L’été s’achevait pour moi sur des doutes. J’étais tellement tourmenté par les événements inquiétants de Yíaros que je ne pouvais soupçonner qu’à quelques kilomètres du Sanctuaire, dans le repère du reclus Arès, l’avènement d’un homme avait lieu…
Chapitre 33 - Le sacre du roi
En Grèce, au Sanctuaire :
2 septembre 1985.
Des éclats de rire animent cette journée bien sombre. Le ciel est obscur et les orages persistent.
Dans la quatrième maison du zodiaque, les anecdotes évoquées par Deathmask au sujet de l’apprentissage inculqué à son disciple arrachent à Lilith un fou rire.
L’italien présente un tout autre visage lorsqu’il parle de son élève resté en Sicile. Ses yeux brillent comme s’il parlait de son propre enfant.
Lilith ne s’imagine pas qu’hormis elle, quelqu’un a pu émouvoir son amant.
Seulement, l’objet de ces souvenirs provient d’un ordre de mission laissé sur une Pandora Box de bronze :
Lilith - " J’aimerai tellement pouvoir t’accompagner en Sicile. "
Deathmask - " Je préfère te savoir ici. Même si je pars pour une année, tu seras plus en sécurité dissimulée dans ma demeure. J’ai sommé un garde de venir déposer ici le ravitaillement qu’il a pour ordre de me déposer habituellement. Il le déposera à l’entrée du palais du Cancer, tu ne manqueras de rien. Je dois veiller à ce que Mei soit désormais prêt à devenir Saint. Le Grand Pope a senti en son cosmos la constellation de la Chevelure de la Chevelure de Bérénice. "
Lilith - " Dans ce cas je veillerai à ne pas me faire remarquer ici en ton absence. "
Deathmask reconnaît la subordination de sa compagne. Il lui sourit affectueusement en lui offrant un tendre baiser.
Enfin, il ramasse sa Pandora Box ainsi que celle de bronze qu’il calle au-dessus de la sienne puis quitte sa demeure.
En Grèce, sous l’Aréopage :
Sous terre, à des kilomètres de profondeur, bien en dessous de ce lieu touristique où étrangers et locaux ont déserté en raison de la pluie, le sanctuaire d’Arès est animé par le son d’une cornemuse du diable. Cet instrument, dont on joue à l’aide de plusieurs claviers et d’un pédalier, plus communément connu sous le nom d’orgue, produit à l’aide de ses tuyaux sonores alimentés par une soufflerie, un retentissement infernal dans l’ensemble du temple en forme de cône.
Placé au rez-de-chaussée, au fond de la pièce principale où siège le trône d’Arès, les longs et larges tuyaux de l’orgue dégagent bourdonnement qui atteint chaque niveau du temple.
Aux étages, les soldats et les serviteurs écoutent avec effrois ce morceau aux allures funestes.
Au sommet du cône, dans la chambrée la plus haute, marbrée du sol au plafond comme l’entièreté de l’Aréopage, le mystérieux Ange de l’Olympe réincarné, Ksénia, veille sur l’objet de sa mission, Vasiliás.
Alité depuis qu’elle l’a secouru, le jeune homme n’est pas encore sorti du profond coma dans lequel ses terribles combats l’ont plongé.
Lavé chaque jour, la barbe et les cheveux rasés régulièrement par les esclaves, le visage de Vasiliás parait serein. Ses hématomes ont disparu et ses plaies ont cicatrisé. Ses doigts bougent et ses sourcils se froncent régulièrement. Il est sur la voix de la guérison.
Les sons brutaux atteignent la chambre de l’américain dont les paupières crépitent.
Ses beaux yeux bleus aux reflets verts n’ont pas de mal à s’habituer au scintillement des flammèches tant elles sont tamisées par les parois cristallines sanguines.
Toutefois, sa vue est encore trouble et ne lui permet pas de reconnaître tout de suite Ksénia :
Sa voix, d’abord enrouée, demande :
Vasiliás - " Où suis-je ? "
Ksénia - " Dans le sanctuaire du dieu Arès, l’Aréopage. "
L’accent slave de la vénusté ne peut échapper au convalescent qui identifie immédiatement son interlocuteur :
Vasiliás - " Ksénia… C’est toi ? Je te cherche depuis si longtemps… "
La demoiselle brune vient lui cueillir la main :
Ksénia - " Et moi je t’observe depuis toujours. "
Vasiliás - " Que faisons-nous chez Arès ? Ce dieu belliqueux est dangereux et hostile à Athéna. Nous devons fuir ! "
Il se redresse dans son lit mais aussitôt la tête lui tourne, il est encore trop faible. Il s’échoue lamentablement dans les bras de la magnifique russe. Elle accueille alors la tête du malheureux contre sa chaude et peu couverte poitrine :
Ksénia - " Pff… Athéna… C’est elle et le dieu Poséidon qui par l’intermédiaire de leurs hommes t’ont mis dans cet état. Celui que tu traîtres ainsi est le seul à avoir cru en toi et à t’avoir sauvé. "
L’Ange sent couler entre ses seins les larmes de détresse de l’ancien prétendant à l’armure d’or du Lion. Elle passe avec affection sa main sur ses cheveux d’à peine trois millimètres de longueur pendant qu’il balbutie :
Vasiliás - " Le Sanctuaire m’a condamné à mort en me faisant porter pour déserteur. Mon ami Bian s’est retourné contre moi après avoir été conquis par Poséidon… Je suis seul à présent… "
Ksénia - " Le dieu Arès est là. "
Vasiliás - " Comment pourrais-je remercier un dieu en lequel je ne crois pas. Il est l’opposé de tout ce que je prône. La guerre et le sang ne sont que les seules choses auxquelles il aspire. "
Ksénia - " Crois-tu que tes projets de royauté sur le monde peuvent se faire sans guerres et sans sang ? Ton sens de la justice est trop dur pour que même une fois en place le sang ne soit pas versé contre les hors-la-loi. Arès et toi avez des intérêts en commun. "
Le rythme funeste joué sur les orgues aspire à devenir plus agréables et moins terrifiants.
A mesure que les notes sont jouées, Vasiliás se laisse gagner petit à petit :
Vasiliás - " Cette musique est jouée en toute contradiction de l’aspect inquiétant provoqué par le son de l’orgue. Qui peut rendre de tels sons si agréables à l’ouie ? "
A cette instant, l’instrument n’est plus joué et le regard de Ksénia se tourne en direction du balcon de la chambre de Vasiliás. Cette pièce la plus haute du temple dispose d’une avancée qui surplombe le hall principal et l’estrade où siége le trône du dieu Arès.
Vasiliás suit progressivement l’attention de son interlocutrice et distingue l’apparence d’un humain qui atterrie sur ce fameux balcon après avoir réalisé un bond prodigieux depuis le rez-de-chaussée.
Ses bottines noires qui protégent ses pieds accueillent son pantalon aussi rouge que ses petits yeux. Sa cape blanche flotte encore dans les airs et retombe peu à peu sur son torse nu et athlétique qu’elle habille. Sa chevelure hirsute et écarlate fait parfaitement ressortir ses yeux ensanglantés. L’expression de son regard est intimidante. Il reflète toute la hauteur d’un dieu.
Pendant qu’il recoiffe ses deux longues mèches qui tombent chacune à côté de ses oreilles pour venir caresser son buste, cet homme grec né sous le nom de Mars répond à la précédente question de Vasiliás :
Arès - " Celui capable de rendre beau tout ce qui s’apparente à la violence et la colère n’est autre que moi-même, le dieu Arès. "
En se présentant, Mars plisse les yeux pour dégager davantage de prestance.
Au soin depuis de nombreuses semaines, Vasiliás ne réalise pas qu’il a été alité en tenu d’Adam. Il expose sa totale nudité au Dieu de la Guerre et de la Destruction ainsi qu’à l’olympienne.
Trop préoccupé par celui qui lui fait face, Vasiliás ne cherche pas à se cacher de Ksénia qui préfère reculer jusqu’au mur de la pièce comme pour masquer sa présence durant la rencontre entre les deux hommes.
Vasiliás - " J’imagine que je dois me prosterner devant vous pour vous remercier de votre hospitalité ? "
Consterné par le manque d’égard dû au dieu qu’il est, Arès exerce d’un simple geste de la main une pression cosmique contre Vasiliás qui tombe à genoux.
Arès - " Ne te méprends pas ! L’hospitalité n’est pas un mot qui existe dans mon vocabulaire… "
Avant de poursuivre, il tourne le regard en direction de Ksénia pour faire comprendre à Vasiliás que c’est d’elle dont il va parler :
Arès - " … Cependant, une récente discussion m’a permis de faire le constat sur l’ensemble de mes échecs. Aujourd’hui seuls sont présents sur mon palmarès mes revers. Il m’a donc été conseillé de me tourner vers un homme qui pourrait trouver intérêt à représenter ma nouvelle armée. Un Roi que, moi, Dieu des Dieux, je nommerai. "
L’attention de Vasiliás est à son comble :
Vasiliás - " Un Roi ? "
Arès - " Comme Athéna, j’ai choisi depuis toujours de me réincarner en un homme. Elle pour vivre la passion que représente la vie éphémère de votre espèce, moi pour jouir de toutes les vicissitudes du fragile esprit humain.
Malheureusement, ce plaisir que j’ai pris à violenter et à détruire m’a toujours conduis à de cuisantes défaites. La dernière remonte il y a quelques années en arrière, en… "
Vasiliás se permet de couper la parole à la divinité :
Vasiliás - " … En 1979 ! "
Arès - " Exactement. Depuis je me suis réfugié dans mon palais et je jouie de mon statut sur mes sujets. Toutefois, ce plaisir ne m’apporte rien de plus que je n’ai déjà et ne m’offrira jamais ce à quoi j’aspire : le succès et la reconnaissance des autres divinités de ce monde.
Même pour le dieu Shiva qui a été maîtrisé comme un insecte par le Sanctuaire il y a peu, je ne suis qu’une faible menace, bien loin de celui que j’étais il y a de ça des millénaires, lorsque j’eue poussé Athéna dans ses derniers retranchements, l’obligeant à utiliser les armes de la Balance… "
Tout en poursuivant son discours, Arès libère Vasiliás de son emprise, voyant le jeune homme tout ouie :
Arès - " Aujourd’hui, il ne me reste plus qu’une centaine de soldats, d’anciens délinquants et déséquilibrés mentaux qui ne savent même pas monter la garde. De mes Berserkers dirigeants mon armée, il n’y en a plus un. "
Vasiliás ne garde pas sa langue dans sa poche :
Vasiliás - " Vous avez surestimé les défauts des hommes pour sous-estimer ce qui fait leur qualité. Voilà pourquoi Athéna a gagné. "
Arès - " Que me proposes-tu ? Ksénia m’a fait un portrait de toi. Tu as la prétention de pouvoir bouleverser cette paix impossible que veut maintenir Athéna. Comment cela pourrait être possible ? "
Vasiliás - " Il faudrait agir comme Athéna vis-à-vis des hommes. Mais uniquement des hommes bons. Les protéger, les aimer. Néanmoins, ces gens bienfaisants sont de plus en plus corrompus par les êtres aux sombres desseins. La paix est possible si on demeure impartial envers ceux qui pourrissent ce monde. "
Arès - " Sous-entendrais-tu qu’il faut faire la guerre aux hommes ? Détruire le mal à la racine ? "
Vasiliás - " Seulement aux hommes irrespectueux des lois. Des lois qui établiraient un monde égalitaire, où amour et respect serait les maîtres mots. "
Arès - " Cela nécessitera la prise de pouvoir d’un dieu autre qu’Athéna. Athéna est trop charitable et ne permettrait pas de laver le monde des êtres impurs. En as-tu conscience ? "
Vasiliás réfléchit un instant. Il repense plein d’amertume à la chasse à l’homme dont il a été l’objet, aux morts de son maître et d’Ariel, la s½ur de Bian, tout cela car ses idéaux furent condamnés par Athéna.
Il grimace en reconnaissant :
Vasiliás - " En effet, c’est désormais indispensable. "
Pendant que Vasiliás baisse honteusement les yeux après cette confession, Arès décrispe légèrement son visage.
Une cosmo énergie vermillon enveloppe aussitôt le dieu et inonde son royaume souterrain, imprégnant au passage l’américain perdu dans ses doutes.
Vasiliás reconnaît aussitôt l’essence parfaite d’Arès. Celle-ci transmet dans l’esprit de l’américain les souvenirs humains d’Arès.
Flashback
Il y a une trentaine d’années Mars vient au monde après une grossesse non désirées dans le coin le plus malfamé de Grèce…
Enfant, Mars est élevé dans une famille où la loi est celle du plus fort…
Son père est fréquemment en indélicatesse avec les forces de l’ordre…
Mars apprend seul à lire et à écrire bien qu’il ne fréquente aucune école…
Son frère est tué par une bande rivale de la sienne…
Adolescent, Mars commet ses premiers meurtres en découvrant sa s½ur dans les bras d’un rival de son défunt frère…
Son acte de barbarie lui permet de découvrir ce don qu’est le cosmos divin qui sommeille en lui…
Mars extermine ses rivaux mais aussi ses camarades…
Ses actes lui valent des démêlés avec la justice dont il cause la perte…
Jeune adulte, Mars est rejeté par ses parents effrayés par la barbarie de celui-ci…
Revanchard envers des parents ivres et violents, il les assassine dans d’atroces circonstances…
Il fuit… S’isole… Débarque à Athènes…
Sa faim et sa soif sont compensées par son cosmos grandissant…
Son esprit est troublé par des actes du passé, de plusieurs époques, depuis la nuit des temps…
Son périple l’amène à la colline de l’Aréopage… Il est mystérieusement attiré par le pont cosmique situé sur le flanc du site dont il ne reste plus aujourd’hui qu’un monolithe…
Son investigation l’amène devant son royaume cerné de lave…
Son esprit divin s’éveille enfin totalement…
Il réunit autour de lui une armée incomplète et, dans la précipitation, profite de la bataille contre les Titans pour envahir le Sanctuaire…
Son attaque surprise lui permet de siéger tout autour du Sanctuaire avant d’être finalement vaincu par des Saints de bronze et d’Argent…
L’armée est décimée, des six Berserkers qu’il a réunis aucun n’a survécu…
Face à l’échec qui se répète de réincarnation en réincarnation, il s’abandonne avec ce qui lui reste de sujets dans les joies de la gourmandise et de la luxure…
Aujourd’hui, 1985, Ksénia gagne l’Aréopage et sort Arès de sa léthargie en lui proposant de retrouver toute sa splendeur en confiant son armée au meilleur général qu’il peut espérer avoir : Vasiliás…
Flashback
Vasiliás sort de sa torpeur, le choc cosmique d’Arès le libère.
A cet instant, Vasiliás, toujours dévêtu, dans sa simple condition d’homme, pose un genou sur le sol de marbre de sa chambre, appuie sa main droite contre son c½ur et baisse la tête en signe d’allégeance envers le dieu :
Vasiliás - " C’est parce que votre vie d’homme a été faite de souffrance que vous voyez en moi celui capable de changer tout cela. "
Arès - " Il reste parmi mes neuf Nightmares celles de trois Berserkers. Je souhaite que tu portes celle du général qui me conduira à la victoire, celle qui n’a jamais été portée depuis ma défaite face aux chevaliers d’or bardés des armes de la Balance, celle du Berserker de la Royauté ! Deviens mon général, deviens le roi de cette planète. "
Vasiliás - " Je ne peux accepter sans avoir la garantie que l’humanité n’aura rien à craindre sous votre régime. "
En annonçant ce qui suit, Mars matérialise dans sa main son épée à la lame longue et brillante comme le diamant avec un manche en or :
Arès - " Le monde sera sous ta direction, tu seras seul juge de son destin. Moi je place ma confiance en un roi qui fera de ma divinité la seule croyance des hommes puisque la politique instauré par celui que j’aurai choisi les mènera à la paix. Un roi qui réhabilitera mon nom jusqu’aux abysses chez Poséidon, jusque dans les enfers de mon ami Hadès et jusqu’aux cieux des olympiens ! "
Vasiliás s’incline encore plus bas laissant ainsi sur le visage d’Arès un sourire de satisfaction.
Arès dépose sa lame sur l’épaule droite de son nouveau général :
Arès - " Parce ce geste… "
L’arme passe désormais sur son épaule gauche :
Arès - " … je fais de toi… "
Désormais c’est sa tête qui est touchée :
Arès - " … l’homme qui changera le destin… "
Subitement, l’épée appuie légèrement la peau de Vasiliás à hauteur de son c½ur :
Arès - " … le Berserker de la Royauté ! "
Vasiliás sent son corps être manipulé sans qu’il puisse interagir. Il est soulevé à un demi mètre du sol et flotte dans les airs.
Un chant barbare retentit dans l’entièreté du royaume tandis que l’orgue accompagne de lui-même le récital. L’origine de ce chant provient d’une armure qui apparaît devant Vasiliás. Une Nightmare en totem sous la forme d’un lion ailé comme le tatouage qui décore la cuisse de l’américain.
A cet instant, la piqûre provoquée par l’épée sur la poitrine du jeune homme se cicatrise sous la forme de griffes ressemblant à celles tatouées dans son cou. Comme si l’animal emblème de sa toute puissance a laissé sa marque.
Une fois la cicatrisation achevée, la protection à la couleur et la forme entièrement différente des autres Nightmares se détache.
Entièrement rouge vif, elle couvre l’intégralité de ses jambes, bardant chaque genou de cornes courbées qui remontent à mi-hauteur de ses cuisses. Le haut de ses jambes et sa taille sont habillés d’une jupette semblable à celle de la Cloth d’or du Lion tout comme son torse entièrement similaire à l’armure du chevalier d’Athéna. Ses imposantes épaulettes forment la tête d’un lion à la crinière opulente et dont les gueules grandes ouvertes descendent jusqu’aux biceps. Les avant-bras enferment entièrement les membres des doigts jusqu’aux coudes, coudes armés de cornes similaires à celles positionnées sur les genoux.
Son visage est dissimulé sous un masque doré qui ne laisse apparaître que ses beaux yeux bleus et verts, et est maintenu par son casque ovale formant une gueule de lion tel le casque de l’armure divine de Zeta que portera Syd de Mizar dans quelques mois.
Enfin, de grandes ailes similaires à celles de l’armure du Sagittaire mais de couleur vermillon se déploient dans son dos.
Impérial dans sa nouvelle tenue, le Berserker de la Royauté se détaille lui-même pour admirer sa magnificence retrouvée.
Son général désormais adoubé, Mars lui demande :
Arès - " Et maintenant jeune roi ? Quelle suite proposes-tu ? "
Vasiliás - " Une armée n’est efficace que par sa ferveur. L’idéal de ce monde ne peut être obtenu par les hommes aux idées néfastes qui composent vos rangs actuels. Je veux des passionnés pour un monde meilleur, des gens déçus par ce monde aujourd’hui, des hommes et des femmes victimes d’injustices, des revanchards, des personnes avec une mentalité de battant, une mentalité déjà soumise à rude épreuve, des êtres prêts à l’apprentissage des armes, à l’art du combat et fidèles à mes principes, accordant leur foi à votre unique grandeur. "
Ksénia, restée en retrait jusqu’à présent, fait un signe positif de la tête en direction du dieu ravi :
Arès - " Qu’il en soit ainsi. Je te laisse les pleins pouvoirs. Fais ce qu’il faut des hommes déjà à ta disposition et part à la recherche de tes perles. Il reste également deux Nightmares non attribuées. A toi de trouver les Berserkers qui t’accompagneront dans la victoire, les Berserkers du Malheur et de la Terreur ! "
En Grèce, au Sanctuaire :
Sur le flanc de la douzième maison du zodiaque, à hauteur du passage secret, l’expression du propriétaire de la demeure est aussi maussade que la météo.
Il répond avec une nonchalance étonnante à son interlocuteur :
Aphrodite - " … Non je n’ai pas envie de sourire Deathmask. Le temps est triste, le sol est couvert de boue. Ce décor est laid, je hais cette disgrâce. "
Le suédois ne pose même pas les yeux sur le sicilien qui se tient debout à l’extérieur, trempé jusqu’aux os.
Deathmask - " Dans ce cas je ne te dérangerai pas davantage cher camarade. "
Aphrodite le retient en adoptant un ton plus aimable :
Aphrodite - " Attend ! Tu m’as dis que tu partais, je veux juste savoir où exactement ? "
Deathmask - " Je retourne auprès de mon élève, achever son entraînement. "
Aphrodite - " Quelle joie dans ton annonce ! Une vie partagée en compagnie d’une femme qui t’aime, des retrouvailles avec un enfant que tu as élevé. On sent que tu rayonnes de bonheur. "
Deathmask - " Ne devrais-je pas ?! "
Aphrodite - " C’est simplement que ça ne colle pas trop à cette nature que je te connais. "
Deathmask - " Tu ne me connais peut-être pas si bien que ça. "
Aphrodite préfère observer le silence.
Deathmask aborde alors un sujet épineux :
Deathmask - " Je t’interdis de l’approcher ! "
Aphrodite - " Qui donc ? "
Deathmask - " Tu sais de qui je veux parler. "
Aphrodite - " Lilith ?! Allons, voyons, tu n’y penses pas. "
Deathmask - " Bien sûr que si. Je n’ai pas oublié ce que tu as fais à Inakis, l’amie de Milo. "
Aphrodite - " Si je te l’ai confié c’est parce que j’ai confiance en toi ainsi qu’une grande considération pour toi. "
Deathmask - " Sache que cette estime est réciproque. Et c’est pour cela que je t’invite à retourner le voir. "
Aphrodite - " Qui donc ? "
Deathmask - " Adonis, ton fils. Il te manque, cela se ressent. Tu ne manges plus rien. A force de dépérir ainsi tu risques même d’y perdre ta beauté. "
Cette annonce saisie Aphrodite. Tout en restant muet, il prend conscience des raisons de son mal-être.
Deathmask préfère ne pas tirer plus fort sur cette corde sensible. Il quitte son ami, direction l’Italie.
En Grèce, sous l’Aréopage :
Le dieu a repris position dans son siège au centre du cône. De nouveau nourri d’espoir, il refuse l’alcool que lui verse une de ses nymphes dans une coupe et se contente de déguster petit à petit une grappe de raisin.
Face à lui, la splendide russe affiche un visage intéressée que personne ne lui connaissait jusque là :
Ksénia - " Quelle belle chose d’avoir utilisé votre enfance pour vous assurer la fidélité de Vasiliás. "
Arès - " Il est fanatique de ses rêves. Je ne pouvais aller que dans ce sens. Il fera de moi ce dieu qui réussira là où tous les autres ont échoué, prendre la Terre à Athéna. "
Ksénia - " Peut-être, mais on ne change pas sa nature. Je doute que Vasiliás réussisse à apaiser votre soif de barbarie. "
Arès - " Il a l’expérience des combats, son instruction lui permet d’avoir de grande connaissance militaire et sa détermination est sans borne. Il est le seul à pouvoir me guider vers la reconnaissance de l’Olympe. "
Ksénia - " Et après ? "
Arès - " Après ? Disons que de tout temps les rois ont subi la volonté des dieux. Mars a promis à Vasiliás de ne pas succomber à ce besoin. C’est la promesse d’un homme à un autre et la parole d’un homme n’a aucune valeur à notre époque. Quoi qu’il arrive, la nature humaine aura toujours une imperfection, le rêve de Vasiliás ne peut se réaliser. La promesse d’un homme n’est rien face à la volonté d’un dieu, la promesse de Mars ne peut influer le caractère d’Arès. "
Ksénia sourit et approche le dieu qu’elle tapote à hauteur de l’épaule :
Ksénia - " Mon maître n’en attendait pas moins de toi. Utilise Vasiliás pour te créer une armée digne de ce nom. Il te permettra de vaincre tes adversaires et de t’emparer de la Terre quand nous te le demanderons. "
Arès - " Et en attendant ? "
Elle se dirige en direction des pièces situées sur le flanc droit du rez-de-chaussée :
Ksénia - " Pas de précipitations ! Ne commets pas les mêmes erreurs qu’autrefois ! "
Colérique, Mars se contente de répondre :
Arès - " Que ton maître soit rassuré, Vasiliás veillera à notre succès lorsqu’il nous le demandera. "
L’olympienne quitte avec grâce l’estrade qui surplombe la pièce.
En Grèce, au Sanctuaire :
La chevelure soyeuse protégée par sa cape, le chevalier des Poissons profite de sa permission pour gagner le village de Noioso au sud du Sanctuaire.
Couvert de sa Cloth dorée, il ne cache à personne sa présence remarquée dans cette zone peuplée de vieillards, d’esclaves affranchis et d’apprentis chevaliers ou de soldats devenus infirmes. Devant les maisons et les tavernes délabrées, à peine fréquentées, les femmes, veuves de soldats et femmes insatisfaites, n’ont d’yeux que pour le bel homme.
Le lieutenant de la zone sud vient immédiatement s’agenouiller sous la pluie battante :
Arachné - " Seigneur Aphrodite, quel évènement peut vous faire venir en ce lieu ? "
Habituellement si discret, se refusant d’être mélangé avec ce bas peuple majoritaire du domaine sacré, Aphrodite reste étrangement courtois :
Aphrodite - " Rien de grave. Je viens simplement rendre visite à Myrrha, une vieille connaissance. "
A cette annonce, Arachné se sent immédiatement ridicule. Myrrha, cette jeune femme aux cheveux melon et aux grands yeux océans. Sa peau blanche et son aspect angélique font d’elle la jeune femme la plus courtisée du village, à commencer par le Saint d’argent de la Tarentule.
Arachné - " Bien Seigneur. Dans ce cas je retourne à la surveillance de nos positions. "
Aphrodite lui envoie un sourire de franche camaraderie qu’il garde bien pour lui en temps normal.
Il arrive devant le logis aux murs en torchis et au toit fait de planches et de paille. Depuis dehors, il entend les effusions de joie de la jeune femme mêlées aux gazouillis d’Adonis.
Dès lors, ses yeux affichent une lueur d’ivresse. Il se voit ouvrir la porte et annoncer de sa voix douce et mélodieuse qu’il vient chercher celle qu’il aime, abandonnant sa vie libertine, prêt à assumer sa vie de famille. Il s’imagine déjà serrant fort contre lui Myrrha qui se jetterait dans ses bras. Il rêve de son fils, beau, portant avec élégance sa toge, apprenant l’art de la chevalerie dans la maison des Poissons en sa compagnie pendant que plus bas, dans la ville d’Honkios, Myrrha leur préparera le repas à l’intérieur de la demeure aristocrate que leur aura offert Aphrodite grâce à sa solde de Saint d’or.
Ces projets sont bien suffisants pour donner le courage à Aphrodite de prendre l’élan nécessaire pour faire une entrée fracassante. Il aspire l’atmosphère humide à pleins poumons, abandonne sa belle cape et ôte son heaume pour pénétrer avec vivacité sur le sol argileux à l’intérieur.
Sa vue fait un rapide tour du logis meublé grâce à des matériaux récupérés dans les fermes avoisinantes. Il se focalise sur la vénusté en toge blanche. Celle-ci ouvre les bras pour recevoir son enfant.
Le sourire d’Aphrodite se fige aussitôt, les mots se sont évaporés de son esprit. Il est aussi saisi que les personnages à l’intérieur. Myrrha, Adonis et… Milo, assis sur la couche faite de paille et couverte d’une épaisse étoffe, rendant à Myrrha l’enfant qu’il faisait rire auparavant.
Myrrha - " Aphrodite ?! "
Aphrodite - " … "
Le Saint d’or est pétrifié, une vision apocalyptique s’empare de son esprit. Son rêve devient un cauchemar. Cette illusion de vie parfaite l’abandonne pour remplacer sa personne par Milo. Il est tourmenté par la représentation d’un futur où le plaisant Adonis apprend l’art de la chevalerie dans la maison du Scorpion pendant que Myrrha cuisine dans une demeure que Milo a fait construire à Honkios.
Ignorant tout de la paternité d’Aphrodite, Milo se redresse du lit :
Milo - " Ah Aphrodite ! Tu me cherchais ? "
Habillé d’une tenue locale, les poignets et avant-bras couverts de bandelettes de papier, un long maillot descendant par-dessus un pantalon usé et ceinturé par du cuir au niveau de la taille, il s’en excuse :
Milo - " Pardonne mon accoutrement. J’étais en permission aujourd’hui donc j’ai voulu profiter de cet instant… "
Aphrodite n’écoute pas son frère d’arme, il est absorbé par le sentiment d’échec qui se dégage de son arrivée finalement ridicule.
Le grec, étrangement cordial, vient secouer son camarade :
Milo - " Tu es sûr que ça va Aphrodite ? "
Ce geste le ramène à lui. Il lève enfin les yeux et croise le regard hébété de Myrrha profondément gênée :
Aphrodite - " Oui… Oui pardon, une étrange image m’est venue en tête. Pardon. Je venais simplement… "
Il regarde son fils avec une once de chagrin et poursuit sa phrase :
Aphrodite - " Je venais simplement t’annoncer que Deathmask était parti en Italie pour achever la formation de son disciple. "
Ne comprenant pas tout, Milo commence à froncer les sourcils, preuve de son tempérament de feu :
Milo - " Et ? "
Aphrodite - " Et… Je voulais que tu le saches. Il est important de savoir quand l’un de nous s’absente. Pour assurer convenablement la défense des maisons vides en cas d’attaque ! "
Milo garde une expression peu convaincue. Il se contente de hocher la tête puis attend qu’Aphrodite réagisse comme il se doit en s’excusant pour cette arrivée outrancière et en prenant congé.
Néanmoins, rien ne vient. Un silence incommodant rend l’ambiance désagréable. Alors Milo choisit lui-même de renvoyer son pair :
Milo - " Très bien… Je te remercie de m’avoir prévenu. Maintenant, si tu le veux bien, j’aimerai achever la conversation que j’entretenais avec mon amie et son fils. "
N’arrivant pas à quitter la maison sans en avoir le c½ur net, Aphrodite essaie de savoir quel lien il entretient avec Myrrha :
Aphrodite - " Euh… Oui. Mais dis-moi, quel beau petit garçon. Est-ce le tien ? "
Milo - " C’est le fils de mon amie. Je viens de te le dire. "
Aphrodite - " Ah… Et son père est un chevalier ? Un garde ? Se peut-il que je le connaisse ? "
Myrrha achève cette discussion inappropriée :
Myrrha - " Son père était un messager. Il nous a quitté au cours d’une mission. "
Aphrodite - " Ah… L’espace d’un instant j’ai cru que c’était toi Milo qui était le père de cet enfant ! "
Myrrha - " Ca se pourrait, Milo est un homme séduisant dont le charme ne peut laisser aucune femme insensible. "
Milo est aussi surpris par cette réaction qu’Aphrodite. Cependant, Myrrha s’agace de cette situation. Elle tient la porte de la demeure ouverte :
Myrrha - " Bon ! Bien loin de moi l’idée de vouloir vous manquer de respect Saint d’or des Poissons, toutefois j’ai besoin de discuter seule à seule avec votre ami. "
La prononciation du mot « ami » arrache un sourire cynique sur les lèvres des deux chevaliers, en témoignage de la rivalité constante parmi le plus haut rang de la chevalerie.
Milo - " Ca ira Myrrha. Je te remercie. J’ai encore des choses à régler à la ferme d’à-côté. Je repasserai vous voir lors de ma prochaine permission. "
Milo devance Aphrodite et passe avec délicatesse près de la jeune femme, lui faisant rougir les joues. Aphrodite le suit en grimaçant de colère comme le fait Myrrha devant celui qu’elle croit l’avoir abandonnée.
Dehors, Milo marche sans faire attention sur la cape que le suédois a ôtée avant de rentrer.
La colère d’Aphrodite ne fait que grimper, il va sentir la pluie lui caresser les cheveux.
Empressé, il suit Milo jusqu’à une grange à proximité de l’habitation de Myrrha où le Scorpion est allé chercher un poulet.
C’est seulement une fois qu’il a payé les sacres dus au paysan que Milo s’agace du comportement d’Aphrodite :
Milo - " Tu as fini de me suivre non ?! "
Aphrodite - " Cette fille, comment la connais-tu ? "
Milo - " Tu m’as l’air bien étrange toi. Tu es sûr que le départ du Cancer ne t’a pas troublé plus que ça ? "
Aphrodite - " Ecoute-moi, ce… cette femme… "
Il reste de longue seconde à chercher une excuse pour évoquer son intérêt pour Myrrha et Adonis :
Aphrodite - " … Cette femme était l’épouse de mon messager. Le malheureux a été envoyé en mission par moi-même. Comme il est mort pour moi, je me suis promis de veiller sur sa femme et son fils. "
Ne voulant se dévoiler, Milo tapote l’épaule de son compagnon avant de lui présenter la volaille qu’il vient d’acquérir :
Milo - " Ne t’en fais pas, je ne lui veux aucun mal. Bon maintenant si tu le permets, j’ai à faire. "
Tandis qu’il fléchit les genoux pour prendre une puissante impulsion qui le propulsera jusqu’à son palais, Milo est retenu par une poigne brutale d’Aphrodite :
Aphrodite - " J’insiste Milo. Comment l’as-tu connu ? "
Avec fierté et détermination, Milo se défait du bras d’Aphrodite d’un revers de la main.
Sa mâchoire se crispe et ses sourcils se froncent :
Milo - " Es-tu venu me voir lorsque j’ai perdu Inakis ? "
Aphrodite, coupable de la mort de la compagne de Milo, baisse honteusement la tête.
Milo - " Non. Non tu n’es pas venu, sans quoi tu aurais pu voir ma peine. Seulement Myrrha l’a vu. Un jour, ordinaire, alors que je venais me ravitailler ici comme je l’ai toujours fais, cette jeune femme qui venait chercher du lait a remarqué ma peine. Elle aussi semblait meurtrie. Prisonnière d’un amour qui ne lui était pas rendue. Nous avons parlé, nous nous sommes fais confiance et nous avons sympathisé. Simplement. "
Aphrodite hoche la tête, retenant le plus qu’il peut un rictus de satisfaction maintenant qu’il est rassuré.
Toutefois, Milo n’est pas dupe :
Milo - " Allez Aphrodite, dis-moi la vérité à présent. Ne crois-tu pas que tes mensonges m’ont permis de te démasquer ? L’homme que Myrrha aime et qui a laissé derrière lui son fils c’est toi n’est-ce pas ? "
Alors qu’il a les bras le long du corps, les doigts d’Aphrodite s’agitent. Dans sa main droite son cosmos crée une rose rouge. Son timbre habituellement calme et hautain se charge d’une animosité inhabituelle :
Aphrodite - " Cesse de tourner autour de Myrrha. C’est tout ce que je te demande. "
Milo - " C’est toi qui me demande ça alors qu’il y a quelques mois tu osais venir prétendre à Inakis d’être en mesure de la satisfaire et tout ça sous mon nez. Je ne savais pas avant aujourd’hui que Myrrha puisse être celle que tu n’oses pas avouer aimer mais cette découverte me comble de joie. Te savoir souffrir le martyre à t’imaginer les pires choses lorsque je serai seul avec Myrrha me fait ressentir un plaisir malsain que j’exercerai aussi longtemps que je pourrai. "
La réaction d’Aphrodite ne tarde pas. A la vitesse de la lumière, il décoche sa fleur contre Milo. Le grec la pulvérise avec le rayon provoqué par un aiguillon écarlate apparu à la place de son ongle.
Milo - " Il nous est interdit de nous battre entre nous Aphrodite. Veux-tu déclencher un combat de mille jours et mille nuits, risquant de nous faire passer pour des hors-la-loi par la même occasion aux yeux du Pope et d’Athéna ? "
Aphrodite se ravise aussitôt, permettant ainsi à Milo de se propulser jusqu’aux premières marches des douze temples du zodiaque.
Désormais seul, Aphrodite observe la direction de chez Myrrha. Il a bien vu aux regards échangés entre Milo et elle la complicité qui s’est créée entre eux. Myrrha le regardait comme jamais elle n’a regardé Aphrodite.
« Milo a parlé de Myrrha, prisonnière de son amour pour moi. J’ai l’impression qu’elle s’est échappée de ma geôle, pour s’enfermer volontaire dans la sienne et en jeter les clés. Elle a réussi à combattre cette dépendance amoureuse durant ce temps où je méditais à m’engager auprès d’elle. Il est trop tard à présent. », réfléchit-il dépité.
PARTIE 1 : Fin
Chapitre 33 - Le sacre du roi
En Grèce, au Sanctuaire :
2 septembre 1985.
Des éclats de rire animent cette journée bien sombre. Le ciel est obscur et les orages persistent.
Dans la quatrième maison du zodiaque, les anecdotes évoquées par Deathmask au sujet de l’apprentissage inculqué à son disciple arrachent à Lilith un fou rire.
L’italien présente un tout autre visage lorsqu’il parle de son élève resté en Sicile. Ses yeux brillent comme s’il parlait de son propre enfant.
Lilith ne s’imagine pas qu’hormis elle, quelqu’un a pu émouvoir son amant.
Seulement, l’objet de ces souvenirs provient d’un ordre de mission laissé sur une Pandora Box de bronze :
Lilith - " J’aimerai tellement pouvoir t’accompagner en Sicile. "
Deathmask - " Je préfère te savoir ici. Même si je pars pour une année, tu seras plus en sécurité dissimulée dans ma demeure. J’ai sommé un garde de venir déposer ici le ravitaillement qu’il a pour ordre de me déposer habituellement. Il le déposera à l’entrée du palais du Cancer, tu ne manqueras de rien. Je dois veiller à ce que Mei soit désormais prêt à devenir Saint. Le Grand Pope a senti en son cosmos la constellation de la Chevelure de la Chevelure de Bérénice. "
Lilith - " Dans ce cas je veillerai à ne pas me faire remarquer ici en ton absence. "
Deathmask reconnaît la subordination de sa compagne. Il lui sourit affectueusement en lui offrant un tendre baiser.
Enfin, il ramasse sa Pandora Box ainsi que celle de bronze qu’il calle au-dessus de la sienne puis quitte sa demeure.
En Grèce, sous l’Aréopage :
Sous terre, à des kilomètres de profondeur, bien en dessous de ce lieu touristique où étrangers et locaux ont déserté en raison de la pluie, le sanctuaire d’Arès est animé par le son d’une cornemuse du diable. Cet instrument, dont on joue à l’aide de plusieurs claviers et d’un pédalier, plus communément connu sous le nom d’orgue, produit à l’aide de ses tuyaux sonores alimentés par une soufflerie, un retentissement infernal dans l’ensemble du temple en forme de cône.
Placé au rez-de-chaussée, au fond de la pièce principale où siège le trône d’Arès, les longs et larges tuyaux de l’orgue dégagent bourdonnement qui atteint chaque niveau du temple.
Aux étages, les soldats et les serviteurs écoutent avec effrois ce morceau aux allures funestes.
Au sommet du cône, dans la chambrée la plus haute, marbrée du sol au plafond comme l’entièreté de l’Aréopage, le mystérieux Ange de l’Olympe réincarné, Ksénia, veille sur l’objet de sa mission, Vasiliás.
Alité depuis qu’elle l’a secouru, le jeune homme n’est pas encore sorti du profond coma dans lequel ses terribles combats l’ont plongé.
Lavé chaque jour, la barbe et les cheveux rasés régulièrement par les esclaves, le visage de Vasiliás parait serein. Ses hématomes ont disparu et ses plaies ont cicatrisé. Ses doigts bougent et ses sourcils se froncent régulièrement. Il est sur la voix de la guérison.
Les sons brutaux atteignent la chambre de l’américain dont les paupières crépitent.
Ses beaux yeux bleus aux reflets verts n’ont pas de mal à s’habituer au scintillement des flammèches tant elles sont tamisées par les parois cristallines sanguines.
Toutefois, sa vue est encore trouble et ne lui permet pas de reconnaître tout de suite Ksénia :
Sa voix, d’abord enrouée, demande :
Vasiliás - " Où suis-je ? "
Ksénia - " Dans le sanctuaire du dieu Arès, l’Aréopage. "
L’accent slave de la vénusté ne peut échapper au convalescent qui identifie immédiatement son interlocuteur :
Vasiliás - " Ksénia… C’est toi ? Je te cherche depuis si longtemps… "
La demoiselle brune vient lui cueillir la main :
Ksénia - " Et moi je t’observe depuis toujours. "
Vasiliás - " Que faisons-nous chez Arès ? Ce dieu belliqueux est dangereux et hostile à Athéna. Nous devons fuir ! "
Il se redresse dans son lit mais aussitôt la tête lui tourne, il est encore trop faible. Il s’échoue lamentablement dans les bras de la magnifique russe. Elle accueille alors la tête du malheureux contre sa chaude et peu couverte poitrine :
Ksénia - " Pff… Athéna… C’est elle et le dieu Poséidon qui par l’intermédiaire de leurs hommes t’ont mis dans cet état. Celui que tu traîtres ainsi est le seul à avoir cru en toi et à t’avoir sauvé. "
L’Ange sent couler entre ses seins les larmes de détresse de l’ancien prétendant à l’armure d’or du Lion. Elle passe avec affection sa main sur ses cheveux d’à peine trois millimètres de longueur pendant qu’il balbutie :
Vasiliás - " Le Sanctuaire m’a condamné à mort en me faisant porter pour déserteur. Mon ami Bian s’est retourné contre moi après avoir été conquis par Poséidon… Je suis seul à présent… "
Ksénia - " Le dieu Arès est là. "
Vasiliás - " Comment pourrais-je remercier un dieu en lequel je ne crois pas. Il est l’opposé de tout ce que je prône. La guerre et le sang ne sont que les seules choses auxquelles il aspire. "
Ksénia - " Crois-tu que tes projets de royauté sur le monde peuvent se faire sans guerres et sans sang ? Ton sens de la justice est trop dur pour que même une fois en place le sang ne soit pas versé contre les hors-la-loi. Arès et toi avez des intérêts en commun. "
Le rythme funeste joué sur les orgues aspire à devenir plus agréables et moins terrifiants.
A mesure que les notes sont jouées, Vasiliás se laisse gagner petit à petit :
Vasiliás - " Cette musique est jouée en toute contradiction de l’aspect inquiétant provoqué par le son de l’orgue. Qui peut rendre de tels sons si agréables à l’ouie ? "
A cette instant, l’instrument n’est plus joué et le regard de Ksénia se tourne en direction du balcon de la chambre de Vasiliás. Cette pièce la plus haute du temple dispose d’une avancée qui surplombe le hall principal et l’estrade où siége le trône du dieu Arès.
Vasiliás suit progressivement l’attention de son interlocutrice et distingue l’apparence d’un humain qui atterrie sur ce fameux balcon après avoir réalisé un bond prodigieux depuis le rez-de-chaussée.
Ses bottines noires qui protégent ses pieds accueillent son pantalon aussi rouge que ses petits yeux. Sa cape blanche flotte encore dans les airs et retombe peu à peu sur son torse nu et athlétique qu’elle habille. Sa chevelure hirsute et écarlate fait parfaitement ressortir ses yeux ensanglantés. L’expression de son regard est intimidante. Il reflète toute la hauteur d’un dieu.
Pendant qu’il recoiffe ses deux longues mèches qui tombent chacune à côté de ses oreilles pour venir caresser son buste, cet homme grec né sous le nom de Mars répond à la précédente question de Vasiliás :
Arès - " Celui capable de rendre beau tout ce qui s’apparente à la violence et la colère n’est autre que moi-même, le dieu Arès. "
En se présentant, Mars plisse les yeux pour dégager davantage de prestance.
Au soin depuis de nombreuses semaines, Vasiliás ne réalise pas qu’il a été alité en tenu d’Adam. Il expose sa totale nudité au Dieu de la Guerre et de la Destruction ainsi qu’à l’olympienne.
Trop préoccupé par celui qui lui fait face, Vasiliás ne cherche pas à se cacher de Ksénia qui préfère reculer jusqu’au mur de la pièce comme pour masquer sa présence durant la rencontre entre les deux hommes.
Vasiliás - " J’imagine que je dois me prosterner devant vous pour vous remercier de votre hospitalité ? "
Consterné par le manque d’égard dû au dieu qu’il est, Arès exerce d’un simple geste de la main une pression cosmique contre Vasiliás qui tombe à genoux.
Arès - " Ne te méprends pas ! L’hospitalité n’est pas un mot qui existe dans mon vocabulaire… "
Avant de poursuivre, il tourne le regard en direction de Ksénia pour faire comprendre à Vasiliás que c’est d’elle dont il va parler :
Arès - " … Cependant, une récente discussion m’a permis de faire le constat sur l’ensemble de mes échecs. Aujourd’hui seuls sont présents sur mon palmarès mes revers. Il m’a donc été conseillé de me tourner vers un homme qui pourrait trouver intérêt à représenter ma nouvelle armée. Un Roi que, moi, Dieu des Dieux, je nommerai. "
L’attention de Vasiliás est à son comble :
Vasiliás - " Un Roi ? "
Arès - " Comme Athéna, j’ai choisi depuis toujours de me réincarner en un homme. Elle pour vivre la passion que représente la vie éphémère de votre espèce, moi pour jouir de toutes les vicissitudes du fragile esprit humain.
Malheureusement, ce plaisir que j’ai pris à violenter et à détruire m’a toujours conduis à de cuisantes défaites. La dernière remonte il y a quelques années en arrière, en… "
Vasiliás se permet de couper la parole à la divinité :
Vasiliás - " … En 1979 ! "
Arès - " Exactement. Depuis je me suis réfugié dans mon palais et je jouie de mon statut sur mes sujets. Toutefois, ce plaisir ne m’apporte rien de plus que je n’ai déjà et ne m’offrira jamais ce à quoi j’aspire : le succès et la reconnaissance des autres divinités de ce monde.
Même pour le dieu Shiva qui a été maîtrisé comme un insecte par le Sanctuaire il y a peu, je ne suis qu’une faible menace, bien loin de celui que j’étais il y a de ça des millénaires, lorsque j’eue poussé Athéna dans ses derniers retranchements, l’obligeant à utiliser les armes de la Balance… "
Tout en poursuivant son discours, Arès libère Vasiliás de son emprise, voyant le jeune homme tout ouie :
Arès - " Aujourd’hui, il ne me reste plus qu’une centaine de soldats, d’anciens délinquants et déséquilibrés mentaux qui ne savent même pas monter la garde. De mes Berserkers dirigeants mon armée, il n’y en a plus un. "
Vasiliás ne garde pas sa langue dans sa poche :
Vasiliás - " Vous avez surestimé les défauts des hommes pour sous-estimer ce qui fait leur qualité. Voilà pourquoi Athéna a gagné. "
Arès - " Que me proposes-tu ? Ksénia m’a fait un portrait de toi. Tu as la prétention de pouvoir bouleverser cette paix impossible que veut maintenir Athéna. Comment cela pourrait être possible ? "
Vasiliás - " Il faudrait agir comme Athéna vis-à-vis des hommes. Mais uniquement des hommes bons. Les protéger, les aimer. Néanmoins, ces gens bienfaisants sont de plus en plus corrompus par les êtres aux sombres desseins. La paix est possible si on demeure impartial envers ceux qui pourrissent ce monde. "
Arès - " Sous-entendrais-tu qu’il faut faire la guerre aux hommes ? Détruire le mal à la racine ? "
Vasiliás - " Seulement aux hommes irrespectueux des lois. Des lois qui établiraient un monde égalitaire, où amour et respect serait les maîtres mots. "
Arès - " Cela nécessitera la prise de pouvoir d’un dieu autre qu’Athéna. Athéna est trop charitable et ne permettrait pas de laver le monde des êtres impurs. En as-tu conscience ? "
Vasiliás réfléchit un instant. Il repense plein d’amertume à la chasse à l’homme dont il a été l’objet, aux morts de son maître et d’Ariel, la s½ur de Bian, tout cela car ses idéaux furent condamnés par Athéna.
Il grimace en reconnaissant :
Vasiliás - " En effet, c’est désormais indispensable. "
Pendant que Vasiliás baisse honteusement les yeux après cette confession, Arès décrispe légèrement son visage.
Une cosmo énergie vermillon enveloppe aussitôt le dieu et inonde son royaume souterrain, imprégnant au passage l’américain perdu dans ses doutes.
Vasiliás reconnaît aussitôt l’essence parfaite d’Arès. Celle-ci transmet dans l’esprit de l’américain les souvenirs humains d’Arès.
Flashback
Il y a une trentaine d’années Mars vient au monde après une grossesse non désirées dans le coin le plus malfamé de Grèce…
Enfant, Mars est élevé dans une famille où la loi est celle du plus fort…
Son père est fréquemment en indélicatesse avec les forces de l’ordre…
Mars apprend seul à lire et à écrire bien qu’il ne fréquente aucune école…
Son frère est tué par une bande rivale de la sienne…
Adolescent, Mars commet ses premiers meurtres en découvrant sa s½ur dans les bras d’un rival de son défunt frère…
Son acte de barbarie lui permet de découvrir ce don qu’est le cosmos divin qui sommeille en lui…
Mars extermine ses rivaux mais aussi ses camarades…
Ses actes lui valent des démêlés avec la justice dont il cause la perte…
Jeune adulte, Mars est rejeté par ses parents effrayés par la barbarie de celui-ci…
Revanchard envers des parents ivres et violents, il les assassine dans d’atroces circonstances…
Il fuit… S’isole… Débarque à Athènes…
Sa faim et sa soif sont compensées par son cosmos grandissant…
Son esprit est troublé par des actes du passé, de plusieurs époques, depuis la nuit des temps…
Son périple l’amène à la colline de l’Aréopage… Il est mystérieusement attiré par le pont cosmique situé sur le flanc du site dont il ne reste plus aujourd’hui qu’un monolithe…
Son investigation l’amène devant son royaume cerné de lave…
Son esprit divin s’éveille enfin totalement…
Il réunit autour de lui une armée incomplète et, dans la précipitation, profite de la bataille contre les Titans pour envahir le Sanctuaire…
Son attaque surprise lui permet de siéger tout autour du Sanctuaire avant d’être finalement vaincu par des Saints de bronze et d’Argent…
L’armée est décimée, des six Berserkers qu’il a réunis aucun n’a survécu…
Face à l’échec qui se répète de réincarnation en réincarnation, il s’abandonne avec ce qui lui reste de sujets dans les joies de la gourmandise et de la luxure…
Aujourd’hui, 1985, Ksénia gagne l’Aréopage et sort Arès de sa léthargie en lui proposant de retrouver toute sa splendeur en confiant son armée au meilleur général qu’il peut espérer avoir : Vasiliás…
Flashback
Vasiliás sort de sa torpeur, le choc cosmique d’Arès le libère.
A cet instant, Vasiliás, toujours dévêtu, dans sa simple condition d’homme, pose un genou sur le sol de marbre de sa chambre, appuie sa main droite contre son c½ur et baisse la tête en signe d’allégeance envers le dieu :
Vasiliás - " C’est parce que votre vie d’homme a été faite de souffrance que vous voyez en moi celui capable de changer tout cela. "
Arès - " Il reste parmi mes neuf Nightmares celles de trois Berserkers. Je souhaite que tu portes celle du général qui me conduira à la victoire, celle qui n’a jamais été portée depuis ma défaite face aux chevaliers d’or bardés des armes de la Balance, celle du Berserker de la Royauté ! Deviens mon général, deviens le roi de cette planète. "
Vasiliás - " Je ne peux accepter sans avoir la garantie que l’humanité n’aura rien à craindre sous votre régime. "
En annonçant ce qui suit, Mars matérialise dans sa main son épée à la lame longue et brillante comme le diamant avec un manche en or :
Arès - " Le monde sera sous ta direction, tu seras seul juge de son destin. Moi je place ma confiance en un roi qui fera de ma divinité la seule croyance des hommes puisque la politique instauré par celui que j’aurai choisi les mènera à la paix. Un roi qui réhabilitera mon nom jusqu’aux abysses chez Poséidon, jusque dans les enfers de mon ami Hadès et jusqu’aux cieux des olympiens ! "
Vasiliás s’incline encore plus bas laissant ainsi sur le visage d’Arès un sourire de satisfaction.
Arès dépose sa lame sur l’épaule droite de son nouveau général :
Arès - " Parce ce geste… "
L’arme passe désormais sur son épaule gauche :
Arès - " … je fais de toi… "
Désormais c’est sa tête qui est touchée :
Arès - " … l’homme qui changera le destin… "
Subitement, l’épée appuie légèrement la peau de Vasiliás à hauteur de son c½ur :
Arès - " … le Berserker de la Royauté ! "
Vasiliás sent son corps être manipulé sans qu’il puisse interagir. Il est soulevé à un demi mètre du sol et flotte dans les airs.
Un chant barbare retentit dans l’entièreté du royaume tandis que l’orgue accompagne de lui-même le récital. L’origine de ce chant provient d’une armure qui apparaît devant Vasiliás. Une Nightmare en totem sous la forme d’un lion ailé comme le tatouage qui décore la cuisse de l’américain.
A cet instant, la piqûre provoquée par l’épée sur la poitrine du jeune homme se cicatrise sous la forme de griffes ressemblant à celles tatouées dans son cou. Comme si l’animal emblème de sa toute puissance a laissé sa marque.
Une fois la cicatrisation achevée, la protection à la couleur et la forme entièrement différente des autres Nightmares se détache.
Entièrement rouge vif, elle couvre l’intégralité de ses jambes, bardant chaque genou de cornes courbées qui remontent à mi-hauteur de ses cuisses. Le haut de ses jambes et sa taille sont habillés d’une jupette semblable à celle de la Cloth d’or du Lion tout comme son torse entièrement similaire à l’armure du chevalier d’Athéna. Ses imposantes épaulettes forment la tête d’un lion à la crinière opulente et dont les gueules grandes ouvertes descendent jusqu’aux biceps. Les avant-bras enferment entièrement les membres des doigts jusqu’aux coudes, coudes armés de cornes similaires à celles positionnées sur les genoux.
Son visage est dissimulé sous un masque doré qui ne laisse apparaître que ses beaux yeux bleus et verts, et est maintenu par son casque ovale formant une gueule de lion tel le casque de l’armure divine de Zeta que portera Syd de Mizar dans quelques mois.
Enfin, de grandes ailes similaires à celles de l’armure du Sagittaire mais de couleur vermillon se déploient dans son dos.
Impérial dans sa nouvelle tenue, le Berserker de la Royauté se détaille lui-même pour admirer sa magnificence retrouvée.
Son général désormais adoubé, Mars lui demande :
Arès - " Et maintenant jeune roi ? Quelle suite proposes-tu ? "
Vasiliás - " Une armée n’est efficace que par sa ferveur. L’idéal de ce monde ne peut être obtenu par les hommes aux idées néfastes qui composent vos rangs actuels. Je veux des passionnés pour un monde meilleur, des gens déçus par ce monde aujourd’hui, des hommes et des femmes victimes d’injustices, des revanchards, des personnes avec une mentalité de battant, une mentalité déjà soumise à rude épreuve, des êtres prêts à l’apprentissage des armes, à l’art du combat et fidèles à mes principes, accordant leur foi à votre unique grandeur. "
Ksénia, restée en retrait jusqu’à présent, fait un signe positif de la tête en direction du dieu ravi :
Arès - " Qu’il en soit ainsi. Je te laisse les pleins pouvoirs. Fais ce qu’il faut des hommes déjà à ta disposition et part à la recherche de tes perles. Il reste également deux Nightmares non attribuées. A toi de trouver les Berserkers qui t’accompagneront dans la victoire, les Berserkers du Malheur et de la Terreur ! "
En Grèce, au Sanctuaire :
Sur le flanc de la douzième maison du zodiaque, à hauteur du passage secret, l’expression du propriétaire de la demeure est aussi maussade que la météo.
Il répond avec une nonchalance étonnante à son interlocuteur :
Aphrodite - " … Non je n’ai pas envie de sourire Deathmask. Le temps est triste, le sol est couvert de boue. Ce décor est laid, je hais cette disgrâce. "
Le suédois ne pose même pas les yeux sur le sicilien qui se tient debout à l’extérieur, trempé jusqu’aux os.
Deathmask - " Dans ce cas je ne te dérangerai pas davantage cher camarade. "
Aphrodite le retient en adoptant un ton plus aimable :
Aphrodite - " Attend ! Tu m’as dis que tu partais, je veux juste savoir où exactement ? "
Deathmask - " Je retourne auprès de mon élève, achever son entraînement. "
Aphrodite - " Quelle joie dans ton annonce ! Une vie partagée en compagnie d’une femme qui t’aime, des retrouvailles avec un enfant que tu as élevé. On sent que tu rayonnes de bonheur. "
Deathmask - " Ne devrais-je pas ?! "
Aphrodite - " C’est simplement que ça ne colle pas trop à cette nature que je te connais. "
Deathmask - " Tu ne me connais peut-être pas si bien que ça. "
Aphrodite préfère observer le silence.
Deathmask aborde alors un sujet épineux :
Deathmask - " Je t’interdis de l’approcher ! "
Aphrodite - " Qui donc ? "
Deathmask - " Tu sais de qui je veux parler. "
Aphrodite - " Lilith ?! Allons, voyons, tu n’y penses pas. "
Deathmask - " Bien sûr que si. Je n’ai pas oublié ce que tu as fais à Inakis, l’amie de Milo. "
Aphrodite - " Si je te l’ai confié c’est parce que j’ai confiance en toi ainsi qu’une grande considération pour toi. "
Deathmask - " Sache que cette estime est réciproque. Et c’est pour cela que je t’invite à retourner le voir. "
Aphrodite - " Qui donc ? "
Deathmask - " Adonis, ton fils. Il te manque, cela se ressent. Tu ne manges plus rien. A force de dépérir ainsi tu risques même d’y perdre ta beauté. "
Cette annonce saisie Aphrodite. Tout en restant muet, il prend conscience des raisons de son mal-être.
Deathmask préfère ne pas tirer plus fort sur cette corde sensible. Il quitte son ami, direction l’Italie.
En Grèce, sous l’Aréopage :
Le dieu a repris position dans son siège au centre du cône. De nouveau nourri d’espoir, il refuse l’alcool que lui verse une de ses nymphes dans une coupe et se contente de déguster petit à petit une grappe de raisin.
Face à lui, la splendide russe affiche un visage intéressée que personne ne lui connaissait jusque là :
Ksénia - " Quelle belle chose d’avoir utilisé votre enfance pour vous assurer la fidélité de Vasiliás. "
Arès - " Il est fanatique de ses rêves. Je ne pouvais aller que dans ce sens. Il fera de moi ce dieu qui réussira là où tous les autres ont échoué, prendre la Terre à Athéna. "
Ksénia - " Peut-être, mais on ne change pas sa nature. Je doute que Vasiliás réussisse à apaiser votre soif de barbarie. "
Arès - " Il a l’expérience des combats, son instruction lui permet d’avoir de grande connaissance militaire et sa détermination est sans borne. Il est le seul à pouvoir me guider vers la reconnaissance de l’Olympe. "
Ksénia - " Et après ? "
Arès - " Après ? Disons que de tout temps les rois ont subi la volonté des dieux. Mars a promis à Vasiliás de ne pas succomber à ce besoin. C’est la promesse d’un homme à un autre et la parole d’un homme n’a aucune valeur à notre époque. Quoi qu’il arrive, la nature humaine aura toujours une imperfection, le rêve de Vasiliás ne peut se réaliser. La promesse d’un homme n’est rien face à la volonté d’un dieu, la promesse de Mars ne peut influer le caractère d’Arès. "
Ksénia sourit et approche le dieu qu’elle tapote à hauteur de l’épaule :
Ksénia - " Mon maître n’en attendait pas moins de toi. Utilise Vasiliás pour te créer une armée digne de ce nom. Il te permettra de vaincre tes adversaires et de t’emparer de la Terre quand nous te le demanderons. "
Arès - " Et en attendant ? "
Elle se dirige en direction des pièces situées sur le flanc droit du rez-de-chaussée :
Ksénia - " Pas de précipitations ! Ne commets pas les mêmes erreurs qu’autrefois ! "
Colérique, Mars se contente de répondre :
Arès - " Que ton maître soit rassuré, Vasiliás veillera à notre succès lorsqu’il nous le demandera. "
L’olympienne quitte avec grâce l’estrade qui surplombe la pièce.
En Grèce, au Sanctuaire :
La chevelure soyeuse protégée par sa cape, le chevalier des Poissons profite de sa permission pour gagner le village de Noioso au sud du Sanctuaire.
Couvert de sa Cloth dorée, il ne cache à personne sa présence remarquée dans cette zone peuplée de vieillards, d’esclaves affranchis et d’apprentis chevaliers ou de soldats devenus infirmes. Devant les maisons et les tavernes délabrées, à peine fréquentées, les femmes, veuves de soldats et femmes insatisfaites, n’ont d’yeux que pour le bel homme.
Le lieutenant de la zone sud vient immédiatement s’agenouiller sous la pluie battante :
Arachné - " Seigneur Aphrodite, quel évènement peut vous faire venir en ce lieu ? "
Habituellement si discret, se refusant d’être mélangé avec ce bas peuple majoritaire du domaine sacré, Aphrodite reste étrangement courtois :
Aphrodite - " Rien de grave. Je viens simplement rendre visite à Myrrha, une vieille connaissance. "
A cette annonce, Arachné se sent immédiatement ridicule. Myrrha, cette jeune femme aux cheveux melon et aux grands yeux océans. Sa peau blanche et son aspect angélique font d’elle la jeune femme la plus courtisée du village, à commencer par le Saint d’argent de la Tarentule.
Arachné - " Bien Seigneur. Dans ce cas je retourne à la surveillance de nos positions. "
Aphrodite lui envoie un sourire de franche camaraderie qu’il garde bien pour lui en temps normal.
Il arrive devant le logis aux murs en torchis et au toit fait de planches et de paille. Depuis dehors, il entend les effusions de joie de la jeune femme mêlées aux gazouillis d’Adonis.
Dès lors, ses yeux affichent une lueur d’ivresse. Il se voit ouvrir la porte et annoncer de sa voix douce et mélodieuse qu’il vient chercher celle qu’il aime, abandonnant sa vie libertine, prêt à assumer sa vie de famille. Il s’imagine déjà serrant fort contre lui Myrrha qui se jetterait dans ses bras. Il rêve de son fils, beau, portant avec élégance sa toge, apprenant l’art de la chevalerie dans la maison des Poissons en sa compagnie pendant que plus bas, dans la ville d’Honkios, Myrrha leur préparera le repas à l’intérieur de la demeure aristocrate que leur aura offert Aphrodite grâce à sa solde de Saint d’or.
Ces projets sont bien suffisants pour donner le courage à Aphrodite de prendre l’élan nécessaire pour faire une entrée fracassante. Il aspire l’atmosphère humide à pleins poumons, abandonne sa belle cape et ôte son heaume pour pénétrer avec vivacité sur le sol argileux à l’intérieur.
Sa vue fait un rapide tour du logis meublé grâce à des matériaux récupérés dans les fermes avoisinantes. Il se focalise sur la vénusté en toge blanche. Celle-ci ouvre les bras pour recevoir son enfant.
Le sourire d’Aphrodite se fige aussitôt, les mots se sont évaporés de son esprit. Il est aussi saisi que les personnages à l’intérieur. Myrrha, Adonis et… Milo, assis sur la couche faite de paille et couverte d’une épaisse étoffe, rendant à Myrrha l’enfant qu’il faisait rire auparavant.
Myrrha - " Aphrodite ?! "
Aphrodite - " … "
Le Saint d’or est pétrifié, une vision apocalyptique s’empare de son esprit. Son rêve devient un cauchemar. Cette illusion de vie parfaite l’abandonne pour remplacer sa personne par Milo. Il est tourmenté par la représentation d’un futur où le plaisant Adonis apprend l’art de la chevalerie dans la maison du Scorpion pendant que Myrrha cuisine dans une demeure que Milo a fait construire à Honkios.
Ignorant tout de la paternité d’Aphrodite, Milo se redresse du lit :
Milo - " Ah Aphrodite ! Tu me cherchais ? "
Habillé d’une tenue locale, les poignets et avant-bras couverts de bandelettes de papier, un long maillot descendant par-dessus un pantalon usé et ceinturé par du cuir au niveau de la taille, il s’en excuse :
Milo - " Pardonne mon accoutrement. J’étais en permission aujourd’hui donc j’ai voulu profiter de cet instant… "
Aphrodite n’écoute pas son frère d’arme, il est absorbé par le sentiment d’échec qui se dégage de son arrivée finalement ridicule.
Le grec, étrangement cordial, vient secouer son camarade :
Milo - " Tu es sûr que ça va Aphrodite ? "
Ce geste le ramène à lui. Il lève enfin les yeux et croise le regard hébété de Myrrha profondément gênée :
Aphrodite - " Oui… Oui pardon, une étrange image m’est venue en tête. Pardon. Je venais simplement… "
Il regarde son fils avec une once de chagrin et poursuit sa phrase :
Aphrodite - " Je venais simplement t’annoncer que Deathmask était parti en Italie pour achever la formation de son disciple. "
Ne comprenant pas tout, Milo commence à froncer les sourcils, preuve de son tempérament de feu :
Milo - " Et ? "
Aphrodite - " Et… Je voulais que tu le saches. Il est important de savoir quand l’un de nous s’absente. Pour assurer convenablement la défense des maisons vides en cas d’attaque ! "
Milo garde une expression peu convaincue. Il se contente de hocher la tête puis attend qu’Aphrodite réagisse comme il se doit en s’excusant pour cette arrivée outrancière et en prenant congé.
Néanmoins, rien ne vient. Un silence incommodant rend l’ambiance désagréable. Alors Milo choisit lui-même de renvoyer son pair :
Milo - " Très bien… Je te remercie de m’avoir prévenu. Maintenant, si tu le veux bien, j’aimerai achever la conversation que j’entretenais avec mon amie et son fils. "
N’arrivant pas à quitter la maison sans en avoir le c½ur net, Aphrodite essaie de savoir quel lien il entretient avec Myrrha :
Aphrodite - " Euh… Oui. Mais dis-moi, quel beau petit garçon. Est-ce le tien ? "
Milo - " C’est le fils de mon amie. Je viens de te le dire. "
Aphrodite - " Ah… Et son père est un chevalier ? Un garde ? Se peut-il que je le connaisse ? "
Myrrha achève cette discussion inappropriée :
Myrrha - " Son père était un messager. Il nous a quitté au cours d’une mission. "
Aphrodite - " Ah… L’espace d’un instant j’ai cru que c’était toi Milo qui était le père de cet enfant ! "
Myrrha - " Ca se pourrait, Milo est un homme séduisant dont le charme ne peut laisser aucune femme insensible. "
Milo est aussi surpris par cette réaction qu’Aphrodite. Cependant, Myrrha s’agace de cette situation. Elle tient la porte de la demeure ouverte :
Myrrha - " Bon ! Bien loin de moi l’idée de vouloir vous manquer de respect Saint d’or des Poissons, toutefois j’ai besoin de discuter seule à seule avec votre ami. "
La prononciation du mot « ami » arrache un sourire cynique sur les lèvres des deux chevaliers, en témoignage de la rivalité constante parmi le plus haut rang de la chevalerie.
Milo - " Ca ira Myrrha. Je te remercie. J’ai encore des choses à régler à la ferme d’à-côté. Je repasserai vous voir lors de ma prochaine permission. "
Milo devance Aphrodite et passe avec délicatesse près de la jeune femme, lui faisant rougir les joues. Aphrodite le suit en grimaçant de colère comme le fait Myrrha devant celui qu’elle croit l’avoir abandonnée.
Dehors, Milo marche sans faire attention sur la cape que le suédois a ôtée avant de rentrer.
La colère d’Aphrodite ne fait que grimper, il va sentir la pluie lui caresser les cheveux.
Empressé, il suit Milo jusqu’à une grange à proximité de l’habitation de Myrrha où le Scorpion est allé chercher un poulet.
C’est seulement une fois qu’il a payé les sacres dus au paysan que Milo s’agace du comportement d’Aphrodite :
Milo - " Tu as fini de me suivre non ?! "
Aphrodite - " Cette fille, comment la connais-tu ? "
Milo - " Tu m’as l’air bien étrange toi. Tu es sûr que le départ du Cancer ne t’a pas troublé plus que ça ? "
Aphrodite - " Ecoute-moi, ce… cette femme… "
Il reste de longue seconde à chercher une excuse pour évoquer son intérêt pour Myrrha et Adonis :
Aphrodite - " … Cette femme était l’épouse de mon messager. Le malheureux a été envoyé en mission par moi-même. Comme il est mort pour moi, je me suis promis de veiller sur sa femme et son fils. "
Ne voulant se dévoiler, Milo tapote l’épaule de son compagnon avant de lui présenter la volaille qu’il vient d’acquérir :
Milo - " Ne t’en fais pas, je ne lui veux aucun mal. Bon maintenant si tu le permets, j’ai à faire. "
Tandis qu’il fléchit les genoux pour prendre une puissante impulsion qui le propulsera jusqu’à son palais, Milo est retenu par une poigne brutale d’Aphrodite :
Aphrodite - " J’insiste Milo. Comment l’as-tu connu ? "
Avec fierté et détermination, Milo se défait du bras d’Aphrodite d’un revers de la main.
Sa mâchoire se crispe et ses sourcils se froncent :
Milo - " Es-tu venu me voir lorsque j’ai perdu Inakis ? "
Aphrodite, coupable de la mort de la compagne de Milo, baisse honteusement la tête.
Milo - " Non. Non tu n’es pas venu, sans quoi tu aurais pu voir ma peine. Seulement Myrrha l’a vu. Un jour, ordinaire, alors que je venais me ravitailler ici comme je l’ai toujours fais, cette jeune femme qui venait chercher du lait a remarqué ma peine. Elle aussi semblait meurtrie. Prisonnière d’un amour qui ne lui était pas rendue. Nous avons parlé, nous nous sommes fais confiance et nous avons sympathisé. Simplement. "
Aphrodite hoche la tête, retenant le plus qu’il peut un rictus de satisfaction maintenant qu’il est rassuré.
Toutefois, Milo n’est pas dupe :
Milo - " Allez Aphrodite, dis-moi la vérité à présent. Ne crois-tu pas que tes mensonges m’ont permis de te démasquer ? L’homme que Myrrha aime et qui a laissé derrière lui son fils c’est toi n’est-ce pas ? "
Alors qu’il a les bras le long du corps, les doigts d’Aphrodite s’agitent. Dans sa main droite son cosmos crée une rose rouge. Son timbre habituellement calme et hautain se charge d’une animosité inhabituelle :
Aphrodite - " Cesse de tourner autour de Myrrha. C’est tout ce que je te demande. "
Milo - " C’est toi qui me demande ça alors qu’il y a quelques mois tu osais venir prétendre à Inakis d’être en mesure de la satisfaire et tout ça sous mon nez. Je ne savais pas avant aujourd’hui que Myrrha puisse être celle que tu n’oses pas avouer aimer mais cette découverte me comble de joie. Te savoir souffrir le martyre à t’imaginer les pires choses lorsque je serai seul avec Myrrha me fait ressentir un plaisir malsain que j’exercerai aussi longtemps que je pourrai. "
La réaction d’Aphrodite ne tarde pas. A la vitesse de la lumière, il décoche sa fleur contre Milo. Le grec la pulvérise avec le rayon provoqué par un aiguillon écarlate apparu à la place de son ongle.
Milo - " Il nous est interdit de nous battre entre nous Aphrodite. Veux-tu déclencher un combat de mille jours et mille nuits, risquant de nous faire passer pour des hors-la-loi par la même occasion aux yeux du Pope et d’Athéna ? "
Aphrodite se ravise aussitôt, permettant ainsi à Milo de se propulser jusqu’aux premières marches des douze temples du zodiaque.
Désormais seul, Aphrodite observe la direction de chez Myrrha. Il a bien vu aux regards échangés entre Milo et elle la complicité qui s’est créée entre eux. Myrrha le regardait comme jamais elle n’a regardé Aphrodite.
« Milo a parlé de Myrrha, prisonnière de son amour pour moi. J’ai l’impression qu’elle s’est échappée de ma geôle, pour s’enfermer volontaire dans la sienne et en jeter les clés. Elle a réussi à combattre cette dépendance amoureuse durant ce temps où je méditais à m’engager auprès d’elle. Il est trop tard à présent. », réfléchit-il dépité.
PARTIE 1 : Fin