vaisseaux sanguins éclatés, mourant d’asphyxie.
_ « Comment est-ce possible que les lobélies poussent encore, cessa son étreinte Emony. Je n’ai jamais rencontré d’adversaire détenant une telle source de cosmos. Elle parait infinie ! »
Inconsciemment, Marin se releva malgré les racines épaisses gorgées d’énergie qui la clouaient à terre jusqu’alors.
Epuisée, Geist se laissa glisser contre le sol, ne soupçonnant pas non plus une telle réserve d’énergie chez sa camarade.
Sans même se défaire des sangsues végétales qui la consumaient, la Saint accrut volontairement son cosmos. Si fortement que les tiges grossirent à s’en faire dégorger de sève et que les pétales s’arrachèrent des bourgeons, incapables qu’ils étaient de contenir tant de puissance.
C’est là qu’elle recroquevilla son coude droit pour prendre plus d’élan, avant de tendre son poing à la vitesse de la lumière vers Emony : « Ryu Sei Ken ! »
Déclenchée plus rapidement que d’ordinaire, l’Attaque de Météores se changea en faisceaux lumineux qui s’entrecroisèrent et martelèrent Emony dont la Fane éclata par endroit.
La Dryade reçut ainsi près de cent millions de coups en une seconde sans avoir pu les anticiper.
Elle fut projetée contre la roche, par-dessus la tête de Geist, et retomba derrière elle avec la pierre changée en vulgaires cailloux.
Epuisée, vidée, Marin profita de son élan pour s’écrouler devant Geist.
_ « Marin… Marin, la secoua tant bien que mal la mercenaire…
_ Ca va Geist… Je n’ai simplement plus aucune force… Cette Dryade a vidé toutes mes ressources… C’est un miracle que j’ai pu les réorienter contre elle…
_ Quelle dommage pour vous, se releva derrière elles Emony furieuse ! »
Le visage menaçant, défigurée par la colère de l’échec, elle était maquillée du sang qui perlait de son cuir chevelu où son bandeau avait été arraché par l’impact.
Surplombant les deux alliées, elle élança son bras pour les achever lorsqu’elle fut contrée inopinément par la pointe du pied de Shaina.
D’un saut acrobatique, la Saint d’argent d’Ophiuchus arriva à leur secours.
_ « C’est mon tour de t’en faire voir de toutes les couleurs, décréta l’Italienne qui partit à l’assaut !
_ Encore une femme Saint qui fanfaronne ! Je vais te remettre à ta place ! » 
Shaina balança ses griffes de façon horizontale.
Emony esquiva grâce à une roue arrière pleine de grâce.
L’Ophiuchus anticipa son point de réception en arrivant depuis les airs talons en avant.
La Dryade para avec son avant-bras gauche mais sa Fane déjà entamée par Marin se fendit davantage sur le coup.
Perturbée, elle laissa Shaina poursuivre son acrobatie en tournant sur elle-même pour la cogner en pleine tempe d’un coup de pied retourné.
Emony évita de peu en s’abaissant. Elle prit même l’avantage en se redressant plus vite que Shaina ne retombait sur ses jambes pour la cogner du poing en pleine cuisse et ainsi lui contracter les muscles.
Ne tenant plus que sur une jambe, Shaina eut du mal à ne pas céder de terrain sur la série de coups de poings que poursuivit Emony.
Elle pivota légèrement au dernier instant pour la laisser être emportée par son élan et espéra contre-attaquer en se retournant à une des vitesses les plus rapides parmi les Saints d’argent du Sanctuaire : « Thunder Claw ! »
Tandis qu’elle laissa depuis les airs ses Griffes de Tonnerre retomber, Emony réussit à faire volte-face à temps et rasa le sol de son poing pour remonter en direction de Shaina, portant un coup dans le sens inverse de celle-ci : « Ton amie a déjà utilisé cette attaque contre moi, elle n’a plus de secret pour moi. Innocent Glumness ! »
Un violent coup de poing contre celui de Shaina, suivi d’une multitude de coups approchant la vitesse de la lumière, brisa la main de Shaina, annihila sa technique et la pilonna jusque haut dans les airs.
Tandis qu’elle retombait en direction du sol tête la première, Emony chargeait à nouveau de son autre poing : « Tu m’as l’air robuste toi ! Je vais m’assurer que tu ne te relèves jamais en te plongeant dans un éternel cauchemar ! Lunatic Bind ! »
Contre toute attente, ce fut Geist qui devança Emony en apparaissant devant elle : « Cette fois c’est moi qui connaît déjà cette technique ! Thunder Claw ! »
Geist la frappa à l’épaule avant même qu’elle n’ait eu l’occasion de déployer totalement son bras.
Le heurt à bout portant explosa la Fane à hauteur de la clavicule et arracha l’épiderme de tout son biceps à la Dryade.
Pendant ce temps, Marin réceptionna Shaina afin de lui éviter une chute fatale.
_ « On a eu chaud, confessa Marin.
_ Néanmoins, même si j’ai pu gagner son bras gauche, elle garde sur nous l’avantage de la vitesse, déplora Geist qui reculait jusqu’à elles.
_ Et elle semble connaître toutes nos techniques, ragea Shaina meurtrie.
_ Pas tout à fait, corrigea Marin. Il nous reste une chance. J’ai une idée. Ecoutez bien… »

Plus loin, à l’intérieur du camp, tandis qu’Erda extrayait Rebecca des branches qui leurs étaient tombées dessus, Mito tentait de voler au secours de chaque camarade.
Hélas, pour une élève rescapée, une autre tombait dans son dos par les griffes des Dryades ou la gueule du bunyip.
_ « Ca va aller, prononça-t-elle essoufflée à la dernière de ses amies qu’elle venait d’extirper d’un ennemi. »
Elle ne se rendit même pas compte que le temps qu’elle tourne la tête, cette camarade secourue fut aussitôt décapitée par l’adversaire suivant.
L’instant d’après, une Dryade frappa du plat du pied derrière le genou de Mito pour le lui faire mettre à terre.
Une seconde arriva alors pour la frapper de volée en plein visage et l’envoyer choir au milieu de quatre de ses alliés Dryades. 
Ce fut alors que les quatre guerriers d’Eris furent retenus dans leurs mouvements par une bourrasque qu’ils ne parvinrent pas à surmonter.
Bandeau violet, kimono pourpre, Shinato arriva à son tour en libérant tout son cosmos.
Juste après, Xiao Ling suivit l’élève de Mayura. Elle vint relever Mito afin qu’elles se regroupent toutes les trois auprès d’Erda et Rebecca.
Par petits groupes, disséminés dans le camp, il ne restait qu’une quinzaine d’élèves qui survivaient tant bien que mal.
Shinato et Mito se tenaient déjà en garde.
Xiao Ling tremblait en faisant le tour d’elle-même au milieu de ce charnier. Rebecca, qu’elle était venue retrouver, était plus morte que vive. Son héroïne du passé était impuissante dans ce présent apocalyptique.
Malgré la perte de son bras, Rebecca, avec l’aide d’Erda, devança les jeunes femmes.
_ « Toutes ces femmes… Ces filles… Ces enfants… Elles avaient foi en moi, déplora la Saint en voyant tomber sur les cadavres les graines scintillantes de l’Utérus… Je les ai trahis…
_ Ne dites pas de bêtises, l’implora Erda qui essaya de la tirer en arrière pour chercher la retraite ! Vous êtes notre guide ! Nous devons nous replier maintenant !
_ Erda a raison, renchérit Mito. Nos forces sont divisées, affaiblies et en minorités. »
Rebecca détacha de son omoplate son foulard imbibé de sang qui retenait à peine l’hémorragie de son bras amputé.
_ « Oui, je sais, Erda a raison, lui tendit Rebecca le tissu. Vous devez battre en retraite. Les Dryades seront à votre portée une fois le bunyip vaincu. »
Elle se jeta sans crier garde contre le monstre.
_ « Maître, hurla de désespoir Erda !
_ Nous devons l’aider, convainquit Shinato une Mito déjà prête à la suivre ! »
Erda se joignit à eux, laissant Xiao Ling incapable de la moindre réaction.
Alors qu’elle s’élançait pour frapper la première, Shinato s’interrompit d’elle-même, prise d’un profond malaise au moment où elle perçut depuis les cimes le cosmos de Mayura décliner. Elle devina le sort de son maître sur l’Utérus.
De son côté, après avoir surpris ses élèves, se présentant à l’arrière de Bunyip, Rebecca répéta son précédent arcane : « Burning Lava Rain ! »
Pris à revers, Bunyip sentit ses pattes arrière s’écrouler, martelées et brûlées qu’elles étaient par les météores de laves que Rebecca libérait de son bras droit.
Son cosmos aussi vert que sa Cloth brilla au firmament avant de chanceler.
_ « Rebecca donne tout ce qu’il lui reste, se reprit Shinato !
_ Nous devons à tout prix la sauver, s’obstina Erda ! »
Erda se jeta vers son maître avec inconscience. 
Mito, voyant un tentacule de Bunyip fondre sur sa bien-aimée, dévia la trajectoire d’Erda qui, l’espace d’une fraction de seconde, resta suspendue dans les airs.
Coupable d’avoir agi sans retenue, Erda se retrouva à observer son sauvetage par Mito en étant impuissante.
Obligée de fixer la sentence irrévocable qui se produisit sous ses yeux.
Comme si cela durait une éternité.
Si long que Xiao Ling eut le temps de passer ses mains devant ses yeux.
Et pourtant, si net et cinglant, qu’Erda n’entendit pas le son déployé de sa gorge en criant le nom de Mito lorsque le fouet de Bunyip trancha en deux, de l’épaule gauche à la hanche droite, celle qu’elle aime, dans un claquement vif et percutant.
Erda roula au sol en première, perdant son masque.
Le tronc de Mito en second.
Ses jambes ensuite.
Le bras tremblant, Rebecca succomba au désespoir en voyant une de ses meilleures élèves vaincue.
La croupe au sol, Bunyip abattit un tentacule sur la Saint de Cassiopée.
Un second tentacule voua le même sort à Xiao Ling.
Contre toute attente, alors que tout semblait perdu, Shinato les dévia en libérant sous la forme d’une bourrasque son cosmos.
Dans son dos, l’emblème de l’Oiseau de Paradis, sa constellation protectrice et dont l’armure était déjà promue à Apodis, irradié d’un cosmos orangé.
Les appendices de Bunyip fendirent le sol en deux à côté de Rebecca et Xiao Ling, épargnées grâce à Shinato.
Cependant, les bras écartés de parts et d’autres, Shinato ne perçut pas un troisième tentacule qui lui perfora l’abdomen depuis le dos, sectionnant en deux sa colonne vertébrale.
Le craquement de ses os fit frémir Xiao Ling qui, de panique, remplie d’adrénaline, se jeta finalement à corps perdu dans la bataille.
Esquivant le quatrième et le cinquième tentacule, elle vit sa route barrée par une douzaine de Dryades. N’écoutant que son courage soudain, elle repoussa la première d’un coup de pied retourné, écrasant du tranchant de la main le larynx du second, enfonça du plat de l’autre main la cage thoracique du troisième, avant d’être submergée par la dizaine restante…
Cet acte de courage, galvanisa les dernières apprenties qui la suivirent dans une ultime tentative de révolte contre les Dryades pour venger Shinato venue héroïquement sacrifier sa vie.
Mito était à peine consciente, incapable de happer l’oxygène, sentant ses intestins se déverser.
Traînant au sol jusqu’à elle, Erda serrait fort dans son poing le foulard de Rebecca.
Le tentacule tombé à côté du professeur reprit sa liberté de mouvement maintenant que Shinato était suspendue en l’air par un autre appendice. Il enroula Rebecca et la conduisit vers sa gueule.
L’animal désormais rampant, le train arrière démantibulé par l’arcane de Rebecca, se hissa sur ses pattes avant.
Bunyip laissa d’abord tomber Shinato, encore vivante, dans sa gueule.
A peine la chair de l’apprentie au contact de sa langue, il croisa sa dentition, broyant le corps, quitte à faire pendre de sa gueule un bras et une jambe de la malheureuse.
La gueule baveuse de chair et de sang, puante de cadavres en putréfaction, Bunyip répéta son geste à l’attention de Rebecca, résignée.
En levant les yeux vers elle, le visage bleui de larme, Erda vit la mine déconfite et blafarde de celle qu’elle a toujours admirée, du jour où elle l’a extirpée de sa condition misérable jusqu’à présent où elle l’a fait grandir et devenir une femme forte.
Tandis que Bunyip lâcha d’en haut sa proie pour l’engloutir toute entière, Erda refusa de s’avouer vaincue.
D’un bond rageur, les bras croisés devant elle, au milieu des cris et des pleurs de ses condisciples tombant tour à tour, elle réunit ce qu’il lui resta de force et imita la technique de Rebecca qu’elle admirait depuis tant des années : « Burning Lava Rain ! »
Frappé à l’arrière par la Pluie de Lave Brûlante, bien que moins impressionnante que celle de Rebecca, Bunyip garda la gueule grande ouverte pour libérer un cri de souffrance.
Condamnée à chuter au fond de cette gorge caverneuse et puante, Rebecca transmit alors son cosmos chaleureux et bienveillant à Erda : « Erda… Ma petite Erda… Comme tu as grandi… Comme tu es devenue forte… Guide tes camarades qui auront survécu… Deviens une Saint digne et respectée… Deviens-le grâce à cette dernière technique que je n’ai pas eu le temps de t’enseigner ! Greatest Eruption ! »
Sombrant tête la première, Rebecca devint alors une boule de lave qu’engloutit malgré lui l’animal.
Ardente à s’en consumer elle-même, elle phosphorait depuis l’intérieur de Bunyip au point d’en être visible depuis l’extérieur par les spectateurs de la scène.
Pris en étau, Bunyip écarquillait ses quatre yeux rouges en luttant contre l’avancée de Rebecca qui lui brûlait l’½sophage après lui avoir déchiré la glotte.
Donnant tout ce qu’il lui reste, Erda n’abdiqua pas. Elle frappait toujours l’arrière de l’animal pour l’empêcher de lutter en son for intérieur contre la progression de Rebecca.
Réalisant le sacrifice de Rebecca, elle accrut son cosmos à son paroxysme au point que celui-ci dessina derrière son dos Cassiopée, l’emblème de son professeur.
Au même instant, achevant son treizième adversaire, Xiao Ling arriva pied en avant contre le flanc de Bunyip, là où sa collerette ne couvre pas le reste de son corps.
Bunyip en eut alors le souffle coupé, incapable de contenir en son sein plus longtemps La Plus Grande Eruption, attaque ultime de Rebecca.
Bunyip recroquevilla sa tête entre ses épaules et replia ses pattes avant contre sa poitrine alors qu’il tombait sur le flanc.
A l’intérieur, la lumière de Rebecca était si flamboyante qu’on voyait les organes de Bunyip à travers lui.
En boule, martelé par Erda et rongé de l’intérieur par Rebecca qui n’était plus qu’un amas de chair en fusion, Bunyip implosa.
Balayant la surface de viscères au liquide gluant et verdâtre.
Soufflant plus loin Xiao Ling et Erda.
Couchant au sol les dernières apprenties et les Dryades.
Pliant en deux les arbres qui délimitaient le champ de bataille.
Faisant céder les derniers vestiges du camp qui tenaient encore debout.
Bunyip était vaincu.
Au prix de nombreux sacrifices.
 
De l’extérieur du camp, la détonation laissa pantois tous les supporters athéniens.
Mal à l’aise depuis qu’il avait senti une perturbation dans le cosmos de Mayura peu avant, Mirai se tenait la poitrine de douleur, bouleversé après la disparition soudaine du cosmos de Shinato.
Personne ne parlait.
Le silence de mort qui planait au milieu du camp après l’explosion, avait eu raison de ses alentours également.

A l’intérieur du camp justement, pendant que les survivants, femmes ou Dryades, reprenaient leurs esprits, une ligne dorée traversa l’horizon.
Le silence qui suivit l’implosion assourdissante de Bunyip permit d’entendre enfin retentir un claquement de doigts.
Aussitôt, le sol se déchira.
L’enfer s’en échappa.
Des feux follets jaillirent des entrailles du centre d’entrainement. Ils emportèrent, sans distinction de camps, les âmes des survivants, incapables du moindre réflexe … 

Plus haut, sur l’Utérus, Rigel redressait Eris étonnamment bien remise du coup porté par Mayura.
Au-dessus de leurs têtes, le plafond s’effritait. Le niveau du dessus les menaçait. Il commençait à s’écrouler.
Aeson, lui, portait assistance à Olivia.
Le Saint d’argent de la Coupe, désormais Ghost Saint, était dérangé par le Paon d’or que s’obstinait Mayura à faire briller dans ses derniers instants.
_ « Que… Que fais-tu, s’enquerra Aeson ? Serais-tu… Serais-tu entrain d’alerter les autres Saints !
_ Ce n’est rien, le rassura Eris, l’Utérus a été détruit de toute façon. Tout est voué à disparaître ici.
_ Dans ce cas, par respect envers la Saint qu’elle fut, je vais mettre un terme à sa douleur, conclut-il.
_ Non, lui interdit Olivia en lui retenant le bras. Je veux la voir agoniser dans d’horribles souffrances. »
Rigel demeurait au sol interdit. Coupable d’avoir trahi Mayura, il fixait avec maladresse Kyoko qui apparaissait sous son vrai jour.
_ « Tu n’étais pas blessée… Tu n’avais rien… Depuis le début… Depuis notre arrivée ici, tu n’as pas accru ton cosmos pour ne pas être repérée puisque tu te baladais dans l’Utérus tandis que les Saints te croyaient au sommet. La destruction de l’Utérus était convenue. Seule comptait ta vengeance.
_ En effet. Néanmoins, rien de tout ce que je t’ai dit n’était faux, lui cueillait-elle à nouveau le visage. Cette étape est un succès, le Sanctuaire brûle partiellement. Mes graines ont éclos et seront semées au gré du vent mauvais pendant des années. Ma famille est presque au complet. L’Utérus a récolté suffisamment d’énergie pour faire ressurgir mon vrai sanctuaire, le Jardin d’Eden. Et tandis que je vais m’y retirer pour enfin y recouvrer toutes mes forces, le Sanctuaire va se remettre en me pensant vaincue. Joins-toi à moi, s’accroupit-elle jusqu’à coller son front au sien. »
A cet instant, depuis l’étage du dessus qui s’effondrait, Shaka et Naïra arrivèrent.
_ « Mayura, s’épouvanta aussitôt la Vierge avant que le sol ne se déroba sous ses pieds. »
Depuis le flanc, Milo et Apodis les rejoignirent aussi.
_ « Aeson, s’indigna Milo !
_ Rigel, s’inquiéta immédiatement Apodis ! »
Sur le flanc opposé, Georg et Juan titubaient côte à côte en se protégeant des débris constants sous le bouclier de l’Ecu.
Enfin, depuis l’orifice par lequel l’arbre matriciel traversait tout le sanctuaire, Aiolia surgit.
Dans son dos, l’arbre tout entier alternait entre la brillance dorée du Photon Burst du Lion et la noirceur de son écorce de plus en plus calcinée. Il menaçait d’imploser, emportant avec lui le reste de la ziggourat dans un nuage de cendres.
Chaque Saint envisageait de venir porter assistance à Mayura agonisante.
Mais le sol se fissura devant chacun d’eux. Les séparant les uns des autres. Laissant la Saint d’argent du Paon au milieu d’Eris, Olivia, Aeson et Rigel.
Se sachant condamnée, Mayura pencha alors sa tête sur le côté afin de voir une dernière fois Shaka. Elle tendit sa main, impuissante, manquant d’air, vers lui.
Incapable d’intervenir, le Saint de la Vierge ressassa alors en une fraction de seconde les derniers mots durs qu’ils s’échangèrent avant la bataille.
Au milieu de tout ça, ignorant l’ennemi et le sol qui s’effritait sous eux, Eris n’avait pas perdu des yeux Rigel. Elle avait gardé son visage entre ses mains et attendait de lire dans ses yeux sa résignation.
Partagé entre la condamnation de Mayura et le danger qui guettait Rigel, qu’il espérait encore pouvoir sauver, Apodis s’époumonait à crier son nom pour le sortir de sa torpeur.
Des failles du sol, des murs et du plafond, commençaient en sortir le restant des Dryades qui n’avaient pas pris part aux combats.
Elles se réunissaient tout autour d’Eris faisant définitivement abandonner aux Saints l’idée de pouvoir intervenir auprès de Mayura ou de Rigel.
Soumis par l’amour qu’il lui portait et la démonstration de force dont elle fit preuve, Rigel se laissa conquérir par l’approche du visage de Kyoko contre le sien.
L’Utérus éclata de part en part.
Volant en éclat.
Morceau par morceau.
Rigel pleura de joie de pouvoir embrasser à nouveau celle qu’il aimait. Il passa sa main derrière sa tête pour appuyer son baiser passionné afin qu’il ne s’arrête jamais.
Ce geste en fit tomber le long de son corps ses bras à Apodis.
Ses camarades baissèrent tous la tête, abattus.
_ « Tant de souffrances endurées pour voir ça, pesta Aiolia. »
Seul Shaka resta figé vers Mayura. Il avait rouvert ses yeux désormais embués de larmes. Elle avait cessé d’essayer de respirer. Son cosmos ne brillait plus.
Autour d’elle, les Dryades espérant échapper à la mort étaient de plus en plus nombreuses. Elles pullulaient.
Entre elles, le sol s’ouvrit encore. Il laissa Mayura tomber dans le faisceau de lumière qui en sortit, faisant disparaître son cadavre dans le néant.
Eris se libéra enfin du baiser de Rigel et exposa à la vue de tous le filet de sang qui fuyait ses lèvres.
Tous découvrirent alors Rigel à genoux, la tête penchée en arrière, s’étouffant dans son propre sang qui jaillissait de ses entrailles.
Les Saints comprirent alors qu’il n’y aurait plus d’autre chance de mettre un terme à tout ceci.
Shaka, yeux toujours grands ouverts, les enjoignit tous. Il s’adressa à eux par télépathie : « C’est maintenant ou jamais ! Nous devons terrasser maintenant Eris afin d’être sûrs qu’elle meurt emportée dans l’explosion de l’Utérus en compagnie de ceux qui nous ont trahis ! »
Tandis que Rigel tombait à la renverse, mort d’un baiser empoisonné, tous les Saints puisaient dans le restant de leur cosmos.
Les effluves dorés des Saints d’or, argentés des Saints d’argent, blanches de Naïra et orangées d’Apodis, s’unirent toutes haut dans le ciel pour former un dôme dont la pointe de cosmos retomba au-dessus de la tête d’Eris et ses hommes.
La déesse dégaina son sceptre à quatre branches pour dresser un bouclier contre ces émanations.
_ « Maintenant, s’élança Milo, Scarlet Needle Antarès !
_ Wing Jikan No Yoyu, suivit Apodis !
_ Typhoon Bullet, invoqua Naïra !
_ Astral Gravitation, frappa Juan !
_ Geistig Blitz, déclencha Georg !
_ Lightning Bolt, libéra Aiolia !
_ Tenma Kofuku, conclut Shaka ! »
Encerclés par des déferlantes de cosmos, Eris n’angoissa guère.
Derrière elle, Aeson ramassait le corps de Rigel.
_ « N’ai crainte, le rassura sa déesse, il s’agissait du baiser de la renaissance. »
A cet instant, Rigel rouvrit les yeux.
Il eut dans le regard le même flou que celui qui habitait Aeson depuis sa résurrection.
L’Utérus implosa au moment de l’impact de tous les arcanes.
Le choc fut tel que le bouclier d’Eris se corroda de part en part.
Soufflés par les explosions successives, les Saints furent incapables de voir les Dryades être emportées par les salves lumineuses au milieu desquelles elles disparaissaient de leurs champs de vision.

Une onde de choc si puissante fit alors trembler le sol terrestre sur toute sa surface. Ebranlant ainsi le monde contemporain.
Un bruit sourd détonant assourdit la Grèce entière tandis qu’un éclat rougeoyant illumina une fraction de seconde le quotidien des Grecs avant qu’un large manteau nuageux, en réalité la poussière de l’Utérus et du temple, ne couvre le ciel européen tout entier.

Au Sanctuaire, la lumière puis la détonation de la destruction de l’Utérus parvinrent.
Les Athéniens sautèrent de joie dans tout le domaine.
Autour de la forêt, les spectateurs s’échangeaient quelques sourires rassurés. Hormis Mirai qui gardait un mauvais pressentiment.

Dans la forêt, Emony guettait le ciel.
Elle ne paraissait pas inquiète malgré la disparition du cosmos d’Eris.
Elle essayait de replier les doigts de son bras gauche mutilé, en vain.
Abandonnant l’idée d’y avoir recours, elle arracha un morceau de tissu noir qui habillait son abdomen pour bander son bras ballant contre son corps et laisser son nombril à l’air.
_ « Bien, mon seul bras droit devrait suffire à vous anéantir. Je vois que vous avez une idée derrière la tête, mais je demeure plus rapide et je connais toutes vos techniques. »
Devant elles, les femmes se tenaient déjà en position après avoir écouté le plan de Marin.
_ « Tu es bien présomptueuse alors qu’Eris vient d’être vaincue, ricana Geist.
_ Tu es seule désormais et une même attaque ne peut marcher deux fois contre un Saint, l’avertit Shaina.
_ Et tu as déjà utilisé toutes tes techniques contre nous, ajouta Geist.
_ Naïves, pouffa Emony… Mon Innocent Glumness invoqué au paroxysme de ma puissance sera si rapide et puissant qu’il vous sera bien égal de savoir en quoi consiste l’arcane. Un seul coup que vous ne parviendriez pas à esquiver vous sera fatal. »
Soudain, les trois femmes furent saisies en même temps d’un étrange pressentiment.
_ « Le camp, s’inquiéta Geist.
_ Tout à coup… Tous les cosmos ont disparu, confirma Shaina. »
Marin, au centre, restait silencieuse : « Maudites soient les Dryades. Malgré la destruction de l’Utérus, elles auraient réussi à nous porter un coup fatal ?! Le temps presse. Le Ku Ken. Avec cette technique je peux faire croire que je porte un coup. Si je le déclenche en premier, en simulant le Ryu Sei Ken, j’obligerai Emony à dégainer aussitôt pour contrer et nous avoir toutes dans le champ de tir. »
Elle pivota légèrement vers Geist tout en accroissant ce qu’il lui restait de cosmos : « Tu es prête Geist, il faut que nous soyons parfaitement synchrones. »
Geist hocha la tête d’un geste d’approbation.
C’est alors que Marin s’élança, poing détendu pour lâcher ses météores.
Emony cria déjà victoire : « C’est pitoyable ! Regroupées comme vous êtes, c’en est trop facile ! Innocent Glumness ! »
Frappe déployée à son tour, défigurée par la joie de la victoire, Emony relâcha tout son cosmos en ravageant le paysage.
Ses coups de poings balancés à une vitesse proche de celle de la lumière pilonnèrent l’horizon, arrachèrent la végétation et les vestiges de la Grèce Antique.
Le nuage de poussière levé l’empêchait de voir les corps démantibulés de ses victimes sans que cela ne l’incite à interrompre.
Toutefois, un violent pincement à la nuque lui fit perdre l’usage de ses jambes.
_ « Eagle Toe Flash, murmura Marin retombée en pic pied droit en avant depuis le ciel dans son cou.
_ Thunder Claw, prirent en étau et en ch½ur Geist et Shaina ! »
Tandis qu’Emony eut la colonne vertébrale brisée sur ce coup du lapin de Marin, Shaina lui planta de sa dernière main valide ses griffes en plein sommet du crâne, lui brisant ainsi son diadème, et Geist en plein pubis, transperçant la ceinture de sa Fane.
Chacune poursuivant son geste, Shaina de haut en bas, Geist de bas en haut, les Griffes de Tonnerre s’entrecroisèrent et déchirèrent verticalement et profondément Emony. Brisant sa Fane, s’insinuant dans sa chair, lacérant son visage. 
A genoux, entourée des trois femmes, sa gorge arrachée ne parvenant à remplir ses poumons d’air tandis que par gerbes régulières son sang fuyait ses plaies, Emony aspirait dans un douloureux râle. Ses paupières arrachées laissaient crédules ses yeux rougis par le sang.
Marin lui apporta alors la raison de sa défaite : « Tu étais persuadée de ta victoire et nous y avons contribué en te laissant admettre que tu étais plus rapide et que tu connaissais toutes nos techniques. Sur le premier point tu avais l’avantage en effet. Sur le second, tu m’as sous-estimé. Il me restait deux techniques non employées. Le Ku Ken est un coup illusoire. J’ai simulé le Ryu Sei Ken que tu connaissais déjà pour engager les hostilités et te faire dégainer. Sauf qu’au même moment, Geist utilisa le Phantom Genwaku Ken pour maintenir une image rémanente de nos positions. En réalité, nous avions déjà quitté nos places en poussant nos cosmos à leurs paroxysmes. Ton Innocent Glumness que tu as lancé avec suffisance n’a rien fait d’autre que de frapper le vide. J’étais au-dessus de toi, prête à retomber en piqué. Geist et Shaina sur chacun de tes flancs, à attendre que mon Eagle Toe Flash que tu ne connaissais pas et ne pouvais pas voir venir te désarçonne pour t’achever de leurs deux techniques, certes connues, mais mortelles et désormais imparables pour toi. »
Marin lui tourna le dos tandis qu’elle glapissait.
Succombant, sa peau flétrissait, elle commença à faner pour de bon.
Geist, cruelle, la coucha au sol d’un coup de pied en pleine poitrine pour qu’elle suffoque dans son sang.
Enfin, Shaina resta à la voir agoniser en la blessant psychologiquement davantage : « Certaines Dryades ont peut-être le niveau des Saints d’or. Mais toi tu n’en fais pas parti. »
Malgré la douleur et la vexation, Emony resta un sourire aux lèvres. Elle pensait : « Le Jardin d’Eden… Notre diversion a donc permis sa résurgence. Tu as réussi Mère… Ma mission fut un succès… »
Le vent balaya la fleur pourrie Emony, tandis que Shaina rejoignait tête baissée ses alliées qui ne pressaient pas le pas. Toutes les trois avaient senti qu’elles ne trouveraient que désolation dans ce qui restait du camp des femmes Saints…
Flashback

_ « Je suis désolé de t’interrompre Eris, la coupe Mars, mais il va nous falloir conclure ton récit sur le chemin du retour. Je sens que mes hommes en ont bientôt fini en Argentine.
_ Très bien. Une petite marche ne me fera pas de mal, répondit elle friponne. Tu ne seras pas déçu de découvrir ce qui se passa réellement au camp des femmes Saints… » 
 

Chapitre 79

Chapitre 79

En Argentine, dans le night-club, Tromos est aux portes de sa vengeance.
En poussant la porte gardée, il débouche enfin sur un grand bureau. Celui-ci dispose d’un mur fait de télévisions retransmettant la vidéosurveillance de l’établissement.
Affalé dans son siège en cuir, le propriétaire du Disfrute n’en revient pas : « Je ne pensais vraiment pas que tu arriverais jusqu’ici. C’est lorsque tu as vaincu facilement le monstre dans la cave que j’ai commencé à avoir des doutes… »
L’ignoble individu dévoile enfin son visage à Tromos instantanément saisi.
_ « … Tu as gagné, achève sa phrase le chef de gang. Je t’engage ! Je vais faire de toi un homme riche. Tu auras tout ce que tu veux.
_ Tu… Tu n’as pas changé, reste un instant bouche-bée Tromos devant lui. Hormis quelques rides, tu restes le même que dans mes pires cauchemars. Un visage crapuleux, chauve avec tout le crâne tatoué, un menton carré et des dents pointues.
_ On se connaît ?!
_ Il y a vingt-et-un ans. Je n’étais qu’un petit garçon, frêle et innocent comme tous les enfants de huit ans. Un petit village dans lequel tu instaurais déjà la terreur. Tu obligeais les gens, de courageux ouvriers travaillant pour nourrir leurs familles, à te verser presque l’intégralité de leurs revenus, sous prétexte qu’ils vivaient dans une citée dont tu te prétendais maître. Tu te servais de cette zone résidentielle pour commencer tes basses besognes. Prostitution, trafic de drogues… »
Toujours confortablement installé dans son siège, le malfaiteur s’allume une cigarette en se sentant glorifié par cette histoire.
_ « Oh tu sais, j’ai commencé jeune à monter mon empire. Je ne me souviens pas de toi.
_ Moi je me souviens de cette nuit où tu es venu en personne punir mon père, qui n’avait pas assez d’argent pour payer ta taxe clandestine. J’ai été le seul à avoir eu le temps de me cacher sous le lit de mes parents. Je me souviens de tout. De tes hommes battant mon père. Le laissant tout juste conscient, pour qu’il puisse te voir violer ma mère et déshonorer mon frère avant de les égorger. Je me remémore encore l’incapacité de ma petite s½ur à répondre, lorsque tu lui as demandé lequel des jumeaux d’un mois elle voulait sauver, alors que tu lui promettais qu’elle aussi s’en sortirait si elle choisissait. J’ai encore ses cris gravés dans ma mémoire lorsque tes hommes ont abusé d’elle, alors qu’elle n’était qu’une enfant pendant que tu m’étais le feu au berceau des deux bébés qui pleuraient car ils mourraient de faim. Et chaque jour, je me vois impuissant, à essayer de tirer mon père immobilisé pour le sauver du feu qui se propageait dans la maison. Il n’y a pas un instant, pas un soupir, durant lequel je ne me maudis pas d’avoir échoué et d’avoir laissé cette peur de petit garçon me forcer à prendre mes jambes à mon cou pour échapper au même sort que les miens.
_ Mouais, recrache insensible Segador sa fumée… Une de mes aventures parmi tant d’autres. Loin d’être la plus palpitante !
_ Comment, s’avance le poing serré Tromos ?! »
Contre toute attente, de chaque côté du large bureau, tapis dans l’ombre, sortent deux derniers hommes de main.
_ « Je te présente les plus habiles tueurs de mon gang. Ils manient aussi bien tous les types d’armes que les styles de combats à mains nues. Je sens que tu vas m’offrir un spectacle beaucoup plus digne que celui de ta mère et ta s½ur dont je ne me souviens pas. »
Ces mots suffisent à faire basculer définitivement Tromos dans cette soif de justice subjective que véhicule Vasiliás.
Sans même laisser le moindre agent réagir, il les terrasse en les tranchant tous les deux en deux à hauteur du buste.
_ « Le Berserker de la Royauté, notre Roi, a raison. Le mal doit être éradiqué à la source. Et je vais m’en charger avec toi. »
Malgré sa fin imminente et inévitable, Segador se permet de se moquer de ses anges gardiens qui gisent au sol : « Les pauvres. Ils devaient manquer d’entraînement ! »
Cette indifférence ne démotive pas l’Arèsien, au contraire.
Il bondit sur Segador et se retient du mieux qu’il peut pour ne pas le tuer d’un seul coup.
En le callant bien dans le creux de son siège, il lui assure : « Je vais te réserver les pires tourments que tu as commis. Et je te promets, moi, homme de parole, que tu perdras ton sourire narquois avant de rendre ton dernier souffle. »
La cigarette lâchée sous le choc, Segador continue d’afficher sa mine sournoise alors que le mégot lui brûle la cuisse, comme pour annoncer que la tâche sera ardue… (Reste 49148 caractères)
 

Chapitre 78

Chapitre 78

En Argentine, dans le night-club, en dehors de la chambre où Vasiliás se livre à un jeu salace, Tromos est arrivé d’un pas décidé à l’étage.
Les yeux fixes et froids, il toise les sept veilleurs de Segador qui gardent la porte au bout du couloir.
Un premier tend la main pour barrer le passage : « Qui t’es toi ? Pas un pas de plu… »
Il n’a même pas le temps de finir sa phrase que Tromos lui retourne le bras, lui brisant ainsi tous les os. Ses camarades ne sont pas assez rapides pour dégainer leurs armes que le colossal Berserker zigzague entre eux pour les tuer d’un seul coup en frappant uniquement un point vital différent pour chacun.
Avant de s’enfoncer dans la dernière pièce, il ramasse sur un des hommes de main une machette attachée à sa ceinture. Il s’en sert pour planter à hauteur de chaque rein le premier rempart au bras brisé : « Meurs en souffrance. C’est tout ce que tu mérites. »


En Grèce, Kyoko continue de raconter à Mars les détails du retour d’Eris sur Terre il y a trois ans.
Sur la terrasse du café où elle a fait germer chez un couple les graines de la discorde, elle narre ses exploits en ignorant la dispute qu’elle a initié chez ses voisins de table…

Flashback
Au Sanctuaire, à proximité du camp des femmes chevaliers, le mètre quatre-vingt-dix-sept de Voskos s’était recroquevillé pour concentrer son cosmos face aux Dryades qui venaient d’éclore.
Le Saint de bronze du Bouvier chargeait de ses cent quatre-vingt-trois kilos une Dryade masculine : « Katapatisi Agria ! »
L’adversaire subit le Piétinement Sauvage de plein fouet et retomba, les os rompus, à côté d’une autre Dryade déjà vaincue et qui fanait avant de finir en poussière.
_ « Et de deux, se glorifia le rustre ! »
Dans son dos, Xiao Ling reculait sous la pression de deux autres qui profitèrent que leurs deux alliées restantes barraient la route au rustre chevalier.
_ « Fraîche, se lécha les lèvres une Dryade…
_ Innocente, pressa le pas la seconde ! »
Xiao Ling était acculée contre un bosquet.
Lorsque la première se jeta sur elle, par réflexe, elle passa ses mains par-dessus sa tête pour saisir le tronc et, appuyant sur ses jambes, grimpa plus haut pour esquiver le coup.
Enchevêtrée dans l’arbre, la Dryade n’eut pas le temps de s’en dépêtrer que Xiao Ling retomba sur elle d’un salto, le talon droit lui fendant le haut du crâne.
Son premier assaillant vaincu, la Chinoise n’en demeurait pas plus rassurée malgré tout.
Le second faisait déjà face, plus incisif.
Avec quelques pirouettes et roulades, elle parvint à esquiver un moment, jusqu’à ce que l’ennemi finisse par planter ses griffes sur le bas de sa tunique, au niveau de l’entrejambe, la laissant à la merci de son autre main aux ongles acérés.
Démunie, elle ferma les yeux, attendant le verdict.
C’est alors que Voskos apparut dans le dos de la Dryade, lui attrapa l’arrière de la tête dans son immense pogne gauche et la lui éclata contre le sol, entre les jambes de la jeune femme fébrile.
Éclaboussée par un sang qui n’était pas le sien, Xiao Ling rouvrit les yeux pour faire face au regard inquisiteur de Voskos : « M… Merci… »
Sous leurs pieds, le sol tremblait des combats venant du camp des femmes chevaliers.
Derrière Voskos, les dernières Dryades fanaient. Le colosse n’en tira aucune gloire.
_ « Ne me remercie pas. Tu aurais dû parvenir à te défaire d’elle sans mon aide, demeura-t-il sévère. Surtout que tu es parvenue à en vaincre une.
_ C’était un coup de chance.
_ La chance… C’est comme le miracle dont parlait plus tôt le Seigneur Algol. C’est l’apanage des Saints. Nous créons notre chance. Nous accomplissons nos miracles. En surpassant nos limites. En brûlant notre cosmos. Tout à l’heure, tu es parvenu à défaire une Dryade. Tu as mêlé sang-froid, analyse tactique du terrain et technique de combat à laquelle tu as joins ton cosmos. Que tu l’ais brûlé inconsciemment ou non, il fallait au moins une once de cosmos pour parvenir à l’éliminer.
_ Peut-être, baissa-t-elle la tête penaude…
_ Je ne peux pas croire qu’une jolie jeune femme comme toi as traversé le monde pour venir jusqu’ici sans rencontrer d’embûches. Des gens malhonnêtes, mal intentionnés, tu as dû en rencontrer des dizaines. Pour t’en débarrasser, tu as dû surpasser ces gens, parfois équipés d’armes contemporaines. Certains chemins sont inhabités. Tu n’as pu voler pour te nourrir. Tu as compensé la faim en t’enveloppant de ton cosmos. Ou tu as chassé dans des lieux où seuls les grands prédateurs arrivent à se repaître. Ou peut-être les deux. Toujours est-il que c’est le cosmos qui t’a maintenu jusqu’ici.
_ Peut-être, balbutia-t-elle à nouveau. Mais pourquoi me dire tout ceci ?
_ Parce que nous sommes arrivés au camp, pointa-t-il du doigt le bosquet dont elle s’était servie plus tôt et qui marquait le début d’une dense forêt. Traverse la forêt et tu trouveras Rebecca. »
Dans son dos, des hurlements de souffrances et de terreurs accompagnaient les tremblements de terre et les secousses cosmiques.
_ « Mais… Mais… Je ne peux pas… C’est la guerre là-dedans…
_ Justement ! C’est pour ça que tu dois aller y porter ton aide ! Nous autres, hommes, ne pouvons fouler cette terre bénie par Athéna. La seule chose que je puisse faire c’est empêcher la retraite des Dryades que vous, femmes, allez vaincre à l’intérieur ! »
Xiao Ling aurait voulu se vautrer plus bas que terre.
_ « … Je… Je ne serai qu’un poids…
_ Un Saint n’est jamais un poids lorsqu’il risque sa vie pour défendre autrui !
_ Mais je ne sais même pas ce qui est en jeu dans cette guerre…
_ Rebecca, celle à qui tu dois la vie aujourd’hui, risque la sienne pour sauver des innocentes prises au piège à l’intérieur et vaincre une menace qui pèse sur le monde !
_ Je ne suis pas aussi forte que Rebecca…
_ Ton soutien lui donnera encore plus de forces !
_ J’en suis incapable… »  (Reste 50642 caractères)
 

Chapitre 77

Chapitre 77

En Argentine, le club où Tromos rendait sa justice s’est vidé.
Libéré du sous-sol miteux où ils étaient réduits à l’esclavage, enfants et opposants politiques sont déjà accueillis dehors par les secours. Ceux-ci, alertés par des voisins interpellés par les fusillades à l’intérieur de l’établissement, attendent les directives des autorités.

A l’intérieur, au rez-de-chaussée, Tromos slalome entre les cadavres des hommes de main de Segador et des victimes pris entre les feux nourris de leurs revolvers.
Le son des enceintes cogne encore dans la tête du seul rescapé au milieu de la piste de danse.
Il fait le tour de lui-même pour, d’une légère émanation de cosmos, détruire chaque caméra afin d’instaurer davantage de crainte aux mafieux qui attendent à l’étage.
Il est temps pour le Berserker de les rejoindre.

C’est justement en haut, au milieu du couloir surveillé au bout par sept gardes du corps, que Vasiliás a suivi Peligra.
Les immenses enceintes ajustées au mur leur ont épargné le moindre soupçon de ce qui a pu se tramer en bas.
Au moment de refermer la porte de la chambre vide où Peligra l’a conduit, l’Américain reconnaît l’apparence de Tromos, couvert du sang de ses victimes, arriver sur le palier pour aller à la rencontre de Segador.

Bien décidé à laisser son second agir seul, Vasiliás retrouve à l’intérieur de la pièce aux murs insonorisés la plantureuse danseuse qui l’assied sur une chaise.
Utilisant une télécommande, elle relance une musique plus engagée qu’en bas.
Perchée sur ses hauts talons, elle reprend là où elle s’est arrêtée.
Habillée de son unique boxer, elle se déhanche de nouveau. Cette fois-ci plus lentement, de manière féline.
Elle fait le tour de la chaise où est assis un Vasiliás subjugué, qui se contente de se laisser caresser par la peau chocolat, douce et parfumée de Peligra lorsqu’elle vient coller contre lui sa poitrine et ses fesses. Alors pour permettre à l’homme d’Arès d’apprécier davantage, elle glisse ses doigts entre sa peau et la lanière de son sous-vêtement, qu’elle laisse descendre très lentement en l’accompagnant jusqu’à ses pieds, offrant à son client la pleine vue sur son intimité dorénavant dissimulée sous une dernière ficelle de tissu avec laquelle elle joue encore.
Seulement, avant de l’abandonner, elle choisit de provoquer son riche client, à qui elle ôte la veste tout en remuant devant lui. Lorsqu’elle s’assoit sur ses genoux, elle tire sèchement sur sa cravate pour écarter en grand sa chemise haute couture, faisant voler tous les boutons.
Face à ce torse nu et athlétique, elle vient coller le sien. Puis, après avoir feint un baiser sur ses lèvres, elle se laisse descendre contre lui en se tortillant paresseusement.
Lorsque son visage arrive devant la fermeture de son pantalon, elle le lui desserre en tirant dessus pour le lui ôter en même temps que ses chaussures…


En Grèce, le serveur vient ramener un nouveau verre à Mars et en profite pour remplir la coupe de Kyoko.
Friponne, elle demande à la réincarnation de son frère : « Sais-tu pourquoi j’ai commencé à réveiller les Evil Seeds du couple voisin ? »
La moue qu’il fait, montre un certain désintérêt pour cette question, dû à l’empressement qui est le sien de connaître la suite des aventures qui ont eu lieu il y a presque trois ans.
_ « Notre serveur porte une Evil Seeds lui aussi. Et il s’avère que l’homme avec qui notre voisine a une liaison secrète est notre serveur. Que dis-tu si je fais éclore son Evil Seed a lui aussi ?
_ Seulement après que tu ais avancé dans ton histoire, lui dit-il en retenant son poignet…
_ D’accord, souffle-t-elle déçue… »  (Reste 60391 caractères)