Chapitre 73

Chapitre 73

En Argentine, à Buenos Aires, pendant que Tromos suit un employé du club peu fréquentable, Vasiliás et Peligra s’isolent plus loin.
Au détour de quelques voiles tombés du plafond destinés à offrir de l’intimité à ceux qui souhaitent s’écarter de la piste de danse, Vasiliás ne perd pas des yeux Peligra.
Partageant côte à côte un verre de champagne, le bras écarté à hauteur du dossier du canapé, comme pour rapprocher la sublime créature de lui, Vasiliás s’occupe de détourner son attention de Tromos.
De sourires en sourires, de compliments en compliments, les deux êtres profitent de cette soirée pour goûter à la présence de l’autre.
Les jambes recroquevillées sur le divan, Peligra laisse à Vasiliás, tout le loisir d’admirer sa poitrine grande offerte sous sa veste déboutonnée.
Très vite, l’ancien homme d’affaires tend quelques billets en indiquant la barre de pole dance : « Quitte à passer une bonne soirée, autant ne pas tout gaspiller en champagne. Il me semblait t’avoir affirmé que j’aime qu’on danse pour moi. »
Comme pour accompagner la demande du richissime Américain, le disque-jockey enchaîne les musiques rythmiques permettant de remuer avec sensualité.

Un simple clignement de paupières de Peligra suffit pour donner à Vasiliás son approbation.
En se levant méthodiquement afin de cambrer chaque partie de son corps, elle ramasse un seul billet qu’elle vient glisser sous la soie entourant sa taille et le haut de ses cuisses à la peau chocolat au lait.
Elle cramponne fermement la tige de métal dressée jusqu’au plafond depuis le podium qu’encerclent les fauteuils sur lesquels Vasiliás s’affale à son aise.
Faisant plusieurs fois le tour de l’axe sur lequel elle descend et remonte continuellement sa main droite comme pour mimer un geste tendancieux, Peligra commence à y rapprocher son corps. Le frôlant en allant d’avant en arrière, tout en tournoyant, elle alterne les rotations dans un sens puis dans l’autre, en s’appliquant chaque fois à enrouler langoureusement sa jambe contre le barreau ferme et froid.
Se saisissant d’une nouvelle coupe fraîchement servie, Vasiliás ne perd pas de vue le spectacle que la véloce jeune femme lui offre.
Suivant de plus en plus les vibrations sonores, elle choisit de lui tourner le dos et de baisser la tête toute en relevant son postérieur. Elle répète cette position, en alternant avec une autre encore plus significative, pour laquelle elle relève une jambe le long du barreau afin d’offrir la vue de son entrejambe écarté mais encore dissimulé sous son n½ud de soie…


Pendant ce temps, en terrasse, à Athènes, Mars tapote tour à tour les doigts de sa main droite sur la table contre laquelle son coude gauche est appuyé pour maintenir sa tête dans la paume de son autre main.
Il est absorbé par le récit d’Eris…

Flashback
Après un intense entraînement, Shoko et Rumi se hâtèrent à Honkios.
Néanmoins, le marché distrayait particulièrement la vorace Shoko.
_ « Shoko ! Il va être l’heure pour les prêtresses de descendre en ville ! Si nous n’allons pas nous cacher au cimetière maintenant, nous louperons ta s½ur !
_ Je sais, piétinait Shoko qui faisait la queue devant un étal, mais c’est ici qu’on trouve la meilleure viande du domaine, bavait-elle sous son masque ! Je compte bien utiliser les sacres que j’ai récupéré en récompense après qu’on a aidé ce petit vieux sur le chemin du retour !
_ Que nous avons récupéré je te ferai dire ! Nous étions deux à l’aider et à être récompensées je te signale ! Mais comme toujours tu t’accapares le tout pour la nourriture ! Tu es incorrigible ! »
Pour seule réponse, l’estomac de Shoko se mit à gargouiller.
Son bruit fut émis si fort qu’il en fit rigoler Filia, la fille du marchand qui aidait son père à servir les nombreux clients.
Alors, une idée vint à Shoko : « Je sais ! Tu vas faire la queue pour moi pendant que j’irai guetter ma s½ur, décréta-t-elle en saisissant Rumi pour l’y poster à sa place ! »
Sans même que Rumi ne put contester, Shoko lui claqua la monnaie dans les mains et partit à vive allure en direction du cimetière.
Blasée, claquant sa main sur son front masqué, Rumi n’eut d’autre choix que de la laisser s’éloigner.

Sortie de la place principale, Shoko déboucha sur les marches des douze maisons.
Dès les premières, bien avant la maison du Bélier, sur la gauche, un chemin morcelé permet de déboucher en contrebas sur une vaste parcelle de terre friable.
Sur la droite, les pavés, en meilleur état, conduisent au colisée.
Incognito dans sa tenue de femme chevalier, elle adopta un pas plus calme afin de ne pas éveiller les soupçons et prit la direction de la parcelle d’où jaillissent par centaines des stèles où sont gravés les noms et les rangs de chevaliers défunts.
Malgré la morosité qui émane d’un cimetière, Shoko demeurait excitée.
Partagée entre la possibilité de revoir sa s½ur, et l’ampleur d’un si spacieux lieu de recueillement particulièrement rempli.
Au milieu de ces incalculables tombes, se dresse un imposant roc dans lequel fut creusé un caveau, à en croire la taille faite dans la pierre.
Devenu le monument de ce cimetière, Shoko se sentit irrémédiablement obligée d’aller en admirer la magnificence.
Sa roche est travaillée pour donner l’impression que des blocs ont été montés les uns sur les autres comme un temple posé par l’homme. Le lierre qui grimpe tout autour jusqu’à son sommet sur quelques parties du pourtour permet de dater ce tombeau à une époque bien lointaine.
De là, elle leva les yeux en direction de la maison du Bélier : « Rumi avait raison. Le chemin du premier temple surplombe pour une bonne partie le cimetière. La distance n’est pas grande. En me cachant derrière ce mausolée, je reconnaîtrai sans problème ma s½ur si elle vient à passer… »

Grand par sa surface, le plateau était balayé par de fraîches bourrasques qui rendait le temps long pour Shoko qui craignait d’être démasquée par les quelques visiteurs venus se recueillir sur les tombes les plus récentes.
Son sens martial lui permettait de percevoir les présences alentours, surtout celles douées d’une forte émanation de cosmos.
Pourtant, elle ne percevait pas venir celui de sa s½ur.
Pas plus que celui d’une présence dans son dos : « Encore toi ! »
Elle reconnut cette voix qui la fit frémir sans hésitation.
Devinant cette prêtresse blonde aux cheveux qui tombent en boucle sur les épaules, Shoko faussa sa gaieté : « Mii ! Quelle bonne surprise ! »
Réajustant une jarre sous son bras, l’aspirante Saintia goûta peu à l’hypocrisie : « Je peux savoir ce que tu fais ici ?! »

Les balbutiements de Shoko et les interjections continues de Mii empêchèrent les jeunes filles de remarquer que la végétation grimpant le mausolée s’agitait curieusement.
Contre nature, les tiges commencèrent à s’enrouler les unes autour des autres pour former un fouet dans le dos de Mii, tandis que deux tentacules rampaient dans le dos de Shoko.
Plus expérimentée, Mii remarqua la progression douteuse et se jeta sur Shoko : « Qu… Quoi ?! Tu veux te battre, réagit d’abord d’une voix étouffée sous son masque la Grecque. »
Alors que la jarre qu’elle abandonna au sol se brisa, libérant le vin qu’elle était partie chercher, Mii manqua de vigilance et se fit frapper à revers par la liane.
Trop tard, Shoko ne comprit qu’après avoir été saisie à chaque jambe la singularité des évènements.
Désarçonnée, Shoko s’inquiéta pour Mii qui demeurait inconsciente malgré ses appels, un filet de sang fuyant son front.
_ « Tu ferais mieux de t’inquiéter pour toi Mère. »
Inopinément, le fouet lui préconisa ces conseils tandis que les tentacules libéraient d’autres liens qui étreignaient cette fois-ci les bras de Shoko.
_ « Le… Le lierre me parle ?! Comment… Comment m’a-t-il appelé ?! »
Un bourgeon se forma au bout du lien avant d’éclore pour laisser en sortir une femme.
Ses formes étaient pulpeuses. Sa taille juste couverte d’un pagne. Son opulente poitrine, agrémentée d’un collier qui descendait au creux de ses fermes seins, entièrement dévoilée.
_ « Je te retrouve enfin, poursuivit la fleur devenue humaine, avec ce corps si jeune et plein de vie, dégaina-t-elle une pomme en or.
_ C’est… C’est comme dans mon rêve ! »
Shoko reconnut l’artefact à travers son masque. 
Les liens se resserrèrent tout autour d’elle, allant jusqu’à lui écraser la gorge.
_ « Mère, je suis Até Dryade de la Ruine, poursuivit l’étrangère en ôtant à Shoko son masque, l’heure est venue de retrouver votre place sur Terre, tendit-elle la pomme vers le visage découvert de Shoko. »
Le manque d’oxygène et l’accumulation de stress à mesure que l’étrangère progressait pomme tendue vers elle commencèrent à lui faire perdre connaissance.
C’est alors qu’une lueur azure déchira l’espace entre Shoko et l’intruse.
_ « Shoko, s’exclama la lumière ! »
Etourdie, Shoko ouvrit lentement les yeux.
_ « Heureusement, je suis arrivée à temps, poursuivit le halo de lumière qui prenait forme humaine.
_ Kyo… Kyoko… Comme dans mon rêve, c’est toi qui viens m’éloigner de ce danger ? »
A mesure qu’elle put l’identifier, Shoko reconnut sa s½ur.
Ses yeux noisette.
Ses longs cheveux bleus.
C’était bien elle.
Le visage plus mûr et la silhouette plus femme que dans ses souvenirs.
_ « Kyoko ? C’est bien toi… Kyoko ?! »
L’aînée répondit d’un simple geste en sortant de sous le col de sa Cloth un pendentif au bout duquel resplendissait le même Pégase que celui de sa s½ur.
_ « Mais… Cette tenue… Tu es…
_ Oui, je suis devenue la Saintia du Petit Cheval, au service d’Athéna.
_ Alors tu as réussi, s’embua les yeux la cadette ?!
_ Je t’expliquerai plus tard, écarta-t-elle sa s½ur en chargeant son poing de cosmos. Equuleus Ryu Sei Ken ! »
Les Météores du Petit Cheval s’abattirent telle une pluie de coups projetés à la vitesse du son sur Até.
Alors que le danger était repoussé, Kyoko se retourna vers Shoko pour dresser avec fierté son poing.
Morveuse, Shoko se jeta dans ses bras.
_ « Tu m’as tellement manqué ! J’étais si triste… !
_ Oui… Moi aussi… Tu as dû te faire tant de souci à cause de moi ! Je suis heureuse de te revoir saine et sauve !
_ Depuis toutes ces années je m’entraîne dur pour devenir Saintia et être digne de toi ! Mais ton attaque était si rapide et puissante que j’en suis sidérée ! Je me rends compte que j’ai encore beaucoup de travail si je veux être à ta hauteur !
_ Ne dis pas de bêtises voyons ! Je suis fière de toi, je l’ai toujours été ! A ta tenue d’ailleurs, et au masque qui jonche le sol, j’en déduis que tu as déjà atteint un certain statut.
_ Pas autant que tu ne le penses hélas, baissa honteusement l’étourdie apprentie. J’ai intégré le camp des femmes Saints en attendant de réussir à être admise chez les prêtresses.
_ Ecoute, reprit son sérieux l’aînée, je ne sais pas quelle est la nature de notre ennemie, mais une chose est sûre, mon coup ne lui a pas été fatal.
_ C’est impossible.
_ Sais-tu quelque chose à son sujet ?
_ Non, c’est la première fois que je la vois… Enfin…
_ Enfin ?!
_ Elle m’est déjà apparue en rêve. Tout du moins, la pomme qu’elle tenait.
_ La pomme, s’exclama Kyoko en cherchant aussitôt l’objet du regard ?! »

A terre, Até reprenait ses esprits.
Son premier réflexe fut de retrouver l’artefact.
Ce fut bref. La pomme irradia brièvement mais suffisamment pour qu’Até puisse la remarquer : « Elle a étrangement réagi dès lors que cette Saintia a posé les yeux dessus… »

Devant le mausolée, Kyoko mit en garde sa s½ur.
_ « La Pomme d’Or qui retient prisonnière Eris Déesse de la Discorde. Athéna l’envoya sur la comète Repulse afin que plus jamais Eris ne revienne causer le mal sur Terre… C’est ce qu’on nous apprend au temple des prêtresses…
_ J’ai déjà dû entendre ça aussi au camp des femmes chevaliers, badina Shoko moins sérieuse.
_ Shoko… Ecoute-moi, somma Kyoko d’une voix empruntée, cela n’est pas à prendre à la légère. Si Repulse s’est rapprochée suffisamment de la Terre pour que la Pomme d’Or s’en échappe, c’est qu’Eris a tout mis en ½uvre pour se réincarner. Je vais compter jusqu’à trois et lancer ma prochaine attaque. Pendant ce temps, tu vas t’enfuir ! Surtout, ne t’occupe pas de moi !
_ Non, tremblota Shoko devant l’inquiétude de sa s½ur… Nous venons à peine de nous retrouver… S’il… S’il y a danger, alors je ne peux te laisser seule contre…
_ Sois sage et fais ce que je te dis d’accord, lui demanda-t-elle avec précaution ? »

Cependant, une voix enfantine venue de leur dos rendit toute retraite impossible : « Il est plutôt présomptueux d’imposer son choix à notre mère ne trouves-tu pas ? »
En faisant volte-face, les s½urs identifièrent une enfant aux cheveux gris cendre.
Elle tenait au c½ur de sa tenue pouponne pourpre un ourson en peluche.
_ « Une enfant ?! Que fait-elle ici ? Sa tenue ne ressemble en rien à ce que nous portons au Sanctuaire, s’étonna naïvement Shoko.
_ C’est parce qu’elle n’a rien à voir avec le Sanctuaire justement. Et tu ferais mieux de ne pas te fier à son apparence, l’encouragea Mii qui revint à elle en s’essuyant les plaies de son visage.
_ Ce n’est pas gentil, bouda la gamine. N’est-ce pas Mick, demanda-t-elle à son ours en peluche ?
_ Beuh… Elle est carrément dérangeante celle-là, dit Shoko en se mettant position de combat ! »

Loin d’être au bout de ses surprises, une nouvelle voix, semblable à la sienne, s’adressa à Shoko : « Si Emony Dryade de la Méchanceté te choque, alors que dis-tu de ça ? »
En effet, devant elle se tenait sa copie conforme.
La Dryade était vêtue de la même manière, un débardeur bleu marine et un shorty moulant d’un bleu plus clair. La seule chose qui la différenciait était que sa tenue était moins abîmée que celle de Shoko.
Prenant appui au sol dans ses ballerines blanches, Shoko tendit ses poignets bardés de bandelettes de papier rouge en direction de sa jumelle.
_ « Non mais je rêve ! C’est moi, écarquilla grand les yeux Shoko ! C’est quoi ce cirque ?!
_ Oh… Tu es confuse, pardonne-moi j’aurai dû me présenter, fit une révérence son double. Je suis Mania Dryade de la Folie.
_ Shoko, la calma sa s½ur en lui prenant l’épaule, finalement je pense que nous ne serons pas trop de trois contre elles. »
Shoko acquiesça tandis que Mii se rangea à leur côté.
_ « Des Dryades. Cela signifie qu’elles sont des guerrières du camp d’Eris. Je ne vais pas me laisser berner par une gamine, lança Mii les hostilités, vous êtes ici sur le territoire d’Athéna ! »
Mii lança son poing en direction d’Emony qui se servit de Mick comme bouclier.
Shoko para l’onde de choc d’un coup porté à distance par Mania.
Kyoko devança Até.
_ « Je ne te laisserai pas t’en prendre à ma s½ur ! Surtout pas sur notre terre ! Equuleus Ryu Sei Ken ! »
Até parut à l’aise face à ce nouvel assaut dont elle se moqua : « Je ne me ferai pas surprendre deux fois par la même attaque ! »
Pendant qu’elle esquivait les météores, Até remarqua la Pomme d’Or être animée par la détermination de Kyoko.
La Saintia profita de cette déconcentration pour charger davantage de coups débordant de plus en plus de cosmos. Até en perdit la pomme et fut repoussée.

A côté, Mania avait rejoint Shoko déstabilisée par l’onde de choc. Elle s’acharna au corps à corps. Heureusement pour elle, la Grecque mit à profit les nombreuses leçons de Rebecca ainsi que les remontrances de Mayura. Elle réussissait à bloquer chaque attaque.
Plus sale et moins bien fagotée qu’elle, Shoko constata rapidement à quel point Mania veillait à ne pas réaliser le moindre geste pouvant être considéré comme grossier : « Elle fait bien trop attention à sa gestuelle alors que nous sommes en plein combat. Hormis le fait qu’elle soit mon reflet, elle n’a rien de ma personnalité. Elle ne peut donc pas prédire mes mouvements. Je dois contre-attaquer, décréta-t-elle ! »

En face, à coup de peluche telle une enfant gâtée à qui on refusait un caprice, Emony s’acharnait sur Mii : « Tu m’as attaqué ! Tu es vilaine, vilaine, vilaine… »
Comprenant à chaque coup qu’il ne s’agissait pas d’un jouet ordinaire, Mii se recroquevilla derrière ses deux bras en attendant une ouverture.
Lorsque Emony prit un nouvel élan, Mii se redressa pour asséner un coup de pied circulaire chargé de cosmo énergie : « Angel Splash ! » 
Emony fut balayée en laissant s’échouer au sol Mick.

Esquivant une droite en inclinant son visage sur le côté, Shoko désarçonna Mania en lui collant un coup de genou en plein abdomen. Mania recula de quelques pas et reprit aussitôt une pose gracieuse. Mais le temps qu’elle se préoccupa de son attitude, elle fut devancée par Shoko qui déclencha un crochet du gauche que Mania capta de sa main droite. Mania tenta de la frapper du tranchant de sa main gauche contre son épaule droite, mais Shoko anticipa en lui bloquant à son tour la main.

Emony, elle, se remettait au loin du coup reçu : « Méchante fille ! Tu as voulu montrer que tu étais l’élève la plus disciplinée de ton ordre en faisant l’étalage de ton apprentissage de combattante ! Mais ça ne marche pas avec moi ! »
Dans le dos de Mii, Mick, resté à terre, prenait un air menaçant : « Nightmare Scheme, cria la Dryade ! » 
Jaillirent alors du sol une multitude de lobélies qui recouvrèrent le corps de Mii.

Devant, Kyoko remarqua les difficultés rencontrées par ses alliées.
Néanmoins, du lierre jaillit de terre pour lui faire barrage, tandis que celui du mausolée fonçait sur elle sous forme de lances.
Até était déjà remise : « Million Hatred ! » 

En plein duel de force, mains contre mains, Shoko usa d’un geste qu’elle se doutait que Mania n’anticiperait pas, le qualifiant d’inconvenant. Elle écarta leurs bras pour rapprocher leurs deux corps tout en prenant un élan suffisant et lui infliger un coup de tête en plein nez. Repoussant Mania au loin dans une gerbe de sang.

Pendant ce temps, les fleurs se servirent du corps de Mii comme de la semence. Elles poussèrent jusqu’à lui faire perdre ses forces.

Shoko choisit d’aller la secourir mais Mania, le visage tuméfié, lui renvoie dans le dos un coup à distance.

Kyoko usait de mouvements longs et tranchants pour endiguer avec ses bras et ses jambes les innombrables assauts d’Até qui revenait vers elle d’un air menaçant.
Elle voulut la repousser à nouveau mais le temps qu’elle charge ses météores, une lance végétale lui transperça la cuisse.

Distinguant la détresse de sa s½ur, Shoko l’imita spontanément en dégageant de son poing sa cosmo énergie comme si elle balançait le Ryu Sei Ken.
Toutefois, elle ne fit pas de miracle.
Un seul coup puissant partit pour frapper à son tour à longue portée Mania en pleine épaule et la renvoyer au tapis.

Até avançait vers Kyoko prisonnière de la lance figée dans sa jambe.
Les autres lames de bois s’assouplir alors pour former de gros tentacules qui vinrent enserrer sa victime.
Alors qu’elle était à sa merci, Até fut troublée : « Plus je prends le dessus sur cette Saintia, plus j’ai l’impression que mes forces me quittent. Comme si… »
Elle examina la Pomme d’or qui scintillait : « Comme si le cosmos de Mère entravait mes mouvements… La protégerait-elle plutôt que moi… Serait-ce parce qu’elle est la s½ur de son réceptacle ? Non… Mère n’attache pas d’importance à ce genre de considération… »
Tandis que Shoko arrivait en titubant à la rescousse de sa s½ur, Até la fit dégager d’un revers de tentacule : « Ne t’en fais pas, je viendrai éveiller Mère en toi quand j’en aurai fini avec elle ! »

Shoko rebondit à proximité de Mii sous la menace de tomber en léthargie.
Déterminée, l’apprentie femme chevalier se remis aussitôt en position de combat : « Mii, s’inquiéta-t-elle alors ! Ce n’est pas que tu as toujours été gentille avec moi, commença-t-elle en frappant du pied l’ourson malveillant qui était sur son passage, mais je ne peux te laisser dans cet état ! »
Profitant qu’Emony courrait récupérer sa peluche, Shoko prit Mii dans ses bras et amplifia sa cosmo énergie pour brûler les lobélies.

Até, elle, faisait étouffer Kyoko sous l’éteinte de ses liens : « C’est ridicule ! Mère te protégerait plus que moi ?! Parce que tu es la s½ur de son réceptacle ?! Et puis quoi encore ?! »
Les tentacules levèrent du sol Kyoko dont l’expression d’angoisse exprimait parfaitement leur progression malsaine. Ils s’enroulaient lascivement autour de ses jambes et s’attardaient sur sa plaie à la cuisse pour lécher son sang tout comme Até laissait glisser la paume de sa main tout le long de son visage.
Pendant que la Dryade passait sa langue de l’intérieur de sa main jusqu’au bout de son majeur, les tentacules remontaient le long des bras de Kyoko jusqu’à venir s’enrouler autour de sa Cloth à hauteur de sa poitrine. L’acidité du sang de sa cuisse les appela inexorablement à remonter chercher un goût plus suave.
Alors qu’ils comprimaient sa cuisse pour remonter jusque sous sa robe, Até continuait de descendre sa main pour venir d’un mouvement circulaire inconscient happer sa poitrine qu’elle frottait jusqu’au bout de ses seins.
Tandis qu’une fièvre la menaçait, partagée entre la perte de ses pouvoirs que lui infligeait la pomme et le désir charnel que les sévices sur Kyoko lui procuraient, Até fut repoussée par un violent coup à l’estomac.
Aussitôt, le lierre s’embrasa d’une flamme bleutée.
Pendant que les liens se replièrent sur eux pour lutter contre leur combustion, sortirent du foyer Kyoko et son sauveur qui la portait à bras.
_ « Rigel, se blottit-elle contre lui en prononçant son nom…
_ Kyoko, la fixa Rigel plein d’émotion, je suis là à présent…
_ Je vais reprendre le combat, se remit-elle sur pied galvanisée par son sauveur. »
Boitant, elle reprit sa garde, alors que lui n’arrivait pas à détacher ses yeux d’elle.
Grand dans son armure argentée, il souriait, hébété, en l’admirant.

Derrière eux, Shoko remarqua que sa s½ur semblait partager quelque chose avec lui : « Les Saintias ne doivent-elles pas rester chaste, songea-t-elle… Pourtant, le regard qu’ils se sont échangés un bref instant paraissait bien passionné. »
Elle n’eut pas le temps de cogiter davantage que Mania et Emony l’encerclaient déjà.
Mii revenait difficilement à elle.
_ « Laisse-moi la mettre hors de combat, implora Mania à Emony en se tenant l’épaule de douleur.
_ Si tu y tiens, dit Emony en caressant Mick.
_ T’es grave, déplora Shoko envers Mania, qu’est-ce que je t’ai fait pour t’intéresser autant ?!
_ Tu n’as toujours pas compris, s’étonna Mania qui devenait à chaque phrase de plus en plus hystérique ? Tu es née pour être la réincarnation de Mère ! Notre mère nourricière ! Si belle ! Si attentionnée ! Si puissante ! C’est pour ça que j’ai éclos à ton image ! Je voulais tes traits ! Etre aussi belle que Sa Majesté Eris !
_ Tu nourris un véritable complexe d’¼dipe. C’est malsain, grimaça de moquerie Shoko ! »

A l’opposé, Até sentait ses forces lui revenir : « Depuis que cet homme est arrivé j’ai l’impression que la Pomme d’Or cesse de m’entraver. Très bien, je vais me débarrasser d’eux. Mania et Emony ont réussi à isoler le réceptacle de Mère. Elles l’auront affaibli d’ici là. »
Rigel posa sa main sur l’épaule de Kyoko afin de lui passer devant : « Kyoko. Repose-toi. Moi Rigel Saint d’argent d’Orion, je vais me charger de cette Dryade. Ignis Fatuus ! »
Curieuse de la complicité apparente entre eux deux, Até se laissa distraire par les flammes bleues et blanches projetées par le chevalier.
La formidable chaleur dégagée l’empêcha de déployer toute sa puissance.
Elle ne vit pas arriver par les airs Kyoko qui à bout portant déclencha son arcane : « Equuleus Ryu Sei Ken ! »
Le corps d’Até martelée de météores, rebondit une centaine de fois au sol sans qu’elle ne puisse riposter.

Au même instant, Mania se jetait sur Shoko. C’est ce moment que Mii choisit pour se relever et contrer par surprise la progression de Mania : « Angel Splash ! »
Shoko profita de la confusion pour attaquer plutôt Emony qui ne s’y attendait pas.

Les trois Dryades repoussées, Rigel se précipita pour soutenir Kyoko et rejoindre Shoko et Mii bras dessus bras dessous pour se maintenir debout.
_ « Merci d’être venu à notre secours Rigel, posa sa main Kyoko sur le torse de son sauveur.
_ Ah ! Oh ! Euh ! Vous vous… Vous êtes ensemble, pointa du doigt sa s½ur Shoko !
_ Ne dis pas de bêtises voyons, fronça les sourcils Kyoko gênée devant Mii. »
Très procédurière, Mii fixait le couple avec suspicion et remarquait que Rigel fuyait les regards.
Cependant, autre chose inquiétait la prêtresse.
_ « C’est tout de même étrange que si proches des maisons du zodiaque, il n’y a que toi Rigel qui a ressenti les Dryades.
_ A vrai dire, commença-t-il gêné, ce ne sont pas les Dryades que j’ai ressenties. Ce qui m’a interpellé, c’est le cosmos de Kyoko qui faiblissait à vue d’½il.
_ Mais comment est-ce possible que personne ne détecte leurs cosmos étrangers, s’enquerra Mii ?
_ C’est parce que nous ne sommes que des émanations de vos traits de personnalités, répondit une voix nouvelle. »
L’auteur, une femme au corps couvert d’une longue cape, sortit de l’ombre du mausolée.
Son regard inquiétant perçait à peine les mèches de ses cheveux châtain foncé qui passaient devant ses yeux. Dysnomie prit la parole.
_ « Obstination, fixa-t-elle Shoko, désir charnel, poursuivit-elle en regardant Rigel, luxure, sourit-t-elle à Kyoko, secret, taquina-t-elle Mii, luxure, mensonge, tentation, déviance, écarta-t-elle les bras au ciel comme pour englober tout le Sanctuaire, nous représentons tout ça. Et vous êtes tout ça. Oui, toi aussi petite souris rongée par un amour inavoué enfoui sous ta rigide discipline, taquina-t-elle Mii. Pour entrer ici, notre cosmo énergie se tapit dans l’ombre des vôtres. De votre cosmos émane vos vertus mais aussi vos péchés. Dès lors, c’est un jeu d’enfant pour nous de nous faufiler ici. Le kekkai d’Athéna ne peut donc faire barrière contre vous autres et, en l’occurrence, contre nous autres qui sommes une partie de vos reflets. Je suis Dysnomie Dryade de l’Anarchie. Et je suis venue vous chercher Mère, inclina-t-elle sa tête vers Shoko.
_ C’est ridicule, s’élança Kyoko contre elle ! »
Mais Dysnomie parut plus alerte que ses soeurs et immobilisa sans peine grâce à sa télékinésie la Saintia qui perdait encore beaucoup de sang par sa cuisse.
Rigel choisit de la secourir, mais il constata trop tard que ses membres étaient immobilisés par le lierre d’Até.
Les trois premières Dryades étaient revenues à l’assaut.
Mania rendait à Mii la monnaie de sa pièce d’un direct au foie.
Shoko reculait pour prendre son élan face à Emony mais se sentit acculée : « Un mur ?! Le monument est loin derrière nous pourtant… »
C’est alors que des mains se posèrent sur ses hanches et remontent langoureusement sous son maillot jusqu’à sa poitrine.
_ « Que tu sens bon… Encore pure et pleine d’un si grand potentiel, susurra le roc dans son dos. »
Elle fit volte-face et découvrit la première Dryade masculine qui lui fit la révérence : « Je suis Phonos Dryade du Meurtre ! »
Il aurait pu lui paraître beau avec ses oreilles d’elfe, dans sa longue robe ébène couverte d’une cape blanche, si la façon dont il la dévorait du regard n’était pas si obscène.
_ « Laissez-là, beuglait à l’envie Kyoko impuissante ! Partez ! Laissez ma s½ur ! »
Até pouffait de rire devant la faiblesse de Kyoko.
A la merci des Dryades, Shoko tournait sur elle-même, ne sachant à laquelle se vouer en premier.
Até était la plus entreprenante de toutes. Elle avançait obstinément pomme tendue vers l’avant. Le fruit brillait de plus en plus, à mesure qu’il approchait son réceptacle. Il libérait un halo de lumière qui voguait jusqu’à lui.
L’entourant.
Pénétrant ses sens en s’infiltrant par ses narines.
_ « Shoko ! Shoko ! Bats-toi ! Ne te laisse pas envoûter, hurlait son aînée ! »
Alors, à chaque supplication, la Pomme d’Or resplendissait encore plus qu’elle ne s’illuminait pour Shoko.
Até perdit son rictus moqueur, en comprenant l’influence que Kyoko avait sur l’artefact.
Enivrée, Shoko n’avait plus la force de lutter malgré les exhortations de sa s½ur à ne pas lâcher prise.
Kyoko était défigurée par la haine qu’elle éprouvait pour la menace qui guettait sa s½ur : « Vous me le paierez ! Je vous ferai subir mille tourments ! Athéna elle-même ne m’empêchera pas de vous mettre au supplice ! »
Toute proche de Shoko, Até sentait l’intérêt paradoxal de la pomme pour chacune des s½urs.
Le camp d’Athéna était suspendu aux lèvres de la méconnaissable Saintia.
Mii était choquée par Kyoko, son modèle.
Rigel n’avait jamais perçu cette facette de sa personnalité.
Kyoko bavait de rage, les lèvres retroussées.
Les sujets d’Eris frémissaient d’impatience.
Mania dévorait des yeux son sosie.
Emony étranglait d'empressement Mick.
Phonos passait sa langue de façon concupiscente sur sa lèvre supérieure.
Dysnomie fronçait les sourcils, en ressentant le même malaise qu’Até.

C’est alors que l’échéance fut imminente, que soudain, un cristal de glace vint écorcher le revers de la main d’Até, faisant tomber la pomme.
Dysnomie fut attaquée par une vague de froid, l’obligeant à cesser sa restriction sur Kyoko.
Rigel profita de l’attention relâchée d’Até pour brûler de ses flammes bleues ses liens.
Et Mii tournoyant sur elle-même, profita qu’elles soient côte à côte pour frapper à revers Mania et Emony d’un coup de pied circulaire encore plus puissant que son précédent arcane : « Angel Blow Splash ! »
Katya, à peine remise du meurtre de Klaus, apparut enfin à leur rescousse.
Couverte de sa Cloth, elle poursuivit son offensive sur Dysnomie : « Jewelic Tears ! »
Des cristaux de glace menacèrent la Dryade qui, une fois l’effet de surprise passé, se contenta d’un revers des longues manches de sa tunique pour balayer le froid.
Cependant elle ne vit pas Kyoko arriver de l’autre côté et fut martelée par une pluie de météores : « Equuleus Ryu Sei Ken ! »
Pendant que Mii allait au chevet de Shoko, Kyoko se réjouissait de l’arrivée de sa camarade.
_ « Katya ! Dis-moi que c’est le Grand Pope qui nous envoie les secours ?!
_ Hélas non. C’est parce que je me rendais à Honkios que j’ai découvert ce qui se trame ici.
_ Espérons alors que d’autres Saints usent de la montée des douze maisons, car nul ne peut ressentir le cosmos de ces Dryades ! »

Rigel, lui, entamait un corps à corps avec la si peu vêtue Até.
Galvanisée par l’éclat d’Eris à travers sa pomme, Até entamait à chaque coup la Cloth d’argent.
Malgré qu’il parût le plus acharné, faisant reculer à chaque tentative Até, Rigel brassait du vent.
Até esquivait chaque assaut et lui rendait au double en touchant sa cible.

_ « Et Rigel, demanda l’air complice Katya à Kyoko ?
_ Il m’a senti en danger. Tu sais ce que c’est après tout d’avoir un ange gardien qui veille sur toi, fit allusion en retour Kyoko à Saga. »
Katya sourit chaleureusement et repartit au combat après que Dysnomie se soit relevée : « Si seulement Saga pouvait encore m’apparaître, espéra-t-elle ! »

Souhaitant être seul avec Shoko, Phonos s’en prit à Mii avant qu’elle n’atteigne son amie en la heurtant aux côtes : « Despaired Bite ! »
Par une multitude de coups d’ongles, Phonos repoussa de son cosmos Mii contre le flanc de la montagne qui supporte les marches vers les temples des chevaliers d’or.

Refusant de laisser les siens se battre sans elle, Shoko empêcha que Mania se jette à la poursuite de Mii.
A distance, elle entama une bataille de coups à longue portée avec Mania.
Toutefois, si elle gérait Mania du mieux qu’elle pouvait, elle ne put empêcher Emony de rendre à Mii la monnaie de sa pièce.

Mii ne pouvait plus reposer pied à terre, tandis qu’Emony déclenchait à chaque fois son arcane : « Innocent Glamness ! »
Des centaines de pétales de lobélies, semblables à des papillons menaçants, venaient la heurter, égratigner sa peau, déchirer sa robe, ronger sa chair.
Mii était chaque fois balancée contre la roche, avant d’être attaquée à nouveau.

De son côté, Rigel commençait à payer le prix des contre-attaques qu’il encaissait.
De sous son diadème ébréché, du sang s’écoulait de ses plaies crâniennes. Ses pommettes fendues lui gonflaient les joues.
Até se voyait victorieuse.
Pourtant, Rigel gardait le sourire. Até comprit trop tard qu’elle était prisonnière d’un brasier.
_ « Impossible ! En réalité je n’esquivais pas tes coups. Tu frappais tout autour de nous pour nous entourer de flammes.
_ Tu as vu juste. Et maintenant prisonnière de mes flammes, tu vas subir de plein fouet mon Feu Follet Dansant : Ignus Fatuus Saltare ! »
Tel un maelström, le feu bleu et blanc monta haut dans le ciel pour former un dôme qui retomba lourdement sur les deux adversaires, les emprisonnant dans le foyer.

_ « Rigel, s’époumona Kyoko pourtant en plein combat !
_ Tu ferais mieux de t’inquiéter pour toi ! Tes sentiments interdits vont mettre en péril ton alliance avec ton amie, la prévint Dysnomie ! »
En effet, alors que leurs attaques coordonnées empêchaient la Dryade de riposter, Dysnomie profita de la déconcentration de Kyoko pour répliquer contre Katya qui n’était plus couverte.
Après avoir évité un direct de Katya au visage, Dysnomie posa sa main contre le poitrail de la Couronne Boréale. Elle matérialisa une boule de cosmos qui repoussa la Saintia.
La déflagration fut si puissante que Katya inconsciente embarqua dans l’élan Kyoko désarçonnée.
Elles atterrirent contre le flanc de montagne où Mii peinait à faire face.

Plus loin, se cachant tour à tour de stèles en stèles, n’en sortant uniquement que lorsqu’elles portaient un impact chaque fois plus puissant, Shoko et Mania poursuivait leur bataille à longue distance.
Chacune parvenait à faire mouche au regard de leurs tenues déchirées, sans toutefois réussir à prendre l’avantage.

A peine Katya et Kyoko heurtèrent le rocher, que Dysnomie, à leur poursuite, ne leur laissa pas de répit.
Elle saisit par la jambe Katya inconsciente et se servit de son corps telle une masse pour frapper à trois reprises contre Kyoko.
Le choc de leurs corps fit crisser leurs Cloths et les ébrécha par endroit.

Inquiète devant la punition infligée à sa s½ur, Shoko se découvrit inconsciemment.
Donnant l’opportunité à Mania de parfaitement viser sa cible.
Cependant, revigorée par le devoir de secourir Kyoko, l’Athénienne joignit toutes ses forces dans un coup qui écrasa celui de Mania au moment de leur impact. Ce coup ressemblait bien plus à un météore que tous ceux portés jusqu’à présent. Mania fut heurtée en plein estomac et repoussée sur plusieurs mètres, inconsciente.

En même temps, Rigel sortit du foyer immense.
Le feu consumait suffisamment de cosmos pour devenir visible à quelques kilomètres de là au sein du Sanctuaire.
Victorieux à première vue d’Até, sa première pensée fut pour sa bien-aimée inconsciente un peu plus loin.
Il s’élança contre Dysnomie et Emony.

Décidée à faire front contre elles aussi, Shoko en oublia Phonos qui réapparut à nouveau dans son dos.
Elle effectua un coup de pied retourné pour s’en débarrasser, mais son mouvement fut entravé par des fils de soies.
_ « Paralyze Silk. Tu es prisonnière de ma toile, ricana Phonos. »

Simultanément, du lierre traversa sous forme de lances les tombes et faucha en plein élan les cuisses, le poitrail et les bras de Rigel, manquant de justesse de l’éborgner.
_ « Non… Até… Tu as survécu, déplora Rigel à bout de forces. »

D’un éclat de rire sadique, Phonos se mit à glisser ses doigts à travers les cheveux de Shoko : « Un corps innocent, pur… Personne ne l’a encore parcouru n’est-ce pas ? Je me délecte d’avance de savoir ce qu’en fera Mère… »
Amusée aussi, Até approchait avec la pomme.
Emony et Dysnomie laissèrent choir leurs adversaires.
Mania ouvrait grands les yeux pour savourer cet instant qu’elle attendait tant.
Kyoko revenait progressivement à elle.
Rigel, suspendu au dessus du sol par les piques tranchant d’Até, préférait fermer les yeux, couvert de honte par sa défaite.
Mii presque dénudée et couverte d’hématomes, rampait jusqu’à Katya en espérant la ramener à elle.
A la merci de la Pomme d’Or, Shoko fermait les yeux : « Kyoko… Grande s½ur… Parviendras-tu à me sauver cette fois encore comme dans mes cauchemars ? Ou bien… Comme pour Rigel et toi, existe-t-il un héros, un ange gardien capable de veiller sur moi ? »

Kyoko, l’armure ébréchée, ne parvenait pas se ressaisir.
Elle regardait Rigel étripé par les lianes arbustives se vider de son sang, avant de constater avec davantage d’effroi qu’elle ne pouvait pas sauver sa s½ur cette fois.

Shoko l’avait compris.
Epuisée, elle ferma les yeux.
S’en voulant d’avoir causé tant de tort à sa s½ur : « Grande s½ur… Je t’ai été bien pénible… J’aurai tant espéré d’autres retrouvailles… Mais tu as fait ta vie… Tes choix… Trouvé ton bonheur à travers ton rang et ton amour pour cet homme… Moi j’ai été négligente… J’ai échoué à te rendre fière… Et voici qu’on m’annonce être le réceptacle d’une ennemie d’Athéna… Rigel t’aime et te sauve. A deux, vous vous battrez pour Athéna… Mais moi, demain, avec qui me battrai-je ? Qui risquera sa vie pour moi ? »

La réponse vint à Shoko par un éclat aussi éblouissant que le soleil.

La lumière passa à travers ses paupières.
Son corps, soudain libéré de la soie, retomba lourdement.
Mais il ne chuta pas au sol.
Il était maintenu dans les airs par une poigne solide, qu’elle sentait sous le pli de ses genoux et derrière son dos.
_ « Cet homme…Non ce n’est pas un rêve… Un homme en or… Sa prise est si dure… Son armure est si solide… Et sa peau… Elle sent si bon le soleil, tout comme ma peau, contempla-t-elle.
_ Tu vas bien, lui demanda sans ménagement son héros aux longs cheveux bleus ?
_ Un Saint d’or, pesta pour sa part Phonos.
_ Milo du Scorpion, s’annonça le chevalier, je suis venu chasser l’araignée que tu es du Sanctuaire. Scarlet Needle ! »
Tout en gardant Shoko dans le creux de son bras gauche, il décocha de son ongle allongé cinq piqûres.
Chacune frappa chaque Dryade.
Toutes plièrent genou à terre, les yeux déchirés par la douleur.

_ « Non… Toutes n’ont pas été atteintes, constata Milo en voyant que Dysnomie n’était plus là ! »
D’un saut acrobatique, la Dryade de l’Anarchie surplombait le Scorpion.
Par réflexe, la faisant tournoyer sur elle-même en la libérant de son bras gauche, Milo écarta Shoko du danger.
Accumulant sa cosmo énergie dans son index droit, il forma une concentration de cosmos pour contrer l’immense sphère de cosmo énergie emmagasinée par Dysnomie qui le menaçait à bout portant.
Dans la foulée, Phonos revint à la charge.
_ « Desperate Bite, attaqua à revers Phonos pour faire pencher la balance !
_ Tu es trop lent, Scarlet Needle ! »
Milo répondit avec son index gauche, avant de ramener à lui Shoko qui valsait au gré de ses bras.
Pris entre deux feux, Milo garda l’avantage devant une Shoko ébahie : « Incroyable ! Je ne l’ai même pas vu bouger ! Il m’a évité de subir chaque attaque tout en contre-attaquant avant de me ramener contre lui ! Cet homme est à des années lumières de moi ! »
Milo ne relâcha pas sa garde pour autant, devinant qu’Até attaquait aussi.
_ « Million Hatred ! »
Alerte, de son aiguillon, il désintégra tous les tentacules qu’elle lui lança de face.
Enfin, d’un bon acrobatique, il anticipa les lances venues du sol en s’élevant avec Shoko qui chercha refuge contre son buste.
Il riposta de son Aiguille Ecarlate mais au moment de l’impact, Até vola en échardes.
_ « Un leurre ! Elle a donné à ses lianes son apparence ! Mais alors… »
Avant même qu’il ne puisse retoucher le sol, il comprit trop tard.
De tout le cimetière, renversant les tombes, arrachant les stèles, jaillirent des milliers de javelots de lierre.
Elles contraignirent Milo à renvoyer au sol, plus loin Shoko, puis à réaliser un effort de concentration extrême pour lutter contre les obstacles.

Sur ces entrefaites, Até arriva nez à nez avec Shoko alors que Phonos, malgré la douleur des piqûres, la bloqua à nouveau dans sa toile une fois qu’elle fut renvoyée à terre.
Immobilisé par l’effet du Scarlet Needle, mis au supplice, il arborait quand même de ses longues dents, le plaisir de voir la pomme être fermement tendue par la main ouverte d’Até contre le creux de la frêle poitrine de la Grecque au maillot craquelé.

Revenue à elle grâce à l’instinct de survie pour sa s½ur, devinant le danger, Kyoko surprit Emony et Mania en se jetant à la poursuite d’Até à la vitesse du son.

Voyant Shoko à la merci des Dryades, Milo choisit alors de recroqueviller ses membres contre lui avant de les relâcher en faisant irradier tout son cosmos, consumant une grande partie de ses forces mais aussi et surtout les pilums végétaux.
Les rayons solaires de la cosmo énergie de Milo éblouirent Shoko qui, abattue, levait une ultime fois les yeux au ciel en tant qu’Athénienne pour admirer une dernière fois son éphémère messie.
Kyoko arriverait trop tard, mais Milo savait qu’à la vitesse de la lumière il pouvait encore contrer Até.
Néanmoins, Dysnomie le menaça à nouveau. A mesure que la Pomme d’Or irradiait, les Dryades gagnaient en force.

Dans la main d’Até, la pomme resplendissait tandis qu’un serpent ailé s’en échappa.
Il encercla Shoko pour la soumettre à son attraction.

Milo repoussa Dysnomie en la devançant grâce à dix piqûres.

Rigel, impuissant, les yeux gondolés de larmes devant l’acte héroïque de Kyoko, regarda la Saintia traverser tout le champ de bataille en s’égosillant du nom de sa s½ur.

Milo, vainqueur, de Dysnomie, fondit depuis les airs en direction d’Até.

Shoko étant maintenant prisonnière de la Pomme d’or et non plus de sa toile, Phonos chargea Milo pour dévier sa course…

Le serpent ailé n’était autre qu’Eris
Il fixa avec appétit Shoko.
Il fonça.
Sorti de la pomme tendue entre les seins de Shoko, le serpent se précipita en direction de la poitrine de…
_ « Kyoko, cria d’angoisse Rigel en crachant du sang ! »

Shoko fut sans voix.
Encore étouffée par le serpent, ce dernier s’était détourné d’elle.
Il était passé par-dessus l’épaule d’Até.
A son sourire la Dryade avait compris les intentions d’Eris.
Le serpent avait transpercé le thorax de Kyoko qui arrivait dans le dos d’Até.

Tous, hormis Até, demeurèrent interdits.

A terre, Milo dégagea d’un revers de bras le glorieux Phonos qui roula au sol avec l’air ahuris, satisfait de la renaissance d’Eris.

Le serpent se desserra de Shoko, pour mieux pénétrer de tout son être le buste de Kyoko.

Aussitôt, d’un pas lent, les bras tremblants tendus vers elle, Shoko progressa en direction de sa s½ur sans se soucier d’Até à côté de qui elle passa sans même la remarquer.
_ « Grand… Grande s½ur ? »
Alors qu’Eris s’insinuait progressivement en elle, Kyoko garda une mine satisfaite à l’endroit de sa cadette.
Malgré le sang qui fuyait le coin de ses lèvres, elle lui souriait de tout son amour.
_ « Je suis heureuse d’être arrivée à temps… Heureuse que cette âme maléfique ait choisi mon âme souillée, plutôt qu’elle ne soit venue pervertir ton innocence…
_ Que racontes-tu ?
_ Il se passe bien des choses au Sanctuaire… Et le monde entier est plus noir qu’on ne le croit… Malgré tout le mal que j’ai couvert… En te voyant ici saine et sauve… Je me dis qu’avant de devenir totalement corrompue, j’aurai pu faire le bien… »
Difficilement, la main rougie par le sang qui s’est écoulé de ses plaies, Kyoko passa sous le col de sa Cloth et en extirpa le même médaillon que sa s½ur à l’effigie de Pégase.
_ « N’aie pas peur… Tout ira bien… N’oublie pas la légende que je te racontais quand nous étions petites…
_ Pégase… Qui accompagne Athéna dans chaque victoire…
_ Oui… Pégase apparaîtra un jour en ce Sanctuaire. Il le nettoiera du mal et viendra à bout de la déesse maléfique que je serai devenue. Ce jour là, bats-toi à ses côtés et terrasse le mal que je n’ai pas eu la volonté de repousser de mon c½ur. »

Le serpent finit d’investir totalement le corps de Kyoko.
Seules ses ailes demeurèrent et commencèrent à battre pour repousser Shoko.
Elles élevèrent Kyoko dans les airs pendant qu’Até commenta : « L’étoile sous laquelle les s½urs sont nées est double. Eris a choisi cette étoile. En l’occurrence, l’une comme l’autre, vous étiez prédisposée à devenir Eris. Si Mère aime se réincarner dans un corps pur, elle a préféré l’âme souillée et torturée de ta s½ur. »

La cadette tomba à genou pendant que sa s½ur s’élevait en position f½tal.
Les yeux rivés au sol, de désespoir, Shoko contrastait avec la mine euphorique d’Até, qui relâchait enfin Rigel de sa prison de lances.

Le ciel s’assombrit.
Les ailes enroulèrent la Saintia.

Le Sanctuaire réalisa enfin qu’un malaise planait.

Phonos sentait la restriction du Scarlet Needle s’évanouir.

Les autres Saints d’or présents au Sanctuaire sortirent sur le parvis de leur maison.

Emony serrait fort contre elle Mick.
Katya revint à elle et réalisa sans tarder l’ampleur des dégâts, en voyant la mine déconfite de Mii.
Dysnomie reculait pour mieux apprécier le spectacle.
Rigel incapable du moindre geste gisait dans son sang, ses larmes se mêlant à l’hémoglobine qui inondait le sol.
Une sphère pourpre émana de Kyoko…

Le Grand Pope prenait appui sur son balcon, devinant le nouveau danger.
La sphère de Kyoko implosa.
Elle souffla le Sanctuaire tout entier.
Clouant les plus proches au sol.
Irritant les pupilles des spectateurs au loin…

A l’exception des Dryades qui furent les premières à admirer la renaissance de leur déesse.

Shoko recouvrit ses émotions en entendant le bruit suspect de cliquetis métalliques.
Elle habitua ses yeux à l’éclat aveuglant et reconnut, morceau par morceau, la Cloth du Petit Cheval retomber à l’endroit même d’où s’était élevée Kyoko.
Enfin, un dernier bruit plus léger acheva les chocs de métaux.
Le pendentif de Pégase quittait en dernier la Saintia.

Par le biais de son cosmos, Kyoko appela sa s½ur : « Shoko ?! »
Shoko sentit sa cosmo énergie happée dans un champ de fleur.
_ « Tout est terminé Shoko. Suis-moi, l’intima Kyoko dans ce jardin sans fin.
_ Kyoko… Pourquoi… Pourquoi te suivrai-je ? »
L’aînée était dans le plus simple appareil, le corps marqué de symboles pourpres.
_ « Parce que la Terre va bientôt être détruite. Les hommes sont avides et ne respectent aucune valeur. Athéna n’a jamais su empêcher le monde de sombrer. Pire, depuis les temps anciens, leurs ambitions démesurées ont massacré des civilisations. Ainsi, la Terre basculera dans un conflit global et finira réduite en cendres. Tu finirais épuisée de désespoir à défendre ce monde qui n’en vaut pas la peine. Alors que désormais, nous pouvons vivre dans mon royaume, un paradis où tu n’auras plus de compte à rendre à personne. La ponctualité. Le travail. La faim… Plus rien de tout ça ne te concernera… Ne nous concernera… »

En dehors de l’illusion créée par Eris, Rigel entendait les paroles de sa bien-aimée et réalisait avec amertume que ses projets ne le concernaient pas.

Shoko, elle, se relevait, l’½il triste.
_ « Shoko, poursuivit Eris, tu as toujours couru de toutes tes forces derrière moi pour me rattraper. Aujourd’hui je te donne une unique chance de pouvoir être à mes côtés. Aucun autre monde que le mien ne l’aurait permis.
_ Ce n’est pas ce que ma s½ur voudrait, balbutia-t-elle timidement.
_ C’est l’image que tu as de ta s½ur. Pourtant c’est bien elle qui te parle. Assouvir ses désirs… Kyoko savait bien avant de devenir Eris qu’il n’y a pas plus grand bonheur que ça… »

Ces paroles firent réaliser à Rigel l’impact de leur amour sur l’âme d’une Saintia.

L’ensemble des Dryades approchait Shoko dont les poings se serraient à s’en briser les os. Du sang en jaillissait et ses dents serrées auraient pu rompre sa mâchoire.

_ « Ma s½ur que j’avais enfin retrouvée… Elle à qui je voulais tant ressembler… Les années l’ont-elles fait changer à ce point ?
_ Je suis devenue femme. Et comme en chaque mortel, le vice me guettait. Une voie sage est un chemin long et difficile à tenir. Le chagrin et la souffrance, d’une vie de dévotion sans reconnaissance, peut facilement nous écarter du droit chemin…
_ Que veux-tu dire ?
_ Je vais te dire un secret, dit la déesse nue qui descendit jusqu’à sa s½ur maintenant encerclée des Dryades. Athéna, susurra-t-elle à son oreille, n’est pas au Sanctuaire. Toute l’éducation chaste reçue ici depuis douze ans ne repose que sur des mensonges. »
Terrassée par de tels propos, Shoko demeurait interdite.

Au loin, ignorant la teneur de l’échange, Milo redoutait de voir l’apprentie Saint être ainsi encerclée.
_ « Cela suffit, décréta-t-il ! C’est maintenant ou jamais ! Je vais nous débarrasser une bonne fois pour toute d’Eris ! Scarlet Needle Antarès ! »
Depuis les airs, la déesse dévêtue vit fondre sur elle quinze Aiguilles Ecarlates dont l’une, destinée à son c½ur, était plus rouge encore que les autres.
Faisant apparaître dans sa main une lance à quatre branches, Eris dressa aussitôt un bouclier.
Néanmoins, si elle a su réagir à la vitesse de la lumière, elle n’anticipa pas le mouvement du Saint d’or qui apparut au milieu des Dryades pour enrouler dans sa cape filée par les combats Shoko : « Restriction, cria-t-il en attaquant les Dryades ! »
Il tourna ensuite le dos à Eris, qui pointait déjà sa lance dans sa direction, afin de servir de bouclier à Shoko.
La concentration de cosmo énergie qui émana de la lance les repoussa jusqu’au flanc de la montagne où, encore une fois, Milo fit une rotation sur lui-même pour épargner Shoko du choc contre la pierre.
La Cloth d’or ébréchée au dos, la cape arrachée, Milo retomba à genoux, refusant de s’avouer vaincu.
Il déposa devant lui sa pantoise compatriote, totalement dépassée par les évènements.

Devant eux, Eris accusait le coup.
Elle retomba à terre. Son front perlant d’une sueur intense, qui descendait jusqu’au creux de sa poitrine nue.
Affaiblies par la Restriction du Scorpion, les Dryades voulurent immédiatement sécuriser leur déesse.
Dysnomie se mit alors en première ligne pour éviter une confrontation qui serait fatale, tandis qu’Até vint à son chevet : « Vous venez à peine de recouvrer votre conscience. Faire ainsi l’étalage de votre puissance dans ce corps nouveau était bien trop dangereux. Il nous faut retourner dans votre temple. Il doit vous rester suffisamment de force pour le faire ressurgir des entrailles du Sanctuaire. »

Aussitôt, tout à l’Ouest du cimetière, sur le versant de la montagne où s’érigent les douze maisons du zodiaque, la roche se fissura.
Les craquelures du sol du cimetière libérèrent des faisceaux pourpres qui accentuèrent la déchirure du parterre.
Le Sanctuaire tout entier trembla.

Les secousses sismiques furent ressenties par-delà le domaine sacré.
Travaillant les plaques tectoniques.
Provoquant des remous de la Mer Ionienne à la Mer Egée en passant par la Mer Méditerranéen et la Mer de Crète.
Submergeant les côtes frontalières d’Athènes…
 
Shoko reprenait difficilement ses appuis, tandis que ses alliés assistaient à terre impuissants à la renaissance du temple d’Eris.
Morceau par morceau, le plateau aux stèles millénaires pour certaines se dérobait dans le vide insondable, formant peu à peu un gouffre arrondi duquel sortit, poussé par ses racines qui puisaient leurs forces dans les entrailles de la Terre, un arbre.
Aux épaisses branches de bois sec, arborant à son sommet un toit feuillu, presque cotonneux, sur plusieurs kilomètres de diamètre, l’arbre engouffré jusqu’alors gardait en ses racines un temple.
Les racines prenaient par le dessous la crépis, cette plateforme à degrés qui servait de soubassement en marbre et carreaux de pierre taillés, pour en sortir la paroisse toute entière.
Les colonnes fièrement dressées maintenaient le plafond parcouru, telles des veines, par les racines qui léchaient l’épistyle.
Extirpé des entrailles du cimetière, le temple s’élevait par-dessus le Sanctuaire.
Porté par son nuage de feuilles, comme un ballon dirigeable, l’arbre hissait haut le temple, par-delà même les nuages, pour sortir du kekkai d’Athéna.

Spectatrices averties de la renaissance de leur temple, les Dryades se laissaient envelopper par les ailes d’Eris dont le plumage devenait plus long et imposant.
_ « En effet Até. Il est temps pour nous, mes enfants, de retrouver notre foyer.
_ L’Utérus, s’émerveilla Até.
_ Allons Mania, partons ! »

Eris invita la dernière Dryade à ne pas s’être regroupée.
La susnommée avait pris la place de Dysnomie.
Elle faisait front à Shoko, la seule Athénienne encore debout.
_ « J’arrive Mère. Laissez-moi juste achever cette erreur. Ce réceptacle n’a plus lieu d’être. Vous n’avez plus besoin qu’elle empoisonne l’âme de Kyoko.
_ C’est déjà le cas Mania. Kyoko présentait une âme corrompue, facile à assimiler pour me permettre de m’exprimer pleinement. Mais je comprends que quelqu’un portant les mêmes traits que toi puisses te rebuter. J’ai brisé le c½ur de ce petit oisillon, en lui montrant la vraie nature de sa s½ur. J’ai brisé sa foi par ma révélation sur l’état du Sanctuaire et l’incapacité d’Athéna à pouvoir intervenir. Je te laisse briser son corps pour qu’il ne subsiste que toi et me donner parfois un sentiment de nostalgie si cher aux humains, lorsque je te regarderai Mania de la Folie. »
Aussitôt, la Dryade fut prise d’une passion débordante. Ses yeux grands ouverts fixaient d’une détermination psychotique le dernier rempart à la reconnaissance de sa mère.
Face à elle, les bras de Shoko en tombaient. Sa s½ur était donc comme cela.
A cet instant elle comprit, Eris exacerbait la part d’ombre de Kyoko. Comme elle qui ressentait de la colère, du chagrin, en cet instant, Kyoko avait une part d’ombre. Mais aussi de lumière. C’est cette lumière qui a fait d’elle une Saintia en dépit des révélations qu’elle a pu lui faire. Si la Cloth l’avait reconnu, c’est qu’il y avait une certaine justice dans ces actes.
Elle tourna sa tête de droite à gauche. Rigel gisait dans son sang. Mii ramenait doucement à elle Katya. Dans son dos, Milo reprenait appui pour faire obstacle à nouveau.
_ « Non… Non, ce n’est pas à lui de se sacrifier pour ma s½ur. Si sa part d’ombre était plus forte que sa lumière au point qu’Eris la domine complètement plutôt que moi, c’est que ma part de lumière est bien plus forte. Mon corps n’est pas brisé, il bouge encore. Mon c½ur n’est pas brisé, j’ai foi envers les actes héroïques de tous ceux qui ont lutté à mes côtés aujourd’hui. Ma foi… Oui ma foi n’en est que plus revigorée. Si ma s½ur n’a pas su être une Saintia jusqu’au bout, alors, parce que j’ai toujours voulu la rendre fière, je serai une bien meilleure Saintia qu’elle ! »
Tandis que Mania, revigorée par le cosmos d’Eris, faisait pousser au bout de ses doigts de longs ongles tranchants, elle ne remarqua pas devant elle les restes de l’armure du Petit Cheval s’agiter.
Elle s’élança contre Shoko qui prit elle aussi une puissante impulsion.
Alors même qu’elle partit en premier, Mania se vit dépasser par plusieurs étoiles venues au contact de Shoko.
Ces fusées vinrent se plaquer contre son corps, morceau après morceau, pour la barder en pleine course de la Cloth du Petit Cheval.
_ « Le cosmos de Kyoko enveloppe tout mon corps ! Pas de doute ! Ce cosmos chaleureux est celui avec lequel elle me protégeait dans mes rêves !
_ Par quel miracle, s’exclama Mania désormais au coude à coude ?!
_ Peu importe qu’Eris dise vrai. Si Kyoko est comme tout homme, partagée entre l’ombre et la lumière, alors sa lumière, à travers sa Cloth, me montre le chemin à suivre : Equuleus Ryu Sei Ken ! »
A bout portant, Shoko terrassa Mania, dont le corps fut déchiré à chaque impact de météore.
Elle retomba la tête la première au sol, inerte.
Les lambeaux de chair qui subsistaient se mirent à faner aussitôt tel des fleurs mortes ensuite balayées par le vent.
Spectatrice depuis les airs, Eris n’éprouva aucune tristesse par rapport à la mort de Mania. Pas plus que les autres Dryades.

_ « Je vois, il restait au fond de l’armure la dernière bonne pensée résiduelle de Kyoko avant que je ne m’éveille. C’était mon dernier éclat lumineux.
_ Qu’importe. Cet éclat m’a montré le chemin à suivre, rétorque Shoko. Même s’il est difficile. Même s’il est douteux. Même s’il restreint nos libertés d’actes et de pensées. Ce chemin est celui d’hommes et de femmes courageux qui n’ont pas peur de mettre leurs vies en danger pour sauver celles de millions d’autres. C’est celui des Saints !
_ Alors, tend Eris sa lance vers Shoko, meurt comme eux ! »
Une vague d’énergie dont la circonférence englobait toute la surface du cimetière partit de l’arme.
L’ampleur du cosmos et sa pression laissèrent Shoko bouche bée. Elles lui paralysèrent les membres.
_ « Alors Kyoko, ton choix est fait. Tu es et resteras Eris. Je vais encore me retrouver toute seule ? Tu ne viendras donc vraiment plus à mon secours, déplorait-elle devant la mort.
_ Je suis là moi, assura alors Milo passablement étourdi. »
Arrivé à sa hauteur, Milo embrasa son cosmos, paume tendue vers le ciel, prêt à accueillir l’ensemble des forces d’Eris.

PARTIE 1/2
La suite, dans le post qui suit.
Last Edit: 19 June 2021 à 13h59 by Kodeni

Author Topic: Chapitre 73  (Read 2055 times)

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Chapitre 73 - Partie 2
PARTIE 2/2 :

A cet instant, le Scorpion parut bien seul pour lutter contre un pouvoir divin.
Immédiatement, au contact de la sphère de cosmo énergie malveillante, les protections de ses mains jusqu’à ses coudes crissèrent.
Ses pieds s’enfonçaient dans le sol.
L’émanation était si forte que, derrière lui, Shoko ployait peu à peu genou au sol.
Milo recroquevillait malgré lui les coudes.
La Cloth du Petit Cheval, déjà entamée lorsque Kyoko la portait, montrait les limites entre une armure de bronze et une armure d’or.
En effet, tandis qu’elle maintenait Milo dans la lutte, l’armure de Shoko, elle, se craquelait.
Quand le casque du Scorpion craquait, le diadème et les épaulettes de la jeune femme volaient en éclat.
Dans son dos, Milo constata l’impuissance de sa jeune compatriote : « Je suis son seul espoir, pensa-t-il. Alors brûle ! Brûle mon cosmos ! »
L’effluve de son cosmos dessina devant Shoko un Scorpion dont il puisait ses forces.
Il déplia ses bras en expirant tout l’air emmagasiné dans ses poumons, pour relâcher tout ce qu’il lui restait.
La sphère cosmique vermillonne d’Eris recula sous l’effet du globe de lumière d’or de Milo.
Cependant, Shoko ne pouvait toujours pas bouger.
L’énergie divine n’avait que reculé, pas fléchit.
A son grand désarroi, Milo vit au travers qu’Eris et ses Dryades n’étaient déjà plus là.
L’Utérus avait déjà quitté l’horizon.
Il luttait contre la rémanence d’une cosmo énergie céleste.
Les veines de son front, gonflées à bloc, n’en purent plus.
Le sang fuyait son nez.
Ses oreilles.
Sa bouche.
Ses yeux…
_ « Tout est fini, crût comprendre Shoko. Il aura tout tenté pour nous sauver. En vain… Tout tenté… Alors… Alors que moi, je suis restée ici à pleurnicher et à attendre un miracle ! Comment puis-je choisir la voie des Saints, si c’est pour me cacher au premier obstacle venu ?! Si je veux honorer le choix initial de ma s½ur, serra-t-elle les poings, si je veux accomplir ce qu’elle n’a pas eu la volonté de faire, se redressa-t-elle, alors je ne dois pas me contenter uniquement des pensées résiduelles de son armure ! Je dois me relever, chargea-t-elle son poing droit de cosmos, et accomplir un miracle ! Equuleus Ryu Sei Ken ! »
Toute en extension, elle se hissa à hauteur de Milo qui était à la peine et libéra de nouveaux météores, cette fois plus nombreux et plus puissants que ses précédents.
D’abord déterminée, elle puisa jusqu’à ses dernières forces pour passer la barre des cents coups à la seconde.
Ses paupières lui semblèrent alors de plus en plus lourdes.
Son bras engourdi.
Ses genoux branlèrent de plus en plus et, tandis que son champ de vision se rétrécissait, elle remarqua que Milo la regardait. Non avec compassion. Mais d’égal à égal.
Alors qu’il ne lui restait plus que cette image avant que l’obscurité ne l’emporte, elle entendit la voix suave de son héros lui adresser un franc : « Merci. »
Puis, plus rien.
La lutte était trop inégale. La réminiscence de leurs passions ne fit que retenir l’inéluctable. La puissance de la Déesse de la Discorde les écrasa de nouveau…
Flashback

Inopinément, la venue d’un serveur interrompt le récit de Kyoko qui tient en haleine Mars.
_ « Mademoiselle. Monsieur. Est-ce pour dîner, leur dit-il en leur tendant la carte ?
_ Nous allons d’abord prendre un apéritif, sourit-elle avec gourmandise.
_ Et vu comme ma s½ur me régale de ses longues histoires, il est possible que nous restions manger finalement, fixe-t-il les yeux de Kyoko avec sadisme.
_ Bien, je vous laisse faire votre choix pour les boissons et reviens prendre votre commande.
_ Faisons ça, acquiesce Kyoko tout en appétit. »